« La liberté, c’est notre destin ! – La philosophie antique au cœur des débats actuels » de Pierre Laurendeau et paru aux Presses de l’Université Laval (PUF) en 2013. Cet ouvrage exprime fort bien comment la philosophie nous aide à mieux vivre.
Pourquoi les propos des philosophes de l’Antiquité grecque et latine, de même qu’asiatique, sont-ils toujours aussi actuels ? C’est en lisant douze extraits de ces penseurs sur la nature, la connaissance, la cité, la morale et le sens de la vie que vous le découvrirez. Mais précisons tout de suite au moins une chose : ces penseurs n’ont cessé de réfléchir à la liberté en lien avec les nécessités de la vie, ce qui demeure un des grands défis du XXIe siècle.
Pierre Laurendeau enseigne la philosophie au cégep. Il a publié quelques ouvrages, dont deux romans philosophiques et un essai intitulé Victor-Lévy Beaulieu en six temps (PUL, 2012).
Texte de présentation sur le site web de l’éditeur
Pour concevoir ce manuel de philosophie, Pierre Laurendeau a réuni des penseurs de l’Antiquité autour d’un questionnement sur la liberté et le déterminisme. Pourquoi les propos des philosophes de l’Antiquité grecque et latine, de même qu’asiatique, sont-ils toujours aussi actuels ? C’est en lisant douze extraits de ces penseurs sur la nature, la connaissance, la cité, la morale et le sens de la vie que vous le découvrirez.
«Il existait deux opinions sur lesquelles se partageaient les anciens philosophes, les uns pensant que cout se produit par le destin, en sorte que ce destin apportait la force de la nécessité (Démocrite, Héraclite, Empédocle, Aristote étaient de cet avis), les autres pour qui les mouvements volontaires de l’âme existaient sans aucune intervention du destin; Chrysippe, en position d’arbitre officieux, me paraît avoir choisi la position intermédiaire; mais il se rattache plutôt à ceux qui veulent voir les mouvements de l’âme libérés de la nécessité. Or quand il utilise ses propres expressions, il tombe dans des difficultés qui l’amènent à confirmer malgré lui la nécessité du destin.»
– (Cicéron, Du destin, §392)
Tout au long de l’histoire de l’humanité, des êtres humains se sont battus contre la nature, les dieux, l’oppression, l’ignorance, et même contre eux-mêmes afin de conquérir leur liberté. Cette conquête de la liberté semble être l’une des motivations fonda mentales de la vie humaine. Mais, face à la liberté, se sont toujours imposées des idées contraires, entre autres celle de la nécessité ou encore celle du déterminisme. L’idée de destin en fut une autre, elle se définissait principalement de la façon suivante: une force plus ou moins occulte, obscure et mystérieuse obligeant les êtres humains à suivre un chemin les menant à une réalité incontournable. À partir de cette vision du destin, la liberté apparaissait, pour beaucoup, comme une illusion.
En partant du fait que les idées de liberté et de destin ont toujours habité l’esprit des hommes, nous proposons une troisième voie, une espèce de duel inhérent à leur réalité. Encore aujourd’hui, ce duel d’idées, déterminant pour l’ensemble de nos choix et de nos actions, exprime, selon nous, le mouvement même de la vie.
Pour comprendre la dynamique de ce duel, remontons à l’Antiquité3 grecque, latine et même asiatique. C’est à cette époque qu’il a pris une tournure décisive: la quête de liberté se faisait alors plus consciente et plus systématique, et ce pour de plus en plus de gens.
Lorsque les premiers penseurs grecs ont remis en question l’ordre du cosmos établi par les dieux, ils cherchaient à comprendre les phénomènes naturels sans avoir recours à des explications surnaturelles. Ils se donnaient ainsi la liberté de penser le monde autrement. Ils remettaient aussi en question le sens et la place de l’être humain dans l’univers afin de mieux délimiter ses marges de manœuvre. De plus, ils instaurèrent la cité démocratique afin d’assurer les conditions de vie nécessaires aux hommes libres. Ils apprirent à débattre et à dialoguer, traçant les voies de la liberté d’expression. Ils visèrent à élargir leur liberté de penser et d’agir, comme si elle seule pouvait donner un sens à leur vie. Mais le duel n’était pas clos pour autant: aux yeux de plusieurs des penseurs et des gens d’action de l’Antiquité, le fait que la liberté soit plus grande ne signifiait pas nécessairement la disparition du destin, et encore moins celle des dieux, vus souvent comme les maîtres de ce destin.
En interrogeant le passé réflexif des êtres humains, c’est une façon de prendre un certain recul face aux enjeux contemporains de l’humanité et, par contraste, d’en dégager une perspective nouvelle. Prenons un seul exemple: les débats et les combats «violents» concernant la religion. Dieu est toujours présent pour la grande majorité des êtres humains et justifie bien des actions, parfois absurdes, sinon cruelles; mais, avec Dieu, il en va aussi du sens que les êtres humains donnent à la vie! Quand on se débarrasse de Dieu, que met-on à sa place?
Les recherches contemporaines en génétique et en psychologie nous font prendre conscience que nous sommes plus ou moins conditionnés, programmés, déterminés. Si une large part de ce que nous sommes est inconsciente, comme le croyait le docteur Freud, père de la psychanalyse, et si la société et les conditions sociales déterminent ce que nous sommes, comme le croyait le philosophe-économiste Karl Marx, que nous reste-e-il comme liberté? L’ONU a défini, dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, des principes universels qui semblent valables pour la conduite de tous les humains. En ce sens, n’y a-t-il pas un but, un destin commun à toute vie humaine? Le souci pour l’humanité aurait-il remplacé la sollicitation de Dieu? Finalement, nous constatons que la liberté est au cœur de nos réalités quotidiennes, et que nous sommes constamment amenés à réfléchir à nos propres limites à son sujet.
Globalement, ce duel liberté/destin soulève toujours la question de l’avenir de l’humanité: toujours plus de liberté ou la reconnaissance d’un destin commun à l’espèce vivante que nous sommes? Deux poids à mettre dans la balance de notre conscience personnelle, car il semble bien que le futur humain repose sur la responsabilité de chacun.
Dans ce duel, que nous présentons comme une dualité liberté/destin, nous retenons cinq angles de réflexion qui ont prévalu au cours de l’Antiquité et qui demeurent encore pertinents: la nature, la connaissance, la cité, l’action et le sens de la vie. Pour ce qui a trait au sens de la vie, nous l’avons d’abord présenté sous l’aspect de la pensée occidentale, et ensuite sous l’aspect de la pensée orientale, étant convaincu de la complémentarité de ces deux aspects pour bien comprendre ce que nous sommes, nous, les êtres humains.
Pour chacun des angles de réflexion, nous vous proposons deux extraits de textes en duel: l’un nous apporte des arguments favorables au destin et l’autre à la liberté. Mais on peut souvent sentir que la frontière est bien mince entre les deux positions, car la pensée humaine ne semble pas pouvoir faire abstraction ni de l’une ni de l’autre. Alors, où trouver l’équilibre sinon en explorant les deux pôles et en les gardant vivants, afin de se faire « une tête » sur ce duel profondément humain. En ce sens, nous terminons la présentation de chaque angle de réflexion par un encadré dans lequel nous imaginons une certaine perspective des choses, perspective qui nous semble pertinente pour le XXIe siècle. De plus, nous vous suggérons quelques questions à réflexion après chaque extrait de texte, et finalement une mise en débat ou en dialogue des deux penseurs vus.
Nous osons croire que cette présentation des penseurs de l’Antiquité vous fera voir leur intarissable actualité, comme s’ils demeuraient des sources d’inspiration profondes pour nous, les êtres humains du XXIe siècle.
« En plus d’enseigner la philosophie au collégial depuis plusieurs années, je suis aussi auteur, conférencier, formateur et animateur. J’ai publié 3 romans Jeunesse, un manuel de philosophie et deux essais. Un de mes romans Jeunesse s’intitule Les mots de mon père. Pour les essais, j’en ai un sur l’œuvre de Victor-Lévy Beaulieu et un en Philosophie pour enfants intitulé Des enfants pensent l’avenir. Mon manuel de philosophie porte le titre La liberté, c’est notre destin.
Comme conférencier, je propose présentement une conférence sur Victor-Lévy Beaulieu et une sur le Bonheur.
Comme formateur, j’ai donné récemment un atelier à des enseignants sur le développement d’une relation éducative satisfaisante avec les étudiants basée sur l’écriture.
Comme animateur, j’anime depuis trois ans des Cafés philo. Je propose aussi un atelier sur L’initiation à la vie philosophique et un autre sur l’écriture. »
De l’intuition à une philosophie de l’éducation : vers l’humain
Résumé
Dans notre travail, nous avions deux objectifs majeurs: rendre l’intuition plus présente au fonctionnement de l’éducateur; montrer l’importance de la philosophie, pour une action consciente. De fait, nous cherchions une philosophie de l’éducation découlant directement d’un approfondissement de l’intuition. Cet approfondissement s’est réalisé par une problématique ouverte sur trois champs d’exploration: pédagogie, psychologie et sociologie. Dans chacun d’eux, nous avons cherché la place de l’intuition, afin de bâtir une structure constituée de l’ensemble des éléments liés à sa présence en éducation. Cette façon de procéder, pour définir l’intuition de manière plus dynamique, nous a permis de la comprendre, non plus uniquement comme état, mais insérer dans un processus. Nous voulions comprendre l’apport de l’intuition, sans en faire l’apologie au détriment des autres composantes essentielles dans un fonctionnement éducatif. Nous voulions démontrer ainsi la nécessité de l’intuition en éducation et indiquer ce qui lui était complémentaire. Nous devions alors nommer sa particularité, la rendant si indispensable. L’intuition, depuis les études en phénoménologie, est devenue essentielle à une action consciente, impliquant une intention claire; ce qui nous a attiré, c’est l’unification active de trois facettes d’une même réalité. Elle agissait simultanément à trois niveaux différents: par la synthèse, au niveau de la connaissance (pédagogique); par la réciprocité, au niveau relationnel (psychologique): par la solidarité, au niveau de l’adaptation (sociologique). L’intuition rendait pour nous, l’apport de chacun d’eux nécessaire, pour une action consciente.
La philosophie antique aux cœur des débats actuels
Pierre Laurendeau
Presse de l’Université Laval, 2013
Ce livre s’inscrit en lien direct avec la philosophie pratique appliquées à notre vie de tous les jours, à notre mode de vie ou notre manière de vivre, et, plus spécifiquement à notre implication dans les débats actuels, en remontant aux philosophes de l’Antiquité.
Le titre, « La liberté, c’est notre destin ! » projette à l’avant scène la dualité de nos vies. Sommes-nous à la fois libres et déterminés ? Au premier abord, la liberté exclue que nous soyons entièrement déterminés et le destin exclue que nous soyons entièrement libres.
«Il existait deux opinions sur lesquelles se partageaient les anciens philosophes, les uns pensant que cout se produit par le destin, en sorte que ce destin apportait la force de la nécessité (Démocrite, Héraclite, Empédocle, Aristote étaient de cet avis), les autres pour qui les mouvements volontaires de l’âme existaient sans aucune intervention du destin; Chrysippe, en position d’arbitre officieux, me paraît avoir choisi la position intermédiaire; mais il se rattache plutôt à ceux qui veulent voir les mouvements de l’âme libérés de la nécessité. Or quand il utilise ses propres expressions, il tombe dans des difficultés qui l’amènent à confirmer malgré lui la nécessité du destin.»
– (Cicéron, Du destin, §392)
Tout au long de l’histoire de l’humanité, des êtres humains se sont battus contre la nature, les dieux, l’oppression, l’ignorance, et même contre eux-mêmes afin de conquérir leur liberté. Cette conquête de la liberté semble être l’une des motivations fonda mentales de la vie humaine. Mais, face à la liberté, se sont toujours imposées des idées contraires, entre autres celle de la nécessité ou encore celle du déterminisme. L’idée de destin en fut une autre, elle se définissait principalement de la façon suivante: une force plus ou moins occulte, obscure et mystérieuse obligeant les êtres humains à suivre un chemin les menant à une réalité incontournable. À partir de cette vision du destin, la liberté apparaissait, pour beaucoup, comme une illusion.
En partant du fait que les idées de liberté et de destin ont toujours habité l’esprit des hommes, nous proposons une troisième voie, une espèce de duel inhérent à leur réalité. Encore aujourd’hui, ce duel d’idées, déterminant pour l’ensemble de nos choix et de nos actions, exprime, selon nous, le mouvement même de la vie.
Pour comprendre la dynamique de ce duel, remontons à l’Antiquité3 grecque, latine et même asiatique. C’est à cette époque qu’il a pris une tournure décisive: la quête de liberté se faisait alors plus consciente et plus systématique, et ce pour de plus en plus de gens.
Globalement, ce duel liberté/destin soulève toujours la question de l’avenir de l’humanité: toujours plus de liberté ou la reconnaissance d’un destin commun à l’espèce vivante que nous sommes? Deux poids à mettre dans la balance de notre conscience personnelle, car il semble bien que le futur humain repose sur la responsabilité de chacun.
LAURENDEAU, Pierre, La liberté, c’est notre destin !, Introduction, Presses de l’université Laval (PUL), Québec (Québec), pp. 1-2.
Pierre Laurendeau oppose la liberté et le destin dans un duel d’idées, et ce, conformément aux penseurs de l’Antiquité. Or, personnellement, je n’adhère pas l’idée de « destin » reconnu par l’auteur comme : « une force plus ou moins occulte, obscure et mystérieuse obligeant les êtres humains à suivre un chemin les menant à une réalité incontournable ».
DESTIN nom masculin
Étymologie : XIIe siècle. Déverbal de destiner.
1. Puissance supérieure et inconnaissable à laquelle on attribue le pouvoir de gouverner l’ordre des choses et la succession des évènements. L’ordre, les arrêts du destin. Le destin aveugle, implacable. Les anciens tenaient le destin pour une puissance à laquelle les dieux mêmes étaient soumis. Spécialement. Cette puissance divinisée. Le Destin. Litt. Au pluriel. Au-dessus des dieux, il y a les destins. Les destins ennemis. Les destins favorables.
▪ Expr. Forcer le destin, s’élever contre une apparente fatalité. C’est le destin ! la fatalité contre laquelle on ne peut rien faire.
2. Le cours de la vie humaine, considéré comme relevant de la fatalité. Un heureux destin. Un destin funeste, tragique. Il était promis à un destin glorieux. Accomplir son destin. Se soumettre à son destin.
3. Le cours de la vie personnelle ou collective, regardé comme modifiable par la volonté, les décisions, les choix personnels. Être maître de son destin. Prendre en main son destin. Être responsable de son destin. Agir sur son destin. Manquer son destin.
4. Par analogie. Ce qu’il advient de quelque chose. Le destin, les destins d’un empire. Les destins d’un combat, d’une campagne militaire. Tel est le destin des dictatures, la fin qu’on peut leur prédire.
5. Finalité, vocation, orientation, avenir d’un être, d’une espèce, d’une société, d’une discipline, etc. Le destin de l’homme est de dépasser la condition animale. Le destin d’une découverte.
6. Class. Vie, existence. Il a terminé son destin. Trancher, abréger le destin de quelqu’un.
Il y a eu trop d’aléas décisionnels dans ma vie pour que je puisse me reconnaître un destin, une destinée, même au sens imagé. Je ne m’imagine pas destiné à quoi que ce soit. Le seul point auquel je peux me rallier librement et par compromis dans la définition donnée du « destin » dans le Dictionnaire de l’Académie française est le point numéro 3 : « Le cours de la vie personnelle ou collective, regardé comme modifiable par la volonté, les décisions, les choix personnels. Être maître de son destin. Prendre en main son destin. Être responsable de son destin. Agir sur son destin. Manquer son destin. »
Mon refus de l’idée de destin ne repose pas sur une quête de liberté. Avoir un destin préétablit, dit-on, fait de la liberté une pure illusion. Notre chemin étant déjà tracé, on n’a plus rien à décider que de l’emprunter.
Je me demande si l’idée de destin ne vient pas rescousse de celui ou celle qui cherche à se reconnaître une valeur propre dans une association avec « une force plus ou moins occulte, obscure et mystérieuse ».
Globalement, ce duel liberté/destin soulève toujours la question de l’avenir de l’humanité: toujours plus de liberté ou la reconnaissance d’un destin commun à l’espèce vivante que nous sommes? Deux poids à mettre dans la balance de notre conscience personnelle, car il semble bien que le futur humain repose sur la responsabilité de chacun.
LAURENDEAU, Pierre, La liberté, c’est notre destin !, Introduction, Presses de l’université Laval (PUL), Québec (Québec), p.3.
Le notion de responsabilité de chacun ( « car il semble bien que le futur humain repose sur la responsabilité de chacun ») dans ce « ce duel liberté/destin » soulève la question de l’individualisme face à l’idée « d’un destin commun à l’espèce vivante que nous sommes ». Je m’oppose à la sur-responsabilisation de l’individu dans le contexte mondial du « futur humain ». Il m’apparaît improbable que nous changions tous individuellement pour influer sur le futur collectif, sur l’humanité dans son ensemble. Un seul espoir m’anime et il repose sur le statut de l’individu comme citoyen, comme membre actif de la Cité.
Mais cet espoir demeure dans les limites civilisationnelles. De toute l’histoire de l’Homme, ce n’est pas l’Homme qui perd pied, mais les civilisations : « Ensemble des connaissances, des croyances, des institutions, des mœurs, des arts et des techniques d’une société. Les civilisations primitives. La civilisation chinoise, égyptienne. La civilisation grecque, hellénistique, romaine, arabe. Les civilisations précolombiennes. La civilisation chrétienne. La civilisation occidentale. La Méditerranée a été le berceau de nos civilisations. Une civilisation agraire. La civilisation industrielle. Une brillante civilisation. Le déclin, la fin, les vestiges d’une civilisation. Une civilisation moribonde, disparue. L’aire de diffusion d’une grande civilisation. » (Civilisation, Dictionnaire de l’Académie française).
Les destin commun de l’humanité est d’abord civilisationnel. La prise de conscience d’un destin commun ne peut se faire qu’entre ceux et celles de même civilisation.
Car aux limites de la liberté s’impose le conditionnement civilisationnel et des sociétés qui la compose. Il n’y a que dans ce conditionnement que je puisse me reconnaître un certain déterminisme, une certaine destinée, un certain destin, couplés d’une certaine liberté de penser et d’action, elle-même conditionnée. Même les instincts innés que je partage avec tous les hommes demeurent sous le conditionnement de la civilisation où je suis né.
Au Chapitre 1, « Cultive le naturel… », entre en scène Marc-Aurèle (stoïcien) (121-180)
Contrairement à Épicure, Marc-Aurèle n’a pas fondé d’école de philosophie. Il appartient à l’école stoïcienne de pensée, dite aussi école du Portique. Le stoïcisme privilégie le respect, tout à la fois, de sa propre nature et de la nature universelle : chacun a un destin qui lui est propre, mais tous les destins conduisent à se reconnaître dans une Intelligence universelle. Selon les stoïciens, on ne choisit pas ce qui nous arrive, mais on choisit les pensées qui les accompagnent. Autrement dit, chaque chose qui nous arrive, on peut la voir positivement ou négativement. Si l’on vit, par exemple, un échec amoureux, on a le choix entre se sentir démoralisé ou décider d’apprendre de son échec, ce qui oriente positivement nos amours futurs. Globalement, il faut retenir de cette philosophie que nous sommes naturellement des être de raison et des êtres sociables, faisant partie d’un tout immuable et harmonieux.
Chez les stoïciens prime donc le destin, mais ce sort n’exclut pas totalement toute forme de liberté, car nous pouvons, avec notre raison, développer une maîtrise de nos pensées, nos croyances et nos jugements. Dans ce contexte, la liberté individuelle, cadeau du divin, sert essentiellement à réaliser notre destin d’être humain, qui lui est universel. En d’autres mots, notre bonheur ne peut faire fi de celui des autres.
Aujourd’hui, de quelqu’un qui adopte cette philosophie, on dit qu’il est un stoïque, c’est-à-dire courageux, ferme, imperturbable, inébranlable, affrontant la souffrance et l’adversité avec détermination. La pensée positive, qui consiste à se convaincre que tout va bien aller, irait peut-être dans le sens du stoïcisme. Notre sens d’une responsabilité face à l’humanité, qui se concrétise par notre engagement dans des causes humanitaires, rejoint de même cette philosophie.
LAURENDEAU, Pierre, La liberté, c’est notre destin !, Chapitre 1 – Cultive le naturel…, Marc-Aurèle (stoïcien) (121-180), Presses de l’université Laval (PUL), Québec (Québec), pp. 14-15.
Selon les stoïciens, on ne choisit pas ce qui nous arrive, mais on choisit les pensées qui les accompagnent.
LAURENDEAU, Pierre, La liberté, c’est notre destin !, Chapitre 1 – Cultive le naturel…, Marc-Aurèle (stoïcien) (121-180), Presses de l’université Laval (PUL), Québec (Québec), p. 15.
Évidemment, si « on ne choisit pas ce qui nous arrive », on ne peut pas être sur-responsabilisé. Or, j’ai connu au cours de ma vie une époque où, selon mes proches, tout ce qui m’arrivait était de ma faute. Ma réponse intérieure : « J’ai fait de mon mieux au meilleur de mes connaissances et de mon expérience ». J’ai souffert de cette sur-responsabilisation jusqu’au jours où un observateur compréhensif m’a dit, sans détour : « Cesse de porter le monde sur tes épaules ». Mais il me fallait comprendre que je ne contrôlais pas tout ce qui m’arrivait. Et pour y parvenir, je devais prendre conscience d’un problème que je ne soupçonnais pas du tout : un problème de rigidité. Ce qui fut réglé. Dès lors, je ne pouvais que prendre la responsabilité et intervenir sur ce que je contrôlais.
Mais je demeure persuadé de ma part de responsabilité dans ce qui m’arrive. Je ne parviens pas à me percevoir que comme une victime de ce qui m’arrive parce que je suis un acteur de ce qui m’arrive. Il y a parfois des pensées décisionnelles, des choix, qui provoquent ce qui nous arrive. Et de la justesse de nos choix tient la connaissance.
Dans nos pays occidentaux, on a même démocratisé la connaissance à travers nos systèmes d’éducation afin que de plus en plus d’humains acquièrent un pouvoir sur leur vie. A-t-on obtenu le résultat escompté ? En partie peut-être, mais une question de fond demeure, héritée de l’Antiquité : nos connaissances sont-elles toujours mises à profit pour le meilleur de l’être humain ? Il parait évident que certains usent de la connaissance pour dominer et manipuler et, en ce sens, elle favorise la discrimination, l’exploitation et l’exclusion. L’humanité est donc de plus en plus appelée à garder vivante le but de la connaissance : ne doit-elle pas toujours nous conduire vers le bonheur, la liberté, et ultimement la sagesse ? À ce sujet, il semble bien que Platon et Aristote tomberaient d’accord. Et beaucoup d’humains sont aussi convaincus que le but de la connaissance, c’est l’épanouissement de notre humanité. Tel serait notre destin comme espèce vivante !
La dualité entre liberté et destin, face à la connaissance, se passe entre l’Idée innée de Platon, aux allures de destin, et l’idée construite d’Aristote, aux figures de liberté. Personne aujourd’hui ne peut nier l’importance de la connaissance pour notre avenir, mais il faut savoir à quelles sources s’abreuver et dans quel sens il faut l’orienter pour le meilleur de l’humanité…
LAURENDEAU, Pierre, La liberté, c’est notre destin !, Chapitre 2 – Connaissance – Allume tes lumières…, Presses de l’université Laval (PUL), Québec (Québec), pp. 24-25.
Si « Personne aujourd’hui ne peut nier l’importance de la connaissance pour notre avenir, mais il faut savoir à quelles sources s’abreuver et dans quel sens il faut l’orienter pour le meilleur de l’humanité », le problème demeure dans sa définition.
CONNAISSANCE nom féminin
Étymologie : XIIe siècle, conoisance, « acte de connaître, idée, notion de quelque chose ». Dérivé du radical du participe présent de connaître.
I. Exercice de la faculté par laquelle on connaît et distingue les objets, ainsi que les actes ou états du sujet.
1. Acte de l’esprit par lequel on se représente, définit ou comprend un objet. Les voies de la connaissance. Connaissance intuitive, rationnelle, empirique, sensible. Une connaissance claire et distincte. La connaissance scientifique. Théorie de la connaissance. Critique de la connaissance.
2. Le fait d’être informé ou de s’informer, d’apprendre quelque chose. Cela est venu à la connaissance des autorités. Porter un règlement à la connaissance du public. J’ai eu, je n’ai pas eu connaissance de cet évènement, de cette affaire. On m’a donné connaissance des dernières conclusions de l’enquête.
▪ Expr. À ma connaissance, autant que je sache. À ma connaissance, il est déjà de retour.
3. Idée, notion que l’on a d’une personne ou d’une chose, représentation que l’on s’en fait. La connaissance de Dieu. La connaissance du bien et du mal. La connaissance des hommes, du cœur humain. La connaissance de l’avenir.
4. Sentiment de sa propre existence ; plein exercice de ses facultés. Perdre connaissance, tomber sans connaissance, s’évanouir. Elle est restée longtemps sans connaissance. Il a repris rapidement connaissance. Il a conservé toute sa connaissance.
5. Ce que l’on connaît par l’étude, l’expérience ou par tout autre moyen d’information. Avoir une connaissance théorique, pratique. Avoir d’un sujet une connaissance approximative, vague, fragmentaire, précise, exhaustive, exacte. Il n’a qu’une connaissance superficielle du dossier. Il a une grande connaissance des langues, une solide connaissance de la musique.
▪ Au pluriel. Ensemble de ce que l’on a appris ; savoir, acquis. Avoir de grandes, de profondes, de vastes connaissances. Des connaissances sommaires, élémentaires, fragmentaires. Acquérir, amasser, accumuler les connaissances. Il a, dans ce domaine, des connaissances précises, étendues. Savoir tirer parti de ses connaissances. Faire montre de ses connaissances et, péj., étaler ses connaissances. Marque de domaine : enseignement. Contrôle continu des connaissances, mode d’évaluation des acquisitions de l’élève par des contrôles partiels et fréquents.
Titre célèbre : Connaissance de l’Est, de Paul Claudel (1900 et 1907).
6. Spécialement. Marque de domaine : droit. Le droit de connaître de certaines affaires, le droit de juger. Attribuer à un tribunal la connaissance de certaines causes. Expr. En connaissance de cause, voir Cause. – Marque de domaine : marine. Avoir connaissance d’une côte, d’une île, l’apercevoir et l’identifier. – Marque de domaine : vènerie. Avoir connaissance d’une bête, en apercevoir les traces. Au pluriel. Traces laissées par le pied de l’animal, donnant des indications sur son âge, sa taille, etc. – Marque de domaine : astronomie. Connaissance des temps, volume de tables, publié chaque année par le Bureau des longitudes, et donnant à l’avance les éléments variables des différents astres.
Observez l’absence du mot « opinion » dans cette définition de la « connaissance ». Or, de nos jours, l’opinion qu’on a de la connaissance est devenue plus importante que la connaissance elle-même. Penser la connaissance, c’est s’en faire une opinion. Et de là la dérive qui conduit une personne à prendre pour vrai ce qu’elle pense uniquement parce qu’elle le pense.
Il y avait donc, pour Platon, un ordre du monde préexistant à notre existence. Une fois que nous étions conscients de ce déterminisme, de ce destin, nous étions sur la bonne voie. Nous pouvions voir progressivement l’essentiel des choses, que Platon appelait connaissance intelligible et qu’il opposait à la connaissance sensible. En ce sens, « Platon prétendait s’attaquer aux connaissances fondées sur la sensation et l’empirisme et opposait la stabilité du véritable savoir aux changements de l’opinion (…) » 5. L’opinion, considérée comme un point de vue non remis en question sur quelque chose, ne nous permettait pas d’acquérir un savoir certain sur la chose perçue.
LAURENDEAU, Pierre, La liberté, c’est notre destin !, Chapitre 2 – Connaissance – Allume tes lumières…, Platon (-428 -348), Presses de l’université Laval (PUL), Québec (Québec), p. 27.
Bref, la connaissance n’est pas une opinion prise pour vraie. « Il est vrai que je pense », ça va. « Ce que je pense est vrai », ça ne va pas.
Je ne m’accorde pas avec l’idée de réminiscence mise de l’avant par Platon, d’un « ordre du monde préexistant à notre existence ». Je ne crois que nous savons tout par nos vie passées et qu’il suffit de s’en souvenir.
Je ne m’accorde pas non plus avec l’opposition de Platon à la connaissance sensible. Je préfère celle d’Aristote.
Pour Aristote, ce sont nos sensations qui sont à la base de nos connaissances. Autrement dit, la connaissance sensible est au fondement de toute connaissance. Il faut d’abord s’intéresser au monde des choses avant de regarder du côté du monde des idées. Aristote parle alors d’induction : pour connaître, il faut partir des choses concrètes, des cas particuliers avant d’arriver à l’idée ou concept. Nous construisons notre idée au lieu de la trouver toute faite en nous, et ce grâce à notre puissance de juger. La sensation est un préliminaire à la connaissance, mais n’est pas suffisante ; il faut à partir de plusieurs sensations, de plusieurs cas particuliers, bâtir la connaissance, qui elle est universelle. C’est ce que vise d’ailleurs la démonstration qui, si elle est bien faite, entraîne l’assentiment de tous. En ce sens, « Aristote, (…), va emprunter à Socrate et à Platon l’idée que la connaissance doit être la recherche du nécessaire et de l’universel et dépasser la sphère de l’opinion changeante et incertaine »9. Par contre, il n’y a pas d’opposition entre la sensation et l’idée, comme chez Platon, mais continuité de l’une à l’autre.
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9Jacqueline Russ, Panorama des idées philosophiques. De Platon aux contemporains, Armand Colin, 2000, p. 26.
LAURENDEAU, Pierre, La liberté, c’est notre destin !, Chapitre 2 – Connaissance – Allume tes lumières…, Aristote (-384 -322), Presses de l’université Laval (PUL), Québec (Québec), p. 27.
La connaissance sensible, acquise par les sens, révèle beaucoup sur nous mêmes en nous informant ce qui attire et retient notre attention. Notre subjectivité influence la connaissance sensible.
Le pouvoir de la « chose », de l’objet de la connaissance qui, par ses stimulus, appelle notre subjectivité. Un objet, quel qu’il soit, n’est jamais neutre en soi :
Nous aimons croire que nous sommes objectifs, que nous nous intéressons à des informations objectives. En réalité, si l’on ne devient pas subjectif face à une nouvelle information objective, on ne s’y intéresse pas et on n’est pas motivé par elle. Nous disons que nous jugeons objectivement, mais en réalité nous réagissons subjectivement.
Nous faisons continuellement des choix dans la vie quotidienne. Nous choisissons les « choses » qui nous attirent subjectivement, mais nous considérons ces choix comme objectifs.
« Le comportement d’un individu se base sur son schéma de références. Le schéma de références d’un individu détermine ses attitudes. Consciemment et inconsciemment, un individu acquiert des concepts qui deviennent une partie de lui-même et qui sont la base de toutes ses attitudes. Le schéma de références est acquis des parents, des enseignants, des relations et des amis, du type d’émissions de radio que nous entendons, des émissions de télévision que nous regardons et du type de livres, magazines et journaux que nous lisons. La plupart d’entre nous croyons tirer des faits de ces sources, non pas des attitudes. Nous pensons que nous avons accumulé des informations objectives, non pas un schéma de références. »
TEXTE ORIGINAL EN ANGLAIS
We like to believe that we are objective, that we are interested in objective information. Actually, unless one becomes subjective about a new objective information, he is not interested in it and is not motivated by it. We say we judge objectively, but actually we react subjectively.
We continually make choices in daily life. We choose the « things » which appeal to us subjectively, but we consider the choices objective. »
An individual’s behavior is based on his frame of refer-ence. A person’s frame of reference determines his attitudes. Consciously and unconsciously one acquires concepts that become part of him and are the basis of all his attitudes. The frame of reference is acquired from parents, teachers, relatives and friends, from the type of radio pro-grams we hear, the T.V. programs we watch and from the kind of books, magazines and newspapers we read. Most of us believe we acquire facts from these sources, not attitudes. We think we have accumulated objective information, not a frame of reference.
Source : Cheskin, Louis, Basis For marketing Decision, Liveright, New York, 1961, p. 82.
Voilà l’entrée en scène de la pensée scientifique dans le traitement de la connaissance sensible. « C’est ce que vise d’ailleurs la démonstration qui, si elle est bien faite, entraîne l’assentiment de tous » écrit Pierre Laurendeau au sujet d’Aristote. Il faut ici parler d’une démonstration scientifique, soumise aux règles de la pensée scientifique pour être dite « bien faite ». Elle permet alors de dégager une connaissance qui soit universelle par la mise à l’épreuve de la connaissance sensible : « La sensation est un préliminaire à la connaissance, mais n’est pas suffisante ; il faut à partir de plusieurs sensations, de plusieurs cas particuliers, bâtir la connaissance, qui elle est universelle » écrit Pierre Laurendeau. Par exemple, il me faut une connaissance sensible de plusieurs arbres de différentes essences pour parvenir à une connaissance universelle de l’arbre, ainsi je peux déduire la définition d’un arbre dans chacune des composantes que les arbres partagent pour être un arbre.
Il faut aussi prendre en considération le déterminisme de la connaissance sensible en nous livrant à une catharsis intellectuelle pour ainsi conduire notre intelligence avec rigueur.
CITATION
De la psychanalyse du sujet connaissant à l’objectivité scientifique dans l’épistémologie Bachelardienne, Merleau NSIMBA NGOMA
L’exigence de la catharsis intellectuelle et affective
« Toute culture scientifique doit commencer (…) par une catharsis intellectuelle et affective, nous dit Bachelard »174(*).
Par cette exigence, Bachelard pense que pour donner vraiment à la raison d’évoluer, il nous faut en toute permanence nous purifier des préjuges, des idées toutes faites, des opinions admises. La culture scientifique doit, dans ses mots, se défaire de tout narcissisme intellectuel et de tout vain optimisme. « Une tète bien faite est malheureusement, une tête fermée. C’est un produit de l’école »175(*).
La catharsis intellectuelle et affective est ce combat contre nous-mêmes. Elle est une condition préalable pour quiconque qui veut vraiment entreprendre une recherche intellectuelle.
Elle nous donne cette conviction que « pour que nous ayons quelque garantie d’être du même avis, sur une idée particulière, il faut, pour le moins que nous n’ayons été du même avis. Deux hommes, s’ils veulent s’entendre vraiment, ont du d’abord se contrarie. La vérité est la fille de la discussion, non pas fille de la sympathie »176(*).
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174(*) G. BACHELARD, La formation de l’esprit scientifique, p.18.
Gaston Bachelard. La formation de l’esprit scientifique, Académie de Grenoble
CHAPITRE I : La notion d’obstacle épistémologique
Dans l’acte même de connaître, la connaissance scientifique doit faire face à des obstacles épistémologiques qui sont causes de lenteur, d’inertie, de stagnation.
La science doit accepter son passé faits d’erreurs dans un véritable « repentir intellectuel ». Mais elle doit aussi détruire ces obstacles qui sont « des connaissances mal faites » et qui font obstacle à l’abstraction et à la « spiritualisation ». Accéder à la science, c’est, spirituellement rajeunir, c’est accepter une mutation brusque qui doit contredire un passé.
La science s’oppose donc à l’opinion. L’opinion de Bachelard sur l’opinion est sans appel :
« l’opinion a, en droit, toujours tort. L’opinion pense mal ; elle ne pense pas : elle traduit des besoins en connaissances ! En désignant les objets par leur utilité, elle s’interdit de les connaître. On ne peut rien fonder sur l’opinion : il faut d’abord la détruire. Elle est le premier obstacle à surmonter. »
Ce qui manque à l’opinion, c’est le « sens du problème ».
« La notion d’obstacle épistémologique peut être étudiée dans le développement historique de la pensée scientifique et dans la pratique de l’éducation. Dans l’éducation, la notion d’obstacle pédagogique est également méconnue. J’ai souvent été frappé du fait que les professeurs de sciences, plus encore que les autres si c’est possible, ne comprennent pas qu’on ne comprenne pas. s’agit alors, non pas d’acquérir une culture expérimentale, mais bien de changer de culture expérimentale, de renverser les obstacles déjà amoncelés par la vie quotidienne. »
« Ainsi toute culture scientifique doit commencer, comme nous l’expliquerons longuement, par une catharsis intellectuelle et affective. Reste ensuite la tâche la plus difficile : mettre la culture scientifique en état de mobilisation permanente, remplacer le savoir fermé et statique par une connaissance ouverte et dynamique, [19] dialectiser toutes les variables expérimentales, donner enfin à la raison des raisons d’évoluer. Un éducateur n’a pas le sens de l’échec précisément parce qu’il se croit un maître. »
Revenons au livre « La liberté, c’est notre destin ! » de Pierre Laurendeau. Il conclut en ces mots et et avec ces questions le deuxième chapitre traitant de la connaissance :
Aujourd’hui, lorsque l’on parle de CONNAISSANCE, on pense pour beaucoup à la connaissance scientifique qui vise l’objectivité, c’est-à-dire qu’à partir de faits concrets elle élabore des théories. Et ces théories sont valables lorsqu’elles permettent de résoudre des problèmes concrets. Au quotidien, chacun d’entre nous fonctionne à partir de connaissances pratiques, à savoir comment faire cuire un œuf ou comment se comporter avec les autres pour se faire des amis. Sur le plan professionnel, on développe des compétences dans un champ de connaissance afin de pouvoir travailler avec efficacité. Puis la société a besoin de connaissances qui font consensus afin que les différentes tendances et les différentes croyances puissent cohabiter ensemble. Il y aurait donc des connaissances individuelle et des connaissances collectives, des connaissances scientifiques et des connaissances philosophiques.
Nos deux philosophes, Aristote et Platon, visaient, par une réflexion sur la connaissance, à rendre l’être humain raisonnable et meilleur, donc plus sage. Se pourrait-il que ce but philosophique soit toujours aussi valable ?
En s’inspirant de Platon et Aristote,
qui ont défini les bases de la connaissance humaine,
ne faut-il pas continuer à réfléchir
à qui nous sommes comme êtres humains
pour comprendre le sens à donner
à notre recherche de connaissance ?
LAURENDEAU, Pierre, La liberté, c’est notre destin !, Chapitre 2 – Connaissance – Allume tes lumières…, Aristote (-384 -322), Presses de l’université Laval (PUL), Québec (Québec), p. 38.
Pierre Laurendeau nous parle de quatre types de connaissance : les connaissances individuelle et les connaissances collectives, les connaissances scientifiques et les connaissances philosophiques. Ces connaissances représentent pour moi les différentes branches de l’arbre et leur le feuillage. Dans ce contexte, il faut tenir compte du tronc et des racines de l’arbre afin de comprendre comment je connais, comment nous pensons (voir mon rapport de lecture : Article # 24 – Comment nous pensons, John Dewey, Les empêcheurs de penser en rond/Seuil).
Du troisième chapitre, « Cité – Arrive en ville… », je retiens cette citation de Cicéron :
DES BIENS ET DES MAUX (DE FINIBUS)6
C’est la nature qui nous pousse à vouloir rendre service au plus grande nombre possible, particulièrement en instruisant les autres et en leur transmettant les règles de la sagesse. Aussi n’est-il pas facile de trouver un homme qui ne transmette à autrui les connaissances qu’il a lui-même acquises ; et nous sommes portés non seulement à apprendre, mais à enseigner. Comme la nature a donné aux taureaux de lutter contre les liens de toutes leurs forces et de tout leur élan pour défendre leurs veaux, elle pousse également les hommes valeureux et capables d’agir, (…), à sauver le genre humain. (…) Donc, de même que nous nous servons de nos membres avoir d’avoir appris pour quel usage nous les possédons, de même c’est la nature qui nous a liés et associés en vue d’une communauté politique : s’il n’en était pas ainsi, il n’y aurait place ni pour la justice ni pour l’honnêteté. (…) puisque la nature humaine est telle qu’il y a entre chaque homme et le genre humain une sorte de droit civil, le juste est celui qui observe ce droit, l’injuste celui qui le transgresse, Mais de même que, au théâtre, on peut dire justement, bien qu’il appartienne à tous, que la place qu’un spectateur a occupé est bien à lui, ainsi, dans la cité ou le monde qui est commun à tous, le droit ne s’oppose pas à ce que chaque chose appartienne en propre à chacun. Puisque nous voyons que l’homme est né pour la protection et le salut de ses semblables, il est conforme à cette nature que le sage veuille s’occuper des affaires publiques et administrer.
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6 Cicéron, Des biens et des maux (De finibus), traduction par Émile Brehier, Livre III, chap. XX, Paris, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, 1962, P. 286-287
LAURENDEAU, Pierre, La liberté, c’est notre destin !, Chapitre 3 – Cité – Arrive en ville…, Cicéron (-106 -43), Aristote (-384 -322), Presses de l’université Laval (PUL), Québec (Québec), p. 46.
Cicéron écrit : « C’est la nature qui nous pousse à vouloir rendre service au plus grande nombre possible » et il ajoute « (…) de même c’est la nature qui nous a liés et associés en vue d’une communauté politique ». Je me demande si la société individualiste occidentale ne va pas contre-nature en s’attardant avant tout et quasi exclusivement à la personne et freine ainsi la volonté naturelle à rendre service au plus grand nombre. Les maigres taux de participation aux élections dans la Cité ne démontrent-ils pas que nos liaisons et nos associations en vue d’une communauté politique s’effritent ?
Est-ce vraiment dans notre nature de vouloir rendre service au plus grand nombre ? J’en doute. Il me semble plutôt que c’est une question d’éducation à la solidarité. Quand ma mère me demandait d’aller porter un plat de soupe à notre voisin de 98 ans, elle m’enseignait l’importance de la solidarité.
Aussi, je me demande si les individus sont encore motivés à instruire les autres et leur transmettent les règles de la sagesse. Les individus ne se désengagent-ils pas personnellement de leur volonté naturelle à rendre service au plus grand nombre possible, et ce, au profit de la Cité (de l’État). Si l’entraide s’inscrit dans la nature même de l’homme, elle revenait davantage à quelques individus et institutions religieuses. Au Québec, lorsque les citoyens rejetèrent la religion catholique, jusque-là dominante sur tous les aspects de la vie et même du travail et de la politique, lors de la Révolution tranquille dans les années 1960, les institutions religieuses furent déclassées par l’État en matière de charité. La charité n’était plu désormais une affaire interpersonnelle mais une affaire politique.
CITATION
L’histoire du droit à l’aide sociale au Québec (1969-2011)
Avant 1969
Il existait un éventail de programmes d’aide:
Assistance aux mères nécessiteuses
Allocations aux personnes aveugles
Aide aux personnes invalides
Allocations sociales
Allocations scolaires
Assistance aux personnes âgées
Assistance publique
Chaque programme avait ses critères d’admissibilité et prévoyait des prestations différentes. La gestion relevait des municipalités, des églises et des communautés religieuses. La distribution de l’aide était principalement basée sur des motifs « dits » charitables, sur la valeur morale et non sur des principes de justice et de droit. On étiquetait les personnes soit de «bons pauvres méritants» soit de «mauvais pauvres». Les individus se devaient d’avoir des comportements répondant aux mentalités de l’époque pour avoir accès à de l’aide. Par exemple, pour avoir accès aux programmes destinés aux mères nécessiteuses, les femmes devaient obtenir du clergé un certificat de bonne conduite. Le clergé décidait alors si les femmes qui faisaient une demande d’aide étaient de bonnes mères et avaient des mœurs de « bonnes chrétiennes ». Les femmes qui n’allaient pas assez souvent à l’église ou étaient soupçonnées d’avoir des relations avec plusieurs hommes pouvaient se voir refuser de l’aide.
(…)
1969 : première Loi sur l’aide sociale (bill 26)
Pour faire suite aux recommandations du Rapport Boucher, le gouvernement du Québec adopte la première loi d’aide sociale (bill 26) en 1969. À cette époque, le chèque d’aide sociale pour les personnes âgées de plus de 30 ans était de 217$ par mois. Si l’on avait indexé ce montant chaque année au même taux que les différents régimes de pension (RRQ, CSST, Pension du Canada), le chèque d’aide sociale serait aujourd’hui de 1299,87$ par mois. Ce montant était pour couvrir ce que le gouvernement qualifiait de besoins ordinaires (logement, nourriture, vêtement, besoins personnels et domestiques). Toutefois, le gouvernement accordait des montants supplémentaires pour les personnes ayant des besoins spéciaux, tels que diète prescrite, aide pour déménagement, prothèses, frais dentaires ou auxiliaires familiales6.
En dépit des tensions au sein même du gouvernement libéral d’alors, entre le droit à l’aide sociale et la norme relative à l’obligation de travailler, « le droit à l’aide sociale a constitué l’objet principal de la Loi sur l’aide sociale adoptée en 19697 ». « Dans le cadre de cette loi seront désormais unifiés tous les programmes d’assistance catégorielle […] ([ex.] aveugles, invalides, mères seules, assistance publique, etc.)»8. Toutefois, une nouvelle division se crée entre les sans emploi et les moins de 30 ans.
Pierre Laurendeau adresse des questions à la fin de chaque chapitre de son ouvrage. Voici celles à la fin du troisième chapitre « Cité – Arrive en ville… » :
Est-ce vrai, comme le pensait Cicéron, que les hommes sont naturellement portés à « sauver le genre humain » ?
Quand Cicéron parle de la cité, il parle essentiellement de justice et d’honnêteté : ces deux valeurs guident-elles encore les hommes pour répondre à la nécessité de vivre ensemble dans une communauté politique ?
Êtes-vous d’accord avec Cicéron lorsqu’il écrit que l’être humain de qualité est naturellement bon, qu’il est bâti pour faire le bien, et que tel est son destin ?
Les conflits entre les êtres humains sont inévitables : ne faut-il pas enseigner les règles de sagesse à tous pour les régler ?
LAURENDEAU, Pierre, La liberté, c’est notre destin !, Chapitre 3 – Cité – Arrive en ville…, Cicéron (-106 -43), Aristote (-384 -322), Presses de l’université Laval (PUL), Québec (Québec), p. 47.
Le quatrième chapitre, « Action -Lance-toi.. », met en vedette Épictète et Plutarque et traite de l’éthique.
L’éthique (morale) s’intéressait à l’action des êtres humains et aux répercussions que celle-ci avant sur eux-mêmes et sur les autres. Elle remettait en question leurs actions sur le monde et leurs réactions face aux situations qui s’imposaient à eux. Les êtres humains avaient une nature humaine qui appelait une morale réfléchie afin de bien encadrer leurs actions et leurs réactions, et ce vers le bien.
Sur le plan de l’action, comme quatrième angle de réflexion, la question centrale .tait alors, pour beaucoup, dans la distinction entre le bien et le mal, au niveau tant personnel qu’universel. Les penseurs de l’Antiquité étaient amenés à se demander si tout était permis à l’être humain, au nom de notre liberté, ou si notre appartenance au genre humain nous créait des limites et des devoirs, comme une certaine forme de destin. (…)
Pour explorer davantage cet angle de réflexion touchant l’action, nous avons fait appel à deux penseurs de l’Antiquité que sont Épictète et Plutarque : le premier nous oriente plus particulièrement vers la liberté et le second vers le destin. Les deux donnent des repères pour développer notre sens moral, morale que certains définissent de la manière suivante : « La morale est un élément essentiel de l’éducation, qui un “art d’incliner la volonté libre vers le bien2”3».
Épictète considérait qu’il ne fallait pas se laisser écraser par notre destin, mais plutôt faire preuve de liberté en maîtrisant nos pensées. De la sorte, la bonne façon d’agir était basé sur notre liberté intérieure, qui nous permettait de ne pas être à la merci des événements sur lesquels nous avions si peu de contrôle. Quand à Plutarque, il visait l’équilibre entre la raison et la passion, en se basant sur des lois fiables comme la décence et la modération. Ces lois s’imposaient à l’être humain, comme des déterminations favorable à la réussite de notre vie, un peu comme un destin relié à notre nature humaine.
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2 Citation tirée d’un article, Laïcité, de Ferdinand Buisson.
3 Anne-Marie Drouin-Hans, La laïcité à l’épreuve du relativisme, dans Repères pour l’éthique professionnelles des enseignants, Presses de l’Université du Québec, 2009, p. 221.
LAURENDEAU, Pierre, La liberté, c’est notre destin !, Chapitre 4 – Action – Lance-toi…, Cicéron (-106 -43), Aristote (-384 -322), Presses de l’université Laval (PUL), Québec (Québec), pp. 59-60.
« Par là même l’enseignement moral se meut dans une tout autre sphère que le reste de l’enseignement. La force de l’éducation morale dépend bien moins de la précision et de la liaison logique des vérités enseignées que de l’intensité du sentiment, de la vivacité des impressions et de la chaleur communicative de la conviction. Cette éducation n’a pas pour but de faire savoir, mais de faire vouloir ; elle émeut plus qu’elle ne démontre ; devant agir sur l’être sensible, elle procède plus du cœur que du raisonnement ; elle n’entreprend pas d’analyser toutes les raisons de l’acte moral, elle cherche avant tout à le produire, à le répéter, à en faire une habitude qui gouverne la vie. A l’école primaire surtout, ce n’est pas une science, c’est un art, l’art d’incliner la volonté libre vers le bien.»
Pierre Laurendeau nous informe qu’Épictète invitait à « faire preuve de liberté en maîtrisant nos pensées ». Est-ce une invitation à devenir libre-penseur ? Il va sans dire que nos pensées, dans la vision d’Épictète, vont dans tous les sens pendant que nos actions sont « à la merci des événements sur lesquels nous avions si peu de contrôle ». Ainsi, « la bonne façon d’agir était basé sur notre liberté intérieure ».
Pour faire preuve de sa liberté, il nous faut être conscient de cette liberté et cela implique plus souvent qu’autrement d’être d’abord conscient de notre conditionnement par la famille, nos proches et nos amis(es), l’école, la société… Il me semble qu’on se croit libre sans pour autant l’être vraiment. À mon humble avis, si la liberté s’inscrit dans la nature de l’homme, elle doit aussi être libérée de son conditionnement.
Quant à la liberté intérieure, le professeur de philosophie Olivier Verdun au Lycée franco-costaricien, San José (Costa Rica) demande « Peut-on parler d’une liberté intérieure ? »
CITATION
Peut-on parler d’une liberté intérieure ?
Olivier Verdun, professeur de philosophie
La notion de liberté intérieure semble d’abord renvoyer à une expérience commune et fruste de la pensée ou de la subjectivité qui, en son for intérieur, se conçoit comme indépendance, c’est-à-dire capacité de se déprendre des contraintes extérieures et d’agir en vertu d’une causalité purement interne au sujet. Ainsi la liberté intérieure désignerait-elle, en premier lieu, par opposition au monde des choses et des nécessités, cet espace intime que le sujet se donne ou découvre lorsqu’il croit tout bonnement faire ce qu’il veut. Ce qui apparaît, dès lors, dans l’idée ou l’expérience naïve de la liberté intérieure, c’est l’opposition tranchée entre le sujet et le monde, dans la mesure où l’adjectif « intérieur » évoque ce qui est au-dedans d’un être, ce qui se passe dans l’esprit et délimite une sphère d’intimité. Liberté toute spirituelle, en somme, interne au sujet, repliée sur elle-même, et qui passerait pour la liberté authentique.
Or, lorsque l’idée de liberté est convoquée, le concept d’action ou d’activité apparaît également et, avec lui, celui d’extériorité. Par liberté, il conviendrait d’entendre l’intervention transformatrice de l’agent dans le monde tentant de s’approprier et de façonner l’univers des choses. Il n’y aurait alors d’action et de liberté qu’extérieures, si l’action désigne la réalisation ou l’exécution d’un projet, c’est-à-dire l’objectivation, dans une réalité externe au sujet, de dispositions internes comme la volonté, l’intelligence, l’esprit, etc. L’extériorité en question ne s’identifierait plus uniquement avec le dehors, le monde ou l’objet dans lesquels le sujet pourrait se perdre ou s’aliéner, mais coïnciderait avec le mouvement de projection de soi vers les choses qui semble au fondement de la conscience créatrice et libre. Ici c’est la notion de liberté intérieure qui fait pâle figure et apparaît bien creuse, en ce qu’elle semble instaurer une coupure artificielle et stérile entre la volonté et l’action, la subjectivité et l’ordre phénoménal.
(…)
On aboutit alors à cette idée que l’on peut et doit parler de liberté intérieure, afin de penser l’idée même de sagesse, c’est-à-dire d’une existence singulière à la recherche du sens, de la plénitude, du bonheur. Et c’est précisément à cela que nous conduisent conjointement les démarches stoïcienne et spinoziste. L’idée de sagesse traduit, en effet, l’aspiration profonde de l’homme à la joie et au bonheur, à la maîtrise du mal et des passions, c’est-à-dire à la liberté. La sagesse se fonde sur une ontologie où le savoir de la nécessité introduit ordre et bien-être et constitue une forme d’action authentique ; la pensée devient une forme d’action et l’action une pensée, ce qui est la caractéristique de la philosophie en tant qu’amour de la sagesse. La sagesse est plutôt une éthique, un questionnement sur le sens à donner à notre existence, l’effort pour passer à une modalité neuve de l’existence et pour construire la liberté.
On peut donc bien parler d’une liberté intérieure, si l’on entend par cette expression, non pas une volonté creuse et solitaire se repliant sur elle-même et ignorant toute intervention dans le monde ou dans l’espace public, mais le mouvement par lequel un sujet tente de se hausser au niveau d’une existence signifiante et comblée par son propre pouvoir de réflexivité. Parler de liberté intérieure, c’est évoquer le pouvoir créateur du sujet (« intérieur » voulant désormais dire « subjectif ») qui, en constante relation avec le monde et les autres, constitue le sens du monde et les déterminations par lesquelles ce monde agit sur le sujet, se libérant ainsi des souffrances imaginaires. Le risque de dualisme est évacué puisque la volonté désirante n’est plus opposée au monde mais le réfléchit d’une manière neuve et significative. Du coup, le sujet n’est plus comme à distance du monde, l’individu n’est pas à opposer au citoyen, la liberté du sage n’est pas en contradiction avec celle du citoyen ou de l’homme de l’action, quelle que soit par ailleurs la scène sur laquelle se déploient les différentes figures possibles de l’action. La liberté intérieure renvoie à cette dimension fondamentale de la conscience humaine qui est aspiration à la liberté et au bonheur. Si la démocratie constitue la forme la plus parfaite de la liberté politique, elle est d’abord à chercher au cœur même de cette aspiration fondamentale qui est précisément celle du désir.
Dans le cinquième chapitre de « La liberté, c’est notre destin ! », le professeur de philosophie Pierre Laurendeau nous instruit du « Sens de la vie à l’occidentale » et met en vedette deux autres philosophes de l’Antiquité, Sextus Empiricus (IIe-IIIe s.) et Lucrèce (-95 -55). Il nous rapporte d’abord les positions de Platon, Socrate, Plotin Aristote et celle des sophistes.
Les philosophes de l’Antiquité, prenant peu à peu leur distance face à un destin jusqu’alors coulé dans le béton, étaient en quête de liberté. Pour aller dans cette direction, ils devraient revoir la place allouée aux dieux. Si les dieux avaient auparavant donné un sens à notre vie, il fallait maintenant apprendre aussi à le façonner comme homme, à même notre vie terrestre. Mais alors, sur quoi fallait-il mettre l’accent ? Que fallait-il chercher ? Le bonheur était-il à la portée de tous ? Vers quoi fallait-il aller pour que la vie y trouve tout son sens ? Toutes ces interrogations sur le sens de la vie faisaient partie du domaine de la philosophie que l’on appelait la métaphysique.
Pour Platon et Socrate, une vie ne valait pas la peine d’être vécue si elle n’était pas analysée, examinée, justifiant ainsi la pratique de la philosophie ; et c’est ainsi que l’être humain réalisait que le sens de sa vie, c’est de faire le bien. Plotin, philosophie du IIIe siècle après J.-C., cherchait à concilier destin et liberté. Pour lui, la liberté venait de l’âme ; quant au corps, il était plutôt déterminé. Il fallait donc se mettre à l’écoute de ce que nous pensions et ressentions pour trouver le véritable sens de la vie. Il espérait nous faire voyager d’une vérité relative, propre à chacun d’entre nous, à une vérité absolue, c’est-à-dire vers un sens valable pour tous les êtres humains. Pour Plotin, si nous savions bien regarde la vie, nous ne pouvions que constater chez l’être humain une quête d’unité à même la diversité des hommes : c’était, selon lui, cette quête d’unité qui, faisant vibrer depuis toujours le cœur des hommes, nous avait conduit à « inventer » dieu. Mais fallait-il vraiment en rester là ? Il voulait aussi nous amener à développer une conscience cosmique, ce sentiment d’appartenir au tout de l’univers.
Les sophistes, eux, proposaient le succès politique et la réussite sociale et, en cela, ils étaient proches des valeurs que beaucoup d’Athéniens privilégiaient dans leur vie : richesse, bonheur et pouvoir. Quant à Aristote, il prenait soin de préciser que le bonheur était propre à l’homme, qu’il donnait un sens à sa vie et qu’il reposait sur la conformité à la raison et à la vertu.
LAURENDEAU, Pierre, La liberté, c’est notre destin !, Chapitre 5 – Sens de la vie à l’occidentale – Suis ta route…, Presses de l’université Laval (PUL), Québec (Québec), pp. 74-75.
Façonner soi-même le sens de notre vie plutôt que de laisser la tâche à/aux dieu/x. Se mettre au service du bien, est-ce là le sens universel de la vie ? On le voudrait… bien. Mais dans la civilisation occidentale, le sens de notre vie supplante le sens universel de la vie. Notre individualisme nous ramène sans cesse à ce qui nous est personnel. Ainsi va notre vite. La question « Quel sens tu donnes à ta vie ? » dit tout.
La vie a-t-elle un sens en soi ? Faut-il nous mettre à la recherche du sens caché de la vie ? Évidemment, je ne peux répondre que pour moi ou, si vous préférez, personnellement, et à mon humble avis : la vie n’a pas de sens en soi, il faut lui en donner un.
Curieusement, je crois aussi que c’est l’expérience de la vie qui nous permet de lui donner un sens. Mais ne me questionnez pas au sujet du sens de ma vie car je ne le connais pas encore, même à 67 ans et malgré mes expériences intenses de la vie. Ce n’est pas que je n’ai pas analysé et examiné ma vie, mais l’exercice demeurera ouvert jusqu’à ma mort.
Aussi, le sens de ma vie me semble intimement lié à mon identité, cette dernière étant modelée sur mes expériences de vie. Et à la lumière de ces dernières, tout ce que je puis affirmer, c’est que je suis « un gars de cause » ; j’épouse des problèmes soumis à mon attention et, de préférence, touchant le plus grands nombre de personnes, dans un domaine ou un autre, pour leur trouver des solutions. Est-ce cela tendre vers le bien ?
Je suis un « Problem-Directed Men » comme le dirait le chercheur américain Louis Cheskin, pionnier des études de motivation d’achat.
Our Greatest Need In Business and Governement, 1964, The Bobbs-Merrill Company Inc., New York, 320 pages. Ce livre s’inscrit à la suite du témoignage de Louis Cheskin devant deux comités du Congrès américain, soit le comité du Sénat sur l’emballage (Anti-Trust and Monopoly) et le comité de la Chambre des Représentants sur la promotion de l’American Way (“Winning the cold war : The US Ideological Offensive” − Foreign Affairs). Louis Cheskin traite des principaux problèmes socio-économiques. Dans son intervention, Louis Cheskin se porte à la défense des plus faibles. Louis Mariano, Éditeur Associé du World Book, écrira : “In his testimony, he has made our leaders aware of the fact that in our affluent society over 90 percent of our income is spent on psychological satisfactions − fashionable clothes, not overalls; decorated homes, not mere shelters; tasteful foods, not only the necessities of life.” LE CONTEXTE : Le passage d’une société de pénurie à une société d’abondance soulève de nombreuses préoccupations socio-économiques alors que l’establishment en place éprouve des difficultés à évoluer vers des raisonnements plus actuels. Voir le site web : Comment motiver les consommateurs à l’achat avec Louis Cheskin.
La position d’Aristote m’intéresse. Si j’ai bien compris, Aristote trouve le sens de sa vie dans le bonheur et ce bonheur repose « sur la conformité à la raison et à la vertu ». Tout est dit si et seulement si le bonheur s’imprime dans ma nature humaine. Je suis heureux lorsque je suis satisfait de ma contribution à la résolution d’un problème avec ma raison et par bonté d’âme.
Afin de poursuivre notre réflexion sur le sens de la vie à l’occidental, nous vous proposons Sextus Empiricus, sceptique, qui doutait de tout, et Lucrèce, épicurien, qui regardait du côté des plaisirs simples de la vie terrestre. Pour Sextus Empiricus, le sens de la vie ne se trouvait dans la recherche de la vérité, comme chez Platon, Aristote et bien d’autres, mais plutôt en apprenant à ne plus la chercher. C’est en doutant de toute vérité, que les autres tentaient souvent de nous imposer, que nous accédions à l’ataraxie, à la paix de l’esprit, qui était le but véritable de la vie. Pour Lucrèce, le sens de la vie se trouvait dans la reconnaissance et l’acceptation de notre condition de mortel. Nous n’étions que matière, tout autant d’esprit que de corps, et il ne servait à rien de chercher plus loin. Il fallait savoir jouir de notre nature corporelle et vivre le plus simplement du monde. Si Sextus Empiricus misait sur notre destin lié à notre état d’esprit, Lucrèce misait sur la reconnaissance de notre liberté purement matérielle. Matérialisme et spiritualisme, voici les deux grandes options que nous proposaient les philosophes pour trouver un sens à notre vie.
LAURENDEAU, Pierre, La liberté, c’est notre destin !, Chapitre 5 – Sens de la vie à l’occidentale – Suis ta route…, Presses de l’université Laval (PUL), Québec (Québec), p. 75.
Je doute avec nécessité et grand plaisir pour garantir ma paix d’esprit mais je reconnais pas là le sens de ma vie. Quand j’écris « La lumière entre par les failles », je confesse implicitement que la lumière vient de l’extérieur de moi. Et quand je précise que « Le doute est la faille qui permet à la lumière de m’éclairer », je mets de l’avant le bénéfice du doute. Le doute fait donc mon bonheur. Mais mon bonheur n’est pas ce qui donne sens à vie. Si je cherche le bonheur, c’est involontairement et inconsciemment.
La vie aurait bien un sens, mais chacun aurait à travailler pour le trouver ou l’inventer, en fonction de notre nature humaine ou de notre condition humaine. (…)
LAURENDEAU, Pierre, La liberté, c’est notre destin !, Chapitre 5 – Sens de la vie à l’occidentale – Suis ta route…, Presses de l’université Laval (PUL), Québec (Québec), p. 76.
« Donner un sens à sa vie, à la vie » ne doit pas devenir une charge au point de pousser à l’abandon d’y réfléchir sereinement. Aussi, je me permets de croire que le sens de la vie peut changer au fil de notre vie, surtout si nous associons le sens de la vie à ce qu’il y a de plus important pour soi. La valeur de la vie dépasse le sens qu’elle a ou qu’on lui donne.
Quant au sixième et dernier chapitre, « Sens de la vie à l’orientale – Éclaire l’univers », je l’ai lu avec une certaine appréhension et beaucoup de préjugées. Dans ces régions du monde, il me semble que tout va de travers quant à la liberté des hommes, la vie dans la Cité et dans l’État. Leurs philosophies religieuses bouddhiques et taôismes tout comme leurs philosophies sociales ne donnent pas aux hommes les moyens de leur liberté de penser et de mouvement. À ces peuples, il ne reste plus que la vie intérieure comme refuge et la méditation pour y entrer… dans le plus grand des silences.
Un jour, un homme m’a affirmé que l’Occident était le plus bel hommage que l’homme puisse rendre aux valeurs historiques qui inspirèrent les Droits de l’Homme. Et je suis depuis de cet avis.
À l’Orient, je n’ai plus qu’une seule question à poser : « Où est votre Descartes ? » J’ai déjà demandé « Où est le René Descartes de la société musulmane ? » Ne serait-il pas temps que le soleil se lève sur l’Orient ? Certes, je respecte les différences entre les civilisations, les sociétés et les peuples mais la noirceur demeure la noirceur peu importe la culture. « C’est la faute de l’Occident » diront certains. Mais il n’en demeure pas moins qu’aujourd’hui est un autre jour.
Dans le dernier chapitre de son livre, Pierre Laurendeau se réfère au fameux « Village global » du sociologue canadien Marshall McLuhan.
Aujourd’hui, en Occident, on parle abondamment de mondialisation, et il est évident qu’elle passe par l’Orient : c’est vrai sur le plan commercial, mais aussi sur les plans culturel, spirituel et humain. La terre devient de plus en plus un village global, comme l’annonçait, à la fin des années 1960, le penseur canadien Marshall McLuhan, et notre quête de sens de la vie humaine ne peut en faire abstraction. N’aurions-nous pas, nous les êtes humains, un destin commun à penser ? Une réalité devient de plus en plus évidente : l’Occident ne peut plus voir l’Orient comme ce qui s’oppose à lui, mais plutôt comme son complément d’humanité. Il semble bien qu’il en va de notre destin comme espèce vivante, et de l’extension de notre liberté, qui ne peut être ultimement que partagées. Jean-Paul Sartre, philosophe français contemporain, écrivait qu’il ne serait jamais totalement libre aussi longtemps que des êtres humains ne le seraient pas, et que chacune de nos actions engageait toute l’humanité : l’Occident a besoin de l’Orient !
LAURENDEAU, Pierre, La liberté, c’est notre destin !, Chapitre 6 – Sens de la vie à l’orientale – Éclaire l’univers…, Presses de l’université Laval (PUL), Québec (Québec), p. 93.
En Occident, nous croyons que tout un chacun à droit à la liberté. Nous croyons même que cette liberté s’inscrit dans la nature humaine, une réalité que nous qualifions ainsi d’universelle. Mais est-ce réellement le cas ? Peut-on en douter. N’y a-t-il pas des hommes qui ne cherchent pas l’émancipation sur cette Terre ? Depuis le temps où l’Occident se donne en exemple d’émancipation des uns et des autres, ne devrions-nous pas nous attendre à un raz-de-marée planétaire si la liberté s’inscrit bel et bien dans la nature humaine ? Dans ce Village global, des quartiers demeurent barricadés et seul le commerce (l’argent) avec les autres quartiers semblent les intéresser. Dans ce Village global, il n’y a pas de mairie… de Cité, pas plus que d’État global. Nous sommes proches de loin.
Une mondialisation « sur les plans culturel, spirituel et humain » ? Est-ce réaliste de penser une telle mondialisation, une mondialisation au-delà du commercial ? N’est-il pas dans la nature humaine d’être différent, et insoluble dans ses différences ? Mondialisation ne signifie certainement pas fusion.
Je ne peux pas nier que le livre LA LIBERTÉ, C’EST NOTRE DESTIN ! de PIERRE LAURENDEAU me donne à penser encore et encore. Ce livre est un bijoux, un ouvrage essentiel. J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq.
Une nouvelle conception de la philosophie antique mais aussi, plus largement, de la philosophie elle-même, s’est progressivement imposée durant la seconde moitié du vingtième siècle, à la suite des nombreux travaux de Pierre Hadot. Cette conception n’a cessé de rencontrer un vif succès, que ce soit auprès des spécialistes ou auprès d’un public plus large, qu’intéressent les questions relatives au sens de l’activité philosophique. Selon cette nouvelle conception, la philosophie aurait été comprise, depuis Socrate, comme une manière de vivre et non comme une discipline purement théorique visant à produire un savoir. En ce sens, elle avait donc d’abord une finalité pratique : fournir aux hommes les moyens de parvenir au bonheur. Mais surtout, elle reposait sur des exercices de nature spirituelle, dont l’objectif était à la fois, par un entraînement constant, de se préparer à cette vie philosophique et d’en poursuivre la pratique. De tels exercices n’étaient donc pas seulement une partie de la philosophie, ils se confondaient avec elle et constituaient l’activité philosophique tout entière.
Une telle conception a acquis la valeur d’un véritable paradigme au sens où elle est devenue un modèle pour tous ceux qui veulent comprendre la philosophie antique. Mais elle n’a jamais fait l’objet d’une analyse critique approfondie ou d’une réflexion portant sur les présupposés qui sont les siens. Il s’agira donc, dans ce livre, de s’interroger sur les fondements d’une telle conception, et d’en signaler les limites, afin d’ouvrir à nouveau le débat sur le sens de la philosophie antique
* * *
Sylvain Roux est professeur de philosophie ancienne à l’Université de Poitiers. Ses travaux portent sur l’histoire du platonisme, et plus particulièrement sur Plotin et le néoplatonisme.
Les analyses et les ouvrages de Pierre Hadot ont imposé une nouvelle conception de la philosophie antique. Celle-ci occupe désormais une place centrale dans le champ des études anciennes, car elle ne constitue pas simplement une conception différente, s’ajoutant à celles qui existent déjà, mais elle s’est imposée, progressivement, comme le modèle principal pour tous ceux qui souhaitent s’interroger sur le sens de la philosophie antique. L’hypothèse qui commande les analyses qui vont suivre est donc que notre rapport à ce moment de l’histoire de la philosophie qu’est la philosophie antique est aujourd’hui largement dépendant de ce que l’on pourrait appeler le paradigme spiritualiste (la philosophie comprise comme exercice spirituel). C’est cette situation originale que nous souhaitons mettre en lumière, étudier, et soumettre à une discussion critique. Il nous faut, pour commencer, en indiquer les raisons.
Un nouveau paradigme
Dans des analyses devenues célèbres, Thomas S. Kuhn a mis en évidence l’importance de la notion de paradigme dans l’histoire des sciences. Rappelons d’abord certains éléments essentiels de sa théorie, puisque nous souhaitons en faire usage dans un contexte différent, qui concerne l’historiographie de la philosophie. T. S. Kuhn soutient qu’il faut distinguer deux moments dans le développement d’une science. Le premier est celui de la « science normale », durant lequel les scientifiques travaillent à partir d’une théorie qui a fait ses preuves et qui est acceptée par une majorité d’entre eux. Les travaux qu’ils conduisent s’en inspirent et se situent dans son sillage. Une telle théorie joue donc un rôle à plusieurs niveaux : elle circonscrit par avance la nature des problèmes à traiter, elle détermine la méthode à appliquer pour leur apporter une solution, elle constitue le cadre dans lequel le travail scientifique doit s’inscrire. Dès lors qu’on reconnaît sa légitimité, les travaux auxquels se livrent les scientifiques ne font que développer toutes les potentialités contenues en elle. La théorie est ainsi un modèle qui permet à la fois de comprendre le monde et de l’étudier suivant des règles pratiques définies. C’est pourquoi tout paradigme donne naissance, selon T. S. Kuhn, à une « tradition1 ». La Physique d’Aristote ou l’Almageste de Ptolémée ont joué ce rôle dans l’histoire des sciences occidentales. Mais il existe un second moment dans le développement des sciences, car celles-ci peuvent connaître des formes de crise durant lesquelles le paradigme dominant se trouve mis en difficulté par des problèmes qu’il ne peut et ne sait résoudre. Ce second moment n’est pas le plus fréquent et il a donc, au sens strict, un aspect « extraordinaire » puisqu’il fait sortir la science de son fonctionnement habituel. Il lui faut en effet mettre en place de nouveaux modèles pour faire face au vide laissé par l’abandon de l’ancien paradigme. Cette situation donne progressivement naissance à une nouvelle étape durant laquelle une théorie s’impose progressivement parce qu’elle permet de lever les difficultés que l’ancienne ne pouvait pas résoudre. Ce changement de paradigme reconduit cependant à l’étape antérieure dans laquelle les scientifiques se pliaient à un paradigme dominant ; de sorte que l’état le plus habituel de la science est bien celui dans lequel un paradigme domine les travaux effectués, tandis que l’état de crise reste au contraire exceptionnel et transitoire. En ce sens, l’histoire des sciences possède nécessairement une dimension cyclique.
Or, il nous semble que cette description du fonctionnement de la science par T. S. Kuhn, dont il ne s’agit pas ici de discuter la pertinence, peut être utile pour décrire la situation dans laquelle nous nous trouvons désormais à l’égard de la compréhension de la philosophie ancienne.
Il convient tout d’abord de remarquer que P. Hadot lui-même a souhaité faire de sa conception un véritable modèle de lecture et d’analyse des textes, puisqu’il l’a présentée comme un paradigme méthodologique. En effet, dans l’avant-propos du recueil d’articles intitulé Exercices spirituels et philosophie antique, il indique qu’un « double anachronisme » menace ceux qui veulent s’intéresser aux textes anciens : d’une part, ils risquent de croire que ces textes avaient essentiellement une dimension informative, c’est-à-dire qu’ils cherchaient d’abord à transmettre un contenu doctrinal ; d’autre part, ils risquent par là même de penser que ces textes ont une dimension biographique, dans la mesure où ils nous renseigneraient sur la pensée de ceux qui les ont écrits2. Ils seraient alors un témoignage sur les conceptions propres aux grands auteurs de l’histoire de cette discipline que l’on nomme philosophie, et c’est à ce titre qu’il conviendrait de s’y référer. Il ne fait pas de doute que P. Hadot s’en prend ici à la conception qui est désormais la nôtre. Il décrit notre tendance à voir dans des textes la manifestation d’une force de raisonnement, d’une puissance intellectuelle qui aboutit à des idées et à des systèmes de pensée complexes. Or, cette tendance joue le rôle, selon lui, d’un véritable obstacle épistémologique. Elle nous empêche de voir que les textes anciens avaient une tout autre finalité, qui était avant tout « psychagogique » : ils cherchaient à transformer l’âme des lecteurs et non à exprimer le point de vue d’un auteur. P. Hadot en appelle donc à un renversement de perspective : il faut lire ces textes en se demandant quel effet ils cherchaient à produire sur ceux auxquels ils s’adressaient.
Cette conception est explicitement reprise dans un autre de ses ouvrages :
C’est pourquoi il est nécessaire d’insister sur certains impératifs méthodologiques. Pour comprendre les œuvres philosophiques de l’Antiquité, il faudra tenir compte des conditions particulières de la vie philosophique à cette époque, y déceler l’intention profonde du philosophe, qui est, non pas de développer un discours qui a sa fin en lui-même, mais d’agir sur les âmes. En fait, toute assertion devra être comprise dans la perspective de l’effet qu’elle vise à produire dans l’âme de l’auditeur ou du lecteur3.
Dans ce passage, P. Hadot insiste particulièrement sur une opposition fondamentale, que nous étudierons plus longuement dans les prochains chapitres. Il s’agit d’une opposition entre deux dimensions de la philosophie, la dimension théorique et la dimension pratique. Plus précisément, il propose de considérer les textes anciens comme l’expression d’une dimension pratique plutôt que comme celle d’une dimension théorique. Selon cette nouvelle perspective et ce nouveau modèle, on ne cherchera plus seulement à retrouver dans ces textes une conception du monde mais une opération qui vise à produire un effet sur des récepteurs afin de modifier leur manière de vivre. Car la philosophie consiste essentiellement en une entreprise de transformation des âmes. C’est pourquoi il devient impérieux de s’intéresser aux conditions de production des discours philosophiques, à la situation et au statut de celui qui les énonce comme à la situation et au statut de celui qui les reçoit, puisqu’ils tiennent leur sens et leur fonction de ces différents aspects. Tels sont les « impératifs méthodologiques » qui découlent de ce renversement de perspective.
Mais si P. Hadot a conféré à cette nouvelle conception de la philosophie ancienne une valeur de paradigme, ce n’est pas seulement pour mener ses propres recherches. Il a souhaité, comme les textes que nous avons cités en témoignent, qu’elle constitue aussi un paradigme pour les recherches menées par d’autres dans le domaine de l’histoire de la philosophie. Sur ce point, il faut bien reconnaître que son souhait a été largement exaucé, car les chercheurs contemporains ont, pour la plupart, adopté sa conception, non seulement pour comprendre et étudier la philosophie antique mais, de façon plus surprenante parfois, pour l’appliquer à d’autres périodes, plus récentes, de l’histoire de la philosophie. En effet, de nombreux travaux ont cherché à montrer que des exercices spirituels étaient présents chez des auteurs modernes et contemporains comme Montaigne4, Nietzsche5 ou encore Husserl6. P. Hadot avait d’ailleurs lui-même ouvert la voie à ces recherches en montrant que la philosophie telle qu’il l’entendait (comme mode de vie et exercice spirituel) n’avait pas disparu à l’époque contemporaine et qu’on en trouvait encore la trace chez Montaigne, Descartes ou Kant7. Enfin, certains travaux ont même cherché à appliquer la notion d’exercices spirituels à des pratiques qui ne relèvent pas de la philosophie, les pratiques sportives par exemple, afin d’en proposer des analyses nouvelles8.
Les raisons d’un succès
Pour quelles raisons l’analyse de P. Hadot s’est-elle ainsi imposée au point de prendre la forme d’un véritable paradigme interprétatif ? Plusieurs explications sont possibles. On pourra d’abord insister sur le fait qu’elle ne relève pas immédiatement, et pas seulement, de la philosophie, mais s’inscrit dans une tradition scientifique, notamment celle de la philologie et de l’histoire des textes anciens. En ce sens, elle paraît échapper d’emblée aux critiques que l’on adresse souvent à certaines études, à qui l’on reproche de dépendre d’une orientation elle-même philosophique et de tenter de restituer le sens de la pratique philosophique sans réussir à s’extraire d’un point de vue particulier. Au contraire, l’analyse de P. Hadot se place dans une autre perspective, qui consiste à vouloir retrouver la posture qui, pour les différents auteurs de l’Antiquité, a déterminé l’acte même d’écrire. Cette extériorité lui confère la supériorité d’un point de vue non partisan. C’est pourquoi on a pu rapprocher cette analyse d’une forme d’exploration et la comparer à une découverte, en reprenant alors le vocabulaire dévolu habituellement à la description du travail scientifique. Jean Greisch, par exemple, voit dans les réflexions de P. Hadot une véritable « percée » permettant de mettre à jour une dimension oubliée de la philosophie, qui est pourtant sa dimension essentielle, et permettant d’ouvrir la voie à la définition d’une véritable « expérience » philosophique9. Comme on le voit, l’emploi du terme « percée » reprend à la fois le vocabulaire de l’exploration d’un territoire inconnu et celui de la stratégie militaire ; il évoque le mérite de ceux qui réussissent à ouvrir une nouvelle voie comme de ceux qui réussissent à briser des résistances pour établir une brèche dans un front ennemi.
Il est toutefois possible d’expliquer d’une autre manière l’importance reconnue aux travaux de P. Hadot. La première explication que nous venons de rappeler insiste sur la nouveauté que constitue le fait de poser un regard extérieur sur la philosophie, un regard différent de celui que la philosophie pose sur elle-même. Cette extériorité se comprend par rapport à la discipline philosophique. Mais il existe une autre forme d’extériorité, qui consiste cette fois en un regard décentré par rapport à notre époque, en une mise à distance du présent de la philosophie. Les travaux de Hadot ont contribué à une interrogation de la philosophie sur sa situation contemporaine et sur la conception que nous nous en faisons. Cet aspect a été tout particulièrement mis en évidence par Jean-François Balaudé, qui montre très justement que la conception de P. Hadot a obligé de nombreux auteurs contemporains à repenser leur rapport à la philosophie antique. En effet, celle-ci ne procède pas par projection sur le passé de problèmes et de concepts actuels. Elle cherche au contraire à prendre en considération les intentions propres aux auteurs anciens, à s’attacher, comme nous l’avons vu, aux principes qui commandaient leur pratique de l’écriture et de la lecture, et à montrer qu’ils accordaient aux textes une finalité essentiellement pratique. Surtout, la conception de P. Hadot permet une lecture rétroactive de la philosophie qui consiste à prendre conscience du processus par lequel nous en sommes arrivés à une conception radicalement opposée à celle des Anciens et qui a en partie sa source dans les transformations que le christianisme lui a imposées. En ce sens, elle nous amène, par un « pas en arrière », à prendre conscience de nous-mêmes en tant que philosophes, et à prendre conscience de la particularité de notre pratique actuelle de la philosophie10. Elle nous conduit donc à nous rendre extérieurs à notre présent, afin de nous comprendre par la prise en compte de notre passé.
Il est indéniable que P. Hadot a ainsi admirablement servi la cause de la philosophie, et de la philosophie antique en particulier, en la replaçant au centre des réflexions contemporaines et en lui redonnant une actualité qu’elle n’avait peut-être plus. Mais, ce faisant, il a accrédité l’idée que la philosophie antique avait un sens que nous avons perdu et a laissé penser que nos propres pratiques de la philosophie lui sont inférieures parce qu’elles s’en sont écartées. En suivant son analyse, on accepte implicitement l’idée que notre conception moderne de la philosophie est d’une certaine manière fautive par rapport à celle de l’Antiquité. Sommes-nous donc condamnés à ne voir l’histoire de la philosophie que comme celle d’une perte ? Ne faut-il pas plutôt s’interroger sur la conception proposée par P. Hadot et sur la valeur paradigmatique qui lui est attribuée ?
Deux problèmes comme clés de lecture
Pour ce faire, nous attirerons l’attention sur deux problèmes que pose, selon nous, une telle conception de la philosophie antique. Le premier nous ramène à nos remarques précédentes sur les raisons qui ont contribué à son succès. Nous indiquions que cette conception veut éviter tout anachronisme dans la mesure où elle refuse de chercher à comprendre la philosophie antique à partir de notre conception moderne. Pourtant, n’est-ce pas justement le refus de la forme qu’a empruntée la philosophie moderne et contemporaine qui porte P. Hadot à cette recherche du sens authentique de la philosophie antique ? C’est ce qui apparaît souvent dans ses différents textes. Ainsi, il se désole de ce qu’est devenue la philosophie au point de considérer comme « urgent de redécouvrir la notion antique du “philosophe”11 » et, dans un texte que nous avons déjà évoqué12, il indique que la conception qu’il se fait de la philosophie antique dépend en fait de la conception plus générale, et en même temps plus personnelle, de la philosophie qu’il a d’abord adoptée et qui est issue de l’influence conjuguée du bergsonisme et de l’existentialisme. Celle-ci a donc préexisté à ses recherches sur l’histoire et le sens de la philosophie, et la conception de la philosophie antique comme manière de vivre ne s’est peut-être pas imposée à lui aposteriori, comme une simple nécessité d’ordre méthodologique. Dans les entretiens qu’il a accordés à Jeannie Carlier et Arnold I. Davidson, il indique en effet que cette conception lui est venue de la volonté de surmonter certaines difficultés de lecture posées par les textes anciens, difficultés qui se dissipent dès lors qu’on conçoit la philosophie antique comme un ensemble d’exercices spirituels et comme une manière de vivre13. Mais on pourrait se demander s’il ne conviendrait pas d’inverser l’ordre des choses : n’est-ce pas parce que P. Hadot concevait la nécessité de penser la philosophie sous une forme nouvelle qu’il a cherché à en retrouver les fondements dans l’Antiquité ? En ce sens, il a peut-être bien interrogé la philosophie antique à partir d’une situation et d’un problème contemporains. L’analyse de la philosophie antique est donc indissociable d’un diagnostic et d’un jugement sur l’état actuel de la philosophie, et la position de Hadot relève elle-même, en ce sens, d’une position philosophique. On ne peut échapper au cercle interprétatif suivant : c’est toujours au nom d’une certaine conception de la philosophie, qui n’est pas toute la philosophie, que l’on questionne son histoire et que l’on prétend retrouver son sens originel et principiel. Il est donc impossible de revenir au sens même de la philosophie parce qu’il est impossible de se situer hors d’une orientation philosophique pour interroger le sens de la philosophie. Comme nous le montrerons, les analyses de P. Hadot ne sauraient échapper à cette difficulté.
Nous voulons également soulever un second problème, qui ne concerne plus les présupposés de la démarche de P. Hadot mais la méthode qu’il a adoptée pour la mener à bien. On peut en effet considérer que celle-ci est une méthode de type essentialiste, qui consiste, comme son nom l’indique, à chercher l’essence de la démarche philosophique, c’est-à-dire ce qui la définit en propre. Poser la question « qu’est-ce que la philosophie antique ? » (question qui donne son titre à l’un des ouvrages de P. Hadot), c’est privilégier les aspects communs à des pratiques pourtant différentes et à des périodes elles-mêmes différentes, afin de faire apparaître une seule et même conception de la philosophie. Une telle volonté s’explique notamment par le contexte que nous venons de rappeler : Hadot veut critiquer la conception contemporaine de la philosophie et pour cela, il lui faut procéder par distinction et opposition pour mieux mettre en valeur la conception spécifiquement antique. Cette méthode offre l’avantage de dégager certains aspects originaux de la philosophie ancienne, mais elle repose nécessairement sur une forme de généralisation et risque d’aboutir à une réduction du sens de la philosophie à l’une des formes qu’elle a empruntées à un moment de son histoire. En adoptant une approche de type essentialiste, c’est-à-dire en cherchant d’abord et surtout ce qu’est la philosophie, il n’est pas sûr que l’analyse de P. Hadot puisse complètement éviter ce risque.
C’est pourquoi il nous apparaît important d’ouvrir la voie à une autre approche, plus descriptive et pluraliste, qui cherche au contraire à manifester la variété des démarches philosophiques présentes dans l’Antiquité. Pour cela, une attention particulière doit être accordée aux textes anciens qui s’interrogeaient déjà sur le sens de la recherche philosophique : il faut se demander, par exemple, comment la philosophie était perçue par ceux-là mêmes qui la pratiquaient ou tout simplement s’en réclamaient, et en quel sens ils s’en réclamaient. Dans le travail qui va suivre, nous nous appuierons donc souvent sur l’historiographie ancienne de la philosophie (en particulier sur les analyses de Platon, d’Aristote, de Cicéron, ou de Diogène Laërce), parce qu’elle révèle la multiplicité des formes que la philosophie a pu revêtir comme la variété de ses pratiques, et permet ainsi d’échapper à toute forme de réduction du sens de la philosophie à l’une de ses définitions.
À la lumière des deux problèmes que nous venons de signaler, nous chercherons d’abord à restituer les analyses de P. Hadot en insistant sur l’orientation philosophique dont elles dépendent (et que Hadot lui-même nomme « existentielle »). Cette recherche fera principalement l’objet des deux premiers chapitres. Nous essaierons, dans les trois chapitres suivants, de rendre manifestes les limites auxquelles se heurte l’application d’une telle conception de la philosophie aux différents auteurs de l’Antiquité, tout en montrant que la philosophie antique a emprunté des voies multiples et que celles-ci résistent à toute tentative d’unification. À travers cette discussion critique, il ne s’agira donc pas seulement de contester le paradigme que l’on pourrait appeler spiritualiste, mais aussi d’insister sur la nécessité de savoir résister à l’emprise exercée par l’adoption d’un paradigme (de quelque nature qu’il soit). L’étude de la philosophie antique doit d’abord savoir rester attentive à son essentielle diversité.
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Sur ce point, voir S. Kuhn, La structure des révolutions scientifiques, Paris, Flammarion, 1972, p. 25-26.
Hadot, Exercices spirituels et philosophie antique, Paris, Études augusti- niennes, 1987 (2e éd. rev. et aug.), p. 9.
Qu’est-ce que la philosophie antique ?, Paris, Gallimard, Folio essais, 1996,
412. Nous soulignons.
Tsakas, « Les Essais de Montaigne, un “exercice spirituel” ? », Bulletin de la Société internationale des amis de Montaigne, 2019/1, no 69, p. 115-121.
Jeanmart, « Les exercices spirituels dans la philosophie de Nietzsche », Philosophique, no 7, 2007, p. 7-24. L’article s’appuie aussi sur des concepts empruntés à l’œuvre de M. Foucault (« pratiques de soi », « esthétique de l’existence », etc.).
Pavie, Exercices spirituels dans la phénoménologie de Husserl, Paris, L’Harmattan, 2009.
Hadot, Qu’est-ce que la philosophie antique ?, op. cit., p. 392 sq.
Voir Moreau et P. Taranto (dir.), Activités physiques et exercices spirituels. Essais de philosophie du sport, Paris, Vrin, 2008.
Greisch, Vivre en philosophant. Expérience philosophique, exercices spirituels et thérapies de l’âme, Paris, Hermann, 2015, p. 11. De même, G. Aubry fait remar- quer que la conception de la philosophie proposée par P. Hadot ne relève pas d’une démarche « antiphilosophique » (qui rejetterait tout discours et tout savoir philosophiques) mais d’une démarche « archiphilosophique », qui entend plutôt revenir aux sources de la philosophie, à ce qui en fait l’essence (l’origine et le principe en même temps). Voir sur ce point, G. Aubry, « La philosophie comme manière de vivre et l’antiphilosophie », dans A. I. Davidson et F. Worms (dir.), Pierre Hadot, l’enseignement des antiques, l’enseignement des modernes, Paris, Éditions rue d’Ulm, 2010, p. 94.
-F. Balaudé, « Rétroaction philosophique : Pierre Hadot, les anciens et les contemporains », dans A. I. Davidson et F. Worms (dir.), Pierre Hadot, l’enseignement des antiques, l’enseignement des modernes, op. cit., p. 37-46.
Hadot, Qu’est-ce que la philosophie antique ?, op. cit., p. 414.
Exercices spirituels et philosophie antique, cit., p. 9.
La philosophie comme manière de vivre. Entretiens avec Jeannie Carlier et Arnold I. Davidson, Paris, Librairie générale française, Le Livre de poche, 2003, p. 148. A. I. Davidson attire particulièrement l’attention sur la présentation méthodologique que fait P. Hadot de l’origine de sa conception de la philosophie ancienne. Voir A. I. Davidson et F. Worms, « Apprendre à lire, apprendre à vivre », dans PierreHadot, l’enseignement desantiques, l’enseignement desmodernes, op. cit., p. 9.
-1. Lesémotions, sous la direction de Sylvain Roux, Paris, Éditions Vrin (collection « Thema »), 2009.
-2.Homère et les philosophes. Actes du colloque international de Poitiers (20-22 mars 2019) sous la direction de Sylvain Roux, Paris, Éditions Hermann, 2020.
-3.Que peut-on enseigner de la vérité ? Ouvrage collectif sous la direction d’Emmanuel Nal (Mulhouse, LISEC, EA 2310, équipe Normes et Valeurs) et de Sylvain Roux (Poitiers, MAPP, EA 2626), Rennes, Presses universitaires de Rennes (coll. « Paideia »), 2023.
–4. « Athènes et Jérusalem face à la naissance de la philosophie ». Actes du colloque organisé en collaboration avec Philippe Grosos (Université de Poitiers) et Camille Riquier (Institut Catholique de Paris) à l’Institut Catholique de Paris) (7 et 8 décembre 2023). À paraître aux Presses Universitaires de Rennes, 2025.
Articles publiées dans des revues avec comités de lecture
-1. « Platon et l’origine de la tyrannie », Florentia Iliberritana, Revista de Estudios de Antigüedad Clásica (Universidad de Granada), 6, 1995, p. 433-443.
-2. « Aristote et Anaximandre, ou : comment faire l’histoire de la philosophie ? », L’Enseignement Philosophique, 4, Mars-Avril 1999, p. 5-26.
-3. « Entre mythe et tragédie : l’origine de la tyrannie selon Platon », Revue des Études Grecques, Tome 114, n° 2, 2001, p. 140-159.
-4. « Raison et bonheur selon Plotin : une lecture du traité 46 (I 4), 1-4 », Kairos, 25, 2005, p. 199-226.
-5. « La place du destin. Aspects d’un problème dans la pensée de Plotin », Revue des Études Anciennes, T. 113, 2011, n°2, p. 409-429.
-6. « Transcendance et relation. Plotin et l’antinomie du principe », ArchivesdePhilosophie, 75, 2012, p. 49-76.
-7. « Conscience et image. Plotin et le rôle de la phantasia », Chôra, Revue d’études anciennes et médiévales, 9-10, 2011-2012, p. 81-102.
-8. « Georges Bataille et la question de l’impersonnel. Une expérience néoplatonicienne ? », ArchivesdePhilosophie, 76, 2013, p. 407-423.
-9. « “Ἐπέκεινα τῆς οὐσίας” : une formule platonicienne chez Numénius et Alcinoos ? » Ktêma, 38, 2013, p. 363-373.
-10. « La théorie du Premier moteur : Plotin critique d’Aristote », Les Études platoniciennes, 10, 2013.
-11. « Foucault, Vernant et la question du sujet dans l’Antiquité. Réflexions sur un débat contemporain », Res Antiquae, 11, 2014, p. 189-202.
-12. « Rendre raison du corps : Plotin et le problème de la corporéité », Revue des Sciences Philosophiques et Théologiques, 100, 2016, p. 9-25.
-13. « Éthique et ipséité ; Aristote dans la pensée de Paul Ricœur », Philosophie, 132, 2016, p. 100-111.
-14. « Quel nom pour le Principe ? Un problème chez Plotin et Proclus », Chôra, Revue d’études anciennes et médiévales, 15-16, 2017-2018, p. 545-564.
-15. « Plotin et la liberté selon Bergson », Lo Sguardo, rivista di filosofia, « Bergson dal vivo », a cura di Federica Buongiorno, Rocco Ronchi, Caterina Zanfi, n°26-2018 (I), p. 117-130.
-16. « André Leroi-Gourhan et le devenir de l’homme. Regards d’un préhistorien », Regards croisés. Revue franco-allemande d’histoire de l’art et d’esthétique (Centre allemand d’histoire de l’art / DFK Paris, Humboldt-Universität zu Berlin, Paris 1-Sorbonne/ HiCSA), 2019.
Traduction allemande dans le même numéro : « André Leroi-Gourhan und die zukünftige Entwicklung des Menschen. Der Blick eines Vor- und Frühgeschichtlers ».
-17. « Georges Bataille et René Char : l’écriture et la question du monde », Studia Romanica et Anglica zagrabiensia, Revue publiée par les Sections romane, italienne et anglaise de la Faculté des Lettres de l’Université de Zagreb, vol. LXIV, 2019.
-18. « Is Levinas a Platonist ? », Studia Phaenomenologica, “Phenomenology and the History of Platonism”, guest Editors: Daniele De Santis & Claudio Majolino, vol. 20, 2020.
-19. « De l’Intellect à l’Un : la notion de συνυπόστασις chez Plotin », Chôra, Revue d’études anciennes et médiévales, 18-19, 2020-2021, p. 501-514.
–20. « Platon et la question du commencement : un modèle explicatif original », Théophilyon, Revue des Facultés Catholiques de Théologie et de Philosophie de Lyon, Tome XXVII – vol. 2, 2022, p. 239-256.
–21. « Fonction et ambiguïté de l’ekplexis dans la philosophie néoplatonicienne ». À paraître dans la revue Pallas, 2025.
–22. « L’interprétation plotinienne de Timée 39e et ses difficultés ». À paraître dans la revue Chôra, 2025.
–23. « L’aporétique du principe chez Plotin et Damascius : convergences ou différences ? », À paraître dans le volume « Les Platonismes de l’Antiquité tardive », Éditions E. J. Brill (série « Ancient Philosophy and Religion »), 2026.
Chapitres d’ouvrages collectifs :
-1. « Le statut du corps dans la philosophie platonicienne », in Le corps, sous la direction de J-C. Goddard, Paris, Vrin (Thema), 2005, p. 11-42.
-2. « Le Bien comme Principe : Aristote contre les platoniciens », Le Principe, sous la direction de B. Mabille, Paris, Vrin (Thema), 2006, p. 43-69.
-3. « Le manque et l’écart : la genèse du temps selon Plotin », Le temps, sous la direction de Alexander Schnell, Paris, Vrin (Thema), 2007, p. 35-59.
-4. « L’idée de conversion chez Plotin : remarques sur une difficulté », Métamorphose et conversion. Actes du colloque tenu à la Sorbonne les 21 et 22 mai 2005 (édités par Antoine Faivre), Cahier du Groupe d’Études Spirituelles Comparées 12, Paris, Archè Edidit, 2008, p. 9-33.
-5. « Affectivité et émotion selon Plotin », Les émotions, sous la direction de S. Roux, Paris, Vrin (Thema), 2009, p. 59-82.
-6. « L’ambiguïté néoplatonicienne : Bergson et la philosophie grecque dans le chapitre 4 de L’Évolution créatrice », dans Bergson, L’Évolution créatrice, Paris, Vrin (Études et commentaires), 2010, p. 285-305.
-7. « Pouvoir des élites et aristocratie dans la Politique d’Aristote », La cité et ses élites. Pratiques et représentations des formes de domination et de contrôle social dans les cités grecques. Textes réunis par L. Capdetrey et Y. Lafond, Bordeaux, Editions Ausonius, 2010, p. 49-68.
-8. « Les conditions de la meilleure constitution dans le livre VII des Politiques : Aristote critique de Platon », Les Politiques d’Aristote, Bordeaux, Presses Universitaires de Bordeaux (« Histoire des pensées »), 2011, p.139-154.
-9. « Maître et disciple dans la tradition platonicienne. L’exemple de Plotin », De l’un à l’autre. Regards comparatifs sur la transmission de maître à disciple, sous la direction d’A. Névot, Paris, Éditions du CNRS, 2013, p. 65-86.
-10. « “Témoigner du différend” : Lyotard, Plotin », L’invisibilité sociale. Approches critiques et anthropologiques, sous la direction d’Hubert Faes, Paris, L’Harmattan, 2013, p. 199-213.
-11. « Platonisme ou aristotélisme ? Matière et forme dans l’Esthétique transcendantale », Actes du colloque international De la sensibilité. Les esthétiques de Kant (29-03 avril 2010), sous la direction de F. Calori, M. Fœssel, D. Pradelle, Presses universitaires de Rennes, 2014, p. 23-35.
-12. « Le modèle de la lumière. Le platonisme en question (E. Levinas, M. Henry) », Ambivalences de la lumière, sous la direction de Charlotte Beaufort et de Marylène Lebrère, Pau, Presses de l’Université de Pau et des Pays de l’Adour (collection « Espaces Frontières Métissages »), 2016, p. 25-45.
–13. « Intellection et simplicité. La critique de Métaphysique, Lambda, 9 dans le traité 38 (VI 7) de Plotin », La réception de la théologie aristotélicienne. D’Aristote à Michel d’Ephèse, Louvain-La-Neuve, Peeters (collection « Aristote. Traductions et études), 2017, p. 185-205.
14. « Le principe est-il rythmique ? Le problème de l’usage du néoplatonisme dans la pensée de Bernard Mabille », Du principe à la liberté : hommage à Bernard Mabille, sous la direction de Gilles Marmasse et Alexandra Roux, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2017, p. 61-73.
-15. « Présence de la philosophie ancienne dans l’œuvre de Shakespeare ? Le cas du stoïcisme », Shakespeare au risque de la philosophie, sous la direction de Pascale Drouet et Philippe Grosos, Paris, Hermann, 2017, p. 11-31.
-16. « André Leroi-Gourhan et l’ethnologie comparée », L’ailleurs et l’avant. Comparatisme, ethnologie et préhistoire, J.-L. Georget, Ph. Grosos, R. Kuba (dir.), Paris, Cerf, 2019.
-17. « Ulysse et les tyrans. Sur le sens d’une figure homérique chez Platon », Homère et les philosophes, Actes du colloque international de Poitiers (20-22 mars 2019), sous la direction de Sylvain Roux, Paris, Hermann, 2020.
–18. « La Cité comme origine de la philosophie ? Retour sur une interprétation », Athènes et Jérusalem face à la naissance de la philosophie, sous la direction de Philippe Grosos, Camille Riquier et Sylvain Roux, à paraître aux Presses Universitaires de Rennes, 2025.
Articles de dictionnaires :
-1. « Philippe d’Oponte » (en collaboration avec Tiziano Dorandi), Dictionnaire des Philosophes Antiques, sous la direction de Richard Goulet, Tome V a, de Paccius à Ploutiadès de Tarse, Paris, CNRS Éditions, 2012, p. 294-301.
-2. « Platon. Études d’orientation », Dictionnaire des Philosophes Antiques, sous la direction de Richard Goulet, Tome V a, de Paccius à Ploutiadès de Tarse, Paris, CNRS Éditions, 2012, p. 619-622.
-3. Article « Philosophe », dans le Dictionnaire de l’homme grec antique, Sous la direction de Lydie Bodiou et Véronique Mehl. À paraître aux presses Universitaires de Rennes en 2025.
Traductions :
-1. Porphyre, Sur la manière dont l’embryon reçoit l’âme, travaux édités sous la responsabilité de L. Brisson, Paris, Librairie Philosophique J. Vrin (collection « Histoire des doctrines de l’Antiquité classique »), 2012, 383 p. Participation à la traduction collective et responsable des chapitres 17 et 18 du traité.
-2. Proclus, Éléments de théologie, à paraître à la Librairie Philosophique J. Vrin (collection « Histoire des doctrines de l’Antiquité classique »), Paris, 2025. Traduction des chapitres 25 à 39.
Articles de vulgarisation scientifique :
-1. « Quand Platon et Aristote refaisaient le monde », Le Nouvel Observateur, Hors-série « L’origine du monde », Janvier-Février 2011.
-2. « Le Banquet de Platon », Le banquet, de Marseille à Rome, plaisirs et jeux de pouvoir, catalogue de l’exposition présentée au Musée d’Archéologie méditerranéenne (Marseille, 3 décembre 2016-21 juin 2017), Paris, Éditions Lienart, 2016.
J’aime beaucoup ce livre. Tout philosophe se doit de le lire. Voici une enquête essentielle, à la fois très bien documentée, fine et facile à suivre. Elle questionne la conclusion du philosophe Pierre Hadot à l’effet que la philosophie est une manière de vivre. Sous le titre « La philosophie comme exercice spirituel ? – Un paradigme en question », le professeur de philosophie ancienne à l’université de Poitiers, Sylvain Roux, déterre les racines de la philosophie pour en montrer leur enchevêtrement.
Il est indéniable que P. Hadot a ainsi admirablement servi la cause de la philosophie, et de la philosophie antique en particulier, en la replaçant au centre des réflexions contemporaines et en lui redonnant une actualité qu’elle n’avait peut-être plus. Mais, ce faisant, il a accrédité l’idée que la philosophie antique avait un sens que nous avons perdu et a laissé penser que nos propres pratiques de la philosophie lui sont inférieures parce qu’elles s’en sont écartées. En suivant son analyse, on accepte implicitement l’idée que notre conception moderne de la philosophie est d’une certaine manière fautive par rapport à celle de l’Antiquité. Sommes-nous donc condamnés à ne voir l’histoire de la philosophie que comme celle d’une perte ? Ne faut-il pas plutôt s’interroger sur la conception proposée par P. Hadot et sur la valeur paradigmatique qui lui est attribuée ?
ROUX, Sylvain, La philosophie comme exercice spirituel ? – Un paradigme en question, Introduction, coll. Anagôgê, Société d’édition Les Belles Lettres, Paris, 2024, p.14.
En ne prenant pas pour acquise et définitive la conception proposée par Pierre Hadot, à savoir que la philosophie est une manière de vivre, et en nous invitant à la questionner, le professeur Sylvain Roux nous étonne et nous ouvre ainsi la porte à une saine réflexion.
(…) Mais on pourrait se demander s’il ne conviendrait pas d’inverser l’ordre des choses : n’est-ce pas parce que P. Hadot concevait la nécessité de penser la philosophie sous une forme nouvelle qu’il a cherché à en retrouver les fondements dans l’Antiquité ? En ce sens, il a peut-être bien interrogé la philosophie antique à partir d’une situation et d’un problème contemporains. L’analyse de la philosophie antique est donc indissociable d’un diagnostic et d’un jugement sur l’état actuel de la philosophie, et la position de Hadot relève elle-même, en ce sens, d’une position philosophique. On ne peut échapper au cercle interprétatif suivant : c’est toujours au nom d’une certaine conception de la philosophie, qui n’est pas toute la philosophie, que l’on questionne son histoire et que l’on prétend retrouver son sens originel et principiel. Il est donc impossible de revenir au sens même de la philosophie parce qu’il est impossible de se situer hors d’une orientation philosophique pour interroger le sens de la philosophie. Comme nous le montrerons, les analyses de P. Hadot ne sauraient échapper à cette difficulté.
ROUX, Sylvain, La philosophie comme exercice spirituel ? – Un paradigme en question, Introduction, coll. Anagôgê, Société d’édition Les Belles Lettres, Paris, 2024, p.15.
Sous l’influence du succès populaire de la thèse du philosophe Pierre Hadot, nous ne nous sommes pas réellement questionnés comme l’exige toute acte de philosophie. Le professeur Sylvain Roux plonge dans ce questionnement avec tact et une grande précision. Il soulève « Deux problèmes comme clés de lecture ».
Pour ce faire, nous attirerons l’attention sur deux problèmes que pose, selon nous, une telle conception de la philosophie antique. Le premier nous ramène à nos remarques précédentes sur les raisons qui ont contribué à son succès. Nous indiquions que cette conception veut éviter tout anachronisme dans la mesure où elle refuse de chercher à comprendre la philosophie antique à partir de notre conception moderne. Pourtant, n’est-ce pas justement le refus de la forme qu’a empruntée la philosophie moderne et contemporaine qui porte P. Hadot à cette recherche du sens authentique de la philosophie antique ?
ROUX, Sylvain, La philosophie comme exercice spirituel ? – Un paradigme en question, Introduction, coll. Anagôgê, Société d’édition Les Belles Lettres, Paris, 2024, p.14.
Nous voulons également soulever un second problème, qui ne concerne plus les présupposés de la démarche de P. Hadot mais la méthode qu’il a adoptée pour la mener à bien. On peut en effet considérer que celle-ci est une méthode de type essentialiste, qui consiste, comme son nom l’indique, à chercher l’essence de la démarche philosophique, c’est-à-dire ce qui la définit en propre. Poser la question « qu’est-ce que la philosophie antique ? » (question qui donne son titre à l’un des ouvrages de P. Hadot), c’est privilégier les aspects communs à des pratiques pourtant différentes et à des périodes elles-mêmes différentes, afin de faire apparaître une seule et même conception de la philosophie. Une telle volonté s’explique notamment par le contexte que nous venons de rappeler : Hadot veut critiquer la conception contemporaine de la philosophie et pour cela, il lui faut procéder par distinction et opposition pour mieux mettre en valeur la conception spécifiquement antique. Cette méthode offre l’avantage de dégager certains aspects originaux de la philosophie ancienne, mais elle repose nécessairement sur une forme de généralisation et risque d’aboutir à une réduction du sens de la philosophie à l’une des formes qu’elle a empruntées à un moment de son histoire. En adoptant une approche de type essentialiste, c’est-à-dire en cherchant d’abord et surtout ce qu’est la philosophie, il n’est pas sûr que l’analyse de P. Hadot puisse complètement éviter ce risque.
ROUX, Sylvain, La philosophie comme exercice spirituel ? – Un paradigme en question, Introduction, coll. Anagôgê, Société d’édition Les Belles Lettres, Paris, 2024, pp. 15-16.
Il ne s’agit pas de déterminer si le philosophe Pierre Hadot a ou non raison de soutenir la thèse à l’effet que la philosophie est une manière de vivre ou de considérer la philosophe comme exercice spirituel. Nous pouvons accepter que la philosophie soit une manière de vivre mais, à la lumière de ce livre du professeur Sylvain Roux, nous ne pouvons plus accepter de définir la philosophie exclusivement comme une manière de vivre.
C’est pourquoi il nous apparaît important d’ouvrir la voie à une autre approche, plus descriptive et pluraliste, qui cherche au contraire à manifester la variété des démarches philosophiques présentes dans l’Antiquité. Pour cela, une attention particulière doit être accordée aux textes anciens qui s’interrogeaient déjà sur le sens de la recherche philosophique : il faut se demander, par exemple, comment la philosophie était perçue par ceux-là mêmes qui la pratiquaient ou tout simplement s’en réclamaient, et en quel sens ils s’en réclamaient. Dans le travail qui va suivre, nous nous appuierons donc souvent sur l’historiographie ancienne de la philosophie (en particulier sur les analyses de Platon, d’Aristote, de Cicéron, ou de Diogène Laërce), parce qu’elle révèle la multiplicité des formes que la philosophie a pu revêtir comme la variété de ses pratiques, et permet ainsi d’échapper à toute forme de réduction du sens de la philosophie à l’une de ses définitions.
À la lumière des deux problèmes que nous venons de signaler, nous chercherons d’abord à restituer les analyses de P. Hadot en insistant sur l’orientation philosophique dont elles dépendent (et que Hadot lui-même nomme « existentielle »). Cette recherche fera principalement l’objet des deux premiers chapitres. Nous essaierons, dans les trois chapitres suivants, de rendre manifestes les limites auxquelles se heurte l’application d’une telle conception de la philosophie aux différents auteurs de l’Antiquité, tout en montrant que la philosophie antique a emprunté des voies multiples et que celles-ci résistent à toute tentative d’unification. À travers cette discussion critique, il ne s’agira donc pas seulement de contester le paradigme que l’on pourrait appeler spiritualiste, mais aussi d’insister sur la nécessité de savoir résister à l’emprise exercée par l’adoption d’un paradigme (de quelque nature qu’il soit). L’étude de la philosophie antique doit d’abord savoir rester attentive à son essentielle diversité.
ROUX, Sylvain, La philosophie comme exercice spirituel ? – Un paradigme en question, Introduction, coll. Anagôgê, Société d’édition Les Belles Lettres, Paris, 2024, pp. 16-17.
« Diversité », c’est le mot clé dont se servira le professeur Sylvain Roux pour opposer la multitude des conceptions et des approches de la philosophie antique à l’unicité de la théorie de Pierre Hadot. On ne peut pas déduire que la philosophie mise de l’avant comme une manière de vivre par tous les philosophes de l’Antiquité. Le contexte même de l’Antiquité ne se prête pas à une telle affirmation. Il y a et il y aura toujours des théories et la fin de ces théories n’est pas toujours pratique ou affairant à une manière de vivre.
Une première extrapolation : la théorie et la pratique
Deux conceptions des exercices spirituels sont en effet possibles. La première consisterait à la considérer comme une partie, plu ou moins importante, de la philosophie. Dans ce cas, ils se distingueraient de l’activité philosophique elle-même, tout en ayant pour but d’y préparer ou d’en conforter la pratique. Les exercices spirituels ne seraient alors qu’un auxiliaire, certes important, mais secondaire tout de même par rapport à la démarche philosophique en tant que telle. La seconde conception du statut de ces exercices opérerait une renversement complet de perspective puisqu’elle les considérerait comme le tout de la philosophie. Dès lors, ils n’auraient plus simplement un rôle propédeutique ou pratique, mais ils seraient la philosophie elle-même. Or, c’est bien cette dernière conception que se propose de défendre P. Hadot. Un passage extrait d’un article que nous avons déjà cité en apporte la confirmation :
La vraie philosophie est donc, dans l’Antiquité, exercice spirituel. Les théories philosophiques sont ou bien mises explicitement au service de la pratique spirituelle, comme c’est le cas dans le stoïcisme et l’épicurisme, ou bien prises comme objets d’exercices intellectuels, c’est-à-dire d’une pratique de la vie contemplative qui n’est elle-même rien d’autre qu’un exercice spirituel. Il n’est donc pas possible de comprendre les théories philosophiques de l’Antiquité sans tenir compte de cette perspective concrète qui leur donne leur véritable signification(23).
La défense de ce que nous avons désigné comme la seconde conception du statut des exercices spirituels s’appuie ici sur deux arguments. Le premier consiste à inverser le rapport établi traditionnellement entre théorie et pratique. La philosophie comporte bien, dans tous les courants de pensée qui s’en réclament, une dimension théorique à travers laquelle elle cherche à comprendre le monde sous ses différents aspects, et la distinction entre pratique et théorie trouve en partie sa source chez les philosophes eux-mêmes. Ainsi Aristote distingue-t-il différentes branches de la philosophie. L’une d’elles, la partie théorétique, consiste selon lui en une étude purement désintéressée des types de réalités qui comprend l’ensemble du Réel(24). Elle s’oppose à la partie pratique, constituée notamment de l’éthique et de la politique. (…)
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(23) Voir l’article « Exercices spirituels », dans P. Hadot, Exercices spirituels et philosophie antique, Paris, Études augustiniennes, 1987 (2ème éd. revue. et augmentée.), p. 51.
(24) Pour cette classification des sciences, vois notamment Aristote, Métaphysique, E, 1. 1025 b 25 sq. et K, 7, 1064 a 10 sq, L’activité théorétique est présentée comme une activité désintéressée, ayant donc sa fin en elle-même, dans l’Éthique à Nicomaque, X, 7, 1177 b 1-4.
ROUX, Sylvain, La philosophie comme exercice spirituel ? – Un paradigme en question, 1. Pierre Hadot et le problème des exercices spirituels, coll. Anagôgê, Société d’édition Les Belles Lettres, Paris, 2024, pp. 32-33.
J’ai lu le livre « La philosophie comme manière de vivre » de Pierre Hadot (Entretiens avec Jeanne Cartier et Arnold I Davidson, Le livre de poche – Biblio essais, Albin Michel, 2001) et j’ai fait mon rapport de lecture. J’ai accordé à ce livre de Pierre Hadot 2½ étoiles sur 5. Bref, si je n’avais pas de problème avec la philosophie comme manière de vivre ou, plus précisément, comme influenceur de la manière de vivre, j’en ai questionné sérieusement l’argumentaire selon ma propre expérience de vie.
À la lecture du livre du professeur Sylvain Roux, notamment de la citation d’un article se rapportant à Pierre Hadot (ci-dessus), je me rends à l’évidence que Pierre Hadot ne propose pas la philosophie comme manière de vivre mais veut plutôt l’imposer comme on défend un dogme. Pierre Hadot croit en ce qu’il avance, c’est-à-dire qu’à ses yeux il exprime une vérité. Il fait donc d’une interprétation une vérité, ce qui ne cadre pas du tout avec ma propre conception de la philosophie qui doit prendre ses distances de toutes croyances.
Le professeur Sylvain Roux dans son livre « La philosophie antique comme exercice spirituels ? » démontre clairement que la philosophie a des racines historiques au-delà de celle de Socrate, contrairement à ce que prétend Pierre Hadot, à savoir que tout a commencé avec Socrate.
La philosophie selon Socrate : une rupture
De quelle manière P. Hadot montre-t-il que Socrate, par ses attitudes et par le dialogue, en vient à rompre avec cette conception dont nous venons de voir qu’elle prévalait jusqu’alors ?
Notons-le pour commencer, P. Hadot n’ignore rien, bien sûr, de sens premier du terme « philosophie » (ou des termes dérivés et apparentés) puisqu’il présente et analyse les textes auxquels nous avons précédemment fait allusion pour rappeler les origines de la notion de philosophie. Mais, selon lui, par sa pratique originale, Socrate est celui qui va inspirer à Platon et à tous ses successeurs le sens qu’ils reconnaîtront à la philosophie, en la dégageant du sens premier attaché à la notion (12). Cela suppose de considérer que le sens socratique ou, du moins, le sens qui provient de la pratique socratique, est bien le sens fondamental de la philosophie. Comme si, avec Socrate, celle-ci trouvait progressivement la forme qui sera définitivement la sienne. Une telle conception comme nous allons le voir, ne va pas de soi, notamment parce que certains témoignages de l’Antiquité donnent à voir une réalité en partie différente.
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(12) Socrate, selon P. Hadot, connaissait probablement ce sens premier du terme « philosophie » comme « culture générale que les sophistes et d’autres pouvaient dispenser à leurs élèves ». Il s’y référait peut-être encore avant que Platon n’expose le sens nouveau issu du modèle de vie qu’il lui a inspiré. Voir Qu’est ce que la philosophie antique ?, Paris, Gallimard, coll. Folio essais, 1996, p. 70.
ROUX, Sylvain, La philosophie comme exercice spirituel ? – Un paradigme en question, II. Socrate : une conception existentielle de la philosophie ?, coll. Anagôgê, Société d’édition Les Belles Lettres, Paris, 2024, p. 48.
Puis-je interpréter l’approche de Pierre Hadot comme une « perversion » de l’origine de la notion de philosophie, comme si tout avait commencé avec Socrate, comme si seul Socrate était digne d’être dit le premier vrai philosophe ? Le professeur Sylvain Roux démontre que la notion de philosophie apparaissait chez les présocratiques et, par conséquent, que Socrate n’est pas la source originale de la philosophie et encore moins en rupture avec le passé.
(…) Considérer que la philosophie a pris avec Socrate un tour nouveau, absolument révolutionnaire, c’est donc se heurter à un élément surprenant : seuls ses disciples semblent l’avoir perçu. Pour ceux qui ne l’étaient pas, c’est plutôt une certaine continuité qui prévalait à leurs yeux. On peut donc se demander si ce ne sont pas les disciples de Socrate qui ont construit cette image d’un homme qui rompt totalement avec les pratiques de son temps. L’interprétation de P. Hadot en est en grande partie dépendante et elle a plutôt tendance à gommer, selon nous, l’ambiguïté des témoignages qui nous sont parvenus.
ROUX, Sylvain, La philosophie comme exercice spirituel ? – Un paradigme en question, II. Socrate : une conception existentielle de la philosophie ?, coll. Anagôgê, Société d’édition Les Belles Lettres, Paris, 2024, p. 54.
En conclusion, on voit que les témoignages relatifs à Socrate ne permettent pas d’en dresser un portrait uniforme et sans ambiguïté. Certains d’entre eux manifestent bien son intérêt pour l’étude des phénomènes naturels, comme sa volonté de parvenir au vrai et de posséder un savoir qui puisse s’enseigner. En ce sens, ces différents aspects dessinent un personnage qui présente des éléments de continuité avec ses prédécesseurs et ses contemporains.
ROUX, Sylvain, La philosophie comme exercice spirituel ? – Un paradigme en question, II. Socrate : une conception existentielle de la philosophie ?, coll. Anagôgê, Société d’édition Les Belles Lettres, Paris, 2024, p. 56.
Socrate en sait davantage qu’il ne l’affirme, et ce, en relation avec le passé de la philosophie. Le « Je sais que je ne sais rien » fait davantage référence à l’incapacité de Socrate à maîtriser la connaissance des phénomènes naturels à sa satisfaction. Pour autant, Socrate affiche tout même un savoir éthique, notamment ce qui est juste et ce qui ne l’est pas.
Le sens du souci de soi
L’interprétation de P. Hadot ne s’appuie pas que sur ces témoignages. Comme on l’a vu, la démarche socratique repose sur la reconnaissance de sa propre ignorance. Mais, ce qui est le plus important pour P. Hadot, c’est qu’elle ne débouche pas pour autant sur la recherche d’un nouveau savoir mais bien plutôt sur la pratique du souci de soi et sur une nouvelle manière d’être. En indiquant clairement vouloir privilégier ce qu’il appelle le souci de soi. Socrate revendiquerait une forme de refus du savoir au bénéfice d’une dimension purement éthique de la philosophie. La rupture serait alors radicale par rapport à ses prédécesseurs puisque la fin de la démarche philosophique serait désormais « existentielle ». (…)
ROUX, Sylvain, La philosophie comme exercice spirituel ? – Un paradigme en question, II. Socrate : une conception existentielle de la philosophie ?, coll. Anagôgê, Société d’édition Les Belles Lettres, Paris, 2024, p. 56.
Se référant au dialogue platonicien l’Alcibiade majeur, le professeur Sylvain Roux nous informe de ce « soi » :
(…) Le soi dont il est question ici n’est pas encore exactement l’âme dont parlera la seconde partie du dialogue (c’est-à-dire une entité métaphysique particulière). Le terme renvoie plutôt ici à l’ensemble des qualités acquises qui constituent la personnalité et à l’ensemble des savoirs, des compétences qu’un individu possède. Ajoutons par ailleurs qu’un tel projet n’a pas nécessairement une dimension éthique. Ce que Socrate signale à Alcibiade, c’est que, s’il veut réussir et atteindre l’objectif qu’il s’est fixé, il doit se soucier de lui-même. Socrate ne se demande pas ici si cet objectif est en lui-même acceptable et justifiable, alors qu’on pourrait estimer, par exemple, que son projet de toute puissance relève d’une forme de démesure (ὕβρις).
ROUX, Sylvain, La philosophie comme exercice spirituel ? – Un paradigme en question, II. Socrate : une conception existentielle de la philosophie ?, coll. Anagôgê, Société d’édition Les Belles Lettres, Paris, 2024, p. 59.
(…) Or, comme nous l’indiquions précédemment, les analyses de P. Hadot tendent à montrer que la démarche socratique est essentiellement « existentielle », au sens où elle provoque, chez l’interlocuteur, une profonde remise en question qui doit le conduire à adopter un nouveau mode de vie. La souci de soi vise une réforme morale de l’individu. Pourtant, dans la première partie de l’Alcibiade, Socrate n’invite pas Alcibiade à changer de vie, à se réformer, mais seulement à cherche à acquérir les compétences qui lui manquent pour réaliser son projet, ou, tout du moins, pour s’en donner les moyens. Il l’appelle ainsi à appliquer tous ses soins à lui-même pour améliorer son état, c’est-à-dire à faire preuve d’une qualité qui n’est pas à proprement parler une qualité philosophique mais une aptitude des Grecs en général, par laquelle ils se distinguent des barbares (48).
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(48) Voir Platon, Œuvres complètes, t. I : Introduction, Hippias mineur, Alcibiade, Apologie de Socrate, Euthyphron, Criton, trad. M. Croiset, Paris, Les Belles Lettres, coll. des universités de France, 1920 (trad. M. Croiset modifiée). 123 d 2-5.
ROUX, Sylvain, La philosophie comme exercice spirituel ? – Un paradigme en question, II. Socrate : une conception existentielle de la philosophie ?, coll. Anagôgê, Société d’édition Les Belles Lettres, Paris, 2024, pp. 59-60.
Est-il besoin d’adopter un nouveau style de vie pour contrer son ignorance ? Personnellement, lorsque je prends conscience de mon ignorance, je ne change pas de manière de vivre. Je cherche plutôt à savoir ce que je ne sais pas, à mettre à l’épreuve ma capacité de comprendre ce que je trouverai. Je ne suis pas automatiquement un ignorant qui s’ignore. Ce n’est que si je prends pour vrai ce que je pense uniquement parce que je le pense, dans ce cas, je suis ignorant car je ne doute pas de ce que je pense.
EN COMPLÉMENT – ARTICLE DE REVUE TIRÉ DE
L’Enseignement philosophique
La figure de Socrate chez Pierre Hadot : motifs kierkegaardiens
Par Vincent Delecroix
Le sens d’un retour à Socrate
Si l’on veut comprendre l’enjeu de la figure de Socrate chez Hadot – c’est-à-dire d’abord pourquoi il est question d’une figure – il faut s’interroger sur la signification, à la fois historique et conceptuelle, de ce geste récurrent de la philosophie qui consiste à « revenir » à Socrate pour se comprendre elle-même. C’est Hadot lui-même qui nous y incite.
Dans « Éloge de Socrate » [1], en effet, Hadot ne cherche pas retrouver le « vrai » Socrate, mais à déceler l’usage de sa figure dans ses reprises successives et à rendre raison de sa construction. Si ce n’est pas Socrate qui l’intéresse, mais bien la figure de Socrate et sa signification dans l’histoire de la philosophie [2], il nous invite à comprendre le sens philosophique de ce geste qui consiste à invoquer Socrate tout autant qu’à l’évoquer, et à faire jouer sa figure dans (ou peut-être contre) l’histoire de la philosophie. Geste de rappel et injonction, paradoxal en ce sens qu’il est à la fois ce qui voudrait établir une continuité entre l’origine et les développements de la philosophie et ce qui brise cette continuité, en faisant jouer l’origine contre une histoire qui se caractériserait comme un oubli de Socrate, c’est-à-dire d’abord, selon les catégories de Hadot, contre la philosophie conçue comme simple « discours philosophique » recouvrant le philosopher comme « manière de vivre ».
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[1] La figure de Socrate est traitée par P. Hadot dans deux grands textes, qui portent le même titre mais ont un contenu différent. D’un côté dans Qu’est-ce que la philosophie antique ? Paris, Gallimard (Coll. : Folio Essais), 1995. De l’autre, il y a le texte repris dans Exercices spirituels et philosophie antique, sous le titre de « Figure de Socrate » également, mais qui reproduit le texte d’une conférence donnée à Ascona en 1974 sous le titre de « Éloge de Socrate » et publiée la même année dans la revue Eranos. C’est sous ce dernier titre d’ailleurs qu’il est paru séparément aux éditions Allia. La fusion entre la description de la figure et son éloge est évidemment un signe.
[2] Cf. P. Hadot, Exercices spirituels et philosophie antique, Paris, Albin Michel, 2002, p. 102 : « Je ne cherche pas ici à retrouver, à reconstituer ce Socrate historique. Ce que je vais essayer de vous présenter maintenant.
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Source : Delecroix, V. (2013). La figure de Socrate chez Pierre Hadot : motifs kierkegaardiens. L’Enseignement philosophique, 63e Année(1), 36-47. https://doi.org/10.3917/eph.631.0036.
Je pourrais poursuivre citation après citation du livre « La philosophie antique comme exercice spirituels ? – Un paradigme en question » du professeur Sylvain Roux et ainsi alimenter davantage mon rapport de lecture mais ce serait gâcher la découverte de cette œuvre tant étonnante qu’originale. En voici donc une toute dernière.
Le conception de la philosophie ancienne que propose P. Hadot repose sur un refus. En effet, à une conception qu’il présente essentiellement moderne, et qui a réduit la philosophie à un discours théorique sur le monde, il oppose une autre conception, selon laquelle celle-ci ne fut pas d’abord ni seulement un discours et une étude mais avant tout une pratique (consistant à se transformer soi-même). Cette nouvelle conception ne vise pas simplement à réhabiliter la dimension pratique pour lui redonner une place à côté de la dimension théorique, mais à opérer un véritable renversement de perspective : désormais, la philosophie se ramène intégralement à sa dimension pratique puisque le discours théorique n’est lui-même qu’une modalité de la pratique dans la mesure où il prend la forme d’exercices spirituels qui doivent contribuer à une nouvelle manière d’être du sujet. L’objectif de P. Hadot est donc de remettre en cause le partage entre théorie et pratique au nom duquel une certaine conception de la philosophie est devenue, selon lui, dominante. Il le fait en soulignant, comme nous l’avons vu, le rôle essentiel de Socrate dans l’émergence de la conception originelle de la philosophie (comme manière de vivre).
ROUX, Sylvain, La philosophie comme exercice spirituel ? – Un paradigme en question, Conclusion – Les voies de la philosophie, coll. Anagôgê, Société d’édition Les Belles Lettres, Paris, 2024, pp. 59-60.
Si la philosophie converge dans une manière de vivre, il faut alors mettre en perspective la vie même des philosophes, ce que Oreste Saint-Drôme a fait dans son livre « Comment choisir son philosophe – Guide de première urgence à l’usage des angoissé métaphysiques » (lire ma rapport de lecture).
Orestre Saint-Drôme nous propose « la voie des affinités électives » pour « Étudier in extenso la pensée des grands théoriciens et en extraire un mode de réflexion agissant ». Cette voie « passe par la rencontre avec la vie et la personnalité du philosophe ». J’ai mentionné en introduction à cet article, trouver un philosophe ayant vécu ou vivant en harmonie avec sa philosophie s’avère difficile, du moins, selon les mini-biographies proposées par Oreste Saint-Drôme dans son livre. Je me suis donc rabattue sur la seconde voie :« L’autre accès consiste à choisir préalablement sa question et à trouver la réponse la plus adéquate dans l’œuvre du philosophe le plus approprié ». On trouve ce tableau dans à la fin du livre :
Dans l’Antiquité, vous auriez utilisé comme médicament une théorie plus ou moins diluée ou une combinaison de plusieurs doctrines. Aujourd’hui, le choix est encore plus vaste pour entreprendre une mono ou une plurithérapie. C’est cette pharmacopée – ancienne et moderne – que nous vous présentons dans le tableau suivant.
Source : Saint-Drôme, Oreste, Comment choisir son philosophe ?, Paris, Éditions La Découverte, 2000, p. 197.
Toutes les théories philosophiques ne se conçoivent pas dans le but d’être mise en pratique dans une manière de vivre. Dans le bonheur de vivre vient en amont le bonheur de penser. Mener un vie vertueuse, éthiquement correct, c’est bien, même très bien, même si l’objectif ne sera jamais atteint. « Je tends vers… », « Je m’efforce de… ».
Mais ce que j’aime le plus de la philosophie, c’est qu’elle me donne à penser et plus un ouvrage me donne à penser, plus il gagne en nombre d’étoiles.
J’accorde cinq étoiles sur cinq
au livre La philosophie comme exercice spirituel ? – Un paradigme en question
de SYLVAIN ROUX
paru en 2024 à la Société d’édition Les Belles Lettres.
Témoignage de ma recherche personnelle au sujet de la philothérapie (philosophie + thérapie) ou, si vous préférez, de la pratique de la philosophie en clinique. Il s’agit de consultation individuel ou de groupe offert par un philosophe praticien pour nous venir en aide. Elle se distingue de la « psychothérapie » (psychologie + thérapie) en ce qu’elle utilise des ressources et des procédés et poursuit de objectifs propres à la philosophie. On peut aussi parler de « philosophie appliquée ».
La philothérapie gagne lentement mais sûrement en popularité grâce à des publications de plus en plus accessibles au grand public (voir l’Introduction de ce dossier).
L’un des titres tout en haut de la liste s’intitule « Platon, pas Prozac! » signé par Lou Marinoff paru en français en l’an 2000 aux Éditions Logiques. Ce livre m’a ouvert à la philothérapie.
L’auteur est professeur de philosophie au City College de New York, fondateur de l’Association américaine des praticiens de la philosophie (American Philosophical Practitioners Association) et auteurs de plusieurs livres.
Présentation du livre Sur le divan d’un philosophe – La consultation philosophie : une nouvelle démarche pour se connaître, changer de perspective, repenser sa vie suivie de mes commentaires de lecture.
Cet article présente et relate ma lecture du livre « Philosopher pour se retrouver – La pratique de la philo pour devenir libre et oser être vrai », de Laurence Bouchet aux Éditions Marabout. Malheureusement ce livre n’est plus disponible à la vente tel que mentionné sur le site web de l’éditeur. Heureusement on peut encore le trouver et l’acheter dans différentes librairies en ligne.
Le livre « La consultation philosophique – L’art d’éclairer l’existence » de Madame Eugénie Vegleris aux Éditions Eyrolles se classe en tête de ma liste des meilleurs essais que j’ai lu à ce jour au sujet de la « philothérapie ».
À ce jour, tous les livres dont j’ai fait rapport de ma lecture dans ce dossier sont l’œuvre de philosophes consultants témoignant de leurs pratiques fondées sur le dialogue. Le livre « Guérir la vie par la philosophie » de Laurence Devillairs aux Presses universitaires de France (PUF) diffère des précédents parce que l’auteure offre à ses lecteurs une aide direct à la réflexion sur différents thèmes.
J’ai lu ce livre à reculons. J’ai appliqué les feins dès les premières pages. L’objectivité sociologique de l’auteur m’a déplu. Ce livre présente aux lecteurs des observations, que des observations. L’auteur n’en tire aucune conclusion.
J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq parce qu’il m’a révélé les coulisses de la quête du bonheur au cœur de notre société néo-libérale. Je savais que cette obsession du bonheur circulait au sein de la population, notamment par le biais des coach de vie et des agents de développement personnel, mais je n’aurais jamais imaginé qu’elle cachait une véritable industrie soutenue par une idéologie psychologisante. Jusque-là, je ne connaissais de cette industrie que le commerce des livres et la montée en puissance des coachs de vie dédiés à la recherche du bonheur.
J’ai adoré ce livre. Il est dense, très dense. On ne peut pas le lire comme un roman. Me voici enfin devant un auteur qui dit tout, où, quand, comment il observe, comment il pense, comment il chemine, comment il voit, comment il entend, comment il anticipe, comment il tire ses conclusions… Bref, un auteur qui expose son propre système de pensée dans un essai plus que formateur pour le nôtre.
La lecture du livre «La consultation philosophique» signé par le philosophe praticien Oscar Brenifier (voir article #11 de notre dossier «Consulter un philosophe – Quand la philosophie nous aide») nous apprend qu’il adresse un document à ses clients potentiels. J’ai écrit à monsieur Brenifier pour lui demander s’il pouvait me faire parvenir ce document.
Cet article présente et relate ma lecture du livre du «La philo-thérapie» de Éric Suárez, Docteur en philosophie de l’Université Laval (Québec), philosophe praticien (Lausanne), publié en 2007 aux Éditions Eyrolles. Ce livre traite de la consultation philosophique ou, si vous préférez, de la philo-thérapie, d’un point de vue pratique. En fait, il s’agit d’un guide pour le lecteur intéressé à acquérir sa propre approche du philosopher pour son bénéfice personnel. Éric Suárez rassemble dans son ouvrage vingt exemples de consultation philosophiques regroupés sous cinq grands thèmes : L’amour, L’image de soi, La famille, Le travail et le Deuil.
Ce livre se caractérise par l’humour de son auteur et se révèle ainsi très aisé à lire. D’ailleurs l’éditeur nous prédispose au caractère divertissant de ce livre en quatrième de couverture : «Étudier in extenso la pensée des grands théoriciens et en extraire un mode de réflexion agissant est une mission impossible pour l’honnête homme/femme. C’est pourquoi l’auteur de cet ouvrage aussi divertissant que sérieux propose des voies surprenantes au premier abord, mais qui se révèlent fort praticables à l’usage. L’une passe par la rencontre avec la vie et la personnalité du philosophe : la voie des affinités électives».
Référencé par un auteur à mon programme de lecture, le livre «La philosophie comme manière de vivre» m’a paru important à lire. Avec un titre aussi accrocheur, je me devais de pousser plus loin ma curiosité. Je ne connaissais pas l’auteur Pierre Hadot : «Pierre Hadot (né à Paris, le 21 février 1922, et mort à Orsay, le 24 avril 20101) est un philosophe, historien et philologue français, spécialiste de l’Antiquité, profond connaisseur de la période hellénistique et en particulier du néoplatonisme et de Plotin. Pierre Hadot est l’auteur d’une œuvre développée notamment autour de la notion d’exercice spirituel et de la philosophie comme manière de vivre.» (Source : Wikipédia)
Jeanne Hersch, éminente philosophe genevoise, constate une autre rupture encore, celle entre le langage et la réalité : « Par-delà l’expression verbale, il n’y a pas de réalité et, par conséquent, les problèmes ont cessé de se poser (…). Dans notre société occidentale, l’homme cultivé vit la plus grande partie de sa vie dans le langage. Le résultat est qu’il prend l’expression par le langage pour la vie même. » (L’étonnement philosophique, Jeanne Hersch, Éd. Gallimard.) / On comprend par là qu’aujourd’hui l’exercice du langage se suffit à lui-même et que, par conséquent, la philosophie se soit déconnectée des problèmes de la vie quotidienne.» Source : La philosophie, un art de vivre, Collectif sous la direction de Jean-François Buisson, Les Éditions Cabédita, 2021, Préface, p. 9.
J’ai trouvé mon bonheur dès l’Avant-propos de ce livre : «Laura Candiotto, en insistant sur le rôle joué par les émotions dans le dialogue socratique ancien et sur l’horizon éthique de celui-ci, vise à justifier théoriquement un «dialogue socratique intégral», c’est-à-dire une pratique du dialogue socratique qui prend en compte des émotions pour la connaissance.» Enfin, ai-je pensé, il ne s’agit plus de réprimer les émotions au profit de la raison mais de les respecter dans la pratique du dialogue socratique. Wow ! Je suis réconforté à la suite de ma lecture et de mon expérience avec Oscar Brenifier dont j’ai témoigné dans les articles 11 et 12 de ce dossier.
Lou Marinoff occupe le devant de la scène mondiale de la consultation philosophique depuis la parution de son livre PLATON, PAS PROJAC! en 1999 et devenu presque’intantément un succès de vente. Je l’ai lu dès sa publication avec beaucoup d’intérêt. Ce livre a marqué un tournant dans mon rapport à la philosophie. Aujourd’hui traduit en 27 langues, ce livre est devenu la bible du conseil philosophique partout sur la planète. Le livre dont nous parlons dans cet article, « La philosophie, c’est la vie – Réponses aux grandes et aux petites questions de l’existence », est l’une des 13 traductions du titre original « The Big Questions – How Philosophy Can Change Your Life » paru en 2003.
J’ai acheté et lu « S’aider soi-même » de Lucien Auger parce qu’il fait appel à la raison : « Une psychothérapie par la raison ». Les lecteurs des articles de ce dossier savent que je priorise d’abord et avant tout la philothérapie en place et lieu de la psychothérapie. Mais cette affiliation à la raison dans un livre de psychothérapie m’a intrigué. D’emblée, je me suis dit que la psychologie tentait ici une récupération d’un sujet normalement associé à la philosophie. J’ai accepté le compromis sur la base du statut de l’auteur : « Philosophe, psychologue et professeur ». « Il est également titulaire de deux doctorats, l’un en philosophie et l’autre en psychologie » précise Wikipédia. Lucien Auger était un adepte de la psychothérapie émotivo-rationnelle créée par le Dr Albert Ellis, psychologue américain. Cette méthode trouve son origine chez les stoïciens dans l’antiquité.
J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq et je peux même en rajouter une de plus, une sixième, pour souligner son importance et sa pertinence. Il faut le lire absolument ! Je le recommande à tous car il nous faut tous sortir de ce monde où l’opinion règne en roi et maître sur nos pensées.
Dans la première partie de ce rapport de lecture du livre « Penser par soi-même – Initiation à la philosophie » de Michel Tozzi, je vous recommandais fortement la lecture de ce livre : « J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq et je peux même en rajouter une de plus, une sixième, pour souligner son importance et sa pertinence. Il faut le lire absolument ! Je le recommande à tous car il nous faut tous sortir de ce monde où l’opinion règne en roi et maître sur nos pensées.» Je suis dans l’obligation d’ajouter cette deuxième partie à mon rapport de lecture de ce livre en raison de ma relecture des chapitres 6 et suivants en raison de quelques affirmations de l’auteur en contradiction avec ma conception de la philosophie.
J’accorde au livre Agir et penser comme Nietzsche de Nathanaël Masselot cinq étoiles sur cinq. Aussi facile à lire qu’à comprendre, ce livre offre aux lecteurs une excellente vulgarisation de la philosophie de Friedricha Wilhelm Nietzsche. On ne peut pas passer sous silence l’originalité et la créativité de l’auteur dans son invitation à parcourir son œuvre en traçant notre propre chemin suivant les thèmes qui nous interpellent.
Tout commence avec une entrevue de Myriam Revault d’Allonnes au sujet de son livre LA FAIBLESSE DU VRAI à l’antenne de la radio et Radio-Canada dans le cadre de l’émission Plus on de fous, plus on lit. Frappé par le titre du livre, j’oublierai le propos de l’auteur pour en faire la commande à mon libraire.
Le développement personnel fourmille de personnes de tout acabit qui se sont improvisées conseillers, coachs, thérapeutes, conférenciers, essayistes, formateurs… et auxquelles s’ajoutent des praticiens issus des fausses sciences, notamment, divinatoires et occultes, des médecines et des thérapies alternatives. Bref, le développement personnel attire toute sorte de monde tirant dans toutes les directions.
Je n’aime pas cette traduction française du livre How we think de John Dewey. « Traduit de l’anglais (États-Unis) par Ovide Decroly », Comment nous pensons parait aux Éditions Les empêcheurs de penser en rond / Seuil en 2004. – Le principal point d’appui de mon aversion pour traduction française repose sur le fait que le mot anglais « belief » est traduit par « opinion », une faute majeure impardonnable dans un livre de philosophie, et ce, dès les premiers paragraphes du premier chapitre « Qu’entend-on par penser ? »
Hier j’ai assisté la conférence Devenir philothérapeute : une conférence de Patrick Sorrel. J’ai beaucoup aimé le conférencier et ses propos. J’ai déjà critiqué l’offre de ce philothérapeute. À la suite de conférence d’hier, j’ai changé d’idée puisque je comprends la référence de Patrick Sorrel au «système de croyance». Il affirme que le «système de croyance» est une autre expression pour le «système de penser». Ce faisant, toute pensée est aussi une croyance.
J’éprouve un malaise face à la pratique philosophique ayant pour objectif de faire prendre conscience aux gens de leur ignorance, soit le but poursuivi par Socrate. Conduire un dialogue avec une personne avec l’intention inavouée de lui faire prendre conscience qu’elle est ignorante des choses de la vie et de sa vie repose sur un présupposé (Ce qui est supposé et non exposé dans un énoncé, Le Robert), celui à l’effet que la personne ne sait rien sur le sens des choses avant même de dialoguer avec elle. On peut aussi parler d’un préjugé philosophique.
Si votre opinion est faite et que vous n’êtes pas capable d’en déroger, vous êtes prisonnier de votre opinion. Si votre opinion est faite et que vous êtes ouvert à son évolution ou prêt à l’abandonner pour une autre, vous êtes prisonnier de l’opinion. Si votre opinion compte davantage en valeur et en vérité que les faits, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si votre opinion est la seule manière d’exprimer vos connaissances, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si vous pensez que l’opinion est le seul résultat de votre faculté de penser, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si vous prenez vos opinion pour vraies, vous êtes prisonnier de vos opinions.
J’ai mis beaucoup de temps à me décider à lire « La pratique philosophique » de Jérôme Lecoq. L’auteur est un émule d’Oscar Brenifier, un autre praticien philosophe. J’ai vécu l’enfer lors de mes consultations philosophiques avec Oscar Brenifier. Ainsi toute association de près ou de loin avec Oscar Brenifier m’incite à la plus grande des prudences. Jérôme Lecoq souligne l’apport d’Oscar Brenifier dans les Remerciements en première page de son livre « La pratique philosophique ».
Quelle est la différence entre « savoir » et « connaissance » ? J’exprime cette différence dans l’expression « Je sais parce que je connais ». Ainsi, le savoir est fruit de la connaissance. Voici quatre explications en réponse à la question « Quelle est la différence entre savoir et connaissance ? ».
J’ai décidé de publier les informations au sujet des styles interpersonnels selon Larry Wilson parce que je me soucie beaucoup de l’approche de la personne en consultation philosophique. Il m’apparaît important de déterminer, dès le début de la séance de philothérapie, le style interpersonnel de la personne. Il s’agit de respecter la personnalité de la personne plutôt que de la réprimer comme le font les praticiens socratiques dogmatiques. J’ai expérimenté la mise en œuvre de ces styles inter-personnels avec succès.
Le livre « La confiance en soi – Une philosophie » de Charles Pépin se lit avec une grande aisance. Le sujet, habituellement dévolue à la psychologie, nous propose une philosophie de la confiance. Sous entendu, la philosophie peut s’appliquer à tous les sujets concernant notre bien-être avec sa propre perspective.
J’ai vécu une sévère répression de mes émotions lors deux consultations philosophiques personnelles animées par un philosophe praticien dogmatique de la méthode inventée par Socrate. J’ai témoigné de cette expérience dans deux de mes articles précédents dans ce dossier.
Vouloir savoir être au pouvoir de soi est l’ultime avoir / Le voyage / Il n’y a de repos que pour celui qui cherche / Il n’y a de repos que pour celui qui trouve / Tout est toujours à recommencer
Que se passe-t-il dans notre système de pensée lorsque nous nous exclamons « Ah ! Là je comprends » ? Soit nous avons eu une pensée qui vient finalement nous permettre de comprendre quelque chose. Soit une personne vient de nous expliquer quelque chose d’une façon telle que nous la comprenons enfin. Dans le deux cas, il s’agit d’une révélation à la suite d’une explication.
Âgé de 15 ans, je réservais mes dimanches soirs à mes devoirs scolaires. Puis j’écoutais l’émission Par quatre chemins animée par Jacques Languirand diffusée à l’antenne de la radio de Radio-Canada de 20h00 à 22h00. L’un de ces dimanches, j’ai entendu monsieur Languirand dire à son micro : « La lumière entre par les failles».
Le succès d’une consultation philosophique (philothérapie) repose en partie sur la prise en compte des biais cognitifs, même si ces derniers relèvent avant tout de la psychologie (thérapie cognitive). Une application dogmatique du dialogue socratique passe outre les biais cognitifs, ce qui augmente les risques d’échec.
Depuis mon adolescence, il y a plus de 50 ans, je pense qu’il est impossible à l’Homme d’avoir une conscience pleine et entière de soi et du monde parce qu’il ne la supporterait pas et mourrait sur le champ. Avoir une pleine conscience de tout ce qui se passe sur Terre et dans tout l’Univers conduirait à une surchauffe mortelle de notre corps. Il en va de même avec une pleine conscience de soi et de son corps.
Le Dr Jean-Christophe Seznec, psychiatre français, a été interrogé par la journaliste Pascale Senk du quotidien Le Figaro au sujet de son livre Savoir se taire, savoir parler, coécrit avec Laurent Carouana et paru en 2017. Le titre de l’article a retenu mon attention : Psychologie: «il faut sortir de l’hystérie de la parole».
Reproduction de l’article « Comment dialoguer de manière constructive ? », un texte de Julien Lecomte publié sur son site web PHILOSOPHIE, MÉDIAS ET SOCIÉTÉ. https://www.philomedia.be/. Echanger sur des sujets de fond est une de mes passions. Cela fait plusieurs années que je m’interroge sur les moyens de faire progresser la connaissance, d’apprendre de nouvelles choses. Dans cet article, je reviens sur le cheminement qui m’anime depuis tout ce temps, pour ensuite donner des pistes sur les manières de le mettre en pratique concrètement.
Dans le récit initiatique, il s’agit de partir du point A pour aller au point B afin que le lecteur ou l’auditeur chemine dans sa pensée vers une révélation permettant une meilleure compréhension de lui-même et/ou du monde. La référence à la spirale indique une progression dans le récit où l’on revient sur le même sujet en l’élargissant de plus en plus de façon à guider la pensée vers une nouvelle prise de conscience. Souvent, l’auteur commence son récit en abordant un sujet d’intérêt personnel (point A) pour évoluer vers son vis-à-vis universel (point B). L’auteur peut aussi se référer à un personnage dont il fait évoluer la pensée.
Cet article présente un état des lieux de la philothérapie (consultation philosophique) en Europe et en Amérique du Nord. Après un bref historique, l’auteur se penche sur les pratiques et les débats en cours. Il analyse les différentes publications, conférences et offres de services des philosophes consultants.
J’ai découvert le livre « L’erreur de Descartes » du neuropsychologue Antonio R. Damasio à la lecture d’un autre livre : L’intelligence émotionnelle de Daniel Goleman. L’édition originale de ce livre est parue en 1995 en anglais et j’ai lu la traduction française à l’été 1998 parue un an auparavant chez Robert Laffont. Diplômé de l’université Harvard et docteur en psychologie clinique et développement personnel, puis journaliste au New York Times, où il suit particulièrement les sciences du comportement, Daniel Goleman nous informe dans son livre « L’intelligence émotionnel » au sujet de la découverte spectaculaire pour ne pas dire révolutionnaire de Antonio R. Damasio à l’effet que la raison a toujours besoin d’un coup des émotions pour prendre des décisions. Jusque-là, il était coutume de soutenir que les émotions perturbaient la raison, d’où l’idée de les contrôler.
Ma lecture du livre ÉLOGE DE LA PRATIQUE PHILOSOPHIQUE de la philosophe praticienne SOPHIE GEOFFRION fut agréable et fort utile. Enfin, un ouvrage court ou concis (le texte occupe 65 des 96 pages du livre), très bien écrit, qui va droit au but. La clarté des explications nous implique dans la compréhension de la pratique philosophique. Bref, voilà un éloge bien réussi. Merci madame Geoffrion de me l’avoir fait parvenir.
Dans cet article, je m’interroge à savoir la consultation philosophique doit s’attarder à l’opinion ou au système pensée du client. OPINION – Le philosophe praticien cible l’opinion de son client en vue de démontrer l’ignorance sur laquelle elle repose et, par conséquent, l’absence de valeur de vérité qu’elle recèle. Cette pratique repose sur le « questionnement philosophique ».
Dans son livre « Sentir et savoir », Antonio Damasio propose « Une nouvelle théorie de la conscience ». Il démontre que la conscience ne peut pas exister sans le corps. Il identifie dans le corps la capacité de sentir comme préalable à la conscience.
Un si petit livre, seulement 46 pages et en format réduit, mais tellement informatif. Une preuve de plus qu’il ne faut se fier aux apparences. Un livre signé ROBERT REDEKER, agrégé de philosophie originaire de la France, connaît fort bien le sujet en titre de son œuvre : DÉPRESSION ET PHILOSOPHIE.
La plupart des intervenants en psychologie affirment des choses. Ils soutiennent «C’est comme ceci» ou «Vous êtes comme cela». Le lecteur a le choix de croire ou de ne pas croire ce que disent et écrivent les psychologues et psychiatres. Nous ne sommes pas invités à réfléchir, à remettre en cause les propos des professionnels de la psychologie, pour bâtir notre propre psychologie. Le lecteur peut se reconnaître ou pas dans ces affirmations, souvent catégoriques. Enfin, ces affirmations s’apparentent à des jugements. Le livre Savoir se taire, savoir dire de Jean-Christophe Seznec et Laurent Carouana ne fait pas exception.
Chapitre 1 – La mort pour commencer – Contrairement au philosophe Fernando Savater dans PENSER SA VIE – UNE INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE, je ne définie pas la vie en relation avec la mort, avec son contraire. Je réfléchie et je parle souvent de la mort car il s’agit de l’un de mes sujets préféré depuis mon adolescence. Certaines personnes de mon entourage pensent et affirment que si je parle aussi souvent de la mort, c’est parce que j’ai peur de mourir. Or, je n’ai aucune peur de la mort, de ma mort, de celles de mes proches. Je m’inquiète plutôt des conséquences de la mort sur ceux et celles qui restent, y compris sur moi-même.
À la lumière du documentaire LE SOLEIL ET DES HOMMES, notamment l’extrait vidéo ci-dessus, je ne crois plus au concept de race. Les différences physiques entre les hommes découlent de l’évolution naturelle et conséquente de nos lointains ancêtres sous l’influence du soleil et de la nature terrestre, et non pas du désir du soleil et de la nature de créer des races. On sait déjà que les races et le concept même de race furent inventés par l’homme en se basant sur nos différences physiques. J’abandonne donc la définition de « race » selon des critères morphologiques…
Dans le cadre de notre dossier « Consulter un philosophe », la publication d’un extrait du mémoire de maîtrise « Formation de l’esprit critique et société de consommation » de Stéphanie Déziel s’impose en raison de sa pertinence. Ce mémoire nous aide à comprendre l’importance de l’esprit critique appliqué à la société de consommation dans laquelle évoluent, non seule les jeunes, mais l’ensemble de la population.
Je reproduis ci-dessous une citation bien connue sur le web au sujet de « la valeur de la philosophie » tirée du livre « Problèmes de philosophie » signé par Bertrand Russell en 1912. Mathématicien, logicien, philosophe, épistémologue, homme politique et moraliste britannique, Bertrand Russell soutient que la valeur de la philosophie réside dans son incertitude. À la suite de cette citation, vous trouverez le texte de Caroline Vincent, professeur de philosophie et auteure du site web « Apprendre la philosophie » et celui de Gabriel Gay-Para tiré se son site web ggpphilo. Des informations tirées de l’Encyclopédie Wikipédia au sujet de Bertrand Russell et du livre « Problèmes de philosophie » et mon commentaire complètent cet article.
Passez donc sans vous arrêter, amis, au milieu des Marchands de Sommeil; et, s’ils vous arrêtent, répondez-leur que vous ne cherchez ni un système ni un lit. Ne vous lassez pas d’examiner et de comprendre. (…) Lisez, écoutez, discutez, jugez; ne craignez pas d’ébranler des systèmes; marchez sur des ruines, restez enfants. (…) Socrate vous a paru un mauvais maître. Mais vous êtes revenus à lui; vous avez compris, en l’écoutant, que la pensée ne se mesure pas à l’aune, et que les conclusions ne sont pas l’important; restez éveillés, tel est le but. Les Marchands de Sommeil de ce temps-là tuèrent Socrate, mais Socrate n’est point mort; partout où des hommes libres discutent, Socrate vient s’asseoir, en souriant, le doigt sur la bouche. Socrate n’est point mort; Socrate n’est point vieux. (…) – Alain, (Emile Charrier), Vigiles de l’esprit.
Tout au long de ma vie, j’ai vu la vérité malmenée, tassée d’un bord puis de l’autre, devenir une propriété personnelle (ma vérité — ta vérité — à chacun sa vérité), tantôt objet de monopôle, tantôt reconnue, tantôt niée et reniée… Ah ! La vérité. Quel chaos ! Je me demande depuis longtemps pourquoi la vérité, si elle existe, ne triomphe pas à tout coup, pourquoi elle ne s’impose à tous d’elle-même. Contestée de toutes parts, la vérité, si elle existe, n’a d’intérêt que pour l’opinion qu’on en a et les débats qui s’ensuivent. On va jusqu’à donner à la vérité une mauvaise réputation eu égard à son influence néfaste sur la société et les civilisations. Et que dire de toutes ces croyances qui se prennent pour la vérité ? Et c’est sans compter l’observation récente à l’effet que nous venons d’entrer dans une « ère de post-vérité ».
J’accorde à ce livre trois étoiles sur cinq. Le titre « Petit manuel philosophique à l’intention des grands émotifs » a attiré mon attention. Et ce passage du texte en quatrième de couverture m’a séduit : «En proposant une voyage philosophique à travers l’histoire des émotions, Iaria Gaspari bouscule les préjugés sur notre vie émotionnelle et nous invite à ne plus percevoir nos d’états d’âme comme des contrainte ». J’ai décidé de commander et de lire ce livre. Les premières pages m’ont déçu. Et les suivantes aussi. Rendu à la moitié du livre, je me suis rendu à l’évidence qu’il s’agissait d’un témoignage de l’auteure, un témoignage très personnelle de ses propres difficultés avec ses émotions. Je ne m’y attendais pas, d’où ma déception. Je rien contre de tels témoignages personnels qu’ils mettent en cause la philosophie, la psychologie, la religion ou d’autres disciplines. Cependant, je préfère et de loin lorsque l’auteur demeure dans une position d’observateur alors que son analyse se veut la plus objective possible.
Tout repose sur le Savoir. L’expérience personnelle et/ou professionnelle qu’on fait du Savoir, après en avoir pris conscience, se retrouve à la base des Connaissances que nous possédons. Les Opinions expriment des Jugements des connaissances et inspirent souvent les Croyances.
La philosophie, mère de toutes les sciences, recherche la sagesse et se définie comme l’Amour de la Sagesse. La sagesse peut être atteinte par la pensée critique et s’adopte comme Mode de vie. • La philosophie soutient la Science et contribue à la naissance et au développement de la méthode scientifique, notamment avec l’épistémologie.
La philothérapie, principale pratique de la philosophie de nos jours, met sans cesse de l’avant les philosophes de l’Antiquité et de l’époque Moderne. S’il faut reconnaître l’apport exceptionnel de ces philosophes, j’ai parfois l’impression que la philothérapie est prisonnière du passé de la philosophie, à l’instar de la philosophie elle-même.
Au Québec, la seule province canadienne à majorité francophone, il n’y a pas de tradition philosophique populaire. La philosophie demeure dans sa tour universitaire. Très rares sont les interventions des philosophes québécois dans l’espace public, y compris dans les médias, contrairement, par exemple, à la France. Et plus rares encore sont les bouquins québécois de philosophie en tête des ventes chez nos libraires. Seuls des livres de philosophes étrangers connaissent un certain succès. Bref, l’espace public québécois n’offre pas une terre fertile à la Philosophie.
J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq parce qu’il me permet d’en apprendre beaucoup plus sur la pensée scientifique telle que pratiquée par de grands scientifiques. L’auteur, Nicolas Martin, propose une œuvre originale en adressant les mêmes questions, à quelques variantes près, à 17 grands scientifiques.
Cet article répond à ce commentaire lu sur LinkedIn : « L’équilibre entre développement personnel et développement spirituel ou philosophique est indispensable. » Il m’apparaît impossible de viser « L’équilibre entre développement personnel et développement spirituel ou philosophique » et de prétendre que cet équilibre entre les trois disciplines soit « indispensable ». D’une part, le développement personnel est devenu un véritable fourre-tout où l’ivraie et le bon grain se mélangent sans distinction, chacun avançant sa recette à l’aveugle.
En ne s’unissant pas au sein d’une association nationale professionnelle fixant des normes et des standards à l’instar des philosophes consultants ou praticiens en d’autres pays, ceux de la France nous laissent croire qu’ils n’accordent pas à leur disciple tout l’intérêt supérieur qu’elle mérite. Si chacun des philosophes consultants ou praticiens français continuent de s’affairer chacun dans son coin, ils verront leur discipline vite récupérée à mauvais escient par les philopreneurs et la masse des coachs.
“ Après les succès d’Épicure 500 vous permettant de faire dix repas par jour sans ballonnements, après Spinoza 200 notre inhibiteur de culpabilité, les laboratoires Laron, vous proposent Philonium 3000 Flash, un médicament révolutionnaire capable d’agir sur n’importe quelle souffrance physique ou mentale : une huile essentielle d’Heidegger pour une angoisse existentielle, une substance active de Kant pour une douleur morale…. Retrouvez sagesse et vitalité en un instant ”, s’amusaient les chroniqueurs radio de France Inter dans une parodie publicitaire diffusée à l’occasion d’une émission ayant pour thème : la philosophie peut-elle soigner le corps ?
J’attribue quatre étoiles sur cinq à ce livre. Les lecteurs assidus de mes articles connaissent fort bien ma position plus que défavorable face au développement personnel. À l’instar de Thiery Jobard, je suis contre le développement personnel. Je qualifie le développement personnel d’arnaque extrêmement dangereuse pour ses adeptes et notre société.
Le philothérapeute (philosophe consultant ou philosophe praticien) a l’obligation de très bien connaître le contexte dans lequel évolue son client. Le développement de l’esprit critique de ce client passe inévitablement par une prise de conscience de sa cognition en vue de comprendre comment il connaît. Si, dès le départ, le client n’a pas conscience de son mode de pensées, il lui sera difficile de participer activement au dialogue avec son philothérapeute. L’objectif primaire du philosophe consultant demeure de déceler et de corriger les biais cognitifs de son client avant même d’abord une question philosophique. Bref, si la »machine à pensée » du client est corrompu par des «virus cognitifs », une «réinitialisation » s’impose en début de séance de consultation.
Dans son livre « Développement (im) personnel, Julia de Funès, docteure en philosophie, soutient que le développement personnel offre la même recette à tous et qu’à ce titre il ne peut donc pas se qualifier sa démarche de « personnel ». Selon ma compréhension, le développement personnel devrait mettre de l’avant un développement personnalisé, c’est-à-dire adapté à chaque individu intéressé pour se targuer d’être personnel.
Mon intérêt pour la pensée scientifique remonte à plus de 25 ans. Alors âgé d’une quarantaine d’année, PDG d’une firme d’étude des motivations d’achat des consommateurs, je profite des enseignements et de l’étude du processus scientifique de différentes sources. Je me concentre vite sur l’épistémologie…
Ce livre m’a déçu en raison de la faiblesse de sa structure indigne de son genre littéraire, l’essai. L’auteur offre aux lecteurs une foule d’information mais elle demeure difficile à suivre en l’absence de sous-titres appropriés et de numérotation utile pour le repérage des énumérations noyés dans un style plus littéraire qu’analytique.
En l’absence d’une association d’accréditation des philothérapeutes, philosophes consultants ou praticiens en francophonie, il est difficile de les repérer. Il ne nous reste plus que de nombreuses recherches à effectuer sur le web pour dresser une liste, aussi préliminaire soit-elle. Les intervenants en philothérapie ne se présentent pas tous sous la même appellation : « philothérapeute », « philosophe consultant » ou « philosophe praticien » « conseiller philosophique » « philosophe en entreprise », « philosophe en management » et autres.
J’ai lu le livre GUÉRIR L’IMPOSSIBLE en me rappelant à chaque page que son auteur, Christopher Laquieze, est à la fois philosophe et thérapeute spécialisé en analyse comportementale. Pourquoi ? Parce que ce livre nous offre à la fois un voyage psychologique et philosophique, ce à quoi je ne m’attendais pas au départ. Ce livre se présente comme « Une philosophie pour transformer nous souffrances en forces ». Or, cette philosophie se base davantage sur la psychologie que la philosophie. Bref, c’est le « thérapeute spécialisé en analyse comportementale » qui prend le dessus sur le « philosophe ».
Nathaniel Masselot maîtrise fort bien son écriture visiblement axée sur son accessibilité et sa compréhension par tous. Loin de la vulgarisation simpliste, l’auteur nous parle comme nous parlons. Loin de l’écriture hermétique, l’auteur n’a pas la tête dans les nuages et isolé dans une tour surplombant la société; il marche auprès de nous. Avec ses références à l’actualité, il campe son lecteur dans la réalité quotidienne où il évolue.
Ma lecture de ce livre m’a procuré beaucoup de plaisir et de bonheur. Je recherche dans mes lectures les auteurs et les œuvres permettant aux lecteurs d’évoluer de prise de conscience en prise de conscience de la première à la dernière page, de ne plus être le même à la fin de la lecture. Et c’est ce que les lecteurs vivront à la lecture de ce livre.
Je n’ai pas aimé ce livre parce que son titre, LES PHILO-COGNITIFS, se réfère à la philosophie sans pour autant faire un traitement philosophique de son sujet. Mon achat reposait entièrement sur le titre de ce livre et je m’attendais à un livre de philosophie. Mais il s’agit d’un livre de psychologie. Mon achat fut intuitif. J’avais pleinement confiance dans l’usage du mot « PHILO » en titre d’un ouvrage pour que ce dernier ne puisse traiter d’un autre sujet que philosophique. Mais ce n’est pas le cas.
À l’instar de ma lecture précédente (Qu’est-ce que la philosophie ? de Michel Meyer), le livre PRÉSENTATIONS DE LA PHILOSOPHIE du philosophe ANDRÉ COMTE-SPONVILLE m’a plu parce qu’il met en avant les bases mêmes de la philosophie et, dans ce cas précis, appliquées à une douzaine de sujets…
J’ai dévoré le livre LES THÉORIES DE LA CONNAISSANCE par JEAN-MICHEL BESNIER avec un grand intérêt puisque la connaissance de la connaissance me captive. Amateur d’épistémologie, ce livre a satisfait une part de ma curiosité. Évidemment, je n’ai pas tout compris et une seule lecture suffit rarement à maîtriser le contenu d’un livre traitant de l’épistémologie, notamment, de son histoire enchevêtrée de différents courants de pensée, parfois complémentaires, par opposés. Jean-Michel Besnier dresse un portrait historique très intéressant de la quête philosophique pour comprendre la connaissance elle-même.
Ce livre n’était pas pour moi en raison de l’érudition des auteurs au sujet de la philosophie de connaissance. En fait, contrairement à ce que je croyais, il ne s’agit d’un livre de vulgarisation, loin de là. J’ai décroché dès la seizième page de l’Introduction générale lorsque je me suis buté à la première équation logique. Je ne parviens pas à comprendre de telles équations logiques mais je comprends fort bien qu’elles soient essentielles pour un tel livre sur-spécialisé. Et mon problème de compréhension prend racine dans mon adolescence lors des études secondaires à l’occasion du tout premier cours d’algèbre. Littéraire avant tout, je n’ai pas compris pourquoi des « x » et « y » se retrouvaient dans des équations algébriques. Pour moi, toutes lettres de l’alphabet relevaient du littéraire. Même avec des cours privés, je ne comprenais toujours pas. Et alors que je devais choisir une option d’orientation scolaire, j’ai soutenu que je voulais une carrière fondée sur l’alphabet plutôt que sur les nombres. Ce fut un choix fondé sur l’usage des symboles utilisés dans le futur métier ou profession que j’allais exercer. Bref, j’ai choisi les sciences humaines plutôt que les sciences pures.
Quelle agréable lecture ! J’ai beaucoup aimé ce livre. Les problèmes de philosophie soulevés par Bertrand Russell et les réponses qu’il propose et analyse étonnent. Le livre PROBLÈMES DE PHILOSOPHIE écrit par BERTRAND RUSSELL date de 1912 mais demeure d’une grande actualité, du moins, selon moi, simple amateur de philosophie. Facile à lire et à comprendre, ce livre est un «tourne-page» (page-turner).
La compréhension de ce recueil de chroniques signées EUGÉNIE BASTIÉ dans le quotidien LE FIGARO exige une excellence connaissance de la vie intellectuelle, politique, culturelle, sociale, économique et de l’actualité française. Malheureusement, je ne dispose pas d’une telle connaissance à l’instar de la majorité de mes compatriotes canadiens et québécois. J’éprouve déjà de la difficulté à suivre l’ensemble de l’actualité de la vie politique, culturelle, sociale, et économique québécoise. Quant à la vie intellectuelle québécoise, elle demeure en vase clos et peu de médias en font le suivi. Dans ce contexte, le temps venu de prendre connaissance de la vie intellectuelle française, je ne profite des références utiles pour comprendre aisément. Ma lecture du livre LA DICTATURE DES RESSENTIS d’EUGÉNIE BASTIÉ m’a tout de même donné une bonne occasion de me plonger au cœur de cette vie intellectuelle française.
À titre d’éditeur, je n’ai pas aimé ce livre qui n’en est pas un car il n’en possède aucune des caractéristiques professionnelles de conceptions et de mise en page. Il s’agit de la reproduction d’un texte par Amazon. Si la première de couverture donne l’impression d’un livre standard, ce n’est pas le cas des pages intérieures du… document. La mise en page ne répond pas aux standards de l’édition française, notamment, en ne respectant pas les normes typographiques.
J’ai lu avec un grand intérêt le livre LE CHANGEMENT PERSONNEL sous la direction de NICOLAS MARQUIS. «Cet ouvrage a été conçu à partir d’articles tirés du magazine Sciences Humaines, revus et actualisés pour la présente édition ainsi que de contributions inédites. Les encadrés non signés sont de la rédaction.» J’en recommande vivement la lecture pour son éruditions sous les aspects du changement personnel exposé par différents spécialistes et experts tout aussi captivant les uns les autres.
À la lecture de ce livre fort intéressent, j’ai compris pourquoi j’ai depuis toujours une dent contre le développement personnel et professionnel, connu sous le nom « coaching ». Les intervenants de cette industrie ont réponse à tout, à toutes critiques. Ils évoluent dans un système de pensée circulaire sans cesse en renouvellement créatif voire poétique, système qui, malheureusement, tourne sur lui-même. Et ce type de système est observable dans plusieurs disciplines des sciences humaines au sein de notre société où la foi en de multiples opinions et croyances s’exprime avec une conviction à se donner raison. Les coachs prennent pour vrai ce qu’ils pensent parce qu’ils le pensent. Ils sont dans la caverne de Platon et ils nous invitent à les rejoindre.
Ce petit livre d’une soixantaine de pages nous offre la retranscription de la conférence « À QUOI SERT LA PHILOSOPHIE ? » animée par Marc Sautet, philosophe ayant ouvert le premier cabinet de consultation philosophique en France et également fondateur des Cafés Philo en France.
L’essai RAVIVER DE L’ESPRIT EN CE MONDE – UN DIAGNOSTIC CONTEMPORAIN par FRANÇOIS JULLIEN chez les Éditions de l’Observatoire, parue en 2023, offre aux lecteurs une prise de recul philosophique révélatrice de notre monde. Un tel recul est rare et fort instructif.
La philosophie a pour but l’adoption d’un mode de vie sain. On parle donc de la philosophie comme un mode de vie ou une manière de vivre. La philosophie ne se possède pas, elle se vit. La philosophie souhaite engendrer un changement de comportement, d’un mode de vie à celui qu’elle propose. Il s’agit ni plus ni moins d’enclencher et de soutenir une conversion à la philosophie.
La lecture de cet essai fut très agréable, instructive et formatrice pour l’amateur de philosophie que je suis. Elle s’inscrit fort bien à la suite de ma lecture de « La philosophie comme manière de vivre » de Pierre Habot (Entretiens avec Jeanne Cartier et Arnold I Davidson, Le livre de poche – Biblio essais, Albin Michel, 2001).
La lecture du livre Les consolations de la philosophie, une édition en livre de poche abondamment illustrée, fut très agréable et instructive. L’auteur Alain de Botton, journaliste, philosophe et écrivain suisse, nous adresse son propos dans une langue et un vocabulaire à la portée de tous.
L’Observatoire de la philothérapie a consacré ses deux premières années d’activités à la France, puis à la francophonie. Aujourd’hui, l’Observatoire de la philothérapie s’ouvre à d’autres nations et à la scène internationale.
Certaines personnes croient le conseiller philosophique intervient auprès de son client en tenant un « discours purement intellectuel ». C’est le cas de Dorothy Cantor, ancienne présidente de l’American Psychological Association, dont les propos furent rapportés dans The Philosophers’ Magazine en se référant à un autre article parue dans The New York Times.
Nathaniel Masselot maîtrise fort bien son écriture visiblement axée sur son accessibilité et sa compréhension par tous. Loin de la vulgarisation simpliste, l’auteur nous parle comme nous parlons. Loin de l’écriture hermétique, l’auteur n’a pas la tête dans les nuages et isolé dans une tour surplombant la société; il marche auprès de nous. Avec ses références à l’actualité, il campe son lecteur dans la réalité quotidienne où il évolue.
De lecture agréable et truffé d’humour, le livre ÊTES-VOUS SÛR D’AVOIR RAISON ? de GILLES VERVISCH, agrégé de philosophie, pose la question la plus embêtante à tous ceux qui passent leur vie à se donner raison.
Dans un article intitulé « Se retirer du jeu » et publié sur son site web Dialogon, le philosophe praticien Jérôme Lecoq, témoigne des « résistances simultanées » qu’il rencontre lors de ses ateliers, « surtout dans les équipes en entreprise » : « L’animation d’un atelier de “pratique philosophique” implique que chacun puisse se « retirer de soi-même », i.e. abandonner toute volonté d’avoir raison, d’en imposer aux autres, de convaincre ou persuader autrui, ou même de se “faire valider” par les autres. Vous avez une valeur a priori donc il n’est pas nécessaire de l’obtenir d’autrui. » (LECOQ, Jérôme, Se retirer du jeu, Dialogon, mai 2024.)
« Jaspers incarne, en Allemagne, l’existentialisme chrétien » peut-on lire en quatrième de couverture de son livre INTRODUCTION À PHILOSOPHIE. Je ne crois plus en Dieu depuis vingt ans. Baptisé et élevé par défaut au sein d’une famille catholique qui finira pas abandonner la religion, marié protestant, aujourd’hui J’adhère à l’affirmation d’un ami philosophe à l’effet que « Toutes les divinités sont des inventions humaines ». Dieu est une idée, un concept, rien de plus, rien de moins. / Dans ce contexte, ma lecture de l’œuvre INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE de KARL JASPERS fut quelque peu contraignante à titre d’incroyant. Je me suis donc concentré sur les propos de JASPERS au sujet de la philosophie elle-même.
« La philosophie a gouverné toute la vie de notre époque dans ses traits les plus typiques et les plus importants » (LAMBERTY, Max, Le rôle social des idées, Chapitre premier – La souveraineté des idées ou La généalogie de notre temps, Les Éditions de la Cité Chrétienne (Bruxelles) / P. Lethielleux (Paris), 1936, p. 41) – la démonstration du rôle social des idées par Max Lamberty doit impérativement se poursuivre de nos jours en raison des défis qui se posent à nous, maintenant et demain, et ce, dans tous les domaines. – Et puisque les idées philosophiques mènent encore et toujours le monde, nous nous devons d’interroger le rôle social des idées en philosophie pratique. Quelle idée du vrai proposent les nouvelles pratiques philosophiques ? Les praticiens ont-ils conscience du rôle social des idées qu’ils véhiculent dans les consultations et les ateliers philosophiques ?
J’aime beaucoup ce livre. Les nombreuses mises en contexte historique en lien avec celui dans lequel nous sommes aujourd’hui permettent de mieux comprendre cette histoire de la philosophie et d’éviter les mésinterprétations. L’auteure Jeanne Hersch nous fait découvrir les différentes étonnements philosophiques de plusieurs grands philosophes à l’origine de leurs quêtes d’une meilleure compréhension de l’Être et du monde.
Mon intérêt pour ce livre s’est dégradé au fil de ma lecture en raison de sa faible qualité littéraire, des nombreuses répétitions et de l’aveu de l’auteur à rendre compte de son sujet, la Deep Philosophy. / Dans le texte d’introduction de la PARTIE A – Première rencontre avec la Deep Philosophy, l’auteur Ran Lahav amorce son texte avec ce constat : « Il n’est pas facile de donner un compte rendu systématique de la Deep Philosophy ». Dans le paragraphe suivant, il écrit : « Néanmoins, un tel exposé, même s’il est quelque peu forcé, pourrait contribuer à éclairer la nature de la Deep Philosophy, pour autant qu’il soit compris comme une esquisse approximative ». Je suis à la première page du livre et j’apprends que l’auteur m’offre un exposé quelque peu forcé et que je dois considérer son œuvre comme une esquisse approximative. Ces précisions ont réduit passablement mon enthousiasme. À partir de là, ma lecture fut un devoir, une obligation, avec le minimum de motivation.
J’ai beaucoup aimé ce livre de Michel Lacroix, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel. Il m’importe de vous préciser que j’ai lu l’édition originale de 2009 aux Éditions Robert Laffont car d’autres éditions sont parues, du moins si je me rapporte aux différentes premières et quatrièmes de couverture affichées sur le web. Ce livre ne doit pas être confondu avec un ouvrage plus récent de Michel Lacroix : Philosophie de la réalisation personnelle – Se construire dans la liberté parue en 2013 et qui sera l’objet d’une rapport de lecture dans ce dossier.
Personnellement, je me suis limité à lecture du livre car je préfère et de loin l’écrit à l’audio. J’aime le titre donné à ce livre, « Une histoire de la raison », plutôt que « L’histoire de la raison », parce qu’il laisse transparaître une certaine humilité dans l’interprétation.
Les ouvrages de la collection Que sais-je ? des PUF (Presses universitaires de France) permettent aux lecteurs de s’aventurer dans les moult détails d’un sujet, ce qui rend difficile d’en faire un rapport de lecture, à moins de se limiter à ceux qui attirent et retient davantage notre attention, souvent en raison de leur formulation. Et c’est d’entrée de jeu le cas dans le tout premier paragraphe de l’Introduction. L’auteur écrit, parlant de la raison (le soulignement est de moi) : « (…) elle est une instance intérieure à l’être humain, dont il n’est pas assuré qu’elle puisse bien fonctionner en situation de risque ou dans un état trouble ».
Dans son livre « Philosophie de la réalisation personnelle – Se construire dans la liberté », le philosophe Michel Lacroix s’engage clairement en faveur du développement personnel. Il le présente comme l’héritier des efforts déployés par la philosophie dans le domaine de la réalisation de soi au cours siècles passés. À mon avis et si c’est effectivement le cas, le mouvement du développement personnel a vite fait de dilapider cet héritage de la philosophie en le déchiquetant en petits slogans vide de sens.
Dans le dossier de son édition de juin 2024, Philosophie magazine tente de répondre à cette question en titre : « Comment savoir quand on a raison ? » Il n’en fallait pas plus pour me motiver à l’achat d’un exemplaire chez mon marchand de journaux.
Le texte en quatrième de couverture de LOIN DE SOI de CLÉMENT ROSSET confronte tous les lecteurs ayant en tête la célèbre maxime grecque gravés sur le fronton du temple de Delphes et interprété par Socrate : « Connais-toi toi-même » : « La connaissance de soi est à la fois inutile et inappétissante. Qui souvent s’examine n’avance guère dans la connaissance de lui-même. Et moins on se connaît, mieux on se porte. » ROSSET, Clément, Loin de moi – Étude sur l’identité, Les Éditions de Minuit, 1999, quatrième de couverture.
Avec ses dix-sept articles de différents auteurs, le recueil PENSER PAR SOI-MÊME, sous la direction de MAUD NAVARRE, docteure en sociologie et journaliste scientifique, chez SCIENCES HUMAINES ÉDITIONS paru en 2024, complète et bonifie généreusement le dossier du même nom de l’édition de mars 2020 du magazine Sciences Humaines. / Sur le site web de l’éditeur, la présentation du recueil comprend une ligne de texte de plus que sur la quatrième de couverture et pose cette question : « Faut-il alors douter de tout ? » Ma réponse : oui, à commencer par les sciences humaines que je trouve un peu trop humaine à mon goût.
Je n’ai pas aimé ce livre en raison de mon aversion face au style d’écriture de l’auteur. J’ai abandonné ma lecture au trois quarts du livre. Je n’en pouvais plus des trop nombreuses fioritures littéraires. Elles donnent au livre les allures d’un sous-bois amazonien aussi dense que sauvage où il est à charge du lecteur de se frayer un chemin, machette à la main. Ce livre a attiré mon attention, l’a retenue et l’auteur pouvait alors profiter de l’occasion pour communiquer avec moi. Mais les ornements littéraires agissent comme de la friture sur la ligne de cette communication. J’ai finalement raccroché.
Notre place dans le monde s’inscrit dans notre identité. Construire sa propre philosophie de vie bonne exige non seulement de se connaître soi-même mais aussi de connaître le monde dans lequel nous existons. C’est l’« Être-au-monde » selon de Martin Heidegger. Bref, voilà donc pourquoi cet Observatoire de la philothérapie – Quand la philosophie nous aide dépasse son sujet avec le livre GRANDEUR ET MISÈRE DE LA MODERNITÉ du philosophe CHARLES TAYLOR paru en 1992, il y a plus de trente ans.
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Collection « RÉPONSES » créée par Joëlle de Gravelaine, dirigée par Nathalie Le Breton
Date de parution : 13 juin 2013
Langue : Français
108 pages
ISBN-13 : 978-2-221-13413-9
Présentation sur le site web Robert Laffont Québec
Philosophie de la réalisation personnelle
Michel Lacroix
Dans Se réaliser, Michel Lacroix avait utilisé les richesses de la philosophie et de la littérature occidentales pour définir le concept de réalisation de soi et trouver les moyens de s’épanouir. Avec ce nouvel ouvrage, il prolonge et élargit sa réflexion, et partage ses convictions intimes sur cette question fondamentale…
Pour le philosophe, l’un des premiers à s’être intéressés au phénomène du développement personnel venu des États-Unis dans les années 1960, l’individu se réalise en avançant sur le chemin de la vie. Ce chemin n’est pas unique, il n’y a pas une seule voie dans la réalisation de soi, mais une pluralité de voies. L’homme libre, tout au long de sa vie, devra choisir la sienne : il sera tout d’abord confronté à l’alternative entre contemplation et action ; puis entre autoréalisation et épanouissement. Ces choix faits, il lui faudra se confronter à autrui – car il est impossible de s’épanouir sans l’estime de ses semblables, leur compréhension et leurs encouragements –, puis à la communauté. Loin d’être une affaire strictement personnelle, le projet de réalisation de soi recèle donc une dimension sociopolitique. Ou comment transformer les communautés d’appartenance en communautés de choix.
Par son approche originale et personnelle, Michel Lacroix nous montre comment une philosophie de la réalisation de soi n’a de sens que si elle est une émancipation pour l’individu.
AUTEUR
Michel Lacroix
Normalien, agrégé de philosophie, Michel Lacroix est maître de conférences à l’université de Cergy-Pontoise. Il est notamment l’auteur de Avoir un idéal, est-ce bien raisonnable ? (Flammarion, 2007), Se réaliser (Robert Laffont, 2009 ; prix Psychologies-Fnac), Paroles toxiques, paroles bienfaisantes (Robert Laffont, 2010) et Éloge du patriotisme (Robert Laffont, 2011).
C’est au XVIIIe siècle qu’est né le projet de la réalisation de soi, dont le mouvement du développement personnel est aujourd’hui l’héritier. Ce projet était novateur car il reposait sur l’idée de liberté. On ne se construit, en effet, que dans la liberté. Ce n’est pas à la société et encore moins à des communautés ethno-culturelles de nous dire en quoi consiste la « vie bonne ».
Chacun de nous est appelé à fixer en toute indépendance la part qu’il donne à sa vie professionnelle et à sa vie privée, à l’action et à la contemplation, à l’avoir et à l’être, à la religion et aux réalités profanes. Et, quoiqu’en disent certains, il est moins important d’adopter les croyances et les traditions de son « groupe d’appartenance » que de pouvoir exercer, en toutes circonstances, son droit au libre examen.
Michel Lacroix nous propose de revenir à la source : la réalisation de soi n’a de sens que si elle est une émancipation.. Un livre personnel et engagé qui rend à la philosophie son rôle le plus essentiel : nous aider à vivre mieux..
Table des matières
Couverture
Collection
Du même auteur
Titre
Copyright
Dédicace
Prologue
Première leçon – Les vertus de l’action
Le règne de la vita contemplativa
La vie sous tension
Le principe d’action
Les dérives de l’action
Le fantasme de la grandeur
La pluralité des styles d’existence
L’action modeste
Le souci de soi et le souci écologique
Deuxième leçon – Libérer son potentiel
Sous le signe de la transcendance
L’idéal d’autoréalisation
Défendre la liberté de conscience
Un autre regard sur autrui
Les deux moteurs de la réalisation personnelle
La force du désir
Adler contre Freud
Le temps de l’introspection
Briser nos chaînes intérieures
Notre « niveau d’aspiration »
La tyrannie de l’excellence
Le Surmoi et l’Idéal du Moi
Le danger de la dispersion
Le baptême du choix
Troisième leçon – La place d’autrui
Se réaliser aux dépens d’autrui ?
Le splendide isolement
Les nutriments psychologiques
La leçon de Victor Hugo
La réalisation de soi, outil de transformation sociale
Quatrième leçon – L’enracinement et la liberté
Du traditionalisme au multicommunautarisme
La communautarisation du moi
L’anthropologie universaliste
Manifeste pour la liberté
Épilogue – Une idée du bonheur
EXTRAIT
Prologue
Une image vient spontanément à l’esprit lorsqu’on évoque la réalisation de soi ou, si l’on préfère, le « développement personnel ». Cette image est fréquemment utilisée par les psychologues, coachs, formateurs, thérapeutes qui s’intéressent à ce sujet. Elle est empruntée au domaine de la vie organique, et plus spécialement de la vie végétale. C’est l’image de la plante, de la fleur, de l’arbre. Se réaliser, nous expliquent les spécialistes du développement personnel, ce serait croître, grandir, s’épanouir à la manière d’un organisme végétal.
Au premier regard, cette image est séduisante ; elle paraît aller de soi. Et, pourtant, je la crois profondément trompeuse. Elle ne peut que nous induire en erreur sur le sens véritable de la réalisation de soi. Car dans l’idée de développement organique, il y a toujours, qu’on le veuille ou non, une notion de préprogrammation. Un organisme, qu’il soit animal ou végétal, se développe selon un schéma préétabli. On sait d’avance comment seront la plante, la fleur, l’arbre une fois qu’ils seront parvenus à maturité.
Or le propre de l’existence humaine est de dépendre de la liberté. L’être humain possède une faculté qui le distingue de tous les autres êtres vivants : le libre arbitre. Et qui dit « liberté » dit forcément « incertitude », « imprévisibilité ». Nul ne peut savoir à l’avance ce que deviendra un être humain. Nul ne peut prédire comment il conduira son existence. C’est pourquoi, aux métaphores végétales qu’affectionnent les psychologues du développement personnel, je préfère la métaphore du chemin. Je me représente la personne qui se réalise comme « s’avançant sur le chemin de la vie ». Cette métaphore est juste, éclairante, satisfaisante, mais à condition d’ajouter immédiatement la précision suivante : le chemin dont il s’agit n’est évidemment pas unique. Il n’y a pas une voie, et une seule, pour la réalisation de soi. Il y a une pluralité de voies. Il y a une multiplicité de styles d’existence. Telle est l’idée centrale du livre que le lecteur a dans les mains. Je m’intéresserai dans cet ouvrage à la diversité des styles d’existence, et je défendrai le droit pour chaque personne de choisir, en toute liberté, son propre style.
La multiplicité des styles d’existence résulte du fait que, sur le chemin de nos vies, des bifurcations se présentent sans cesse à nous. Des choix existentiels nous sont offerts. Et notre réalisation personnelle, c’est-à-dire la manière dont nous allons construire notre vie, dépendra des décisions que nous prendrons à chacun de ces moments cruciaux.
Quelles sont ces bifurcations ? Quelles sont ces alternatives ?
Il est l’auteur d’une thèse d’État sur « L’idée de politesse dans les manuels de bienséance (XIXe et XXe siècles) » dont le président du jury était Jean Guitton.
Fils du médecin colonel Roger Lacroix (AOF-AEF-Indochine), il est aussi le neveu de Michel Bernstein, un des responsables du mouvement de Résistance Défense de la France, chargé des faux papiers. Il est marié à Sophie Ader, philosophe. Ils ont trois enfants.
Le livre « Philosophie de la réalisation personnelle – Se construire dans la liberté », paru en 2013 sous la plume du philosophe français Michel Lacroix, est une réécriture enrichie de son précédent livre «Se réaliser – Petite philosophie de l’épanouissement personnel » paru en 2009 (voir mon rapport de lecture de ce dernier).
Dans son livre « Philosophie de la réalisation personnelle – Se construire dans la liberté », le philosophe Michel Lacroix s’engage clairement en faveur du développement personnel. Il le présente comme l’héritier des efforts déployés par la philosophie dans le domaine de la réalisation de soi au cours siècles passés. À mon avis et si c’est effectivement le cas, le mouvement du développement personnel a vite fait de dilapider cet héritage de la philosophie en le déchiquetant en petits slogans vide de sens.
L’approche psychologique de la réalisation de soi adoptée par le philosophe Michel Lacroix, dans son deux livres, me déplaît passablement. Il en fait presque l’apologie. Lorsqu’on me présente une « philosophie de la réalisation personnelle » ou une « petite philosophie de l’épanouissement personnel », je m’attends à une véritable « philosophie », et non pas à un ramassis de bribes de psychologie de comptoir. Michel Lacroix tombe dans la psychologisation de la philosophie contre laquelle je vous ai déjà mis en garde (voir : Mise en garde contre le copinage entre la philosophie et la psychologie). Je ne suis pas content.
La récupération partiale et plus que maladroite de la philosophie par le développement personnel consiste à tirer de la philosophie un soupçon de plus de crédibilité.
Ainsi, Michel Lacroix, le philosophe, peut aisément se réfèrer à la philosophie au fil des siècles passés, mais cela ne fait pas de son œuvre une « philosophie » de la réalisation personnelle pour autant.
Michel Lacroix aborde les mêmes sujets que dans son livre précédent mais, cette fois, il nous donne des leçons, à la manière des coachs en développement personnel.
Première leçon – Les vertus de l’action
Deuxième leçon – Libérer son potentiel
Troisième leçon – La place d’autrui
Quatrième leçon – L’enracinement et la liberté
Épilogue – Une idée du bonheur
Bref, « Philosophie de la réalisation personnelle » est un livre de développement personnel, non pas de philosophie.
Le philosophe Michel Lacroix revient dans ce livre sur la vie contemplative et la vie active, cette dernière ayant supplanté la première au XIXe siècle alors qu’elle avait cours depuis l’Antiquité. « Il y aurait beaucoup à dire sur la fascination que l’action exerce sur les philosophes depuis deux siècles (Les vertus de l’action, p. 22) » souligne monsieur Lacroix.
Cette promotion de l’action est même un des signes distinctifs de ce qu’il est convenu d’appeler la « modernité ». Et puisque ce livre a pour but d’exposer ma philosophie de la réalisation, le lecteur ne trouver pas déplacé que j’exprime ici mon point de vue. Je considère que cette primauté de l’action est justifiée. Le pense comme Malraux que « nous sommes la somme de nos actes ». Ma conviction est que l’action constitue une condition sine qua non du développement personnel. Si nous voulons nous réaliser, il faut que nous réalisions quelque chose. (…) J’inscris donc le principe d’action par les fondamentaux du développement personnel.
LACROIX, Michel, Philosophie de la réalisation personnelle, Première leçon – Les vertus de l’action, coll. Réponses, Éditions Robert Laffont, Paris, 2013, p.23.
P.S. Les mots soulignés remplacent les mots en italique dans le texte original du livre.
De l’époque moderne à notre époque (l’époque contemporaine) on ne peut certainement pas nier que ça bouge beaucoup, et même beaucoup trop, du moins, pour ceux et celles qui se voient bousculés par une vie devenue exagérément rapide et agitée. Ça bouge de partout en tout temps. Le monde se presse dans la vie active la tête baissée ou sans plus de temps pour réfléchir, réfléchir avant d’agir. Trépidante, frénétique, la vie avale le temps plus rapidement qu’il ne passe réellement.
« Le temps, notre grand ennemi, nous vaincra si nous hésitons un instant pour réfléchir ou douter. Dans notre panique, nous nous précipitions vers la certitude ».
Saul, John Ralston, La civilisation inconsciente, Éditions Payot & Rivages, Paris, 1997, p. 175.
Pourtant, « les gens n’ont jamais eu autant de temps ».
Saul, John Ralston, La civilisation inconsciente, Éditions Payot & Rivages, Paris, 1997, p. 175-176.
« Rien que depuis le début du siècle (XXè), l’espérance de vie des Occidentaux a augmenté de vingt-cinq ans. Nous disposons à présent de 50 % de temps de plus pour faire ce dont nous avons envie. Compte tenu de notre niveau de vie général et de notre éducation, nous pourrions utiliser au moins un peu de ce temps pour réfléchir davantage et remplacer la course à la certitude par une promenade vers le doute.
Pourtant, il semble qu’avoir 50 % de temps en plus ait produit l’effet contraire. Nous nous sommes retranchés dans ces peurs inconscientes qui nous rendent sensibles à la menace du temps. Ces dernières années, les menaces de la nécessité, du « maintenant ou jamais », ont influencé avec une remarquable facilité et à maintes reprises des publics très complexes. »
Saul, John Ralston, La civilisation inconsciente, Éditions Payot & Rivages, Paris, 1997, p. 175-176.
Si le philosophe Michel Lacroix met en garde ses lecteurs contre les dérives de l’action en pointant d’abord du doigt l’hyperactivité :
D’abord, l’hyperactivité. Mon action peut se transformer en une obsession. Elle peut dégénérer en névrose. Je peux devenir “accro” à l’action. Je peux la consommer comme une drogue. (…)
LACROIX, Michel, Philosophie de la réalisation personnelle, Première leçon – Les vertus de l’action, coll. Réponses, Éditions Robert Laffont, Paris, 2013, p.24.
N’est-ce pas plutôt un signe des temps ? N’est-ce pas la société d’aujourd’hui qui conditionne les hommes et les femmes à l’hyperactivité ? N’est-ce pas là une faute de la courte vue des philosophes de la réalisation de soi depuis deux siècles ? Cette perte de contrôle des vertus de l’action au sein de la société atteint maintenant nos enfants. On parle maintenant du « syndrome » de l’hyperactivité, d’une « maladie » « jusqu’à 70% génétique ». Le passage révolutionnaire de la vie contemplative à la vie active a-t-il engendrer au fil des deux derniers siècles un défaut génétique et neurologique, tel que le porposent certaines recherches scientifiques ?
Les origines génétiques du syndrome d’hyperactivité
C’est a priori une avancée importante dans la compréhension du syndrome d’hyperactivité que viennent de publier, sur le site du Lancet,[1] un groupe de chercheurs britanniques. Ils assurent avoir pu, pour la première fois, identifier les bases génétiques de ce syndrome qui associe des troubles de l’attention et de la concentration à un comportement hyperactif. On parle ici dans un relatif désordre de syndrome hyperkinétique, de dysfonction cérébrale minime ou encore, plus fréquemment de troubles déficitaires de l’attention avec hyperactivité (TDAH). Ces résultats ne manqueront pas de relancer la controverse récurrente quant à l’origine exacte de cette pathologie hautement handicapante. Pour les auteurs de ce travail, les choses sont claires : ce syndrome a une origine génétique expliquant des anomalies du développement cérébral ; et il ne doit en aucun cas être compris comme la résultante d’une «pure construction sociale». Ce travail a été coordonné et dirigé par le Dr Nigel M. Williams et le Pr Anita Thapar (Centre de neuropsychiatrie génétique et génomique, Université médicale de Cardiff).
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[1] Rare chromosomal deletions and duplications in attention-deficit hyperactivity disorder : a genome-wide analysis. http://www.thelancet.com. Published Online September 30, 2010. DOI:10.1016/S0140-6736(10)61109-9. Online/Comment : DOI:10.1016/S0140-6736(10)61192-0
Et que dire du stress, du mauvais stress, celui qui rend malade.
Le stress lié au travail est le plus souvent causé par une lourde charge de travail et la conciliation travail-vie personnelle
Plusieurs raisons peuvent expliquer le stress lié au travail; par exemple, lorsque l’on doit composer avec une lourde charge de travail ou concilier le travail et la vie personnelle. Des niveaux élevés de stress lié au travail peuvent entraîner des répercussions négatives sur la santé et des pertes d’heures et de revenus. Ces aspects sont liés au bien-être des personnes qui occupent un emploi et peuvent être mesurés à l’aide du Cadre statistique pour la mesure de la qualité de l’emploi. En avril 2023, des renseignements sur la santé mentale et le stress lié au travail ont été recueillis auprès de travailleurs de 15 à 69 ans, dans le cadre d’une série de suppléments à l’Enquête sur la population active.
Un peu plus de 4,1 millions de personnes ont déclaré éprouver des niveaux de stress lié au travail élevés ou très élevés, ce qui représente 21,2 % de l’ensemble des personnes en emploi. Les causes les plus courantes de stress lié au travail étaient une lourde charge de travail, qui touchait 23,7 % des personnes en emploi, ainsi que la conciliation du travail et de la vie personnelle (15,7 % des personnes en emploi). Les femmes (22,7 %) étaient plus susceptibles que les hommes (19,7 %) d’éprouver des niveaux de stress lié au travail élevés ou très élevés.
C’est bien beau la vie active mais les revers sont nombreux et affectent un part importante de la population.
Le philosophe Michel Lacroix écrit :
Un deuxième danger nous guette : le goût de la confrontation, la fascination pour le combat. car l’exaltation de l’action débouche sur une pure et simple apologie de la lutte. Elle se traduit alors par une célébration des valeurs de rivalité, des valeurs compétitives, agonistiques, concurrentielles, valeurs supposées être les seules capables de nous faire mûrir… Comme si la vérité de l’existence résidait dans la lutte de tous contre tous ! Comme si on ne pouvait se réaliser qu’en livrant on ne sait quel combat de la vie ! « Tout bonheur est dans la lutte », aimait à répéter Nietzsche. (…)
LACROIX, Michel, Philosophie de la réalisation personnelle, Première leçon – Les vertus de l’action, coll. Réponses, Éditions Robert Laffont, Paris, 2013, pp. 24-25.
Il y a effectivement des hommes et des femmes en compétition permanente, conditionnés par le modèle de société dans lequel nous vivons, ce que je ne supporte pas. Et que dire aussi des dépendants au succès matérialiste, tout aussi conditionné.
Il y a un autre piège dans lequel on risque de tomber. On peut entrer dans une logique du succès, en adoptant la maxime suivante : “ L’action que j’entreprends permettra mon développement personnel à la condition d’être couronnée de succès.. Elle sera favorable à mon épanouissement si et seulement si elle réussit… ” Et cette réussite, je vais être tenté, bien souvent, de la mesurer d’après des critères extérieurs, matériels, sociaux. Je l’évaluerai à l’aune du pouvoir que j’ai conquis, de l’argent que j’ai gagné, de la notoriété que j’ai acquise, de la popularité dont je jouis. Par là même, ma réalisation personnelle basculera dans le matérialisme ou bien elle se laissera ligoter par le regard des autres, ce qui la conduira à la vanité, à la superficialité. La logique du succès à tout prix est donc pernicieuse. Elle transforme insidieusement la réalisation de soi en aliénation de soi.
LACROIX, Michel, Philosophie de la réalisation personnelle, Première leçon – Les vertus de l’action, coll. Réponses, Éditions Robert Laffont, Paris, 2013, pp. 25-26.
Le philosophe ajoute à sa liste des dérives de l’action « l’obsession de la grandeur et de la supériorité ».
Ces observations sont justes et pertinentes. Elles appuient le premier conseil qu’il donne, à savoir « de ne pas donner prise à l’aristocratisme et à l’élitisme ».
(…) Plutôt que de parler en termes de hiérarchie, je préférerais qu’on s’exprime en termes de « diversité des styles d’existence ». Cette notion de diversité est, conjointement avec l’idée de liberté. le fil rouge de ce livre. Il n’y a pas un seul modèle de « vie bonne ». Il n’y a pas une manière et une seule manière de s’épanouir. Il n’y a pas une voie unique. Il y a une pluralité des styles d’existence. Les formes de la réalisation personnelle sont multiples. Et rien n’autorise à affirmer que certaines seraient plus nobles, plus élevées, plus admirables, plus respectables que les autres. (…)
LACROIX, Michel, Philosophie de la réalisation personnelle, Première leçon – Les vertus de l’action, coll. Réponses, Éditions Robert Laffont, Paris, 2013, pp. 26-27.
Mais encore faut-il que la personne prenne d’abord conscience que son style d’existence n’est pas le seul disponible. Certes, nous voyons des gens agir différemment de nous mais en tirons-nous la conclusion qu’il y a plusieurs styles d’existence, tout occupés que nous sommes par notre propre style. Nous sommes davantage portés à juger les comportements différents du nôtre, ce que déconseille le philosophe Michel Lacroix, sans nous poser la question à savoir s’il s’agit en fait d’un autre style d’existence.
Un jour, alors dans la trentaine, j’ai sollicité et obtenu le poste de premier directeur général d’une toute nouvelle fondation dans le milieu de la santé. Mon objectif de compagne de financement s’élevait à un million de dollars. J’ai alors procédé comme je l’avais fait dans le passé, fort de mes succès. Mais à mi-chemin tout a bloqué au conseil d’administration de la fondation. Pour débloquer la situation, qui impliquait le président, j’ai sollicité les autres membres du C.A. Il va sans dire que le président fulminait et mon poste fut mis en jeu. Le président me convoqua à une rencontre privée, entre lui et moi, pour me dire que si j’atteignais toujours mes objectifs, il n’en doutait pas, après mon passage, il fallait construire un cimetière tellement je bousculais les gens sur mon chemin. C’est là que j’ai compris qu’il n’y avait pas un seul style d’existence, le mien. Il y en avait d’autre tel que celui du président et des autres membres du cas. Ce fut une prise de conscience douloureuse ; mon estime de soi venait de tomber à genoux et c’est peu dire.
J’ai quitté mon poste après l’atteinte de mon objectif de campagne. Je répondais à une autre demande en même temps en travaillant comme conseiller en marketing et en publicité pour une entreprise privée dans le domaine agroalimentaire. Ma conclusion : retenir les services à temps plein d’un consultant en marketing. J’ai offert mes services mais j’ai perdu le contrat aux mains d’une firme plus organisée et plus rusée que moi en tant que travailleur indépendant (autonome). C’était la première fois de ma vie professionnelle que je perdais un contrat.
J’ai vite décidé de créer une entreprise pour lutter à armes égales avec un véritable statut d’entrepreneur. Je me suis inscrit à cours entrepreneuriat. Le premier cours s’intitulait « Connaissance de soi » et je me demandais bien pourquoi. La réponse : il y a plusieurs types d’entrepreneur. Il me fallait déterminer de quel type j’étais entre fonceur, analytique, aimable et expressif. Mais je ne parvenais pas à me situer. J’avais l’impression qu’un train venait de me passer sur le corps (perte de mon premier contrat) et que je ne savais plus où j’en étais vraiment. J’ai donc demander à l’enseignante, psychologue de profession, s’il était possible qu’un changement de style s’était opéré en moi. Réponse : oui, à la suite d’une révélation ou d’un traumatisme. Finalement, grâce à un exercice avec mes collègues de classe, j’ai compris que je venais de passer passé du style fonceur (après qui on doit ériger un cimetière) à celui d’analytique. Je n’avais plus réponse à tout sur-le-champ. Désormais, je réfléchissais ; la réponse ne venait plus instantanément.
Alors, je ne peux qu’être en parfait accord avec l’idée qu’il y a plusieurs styles d’existence tel que mise de l’avant par le philosophe Michel Lacroix. Mais, il y a toujours un « mais », la prise de conscience de son style d’existence exige une prise de recul — une prise de conscience — pour enclencher le processus, ce qui vient selon l’enseignante psychologue et plusieurs autres sources, à la suite d’un traumatisme ou d’une révélation. Il ne s’agit donc pas de soutenir qu’il y a plusieurs styles d’existence et que nous sommes libres de choisir celui qui nous convient pour en révéler l’évidence à la conscience.
Notre style d’existence est acquis inconsciemment au fil de notre vie auprès de notre famille, nos ami(e)s, nos enseignants, etc. Au départ, nous nous sentons libres dans notre style d’existence même si, en réalité, nous y comme confiné. Il n’est pas aisé de prendre conscience du conditionnement de notre style d’existence et de s’en libérer. Notre style d’existence a des racines beaucoup plus profondes que la psychologie. Il émerge de notre philosophie, de nos valeurs et de nos convictions ancrées au plus profond de soi. Par conséquent, une approche psychologique peut voiler la seule et unique approche utile, l’approche philosophique.
Enfin, il est temps de revenir à la bifurcation entre la vita activa et la vita contemplativa qui s’est ouverte sur le chemin des hommes au début de XIXe siècle, et que nous avons évoquée plus haut. Placés devant les deux branches de cette alternative, nos ancêtres se sont engagés dans la voie de la vita activa. Ainsi, un déséquilibre s’est créé entre les deux polarité de l’existence, et si tant de gens souffrent aujourd’hui, si nous sommes nombreux à éprouver un sentiment d’aliénation, c’est en partie parce que, depuis cette époque, le ressort de l’action a été constamment surtendu. Il faut rétablir un juste milieu entre la vie active et la vie contemplative, ce juste milieu qui, en définitive, est la meilleure définition de la sagesse. Comment y parvenir ? En réinjectant dans nos existences les valeurs, trop souvent oubliées, de lenteur et de tranquillité. (…)
LACROIX, Michel, Philosophie de la réalisation personnelle, Première leçon – Les vertus de l’action, coll. Réponses, Éditions Robert Laffont, Paris, 2013, p. 33.
P.S. Les mots soulignés remplacent les mots en italique dans le texte original du livre.
DOSSIER : « RATIONALITÉ PRATIQUE ET MOTIVATION MORALE »
Vertu éthique et rationalité pratique chez Aristote.
Note sur la notion d’hexis proairetikê
Pierre-Marie MOREL
« La vertu est donc une inclination à décider, située dans un juste milieu relatif à nous fixé par la raison et comme le fixerait le prudent. C’est en outre un juste milieu entre deux vices, l’un par excès et l’autre par défaut, et cela parce que les uns sont en défaut et les autres en excès par rapport à ce qui doit être, dans le domaine des affections et dans celui des actions, alors que la vertu trouve et choisit le milieu. C’est pourquoi, selon la substance, c’est-à-dire selon l’énonciation de ce qui fait son essence même, la vertu est un juste milieu, bien que selon le meilleur et le convenable, ce soit un sommet. »
Raphaël Fiévez, travailleur social et détenteur d’un certificat en philosophie.
Il habite à Montréal.
Publié le 14 nov. 2023 Libre opinion
Le juste milieu comme manière d’être et d’agir
Aristote, un philosophe de la Grèce antique, a développé une idée maîtresse de la philosophie morale. Ce concept est la médiété, ou le juste milieu. En bref, il est question de rechercher la voie et l’action dans un juste milieu entre deux excès. (…)
Un juste milieu dans la réalisation de soi entre la vie contemplative et la vie active rime souvent aujourd’hui en un juste milieu entre la vie professionnelle et la vie familiale. On parle souvent de la réconciliation Travail/Famille, le temps et la charge de travail empiétant sur le temps disponible et en reste pour la vie familiale (ou la vie personnelle). Tout est ici une question de déséquilibre dans le partage du temps disponible dans une journée, une semaine, un mois, une année. Mais le temps lui-même n’est pas en cause car personne ne peut ajouter du temps à une journée, lui attribuer, par exemple, deux heures de plus. La cause réside dans la philosophie de vie en tension avec les impératifs de la vie active associée, notamment, à la société de consommation ou, si vous préférez, au matérialisme. La psychologie de l’individu est prise en otage et seule la philosophie peut la libérer. Le juste milieu est un concept attrayant mais l’adopter dans son style d’existence implique souvent un cassure révolutionnaire qui demande beaucoup de courage et de nouvelles valeurs.
La Grande Démission
En ondes et sur le web – Documentaire de 60 minutes.
Isabelle Maréchal rencontre des travailleurs de la classe moyenne qui ont démissionné afin de donner un plus grand sens à leur travail.
Dans la foulée de son documentaire choc, Les moyens de la classe moyenne, Isabelle Maréchal reprend la route à la rencontre de travailleurs épuisés, stressés et démotivés qui ont choisi de quitter leur emploi. Ces démissionnaires ont pris leur courage à deux mains et claqué la porte de la « chop en quête d’un nouveau sens à leur vie.
États-Unis : les dessous de la « Grande démission » • FRANCE 24
Les économistes l’appellent « la Grande démission » (« Great Resignation ») : une vague sans précédent de travailleurs ayant quitté leur emploi aux États-Unis depuis le début de la pandémie de Covid-19. Soit 4,5 millions de personnes en novembre 2021, un nombre jamais enregistré par le ministère du Travail en 20 ans. Le secteur le plus touché est celui de l’hôtellerie et de la restauration, suivi par ceux des loisirs, de la vente au détail et de la santé. Par ailleurs, de vastes mouvements de grève ont eu lieu dans plusieurs grandes entreprises américaines pour réclamer plus d’avantages sociaux. Le rapport de force entre patrons et employés semble s’inverser. Que se passe-t-il au pays du capitalisme ? Un reportage de Fanny Allard.
« Grande démission » : perdre sa vie à la gagner ? • FRANCE 24
Depuis le printemps 2021, les statisticiens observent un phénomène sans précédent aux États-Unis. En un an, des millions de personnes – 1 salarié sur 3 – ont quitté volontairement leur emploi. Ce « virus », baptisé la « Grande démission, a démarré dans la foulée de la pandémie de Covid-19. Il gagne peu à peu le reste du monde : en France, 1 salarié sur 6 a quitté son poste pendant la même période. Sans compter les jeunes diplômés d’écoles prestigieuses comme Agro Paris Tech qui décident de « bifurquer ». Quelle mouche les pique ? Est-ce un grand coup de flemme ou s’agit-il d’autre chose ?
Bref, la révolution du rapport au travail et au style d’existence est déjà en marche suite au traumatisme de la pandémie mondiale du Covid 19.
Dans la deuxième leçon, Libérer son potentiel, le philosophe Michel Lacroix propose deux avenues : 1. Sous le signe de la transcendance — « être plus humain, ou se réaliser, consiste à modeler sa vie conformément à un modèle transcendant ». ; 2. L’idéal d’autoréalisation — « Me réaliser, énonce-t-elle (la deuxième option), consiste à développer quelque chose qui se trouve en moi et qui attend d’être cultivé ».
Je soulève un problème avec la première option. Aujourd’hui, les risques sont grands si on modèle sa vie à un modèle transcendant ( « Qui suppose un ordre de réalités supérieur, un principe extérieur et supérieur (opposé à immanent) » Dictionnaire Le Robert ). On ne sait jamais si le modèle ne va pas sombrer dans la déchéance, ou être déchu et ainsi nous trahir. Je préfère donc et de loin, la seconde option.
(…) Nous avons l’immense chance de vivre dans une civilisation où nous jouissons du droit de nous épanouir comme nous l’entendons. Nous pouvons choisir librement notre voie. Aucune autorité ne nous prescrit un modèle de « vie bonne ». Aucune autorité ne nous oblige à suivre la voie religieuse, et encore moins, d’une religion particulière, Aucune autorité ne peut, inversement, nous interdire (comme jadis en URSS) de suivre, si nous le désirons, la voie religieuse. Puisse à l’avenir notre société démocratique préserver cette liberté de conscience, sans laquelle la réalisation de soi deviendrait un mot vide de sens.
LACROIX, Michel, Philosophie de la réalisation personnelle, Deuxième leçon – Libérer son potentiel, coll. Réponses, Éditions Robert Laffont, Paris, 2013, p. 43.
P.S. Le mot souligné remplace le mot en italique dans le texte original du livre.
Tout cela s’inscrit dans un idéal car, dans la réalité, nous sommes constamment sous influence et conditionnés, consciemment et inconsciemment, par notre civilisation, même dite démocratique. Tout d’abord, si aucune autorité nous dicte un modèle de « vie bonne », elle nous impose tout de même des limites dans les lois en vigueur. Notre liberté est encadrée par les lois. Ensuite, si nous jouissons effectivement de la liberté de conscience, cette dernière subit un conditionnement culturel, social, économique, etc. Évidemment, si nous comparons notre liberté de conscience avec celle offerte par les régimes politiques et/ou religieux totalitaires, notre liberté nous apparaît comme une « chance », la chance d’être né dans un régime démocratique libre. Notre lieu de naissance nous favorise ou défavorise, selon le régime en place. Mais, peu importe le régime en place, ce dernier nous conditionne. Pour vivre libre, il faut souvent accepter de vivre en marge, c’est-à-dire en se soustrayant à certains conditionnements et en s’accordant certains privilèges et avantages que ne peut se permettre la majorité des individus.
Au sous-titre, Les deux moteurs de la réalisation personnelle (chapt. Libérer son potentiel), le philosophe Michel Lacroix nous dit :
(…) L’être humain se définit d’une part parce que qu’il est capable de faire, et d’autre part par ce qu’il a envie de faire ». Il y a des aptitude et des motivations. Les aptitudes et les motivations : tels sont les deux moteurs de la réalisation personnelle.
LACROIX, Michel, Philosophie de la réalisation personnelle, Deuxième leçon – Libérer son potentiel, coll. Réponses, Éditions Robert Laffont, Paris, 2013, p. 45.
P.S. Les mots soulignés remplacent les mots en italique dans le texte original du livre.
Personnellement, je ne me suis pas casser la tête et j’ai découvert ce que j’étais capable de faire (dans la vie), dès ma quatrième année d’étude secondaire, vers l’âge de 14 ou 15 ans, en choisissant entre deux ressources : les nombres ou les lettres de l’alphabet. J’ai choisi ces dernières. J’allais gagner ma vie et me réaliser en écrivant puisque je ne comprenais rien aux mathématiques, surtout lorsque j’ai constaté que l’algèbre utilisait des lettres de l’alphabet qui, dans ma compréhension, étaient réservées en exclusivité à l’écriture. Quant à mes motivations, si je me réfère aux nombreux projets scolaires et individuels que j’ai réalisés au cours de mon adolescence, je voulais contribuer à la résolution de problèmes que rencontrait le monde dans lequel j’évoluais, notamment ceux engendrés par un défaut de formulation et de communication. À cet époque, tout problème en était un de communication. Avant même d’être un homme, j’avais une vision du monde qui me semblait peu commune, en partie contestataire, que je me devais de reconnaître comme un potentiel à explorer. Notez que je ne dis pas : « à exploiter ».
Au cours de mes lectures, j’annote ici et là le mot « NON » en lettres majuscules ou un « ? » point d’interrogation pour me rappeler des passages avec lesquels je ne suis pas d’accord ou qui me questionne. Dans le chapitre « Deuxième leçon – Libérer son potentiel », j’ai plusieurs « NON » et « ? ». Le philosophe Michel Lacroix me semble un peu trop psychologisant, pour un philosophe. Les références à la psychologie finissent toujours par me tomber sur les nerfs parce qu’elles demeurent, faute de moyens de cette science humaine, trop interprétatives et trop subjectives, ce qui la contraint à la surface du sujet plutôt qu’à sa profondeur.
Par exemple, le philosophe Michel Lacroix donne voie au psychanalyste Alfred Adler.
(…) Nous sommes tous, expliquait Adler, habités par un complexe d’infériorité, à commencer par celui que, enfants, nous ressentions de simple fait que nous vivions auprès d’adultes qui nous semblaient plus grands, plus intelligents, plus savants, plus adroits, plus courageux, plus sages, plus forts que nous. Auprès de ces grandes personnes, nous nous sentions petits, faibles, ignorants, limités, incapables. (…)
LACROIX, Michel, Philosophie de la réalisation personnelle, Deuxième leçon – Libérer son potentiel, coll. Réponses, Éditions Robert Laffont, Paris, 2013, p. 52.
Je n’ai jamais ressenti une telle infériorité au cours de mon enfance, pas plus que durant mon adolescence. Les allégations d’Alfred Adler mettant tous les hommes, y compris tous les enfants, dans le même panier fournissent la preuve de ce pourquoi on dit de la psychanalyse qu’elle est une « fausse science ». Et, sous la plume du philosophe Michel Lacroix, Alfred Adler a soutenu que « La conscience douloureuse de notre infériorité nous a incité à nous élever au même niveau que ceux qui, déjà installés dans l’âge adulte, nous regardaient avec condescendance ». Je ne me suis jamais senti regardé avec condescendance au cours de mon enfance et de mon adolescence. Et je ne me sentais pas inférieur mais différent. Mon entrée dans l’âge adulte n’a pas reposé sur le désir de m’élever au même niveau de les adultes. J’allais être un adulte par la force de l’âge, de l’expérience et de l’éducation. Et je ne suis pas né sur une autre planète. Quand la philosophie s’attarde à la psychologie, elle perd sa crédibilité.
Le philosophe Michel Lacroix écrit « Aussi, sans hésiter, je range la pensée positive parmi les fondamentaux de ma philosophie » il me dit fonder sa philosophie sur la psychologie. La pensée positive en lutte contre la pensée négative, quelle histoire de fou ! « Pensées limitantes », « déprogrammation », « reprogrammation », c’est le développement personnel dans toutes ses limites de la compréhension de l’Être humain. C’est le développement personnel qui est dans la Caverne de Platon.
Passons par-dessus la troisième leçon, La place d’autrui (dans la réalisation de soi), pour atteindre la quatrième et dernière leçon, L’enracinement et la liberté. Le philosophe Michel Lacroix nous parle de « La communautarisation du moi » :
Ainsi conçue, la réalisation de soi ne saurait prétendre être une « invention de soi », « une création de soi ». Elle s’écarte de l’idéal que nous avons dessiné dans ce livre, celui de l’autoréalisation. Elle tend à être un simple marquage identitaire. Elle se réduit à une communautarisation de soi. C’est contre cette communautarisation de soi que je m’élève. Je la considère comme une régression, car elle ne tien pas compte des deux choses essentielles : la liberté de l’homme et sa raison.
(…) Les individus sont épinglés à leurs particularismes ethniques, linguistiques, religieux. Ils héritent de leur appartenance ; ils ne la choisissent pas. Ils sont membres de leur communauté en vertu d’un déterminisme qui pèse sur eux. À aucun moment ils sont appelés à donner leur consentement. Leurs appartenance relève du subi et non du volontaire. Il se voient donc privé, de facto, d’un droit qui, à mes yeux, est une condition sine qua non de l’accomplissement personnel : le droit à la rupture, le droit à la désaffiliation.
LACROIX, Michel, Philosophie de la réalisation personnelle, Quatrième leçon – L’enracinement et la liberté, coll. Réponses, Éditions Robert Laffont, Paris, 2013, pp. 86-87.
À celui ou celle qui vit sous la loi pesante, parfois, aliénante, d’une tradition communautaire, j’adresse donc le message suivant : « Ton identité profonde ne réside pas dans ton appartenance communautaire. Elle réside dans ta faculté de consentir, dans ton pouvoir de décider, dans ta capacité d’adhérer. N’accepte pas que ton existence soit préemptée par un modèle de vie bonne. C’est à toi et à toi seul qu’il appartient de choisir ton style d’existence. L’identité que tu t’inventeras vaudra toujours mieux que celle que tu te contenteras de revendiquer. Et souviens-toi que le bien le plus précieux de l’homme est la liberté de l’esprit. »
LACROIX, Michel, Philosophie de la réalisation personnelle, Quatrième leçon – L’enracinement et la liberté, coll. Réponses, Éditions Robert Laffont, Paris, 2013, pp. 94-95.
P.S. Les mots soulignés remplacent les mots en italique dans le texte original du livre.
Que dire de plus sinon que d’applaudir à cette mise en garde essentielle pour vivre une réalisation de soi en toute liberté d’esprit.
J’accorde quatre étoiles sur cinq
au livre PHILOSOPHIE DE LA RÉALISATION DE SOI —SE CONSTRUIRE DANS LA LIBERTÉ du philosophe MICHEL LACROIX paru aux ÉDITIONS ROBERT LAFFONT en 2013 .
Témoignage de ma recherche personnelle au sujet de la philothérapie (philosophie + thérapie) ou, si vous préférez, de la pratique de la philosophie en clinique. Il s’agit de consultation individuel ou de groupe offert par un philosophe praticien pour nous venir en aide. Elle se distingue de la « psychothérapie » (psychologie + thérapie) en ce qu’elle utilise des ressources et des procédés et poursuit de objectifs propres à la philosophie. On peut aussi parler de « philosophie appliquée ».
La philothérapie gagne lentement mais sûrement en popularité grâce à des publications de plus en plus accessibles au grand public (voir l’Introduction de ce dossier).
L’un des titres tout en haut de la liste s’intitule « Platon, pas Prozac! » signé par Lou Marinoff paru en français en l’an 2000 aux Éditions Logiques. Ce livre m’a ouvert à la philothérapie.
L’auteur est professeur de philosophie au City College de New York, fondateur de l’Association américaine des praticiens de la philosophie (American Philosophical Practitioners Association) et auteurs de plusieurs livres.
Présentation du livre Sur le divan d’un philosophe – La consultation philosophie : une nouvelle démarche pour se connaître, changer de perspective, repenser sa vie suivie de mes commentaires de lecture.
Cet article présente et relate ma lecture du livre « Philosopher pour se retrouver – La pratique de la philo pour devenir libre et oser être vrai », de Laurence Bouchet aux Éditions Marabout. Malheureusement ce livre n’est plus disponible à la vente tel que mentionné sur le site web de l’éditeur. Heureusement on peut encore le trouver et l’acheter dans différentes librairies en ligne.
Le livre « La consultation philosophique – L’art d’éclairer l’existence » de Madame Eugénie Vegleris aux Éditions Eyrolles se classe en tête de ma liste des meilleurs essais que j’ai lu à ce jour au sujet de la « philothérapie ».
À ce jour, tous les livres dont j’ai fait rapport de ma lecture dans ce dossier sont l’œuvre de philosophes consultants témoignant de leurs pratiques fondées sur le dialogue. Le livre « Guérir la vie par la philosophie » de Laurence Devillairs aux Presses universitaires de France (PUF) diffère des précédents parce que l’auteure offre à ses lecteurs une aide direct à la réflexion sur différents thèmes.
J’ai lu ce livre à reculons. J’ai appliqué les feins dès les premières pages. L’objectivité sociologique de l’auteur m’a déplu. Ce livre présente aux lecteurs des observations, que des observations. L’auteur n’en tire aucune conclusion.
J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq parce qu’il m’a révélé les coulisses de la quête du bonheur au cœur de notre société néo-libérale. Je savais que cette obsession du bonheur circulait au sein de la population, notamment par le biais des coach de vie et des agents de développement personnel, mais je n’aurais jamais imaginé qu’elle cachait une véritable industrie soutenue par une idéologie psychologisante. Jusque-là, je ne connaissais de cette industrie que le commerce des livres et la montée en puissance des coachs de vie dédiés à la recherche du bonheur.
J’ai adoré ce livre. Il est dense, très dense. On ne peut pas le lire comme un roman. Me voici enfin devant un auteur qui dit tout, où, quand, comment il observe, comment il pense, comment il chemine, comment il voit, comment il entend, comment il anticipe, comment il tire ses conclusions… Bref, un auteur qui expose son propre système de pensée dans un essai plus que formateur pour le nôtre.
La lecture du livre «La consultation philosophique» signé par le philosophe praticien Oscar Brenifier (voir article #11 de notre dossier «Consulter un philosophe – Quand la philosophie nous aide») nous apprend qu’il adresse un document à ses clients potentiels. J’ai écrit à monsieur Brenifier pour lui demander s’il pouvait me faire parvenir ce document.
Cet article présente et relate ma lecture du livre du «La philo-thérapie» de Éric Suárez, Docteur en philosophie de l’Université Laval (Québec), philosophe praticien (Lausanne), publié en 2007 aux Éditions Eyrolles. Ce livre traite de la consultation philosophique ou, si vous préférez, de la philo-thérapie, d’un point de vue pratique. En fait, il s’agit d’un guide pour le lecteur intéressé à acquérir sa propre approche du philosopher pour son bénéfice personnel. Éric Suárez rassemble dans son ouvrage vingt exemples de consultation philosophiques regroupés sous cinq grands thèmes : L’amour, L’image de soi, La famille, Le travail et le Deuil.
Ce livre se caractérise par l’humour de son auteur et se révèle ainsi très aisé à lire. D’ailleurs l’éditeur nous prédispose au caractère divertissant de ce livre en quatrième de couverture : «Étudier in extenso la pensée des grands théoriciens et en extraire un mode de réflexion agissant est une mission impossible pour l’honnête homme/femme. C’est pourquoi l’auteur de cet ouvrage aussi divertissant que sérieux propose des voies surprenantes au premier abord, mais qui se révèlent fort praticables à l’usage. L’une passe par la rencontre avec la vie et la personnalité du philosophe : la voie des affinités électives».
Référencé par un auteur à mon programme de lecture, le livre «La philosophie comme manière de vivre» m’a paru important à lire. Avec un titre aussi accrocheur, je me devais de pousser plus loin ma curiosité. Je ne connaissais pas l’auteur Pierre Hadot : «Pierre Hadot (né à Paris, le 21 février 1922, et mort à Orsay, le 24 avril 20101) est un philosophe, historien et philologue français, spécialiste de l’Antiquité, profond connaisseur de la période hellénistique et en particulier du néoplatonisme et de Plotin. Pierre Hadot est l’auteur d’une œuvre développée notamment autour de la notion d’exercice spirituel et de la philosophie comme manière de vivre.» (Source : Wikipédia)
Jeanne Hersch, éminente philosophe genevoise, constate une autre rupture encore, celle entre le langage et la réalité : « Par-delà l’expression verbale, il n’y a pas de réalité et, par conséquent, les problèmes ont cessé de se poser (…). Dans notre société occidentale, l’homme cultivé vit la plus grande partie de sa vie dans le langage. Le résultat est qu’il prend l’expression par le langage pour la vie même. » (L’étonnement philosophique, Jeanne Hersch, Éd. Gallimard.) / On comprend par là qu’aujourd’hui l’exercice du langage se suffit à lui-même et que, par conséquent, la philosophie se soit déconnectée des problèmes de la vie quotidienne.» Source : La philosophie, un art de vivre, Collectif sous la direction de Jean-François Buisson, Les Éditions Cabédita, 2021, Préface, p. 9.
J’ai trouvé mon bonheur dès l’Avant-propos de ce livre : «Laura Candiotto, en insistant sur le rôle joué par les émotions dans le dialogue socratique ancien et sur l’horizon éthique de celui-ci, vise à justifier théoriquement un «dialogue socratique intégral», c’est-à-dire une pratique du dialogue socratique qui prend en compte des émotions pour la connaissance.» Enfin, ai-je pensé, il ne s’agit plus de réprimer les émotions au profit de la raison mais de les respecter dans la pratique du dialogue socratique. Wow ! Je suis réconforté à la suite de ma lecture et de mon expérience avec Oscar Brenifier dont j’ai témoigné dans les articles 11 et 12 de ce dossier.
Lou Marinoff occupe le devant de la scène mondiale de la consultation philosophique depuis la parution de son livre PLATON, PAS PROJAC! en 1999 et devenu presque’intantément un succès de vente. Je l’ai lu dès sa publication avec beaucoup d’intérêt. Ce livre a marqué un tournant dans mon rapport à la philosophie. Aujourd’hui traduit en 27 langues, ce livre est devenu la bible du conseil philosophique partout sur la planète. Le livre dont nous parlons dans cet article, « La philosophie, c’est la vie – Réponses aux grandes et aux petites questions de l’existence », est l’une des 13 traductions du titre original « The Big Questions – How Philosophy Can Change Your Life » paru en 2003.
J’ai acheté et lu « S’aider soi-même » de Lucien Auger parce qu’il fait appel à la raison : « Une psychothérapie par la raison ». Les lecteurs des articles de ce dossier savent que je priorise d’abord et avant tout la philothérapie en place et lieu de la psychothérapie. Mais cette affiliation à la raison dans un livre de psychothérapie m’a intrigué. D’emblée, je me suis dit que la psychologie tentait ici une récupération d’un sujet normalement associé à la philosophie. J’ai accepté le compromis sur la base du statut de l’auteur : « Philosophe, psychologue et professeur ». « Il est également titulaire de deux doctorats, l’un en philosophie et l’autre en psychologie » précise Wikipédia. Lucien Auger était un adepte de la psychothérapie émotivo-rationnelle créée par le Dr Albert Ellis, psychologue américain. Cette méthode trouve son origine chez les stoïciens dans l’antiquité.
J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq et je peux même en rajouter une de plus, une sixième, pour souligner son importance et sa pertinence. Il faut le lire absolument ! Je le recommande à tous car il nous faut tous sortir de ce monde où l’opinion règne en roi et maître sur nos pensées.
Dans la première partie de ce rapport de lecture du livre « Penser par soi-même – Initiation à la philosophie » de Michel Tozzi, je vous recommandais fortement la lecture de ce livre : « J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq et je peux même en rajouter une de plus, une sixième, pour souligner son importance et sa pertinence. Il faut le lire absolument ! Je le recommande à tous car il nous faut tous sortir de ce monde où l’opinion règne en roi et maître sur nos pensées.» Je suis dans l’obligation d’ajouter cette deuxième partie à mon rapport de lecture de ce livre en raison de ma relecture des chapitres 6 et suivants en raison de quelques affirmations de l’auteur en contradiction avec ma conception de la philosophie.
J’accorde au livre Agir et penser comme Nietzsche de Nathanaël Masselot cinq étoiles sur cinq. Aussi facile à lire qu’à comprendre, ce livre offre aux lecteurs une excellente vulgarisation de la philosophie de Friedricha Wilhelm Nietzsche. On ne peut pas passer sous silence l’originalité et la créativité de l’auteur dans son invitation à parcourir son œuvre en traçant notre propre chemin suivant les thèmes qui nous interpellent.
Tout commence avec une entrevue de Myriam Revault d’Allonnes au sujet de son livre LA FAIBLESSE DU VRAI à l’antenne de la radio et Radio-Canada dans le cadre de l’émission Plus on de fous, plus on lit. Frappé par le titre du livre, j’oublierai le propos de l’auteur pour en faire la commande à mon libraire.
Le développement personnel fourmille de personnes de tout acabit qui se sont improvisées conseillers, coachs, thérapeutes, conférenciers, essayistes, formateurs… et auxquelles s’ajoutent des praticiens issus des fausses sciences, notamment, divinatoires et occultes, des médecines et des thérapies alternatives. Bref, le développement personnel attire toute sorte de monde tirant dans toutes les directions.
Je n’aime pas cette traduction française du livre How we think de John Dewey. « Traduit de l’anglais (États-Unis) par Ovide Decroly », Comment nous pensons parait aux Éditions Les empêcheurs de penser en rond / Seuil en 2004. – Le principal point d’appui de mon aversion pour traduction française repose sur le fait que le mot anglais « belief » est traduit par « opinion », une faute majeure impardonnable dans un livre de philosophie, et ce, dès les premiers paragraphes du premier chapitre « Qu’entend-on par penser ? »
Hier j’ai assisté la conférence Devenir philothérapeute : une conférence de Patrick Sorrel. J’ai beaucoup aimé le conférencier et ses propos. J’ai déjà critiqué l’offre de ce philothérapeute. À la suite de conférence d’hier, j’ai changé d’idée puisque je comprends la référence de Patrick Sorrel au «système de croyance». Il affirme que le «système de croyance» est une autre expression pour le «système de penser». Ce faisant, toute pensée est aussi une croyance.
J’éprouve un malaise face à la pratique philosophique ayant pour objectif de faire prendre conscience aux gens de leur ignorance, soit le but poursuivi par Socrate. Conduire un dialogue avec une personne avec l’intention inavouée de lui faire prendre conscience qu’elle est ignorante des choses de la vie et de sa vie repose sur un présupposé (Ce qui est supposé et non exposé dans un énoncé, Le Robert), celui à l’effet que la personne ne sait rien sur le sens des choses avant même de dialoguer avec elle. On peut aussi parler d’un préjugé philosophique.
Si votre opinion est faite et que vous n’êtes pas capable d’en déroger, vous êtes prisonnier de votre opinion. Si votre opinion est faite et que vous êtes ouvert à son évolution ou prêt à l’abandonner pour une autre, vous êtes prisonnier de l’opinion. Si votre opinion compte davantage en valeur et en vérité que les faits, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si votre opinion est la seule manière d’exprimer vos connaissances, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si vous pensez que l’opinion est le seul résultat de votre faculté de penser, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si vous prenez vos opinion pour vraies, vous êtes prisonnier de vos opinions.
J’ai mis beaucoup de temps à me décider à lire « La pratique philosophique » de Jérôme Lecoq. L’auteur est un émule d’Oscar Brenifier, un autre praticien philosophe. J’ai vécu l’enfer lors de mes consultations philosophiques avec Oscar Brenifier. Ainsi toute association de près ou de loin avec Oscar Brenifier m’incite à la plus grande des prudences. Jérôme Lecoq souligne l’apport d’Oscar Brenifier dans les Remerciements en première page de son livre « La pratique philosophique ».
Quelle est la différence entre « savoir » et « connaissance » ? J’exprime cette différence dans l’expression « Je sais parce que je connais ». Ainsi, le savoir est fruit de la connaissance. Voici quatre explications en réponse à la question « Quelle est la différence entre savoir et connaissance ? ».
J’ai décidé de publier les informations au sujet des styles interpersonnels selon Larry Wilson parce que je me soucie beaucoup de l’approche de la personne en consultation philosophique. Il m’apparaît important de déterminer, dès le début de la séance de philothérapie, le style interpersonnel de la personne. Il s’agit de respecter la personnalité de la personne plutôt que de la réprimer comme le font les praticiens socratiques dogmatiques. J’ai expérimenté la mise en œuvre de ces styles inter-personnels avec succès.
Le livre « La confiance en soi – Une philosophie » de Charles Pépin se lit avec une grande aisance. Le sujet, habituellement dévolue à la psychologie, nous propose une philosophie de la confiance. Sous entendu, la philosophie peut s’appliquer à tous les sujets concernant notre bien-être avec sa propre perspective.
J’ai vécu une sévère répression de mes émotions lors deux consultations philosophiques personnelles animées par un philosophe praticien dogmatique de la méthode inventée par Socrate. J’ai témoigné de cette expérience dans deux de mes articles précédents dans ce dossier.
Vouloir savoir être au pouvoir de soi est l’ultime avoir / Le voyage / Il n’y a de repos que pour celui qui cherche / Il n’y a de repos que pour celui qui trouve / Tout est toujours à recommencer
Que se passe-t-il dans notre système de pensée lorsque nous nous exclamons « Ah ! Là je comprends » ? Soit nous avons eu une pensée qui vient finalement nous permettre de comprendre quelque chose. Soit une personne vient de nous expliquer quelque chose d’une façon telle que nous la comprenons enfin. Dans le deux cas, il s’agit d’une révélation à la suite d’une explication.
Âgé de 15 ans, je réservais mes dimanches soirs à mes devoirs scolaires. Puis j’écoutais l’émission Par quatre chemins animée par Jacques Languirand diffusée à l’antenne de la radio de Radio-Canada de 20h00 à 22h00. L’un de ces dimanches, j’ai entendu monsieur Languirand dire à son micro : « La lumière entre par les failles».
Le succès d’une consultation philosophique (philothérapie) repose en partie sur la prise en compte des biais cognitifs, même si ces derniers relèvent avant tout de la psychologie (thérapie cognitive). Une application dogmatique du dialogue socratique passe outre les biais cognitifs, ce qui augmente les risques d’échec.
Depuis mon adolescence, il y a plus de 50 ans, je pense qu’il est impossible à l’Homme d’avoir une conscience pleine et entière de soi et du monde parce qu’il ne la supporterait pas et mourrait sur le champ. Avoir une pleine conscience de tout ce qui se passe sur Terre et dans tout l’Univers conduirait à une surchauffe mortelle de notre corps. Il en va de même avec une pleine conscience de soi et de son corps.
Le Dr Jean-Christophe Seznec, psychiatre français, a été interrogé par la journaliste Pascale Senk du quotidien Le Figaro au sujet de son livre Savoir se taire, savoir parler, coécrit avec Laurent Carouana et paru en 2017. Le titre de l’article a retenu mon attention : Psychologie: «il faut sortir de l’hystérie de la parole».
Reproduction de l’article « Comment dialoguer de manière constructive ? », un texte de Julien Lecomte publié sur son site web PHILOSOPHIE, MÉDIAS ET SOCIÉTÉ. https://www.philomedia.be/. Echanger sur des sujets de fond est une de mes passions. Cela fait plusieurs années que je m’interroge sur les moyens de faire progresser la connaissance, d’apprendre de nouvelles choses. Dans cet article, je reviens sur le cheminement qui m’anime depuis tout ce temps, pour ensuite donner des pistes sur les manières de le mettre en pratique concrètement.
Dans le récit initiatique, il s’agit de partir du point A pour aller au point B afin que le lecteur ou l’auditeur chemine dans sa pensée vers une révélation permettant une meilleure compréhension de lui-même et/ou du monde. La référence à la spirale indique une progression dans le récit où l’on revient sur le même sujet en l’élargissant de plus en plus de façon à guider la pensée vers une nouvelle prise de conscience. Souvent, l’auteur commence son récit en abordant un sujet d’intérêt personnel (point A) pour évoluer vers son vis-à-vis universel (point B). L’auteur peut aussi se référer à un personnage dont il fait évoluer la pensée.
Cet article présente un état des lieux de la philothérapie (consultation philosophique) en Europe et en Amérique du Nord. Après un bref historique, l’auteur se penche sur les pratiques et les débats en cours. Il analyse les différentes publications, conférences et offres de services des philosophes consultants.
J’ai découvert le livre « L’erreur de Descartes » du neuropsychologue Antonio R. Damasio à la lecture d’un autre livre : L’intelligence émotionnelle de Daniel Goleman. L’édition originale de ce livre est parue en 1995 en anglais et j’ai lu la traduction française à l’été 1998 parue un an auparavant chez Robert Laffont. Diplômé de l’université Harvard et docteur en psychologie clinique et développement personnel, puis journaliste au New York Times, où il suit particulièrement les sciences du comportement, Daniel Goleman nous informe dans son livre « L’intelligence émotionnel » au sujet de la découverte spectaculaire pour ne pas dire révolutionnaire de Antonio R. Damasio à l’effet que la raison a toujours besoin d’un coup des émotions pour prendre des décisions. Jusque-là, il était coutume de soutenir que les émotions perturbaient la raison, d’où l’idée de les contrôler.
Ma lecture du livre ÉLOGE DE LA PRATIQUE PHILOSOPHIQUE de la philosophe praticienne SOPHIE GEOFFRION fut agréable et fort utile. Enfin, un ouvrage court ou concis (le texte occupe 65 des 96 pages du livre), très bien écrit, qui va droit au but. La clarté des explications nous implique dans la compréhension de la pratique philosophique. Bref, voilà un éloge bien réussi. Merci madame Geoffrion de me l’avoir fait parvenir.
Dans cet article, je m’interroge à savoir la consultation philosophique doit s’attarder à l’opinion ou au système pensée du client. OPINION – Le philosophe praticien cible l’opinion de son client en vue de démontrer l’ignorance sur laquelle elle repose et, par conséquent, l’absence de valeur de vérité qu’elle recèle. Cette pratique repose sur le « questionnement philosophique ».
Dans son livre « Sentir et savoir », Antonio Damasio propose « Une nouvelle théorie de la conscience ». Il démontre que la conscience ne peut pas exister sans le corps. Il identifie dans le corps la capacité de sentir comme préalable à la conscience.
Un si petit livre, seulement 46 pages et en format réduit, mais tellement informatif. Une preuve de plus qu’il ne faut se fier aux apparences. Un livre signé ROBERT REDEKER, agrégé de philosophie originaire de la France, connaît fort bien le sujet en titre de son œuvre : DÉPRESSION ET PHILOSOPHIE.
La plupart des intervenants en psychologie affirment des choses. Ils soutiennent «C’est comme ceci» ou «Vous êtes comme cela». Le lecteur a le choix de croire ou de ne pas croire ce que disent et écrivent les psychologues et psychiatres. Nous ne sommes pas invités à réfléchir, à remettre en cause les propos des professionnels de la psychologie, pour bâtir notre propre psychologie. Le lecteur peut se reconnaître ou pas dans ces affirmations, souvent catégoriques. Enfin, ces affirmations s’apparentent à des jugements. Le livre Savoir se taire, savoir dire de Jean-Christophe Seznec et Laurent Carouana ne fait pas exception.
Chapitre 1 – La mort pour commencer – Contrairement au philosophe Fernando Savater dans PENSER SA VIE – UNE INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE, je ne définie pas la vie en relation avec la mort, avec son contraire. Je réfléchie et je parle souvent de la mort car il s’agit de l’un de mes sujets préféré depuis mon adolescence. Certaines personnes de mon entourage pensent et affirment que si je parle aussi souvent de la mort, c’est parce que j’ai peur de mourir. Or, je n’ai aucune peur de la mort, de ma mort, de celles de mes proches. Je m’inquiète plutôt des conséquences de la mort sur ceux et celles qui restent, y compris sur moi-même.
À la lumière du documentaire LE SOLEIL ET DES HOMMES, notamment l’extrait vidéo ci-dessus, je ne crois plus au concept de race. Les différences physiques entre les hommes découlent de l’évolution naturelle et conséquente de nos lointains ancêtres sous l’influence du soleil et de la nature terrestre, et non pas du désir du soleil et de la nature de créer des races. On sait déjà que les races et le concept même de race furent inventés par l’homme en se basant sur nos différences physiques. J’abandonne donc la définition de « race » selon des critères morphologiques…
Dans le cadre de notre dossier « Consulter un philosophe », la publication d’un extrait du mémoire de maîtrise « Formation de l’esprit critique et société de consommation » de Stéphanie Déziel s’impose en raison de sa pertinence. Ce mémoire nous aide à comprendre l’importance de l’esprit critique appliqué à la société de consommation dans laquelle évoluent, non seule les jeunes, mais l’ensemble de la population.
Je reproduis ci-dessous une citation bien connue sur le web au sujet de « la valeur de la philosophie » tirée du livre « Problèmes de philosophie » signé par Bertrand Russell en 1912. Mathématicien, logicien, philosophe, épistémologue, homme politique et moraliste britannique, Bertrand Russell soutient que la valeur de la philosophie réside dans son incertitude. À la suite de cette citation, vous trouverez le texte de Caroline Vincent, professeur de philosophie et auteure du site web « Apprendre la philosophie » et celui de Gabriel Gay-Para tiré se son site web ggpphilo. Des informations tirées de l’Encyclopédie Wikipédia au sujet de Bertrand Russell et du livre « Problèmes de philosophie » et mon commentaire complètent cet article.
Passez donc sans vous arrêter, amis, au milieu des Marchands de Sommeil; et, s’ils vous arrêtent, répondez-leur que vous ne cherchez ni un système ni un lit. Ne vous lassez pas d’examiner et de comprendre. (…) Lisez, écoutez, discutez, jugez; ne craignez pas d’ébranler des systèmes; marchez sur des ruines, restez enfants. (…) Socrate vous a paru un mauvais maître. Mais vous êtes revenus à lui; vous avez compris, en l’écoutant, que la pensée ne se mesure pas à l’aune, et que les conclusions ne sont pas l’important; restez éveillés, tel est le but. Les Marchands de Sommeil de ce temps-là tuèrent Socrate, mais Socrate n’est point mort; partout où des hommes libres discutent, Socrate vient s’asseoir, en souriant, le doigt sur la bouche. Socrate n’est point mort; Socrate n’est point vieux. (…) – Alain, (Emile Charrier), Vigiles de l’esprit.
Tout au long de ma vie, j’ai vu la vérité malmenée, tassée d’un bord puis de l’autre, devenir une propriété personnelle (ma vérité — ta vérité — à chacun sa vérité), tantôt objet de monopôle, tantôt reconnue, tantôt niée et reniée… Ah ! La vérité. Quel chaos ! Je me demande depuis longtemps pourquoi la vérité, si elle existe, ne triomphe pas à tout coup, pourquoi elle ne s’impose à tous d’elle-même. Contestée de toutes parts, la vérité, si elle existe, n’a d’intérêt que pour l’opinion qu’on en a et les débats qui s’ensuivent. On va jusqu’à donner à la vérité une mauvaise réputation eu égard à son influence néfaste sur la société et les civilisations. Et que dire de toutes ces croyances qui se prennent pour la vérité ? Et c’est sans compter l’observation récente à l’effet que nous venons d’entrer dans une « ère de post-vérité ».
J’accorde à ce livre trois étoiles sur cinq. Le titre « Petit manuel philosophique à l’intention des grands émotifs » a attiré mon attention. Et ce passage du texte en quatrième de couverture m’a séduit : «En proposant une voyage philosophique à travers l’histoire des émotions, Iaria Gaspari bouscule les préjugés sur notre vie émotionnelle et nous invite à ne plus percevoir nos d’états d’âme comme des contrainte ». J’ai décidé de commander et de lire ce livre. Les premières pages m’ont déçu. Et les suivantes aussi. Rendu à la moitié du livre, je me suis rendu à l’évidence qu’il s’agissait d’un témoignage de l’auteure, un témoignage très personnelle de ses propres difficultés avec ses émotions. Je ne m’y attendais pas, d’où ma déception. Je rien contre de tels témoignages personnels qu’ils mettent en cause la philosophie, la psychologie, la religion ou d’autres disciplines. Cependant, je préfère et de loin lorsque l’auteur demeure dans une position d’observateur alors que son analyse se veut la plus objective possible.
Tout repose sur le Savoir. L’expérience personnelle et/ou professionnelle qu’on fait du Savoir, après en avoir pris conscience, se retrouve à la base des Connaissances que nous possédons. Les Opinions expriment des Jugements des connaissances et inspirent souvent les Croyances.
La philosophie, mère de toutes les sciences, recherche la sagesse et se définie comme l’Amour de la Sagesse. La sagesse peut être atteinte par la pensée critique et s’adopte comme Mode de vie. • La philosophie soutient la Science et contribue à la naissance et au développement de la méthode scientifique, notamment avec l’épistémologie.
La philothérapie, principale pratique de la philosophie de nos jours, met sans cesse de l’avant les philosophes de l’Antiquité et de l’époque Moderne. S’il faut reconnaître l’apport exceptionnel de ces philosophes, j’ai parfois l’impression que la philothérapie est prisonnière du passé de la philosophie, à l’instar de la philosophie elle-même.
Au Québec, la seule province canadienne à majorité francophone, il n’y a pas de tradition philosophique populaire. La philosophie demeure dans sa tour universitaire. Très rares sont les interventions des philosophes québécois dans l’espace public, y compris dans les médias, contrairement, par exemple, à la France. Et plus rares encore sont les bouquins québécois de philosophie en tête des ventes chez nos libraires. Seuls des livres de philosophes étrangers connaissent un certain succès. Bref, l’espace public québécois n’offre pas une terre fertile à la Philosophie.
J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq parce qu’il me permet d’en apprendre beaucoup plus sur la pensée scientifique telle que pratiquée par de grands scientifiques. L’auteur, Nicolas Martin, propose une œuvre originale en adressant les mêmes questions, à quelques variantes près, à 17 grands scientifiques.
Cet article répond à ce commentaire lu sur LinkedIn : « L’équilibre entre développement personnel et développement spirituel ou philosophique est indispensable. » Il m’apparaît impossible de viser « L’équilibre entre développement personnel et développement spirituel ou philosophique » et de prétendre que cet équilibre entre les trois disciplines soit « indispensable ». D’une part, le développement personnel est devenu un véritable fourre-tout où l’ivraie et le bon grain se mélangent sans distinction, chacun avançant sa recette à l’aveugle.
En ne s’unissant pas au sein d’une association nationale professionnelle fixant des normes et des standards à l’instar des philosophes consultants ou praticiens en d’autres pays, ceux de la France nous laissent croire qu’ils n’accordent pas à leur disciple tout l’intérêt supérieur qu’elle mérite. Si chacun des philosophes consultants ou praticiens français continuent de s’affairer chacun dans son coin, ils verront leur discipline vite récupérée à mauvais escient par les philopreneurs et la masse des coachs.
“ Après les succès d’Épicure 500 vous permettant de faire dix repas par jour sans ballonnements, après Spinoza 200 notre inhibiteur de culpabilité, les laboratoires Laron, vous proposent Philonium 3000 Flash, un médicament révolutionnaire capable d’agir sur n’importe quelle souffrance physique ou mentale : une huile essentielle d’Heidegger pour une angoisse existentielle, une substance active de Kant pour une douleur morale…. Retrouvez sagesse et vitalité en un instant ”, s’amusaient les chroniqueurs radio de France Inter dans une parodie publicitaire diffusée à l’occasion d’une émission ayant pour thème : la philosophie peut-elle soigner le corps ?
J’attribue quatre étoiles sur cinq à ce livre. Les lecteurs assidus de mes articles connaissent fort bien ma position plus que défavorable face au développement personnel. À l’instar de Thiery Jobard, je suis contre le développement personnel. Je qualifie le développement personnel d’arnaque extrêmement dangereuse pour ses adeptes et notre société.
Le philothérapeute (philosophe consultant ou philosophe praticien) a l’obligation de très bien connaître le contexte dans lequel évolue son client. Le développement de l’esprit critique de ce client passe inévitablement par une prise de conscience de sa cognition en vue de comprendre comment il connaît. Si, dès le départ, le client n’a pas conscience de son mode de pensées, il lui sera difficile de participer activement au dialogue avec son philothérapeute. L’objectif primaire du philosophe consultant demeure de déceler et de corriger les biais cognitifs de son client avant même d’abord une question philosophique. Bref, si la »machine à pensée » du client est corrompu par des «virus cognitifs », une «réinitialisation » s’impose en début de séance de consultation.
Dans son livre « Développement (im) personnel, Julia de Funès, docteure en philosophie, soutient que le développement personnel offre la même recette à tous et qu’à ce titre il ne peut donc pas se qualifier sa démarche de « personnel ». Selon ma compréhension, le développement personnel devrait mettre de l’avant un développement personnalisé, c’est-à-dire adapté à chaque individu intéressé pour se targuer d’être personnel.
Mon intérêt pour la pensée scientifique remonte à plus de 25 ans. Alors âgé d’une quarantaine d’année, PDG d’une firme d’étude des motivations d’achat des consommateurs, je profite des enseignements et de l’étude du processus scientifique de différentes sources. Je me concentre vite sur l’épistémologie…
Ce livre m’a déçu en raison de la faiblesse de sa structure indigne de son genre littéraire, l’essai. L’auteur offre aux lecteurs une foule d’information mais elle demeure difficile à suivre en l’absence de sous-titres appropriés et de numérotation utile pour le repérage des énumérations noyés dans un style plus littéraire qu’analytique.
En l’absence d’une association d’accréditation des philothérapeutes, philosophes consultants ou praticiens en francophonie, il est difficile de les repérer. Il ne nous reste plus que de nombreuses recherches à effectuer sur le web pour dresser une liste, aussi préliminaire soit-elle. Les intervenants en philothérapie ne se présentent pas tous sous la même appellation : « philothérapeute », « philosophe consultant » ou « philosophe praticien » « conseiller philosophique » « philosophe en entreprise », « philosophe en management » et autres.
J’ai lu le livre GUÉRIR L’IMPOSSIBLE en me rappelant à chaque page que son auteur, Christopher Laquieze, est à la fois philosophe et thérapeute spécialisé en analyse comportementale. Pourquoi ? Parce que ce livre nous offre à la fois un voyage psychologique et philosophique, ce à quoi je ne m’attendais pas au départ. Ce livre se présente comme « Une philosophie pour transformer nous souffrances en forces ». Or, cette philosophie se base davantage sur la psychologie que la philosophie. Bref, c’est le « thérapeute spécialisé en analyse comportementale » qui prend le dessus sur le « philosophe ».
Nathaniel Masselot maîtrise fort bien son écriture visiblement axée sur son accessibilité et sa compréhension par tous. Loin de la vulgarisation simpliste, l’auteur nous parle comme nous parlons. Loin de l’écriture hermétique, l’auteur n’a pas la tête dans les nuages et isolé dans une tour surplombant la société; il marche auprès de nous. Avec ses références à l’actualité, il campe son lecteur dans la réalité quotidienne où il évolue.
Ma lecture de ce livre m’a procuré beaucoup de plaisir et de bonheur. Je recherche dans mes lectures les auteurs et les œuvres permettant aux lecteurs d’évoluer de prise de conscience en prise de conscience de la première à la dernière page, de ne plus être le même à la fin de la lecture. Et c’est ce que les lecteurs vivront à la lecture de ce livre.
Je n’ai pas aimé ce livre parce que son titre, LES PHILO-COGNITIFS, se réfère à la philosophie sans pour autant faire un traitement philosophique de son sujet. Mon achat reposait entièrement sur le titre de ce livre et je m’attendais à un livre de philosophie. Mais il s’agit d’un livre de psychologie. Mon achat fut intuitif. J’avais pleinement confiance dans l’usage du mot « PHILO » en titre d’un ouvrage pour que ce dernier ne puisse traiter d’un autre sujet que philosophique. Mais ce n’est pas le cas.
À l’instar de ma lecture précédente (Qu’est-ce que la philosophie ? de Michel Meyer), le livre PRÉSENTATIONS DE LA PHILOSOPHIE du philosophe ANDRÉ COMTE-SPONVILLE m’a plu parce qu’il met en avant les bases mêmes de la philosophie et, dans ce cas précis, appliquées à une douzaine de sujets…
J’ai dévoré le livre LES THÉORIES DE LA CONNAISSANCE par JEAN-MICHEL BESNIER avec un grand intérêt puisque la connaissance de la connaissance me captive. Amateur d’épistémologie, ce livre a satisfait une part de ma curiosité. Évidemment, je n’ai pas tout compris et une seule lecture suffit rarement à maîtriser le contenu d’un livre traitant de l’épistémologie, notamment, de son histoire enchevêtrée de différents courants de pensée, parfois complémentaires, par opposés. Jean-Michel Besnier dresse un portrait historique très intéressant de la quête philosophique pour comprendre la connaissance elle-même.
Ce livre n’était pas pour moi en raison de l’érudition des auteurs au sujet de la philosophie de connaissance. En fait, contrairement à ce que je croyais, il ne s’agit d’un livre de vulgarisation, loin de là. J’ai décroché dès la seizième page de l’Introduction générale lorsque je me suis buté à la première équation logique. Je ne parviens pas à comprendre de telles équations logiques mais je comprends fort bien qu’elles soient essentielles pour un tel livre sur-spécialisé. Et mon problème de compréhension prend racine dans mon adolescence lors des études secondaires à l’occasion du tout premier cours d’algèbre. Littéraire avant tout, je n’ai pas compris pourquoi des « x » et « y » se retrouvaient dans des équations algébriques. Pour moi, toutes lettres de l’alphabet relevaient du littéraire. Même avec des cours privés, je ne comprenais toujours pas. Et alors que je devais choisir une option d’orientation scolaire, j’ai soutenu que je voulais une carrière fondée sur l’alphabet plutôt que sur les nombres. Ce fut un choix fondé sur l’usage des symboles utilisés dans le futur métier ou profession que j’allais exercer. Bref, j’ai choisi les sciences humaines plutôt que les sciences pures.
Quelle agréable lecture ! J’ai beaucoup aimé ce livre. Les problèmes de philosophie soulevés par Bertrand Russell et les réponses qu’il propose et analyse étonnent. Le livre PROBLÈMES DE PHILOSOPHIE écrit par BERTRAND RUSSELL date de 1912 mais demeure d’une grande actualité, du moins, selon moi, simple amateur de philosophie. Facile à lire et à comprendre, ce livre est un «tourne-page» (page-turner).
La compréhension de ce recueil de chroniques signées EUGÉNIE BASTIÉ dans le quotidien LE FIGARO exige une excellence connaissance de la vie intellectuelle, politique, culturelle, sociale, économique et de l’actualité française. Malheureusement, je ne dispose pas d’une telle connaissance à l’instar de la majorité de mes compatriotes canadiens et québécois. J’éprouve déjà de la difficulté à suivre l’ensemble de l’actualité de la vie politique, culturelle, sociale, et économique québécoise. Quant à la vie intellectuelle québécoise, elle demeure en vase clos et peu de médias en font le suivi. Dans ce contexte, le temps venu de prendre connaissance de la vie intellectuelle française, je ne profite des références utiles pour comprendre aisément. Ma lecture du livre LA DICTATURE DES RESSENTIS d’EUGÉNIE BASTIÉ m’a tout de même donné une bonne occasion de me plonger au cœur de cette vie intellectuelle française.
À titre d’éditeur, je n’ai pas aimé ce livre qui n’en est pas un car il n’en possède aucune des caractéristiques professionnelles de conceptions et de mise en page. Il s’agit de la reproduction d’un texte par Amazon. Si la première de couverture donne l’impression d’un livre standard, ce n’est pas le cas des pages intérieures du… document. La mise en page ne répond pas aux standards de l’édition française, notamment, en ne respectant pas les normes typographiques.
J’ai lu avec un grand intérêt le livre LE CHANGEMENT PERSONNEL sous la direction de NICOLAS MARQUIS. «Cet ouvrage a été conçu à partir d’articles tirés du magazine Sciences Humaines, revus et actualisés pour la présente édition ainsi que de contributions inédites. Les encadrés non signés sont de la rédaction.» J’en recommande vivement la lecture pour son éruditions sous les aspects du changement personnel exposé par différents spécialistes et experts tout aussi captivant les uns les autres.
À la lecture de ce livre fort intéressent, j’ai compris pourquoi j’ai depuis toujours une dent contre le développement personnel et professionnel, connu sous le nom « coaching ». Les intervenants de cette industrie ont réponse à tout, à toutes critiques. Ils évoluent dans un système de pensée circulaire sans cesse en renouvellement créatif voire poétique, système qui, malheureusement, tourne sur lui-même. Et ce type de système est observable dans plusieurs disciplines des sciences humaines au sein de notre société où la foi en de multiples opinions et croyances s’exprime avec une conviction à se donner raison. Les coachs prennent pour vrai ce qu’ils pensent parce qu’ils le pensent. Ils sont dans la caverne de Platon et ils nous invitent à les rejoindre.
Ce petit livre d’une soixantaine de pages nous offre la retranscription de la conférence « À QUOI SERT LA PHILOSOPHIE ? » animée par Marc Sautet, philosophe ayant ouvert le premier cabinet de consultation philosophique en France et également fondateur des Cafés Philo en France.
L’essai RAVIVER DE L’ESPRIT EN CE MONDE – UN DIAGNOSTIC CONTEMPORAIN par FRANÇOIS JULLIEN chez les Éditions de l’Observatoire, parue en 2023, offre aux lecteurs une prise de recul philosophique révélatrice de notre monde. Un tel recul est rare et fort instructif.
La philosophie a pour but l’adoption d’un mode de vie sain. On parle donc de la philosophie comme un mode de vie ou une manière de vivre. La philosophie ne se possède pas, elle se vit. La philosophie souhaite engendrer un changement de comportement, d’un mode de vie à celui qu’elle propose. Il s’agit ni plus ni moins d’enclencher et de soutenir une conversion à la philosophie.
La lecture de cet essai fut très agréable, instructive et formatrice pour l’amateur de philosophie que je suis. Elle s’inscrit fort bien à la suite de ma lecture de « La philosophie comme manière de vivre » de Pierre Habot (Entretiens avec Jeanne Cartier et Arnold I Davidson, Le livre de poche – Biblio essais, Albin Michel, 2001).
La lecture du livre Les consolations de la philosophie, une édition en livre de poche abondamment illustrée, fut très agréable et instructive. L’auteur Alain de Botton, journaliste, philosophe et écrivain suisse, nous adresse son propos dans une langue et un vocabulaire à la portée de tous.
L’Observatoire de la philothérapie a consacré ses deux premières années d’activités à la France, puis à la francophonie. Aujourd’hui, l’Observatoire de la philothérapie s’ouvre à d’autres nations et à la scène internationale.
Certaines personnes croient le conseiller philosophique intervient auprès de son client en tenant un « discours purement intellectuel ». C’est le cas de Dorothy Cantor, ancienne présidente de l’American Psychological Association, dont les propos furent rapportés dans The Philosophers’ Magazine en se référant à un autre article parue dans The New York Times.
Nathaniel Masselot maîtrise fort bien son écriture visiblement axée sur son accessibilité et sa compréhension par tous. Loin de la vulgarisation simpliste, l’auteur nous parle comme nous parlons. Loin de l’écriture hermétique, l’auteur n’a pas la tête dans les nuages et isolé dans une tour surplombant la société; il marche auprès de nous. Avec ses références à l’actualité, il campe son lecteur dans la réalité quotidienne où il évolue.
De lecture agréable et truffé d’humour, le livre ÊTES-VOUS SÛR D’AVOIR RAISON ? de GILLES VERVISCH, agrégé de philosophie, pose la question la plus embêtante à tous ceux qui passent leur vie à se donner raison.
Dans un article intitulé « Se retirer du jeu » et publié sur son site web Dialogon, le philosophe praticien Jérôme Lecoq, témoigne des « résistances simultanées » qu’il rencontre lors de ses ateliers, « surtout dans les équipes en entreprise » : « L’animation d’un atelier de “pratique philosophique” implique que chacun puisse se « retirer de soi-même », i.e. abandonner toute volonté d’avoir raison, d’en imposer aux autres, de convaincre ou persuader autrui, ou même de se “faire valider” par les autres. Vous avez une valeur a priori donc il n’est pas nécessaire de l’obtenir d’autrui. » (LECOQ, Jérôme, Se retirer du jeu, Dialogon, mai 2024.)
« Jaspers incarne, en Allemagne, l’existentialisme chrétien » peut-on lire en quatrième de couverture de son livre INTRODUCTION À PHILOSOPHIE. Je ne crois plus en Dieu depuis vingt ans. Baptisé et élevé par défaut au sein d’une famille catholique qui finira pas abandonner la religion, marié protestant, aujourd’hui J’adhère à l’affirmation d’un ami philosophe à l’effet que « Toutes les divinités sont des inventions humaines ». Dieu est une idée, un concept, rien de plus, rien de moins. / Dans ce contexte, ma lecture de l’œuvre INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE de KARL JASPERS fut quelque peu contraignante à titre d’incroyant. Je me suis donc concentré sur les propos de JASPERS au sujet de la philosophie elle-même.
« La philosophie a gouverné toute la vie de notre époque dans ses traits les plus typiques et les plus importants » (LAMBERTY, Max, Le rôle social des idées, Chapitre premier – La souveraineté des idées ou La généalogie de notre temps, Les Éditions de la Cité Chrétienne (Bruxelles) / P. Lethielleux (Paris), 1936, p. 41) – la démonstration du rôle social des idées par Max Lamberty doit impérativement se poursuivre de nos jours en raison des défis qui se posent à nous, maintenant et demain, et ce, dans tous les domaines. – Et puisque les idées philosophiques mènent encore et toujours le monde, nous nous devons d’interroger le rôle social des idées en philosophie pratique. Quelle idée du vrai proposent les nouvelles pratiques philosophiques ? Les praticiens ont-ils conscience du rôle social des idées qu’ils véhiculent dans les consultations et les ateliers philosophiques ?
J’aime beaucoup ce livre. Les nombreuses mises en contexte historique en lien avec celui dans lequel nous sommes aujourd’hui permettent de mieux comprendre cette histoire de la philosophie et d’éviter les mésinterprétations. L’auteure Jeanne Hersch nous fait découvrir les différentes étonnements philosophiques de plusieurs grands philosophes à l’origine de leurs quêtes d’une meilleure compréhension de l’Être et du monde.
Mon intérêt pour ce livre s’est dégradé au fil de ma lecture en raison de sa faible qualité littéraire, des nombreuses répétitions et de l’aveu de l’auteur à rendre compte de son sujet, la Deep Philosophy. / Dans le texte d’introduction de la PARTIE A – Première rencontre avec la Deep Philosophy, l’auteur Ran Lahav amorce son texte avec ce constat : « Il n’est pas facile de donner un compte rendu systématique de la Deep Philosophy ». Dans le paragraphe suivant, il écrit : « Néanmoins, un tel exposé, même s’il est quelque peu forcé, pourrait contribuer à éclairer la nature de la Deep Philosophy, pour autant qu’il soit compris comme une esquisse approximative ». Je suis à la première page du livre et j’apprends que l’auteur m’offre un exposé quelque peu forcé et que je dois considérer son œuvre comme une esquisse approximative. Ces précisions ont réduit passablement mon enthousiasme. À partir de là, ma lecture fut un devoir, une obligation, avec le minimum de motivation.
J’ai beaucoup aimé ce livre de Michel Lacroix, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel. Il m’importe de vous préciser que j’ai lu l’édition originale de 2009 aux Éditions Robert Laffont car d’autres éditions sont parues, du moins si je me rapporte aux différentes premières et quatrièmes de couverture affichées sur le web. Ce livre ne doit pas être confondu avec un ouvrage plus récent de Michel Lacroix : Philosophie de la réalisation personnelle – Se construire dans la liberté parue en 2013 et qui sera l’objet d’une rapport de lecture dans ce dossier.
Personnellement, je me suis limité à lecture du livre car je préfère et de loin l’écrit à l’audio. J’aime le titre donné à ce livre, « Une histoire de la raison », plutôt que « L’histoire de la raison », parce qu’il laisse transparaître une certaine humilité dans l’interprétation.
Les ouvrages de la collection Que sais-je ? des PUF (Presses universitaires de France) permettent aux lecteurs de s’aventurer dans les moult détails d’un sujet, ce qui rend difficile d’en faire un rapport de lecture, à moins de se limiter à ceux qui attirent et retient davantage notre attention, souvent en raison de leur formulation. Et c’est d’entrée de jeu le cas dans le tout premier paragraphe de l’Introduction. L’auteur écrit, parlant de la raison (le soulignement est de moi) : « (…) elle est une instance intérieure à l’être humain, dont il n’est pas assuré qu’elle puisse bien fonctionner en situation de risque ou dans un état trouble ».
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MON LIVRE
Exemplaire numérique gratuit
Mon livre « J’aime penser ou Comment prendre plaisir à penser dans un monde où tout un chacun se donne raison» offert gratuitement en format numérique (PDF) ouà lire en ligne sur un site web dédié.
Éditeur : ÉDITIONS ROBERT LAFFONT (9 février 2009)
ÉDITEUR : Marabout Psy (novembre 2010)
Collections : Réponses
Catégories : Psychologie / Croissance personnelle
Nombre de pages : 190 pages
ISBN : 10 2501062957
ISBN 13 : 9782501062954
Support : Livre imprimé à couverture souple
Mesure : 22.0 cm (Hauteur), 14 cm (Largeur), 217 gr (Poids)
Texte en quatrième de couverture
Quand on pense au développement personnel, on pense souvent aux inspirations apportées par le bouddhisme, le yoga ou le taoïsme. Mais on oublie toutes les réflexions et les expériences proposées par la philosophie et la littérature occidentale. Goethe, Stendhal, Hegel, Kierkegaard, Sartre, Emmanuel Mounier n’ont cessé de s’interroger sur le développement de l’individu et les moyens de s’épanouir.
Conçu comme un guide philosophique, ce nouveau livre de Michel Lacroix permet à tous de se saisir de ces richesses culturelles pour avancer sur le chemin de la réalisation de soi, un chemin qui peut bifurquer vers l’action aussi bien que la contemplation, et qui, parfois, peut conduire dans certaines impasses comme l’hyperactivité ou le fantasme de grandeur…
Pas de techniques simplistes ici, mais un éclairage novateur sur le potentiel humain, la confiance en soi ou la pensée positive tels que les ont imaginés nos plus grands penseurs.
* * *
MICHEL LACROIX, normalien, agrégé de philosophie, est maître de conférence à l’université Cergy-Pontoise. Il est l’auteur d’une douzaine d’ouvrages parmi lesquels, chez Marabout, Le Développement personnel et Avoir un idéal, est-ce bien raisonnable ?
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION 9
Transcendance ou autoréalisation ? 13
« Le plus vrai d’un individu, c’est son possible » (Paul Valéry) 19
Du Ciel sur la Terre 25
La pensée positive 31
Se réaliser, au risque de l’immoralité ? 37
Le complexe de Don Juan 47
Le baptême du choix 53
De la vita contemplativa à la vita activa 61
Se réaliser, c’est agir 71
La tentation activiste 77
Le fantasme de la grandeur et de la supériorité 81
Y a-t-il un désir spécifique de réalisation de soi ? 87
Réalisation de soi ou sublimation ?
Le développement personnel face à la psychanalyse 95
La vertu transformatrice de l’amour 103
La confiance d’autrui 107
L’autorité qui entraîne 111
La puissance des modèles 117
La dialectique de la bienveillance 123
Le «Je » et le « Nous » 127
Réalisation de soi ou communautarisation de soi? 133
Le cas Barrès 139
Portrait d’un esthète solitaire 145
L’idéal de Thélème 151
Le développement personnel victime de la contre-culture 157
L’Occident et l’Orient 167
La réalisation de soi, moteur de changement social 171
CONCLUSION : Vers un monde plus humain ? 179
NOTES 183
EXTRAIT
INTRODUCTION
« Me réaliser ». Voilà un projet ambitieux… Le verbe « réaliser » n’est pas pris ici dans le sens ordinaire. Il ne s’agit pas de réaliser un programme, un dessein, un vœu, ni même un rêve. Il ne s’agit pas non plus d’un « événement qui se réalise ». Ce ne sont pas seulement des tâches que j’ai à remplir, des travaux qui m’attendent, un dossier à étudier, un rendez-vous professionnel, un cours à préparer pour mes étudiants, une conférence à peaufiner, un article à écrire, un voyage à organiser, un livre à lire. Il s’agit de mon être. En articulant les cinq syllabes du verbe « se réaliser » dans sa forme réflexive, j’exprime l’intention de me faire moi-même. Mon propre moi est ma tâche. Je veux me prendre comme un matériau, comme une matière première, et faire de cette matière… une œuvre. Qui sait, une œuvre d’art ? Voilà, décidément, un projet audacieux.
« Se réaliser » est aussi une expression déconcertante. Elle est flanquée d’une foule de synonymes, qui provoquent un véritable encombrement sémantique. J’aurais pu écrire « m’épanouir », « me développer », par référence au développement personnel, ou bien « m’accomplir », en hommage à Nietzsche pour qui « l’homme est quelque chose qui s’accomplit encore ». Mon livre aurait pu s’intituler l’Épanouissement de soi, ou l’Accomplissement de soi, ou le Développement personnel. J’avais à ma disposition des expressions comme « vivre plus », « vivre pleinement », « atteindre la plénitude », « augmenter son être », « travailler au perfectionnement de soi », « être un individu complet », un « homme total », « développer l’humanité que l’on porte en soi », « accroître son humanitude », « mener une vie riche et créative », « donner le meilleur de soi-même », « aller jusqu’au bout de soi »… Il y avait d’autres possibilités encore. Avec les sages de l’Antiquité, je pouvais m’interroger sur la « vie bonne », avec Cicéron apprendre à « cultiver mon âme ». Dans les Nourritures terrestres, André Gide m’enseigne à « assumer le plus possible d’humanité ». Maurice Barrès m’assure qu’« en chacun est un être supérieur qui veut se réaliser ». Karl Marx propose de « réaliser l’essence de l’homme », Sartre d’« exister authentiquement ». Quant au philosophe personnaliste Emmanuel Mounier, fondateur de la revue Esprit dans les années 1930, il écrit simplement : « être une personne ».
En parcourant ainsi le vocabulaire, on est saisi par une impression de flou. De quoi dissuader un philosophe de se pencher sur une telle question… Mais si déconcertante soit-elle, cette abondance lexicale est, en un certain sens, rassurante. N’est-elle pas la preuve qu’il y a ici un vrai sujet de réflexion ? Si tant de mots ont été forgés, n’est-ce pas parce qu’ils répondent à une aspiration profonde de l’être humain ?
Enfin, « se réaliser » est une expression ciblée. Elle est ciblée vers l’adulte. Elle exprime un besoin propre à l’adulte. La réalisation de soi ne saurait être confondue avec le problème de l’éducation de l’enfant et de l’adolescent. Elle ne désigne pas le processus de maturation de la personnalité qui, de stade en stade, conduit l’enfant à devenir un adolescent, et l’adolescent à devenir un adulte. L’enfant et l’adolescent se développent, mûrissent, grandissent, à la fois physiologiquement et psychologiquement, mais à proprement parler ils ne « se réalisent » pas. Non sans raison, le langage courant réserve le verbe « se réaliser » à l’adulte, c’est-à-dire un être éduqué, socialisé, mûr, entré dans la vie. Et j’ajouterais : un adulte qui, ne souffrant pas de problèmes psychologiques sérieux, n’étant pas en proie à des difficultés affectives ou relationnelles graves, et ressentant par conséquent un relatif bien-être, est disponible pour un questionnement sur ce que, d’une façon provisoire, nous pourrions appeler le plus-être.
Le but de ce livre n’est aucunement d’indiquer la voie, la méthode, le chemin de la réalisation de soi. Nous laissons aux gourous et aux donneurs de leçons de vie (ils sont nombreux de nos jours) le douteux privilège de révéler à leurs semblables comment il faut conduire son existence. D’ailleurs, il y a plusieurs manières de se réaliser, plusieurs styles d’existence et rien n’autorise à établir entre eux une hiérarchie de valeur. Tous sont légitimes. Il appartient à chaque individu de trouver son propre style et il est fort heureux, en définitive, que tout le monde ne choisisse pas la même voie. La vie serait bien monotone si tous les individus envisageaient leur réalisation personnelle de la même manière.
Le livre que l’on va lire a une seule finalité : comprendre. Il est écrit par un philosophe depuis toujours passionné par la psychologie, qui a pénétré dans le domaine de l’« épanouissement », du « développement personnel », de la « plénitude », de la « créativité », du « vivre plus », dans le seul but de savoir de quoi l’on parle exactement lorsque l’on utilise ces mots. J’ai essayé de dissiper les brumes qui recouvrent ce domaine et de construire une notion claire et distincte, comme on disait autrefois, de la réalisation de soi. Dans cet univers souvent peu cartésien, je me suis aventuré avec mon esprit cartésien.
Chapitre 1
Transcendance ou autoréalisation ?
Il convient tout d’abord de délimiter notre sujet. D’où une première question. La religion relève-t-elle de la réalisation de soi ? Peut-on dire que le croyant « se réalise » ?
À l’évidence, la foi religieuse a une vertu épanouissante. Qui peut en douter ? Il suffit d’observer les personnes qui ont la foi et de recueillir leurs témoignages : ces personnes ont, la plupart du temps, une aptitude à la joie et à la sérénité, une capacité de plénitude, une confiance dans la vie qui sont, indiscutablement, en rapport direct avec la foi qui les anime. N’en déplaisent aux émules de Nietzsche, pour qui la religion est une cause d’amoindrissement et de décadence, la foi religieuse nous fait grandir humainement. Pendant des siècles, les individus n’ont même envisagé leur accomplissement personnel qu’à travers elle. L’adoration du divin, la prière, le souci du salut, l’observance des préceptes bibliques et évangéliques, l’espérance de la vie éternelle constituaient l’horizon indépassable de l’épanouissement de soi.
Cependant, il y a dans le processus de la « réalisation par la foi » un élément qui empêche de la considérer comme une « réalisation de soi » au plein sens du terme. Le croyant s’épanouit en se reliant à une transcendance divine. À travers ce lien avec la divinité, il découvre du même coup l’être-humain-qu’il-doit-devenir. La religion lui prescrit ce-qu’il-a-à-être. Elle lui fournit une définition canonique de la personne humaine. Pour le croyant, « vivre pleinement », « vivre plus », « assumer le plus possible d’humanité », ne consiste donc pas à s’inventer soi-même, en vertu d’une autocréation, mais à réaliser une essence d’homme prédéfinie dans la transcendance, inscrite de toute éternité dans le projet divin. C’est en Dieu que réside la vérité que le croyant cherche sur lui-même. Dieu abrite la vérité anthropologique fondamentale qu’il s’agit de mettre en œuvre dans la vie. Le Divin prescrit sous quelle forme doit s’accomplir l’Humain.
Dans le christianisme, cette dépendance de l’épanouissement humain par rapport à un projet divin est particulièrement nette. La théologie chrétienne enseigne que l’homme « a été créé à l’image et à la ressemblance de Dieu1 ». En raison de la chute d’Adam, il s’est écarté de ce modèle idéal, il s’est éloigné de l’essence parfaite qui lui était assignée. Sa nature s’est corrompue et le péché est entré dans l’Humanité. La tâche qui incombe à l’être humain dans cette vie terrestre est, à l’aide de la grâce divine, de rétablir cette perfection initiale. Pour le chrétien, « se réaliser » signifie donc être fidèle à l’image originelle de l’homme, et c’est ce qu’il s’efforce de faire en conformant sa vie au modèle idéal de la divinité, c’est-à-dire par une imitation : l’imitation de la perfection de Dieu, comme le demande l’Évangile (« Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait », lit-on dans saint Matthieu2), ou celle du Fils de Dieu, comme l’enseignait jadis L’Imitation de Jésus-Christ, l’un des grands livres de la piété traditionnelle.
Il convient donc, au seuil de notre enquête, d’établir une distinction nette entre ce qui relève de l’« épanouissement par la religion » et ce qui relève de la « réalisation de soi ». Dans le verbe « se réaliser », la forme réflexive, qui s’exprime par la particule « se », a une signification précise. Elle indique, d’une part, que mon moi constitue la matière première à partir de laquelle s’opère le travail de réalisation personnelle et, d’autre part, que c’est par moi-même que cette réalisation aura lieu. La réalisation de soi est une création de moi-même par moi-même. Mon moi est à construire et c’est à moi, et moi seul, qu’il appartient de mener à bien cette construction. Entrer dans une démarche de réalisation de soi, c’est se déclarer non soumis à des règles prédéfinies, à des lois dictées de l’extérieur. Je ne suis pas l’exécutant d’un programme théologique. Ma destination n’est pas tracée d’avance. Je ne dispose pas d’un patron préétabli d’après lequel je pourrais tailler l’étoffe de mon moi. Ce n’est pas en me reliant à une transcendance divine que j’atteindrai mon maximum d’humanité. La réalisation de soi est un processus entièrement autonome. Elle est autoréférentielle. Elle constitue une autoréalisation. Dans une pièce de théâtre, Jean-Paul Sartre fait dire à un de ses personnages : « Je n’ai d’autre loi que celle que je me donnerai3. » La démarche de réalisation de soi, ou autoréalisation, s’ouvre par une déclaration semblable : « La seule loi de mon épanouissement sera celle que je me donnerai. »
Ayant mis de côté la religion, parce qu’elle ne relève pas de notre étude, il faut nous interroger sur une autre forme d’épanouissement : celle que propose la métaphysique. Ce que nous venons de dire au sujet de la transcendance religieuse vaut-il également pour la transcendance métaphysique ? Tournons-nous vers le philosophe métaphysicien (tous les philosophes ne sont pas métaphysiciens…) et voyons comment ce dernier conçoit l’épanouissement humain. Que signifie pour un philosophe métaphysicien « vivre d’une manière authentiquement humaine », « assumer le plus possible d’humanité » ?
Le philosophe métaphysicien est, à sa manière, un croyant. Il croit en une réalité suprasensible, celle des Essences, des Idées pures. Sa démarche d’épanouissement consiste à rejoindre cette réalité transcendante, à l’assimiler, à se nourrir d’elle. Cette démarche vers une vie plus humaine a été parfaitement décrite par Platon dans le fameux mythe de la Caverne, exposé au livre VII de La République. Ce mythe constitue un véritable apologue de l’épanouissement humain.
Au départ, explique Platon, l’individu est emprisonné dans un lieu obscur, où il ne voit pas les choses elles-mêmes mais seulement leur reflet déformé. Il est éloigné de l’essence des choses et séparé de la vérité. Il décide donc d’entreprendre l’ascension qui va le conduire au Ciel des Idées, qui représente, selon Platon, le domaine métaphysique où sont gravées les Essences éternelles. Une fois parvenu dans ce lieu céleste, il peut enfin contempler les Idées, c’est-à-dire l’essence intemporelle du bien, de la vertu, de la justice, du beau, et d’une manière générale de toutes les réalités dont, dans la Caverne, il n’avait qu’une notion imprécise puisqu’il n’en voyait que le reflet déformé. Parmi toutes les essences qui se dévoilent à lui, il y en a une qui revêt une importance particulière. C’est l’Idée d’Homme. Le philosophe découvre dans la transcendance ce qu’est l’homme dans son essence, l’homme-de-toute-éternité. Il ne lui restera plus, dès lors, qu’à se conformer à ce modèle idéal, à le traduire dans son existence concrète. Tant qu’il était prisonnier dans la Caverne, il vivait d’une vie amoindrie. Grâce à la découverte qu’il fait dans le Ciel des Idées, cet état d’amoindrissement va prendre fin. L’individu sait maintenant en quoi consiste sa vraie nature. Il peut enfin connaître la plénitude. Il peut épanouir son humanité.
La similitude entre l’expérience métaphysique et l’expérience religieuse ressort de façon frappante. De même que le croyant reçoit de Dieu la révélation de la vérité anthropologique, l’homme platonicien la reçoit des Idées. C’est dans la transcendance métaphysique qu’il prend connaissance de la forme parfaite de l’homme, forme parfaite qu’il lui appartient de mettre en pratique dans son existence concrète. Pas plus que le croyant, l’homme platonicien n’a donc à inventer l’homme. Il se transforme, il s’épanouit, il accède à une vie pleine, à la plénitude de soi, mais, à proprement parler, il ne se réalise pas. Il n’a pas à se forger une identité. Il se contente de devenir ce qui-est-écrit-de-toute-éternité-dans-la-transcendance. Son devenir humain est tracé par avance. Pour lui comme pour le croyant religieux, c’est dans la transcendance que, tel le mètre étalon enfermé dans le pavillon de Sèvres, est déposée la norme qui trace l’horizon de son existence.
Ni le croyant ni le philosophe métaphysicien ne se situent, à proprement parler, dans une perspective de réalisation de soi. Leur démarche est celle d’un épanouissement par la transcendance. Le but que nous poursuivons dans ce livre est, au contraire, de suivre l’individu dans son effort pour s’autoréaliser, c’est-à-dire pour s’épanouir en dehors des voies prétracées de la transcendance religieuse ou métaphysique. Nous voulons assumer tous les risques inhérents à cette aventure. Car se réaliser, c’est prendre des risques. Le risque de manquer de repères. Le risque de cheminer sans boussole transcendante. De s’enfermer dans son moi. De s’égarer. Le risque de la liberté.
______
1- Genèse 1, 26-29. 2- Saint Matthieu 5, 48. 3- Les Mouches.
Chapitre 2
« Le plus vrai d’un individu, c’est son possible » (Paul Valéry)
Nous avons commencé à lever le voile sur la réalisation de soi en montrant ce qu’elle n’est pas. Voyons maintenant ce qu’elle est. J’entre dans une démarche d’autoréalisation à partir de l’instant où, me détournant de la transcendance, je me recentre sur moi-même.
Je déclare que la destination de mon être réside non pas dans une extériorité religieuse ou métaphysique, mais en moi-même, dans ma subjectivité. « Me réaliser » consiste non pas à me relier à un Dieu ou à des Essences éternelles qui prescrivent ce que je dois être, mais à développer quelque chose qui est en moi, quelque chose qui requiert d’être libéré et cultivé. De quoi s’agit-il ? Quel est ce bien que je possède et que je dois mettre en valeur ? Quelle est cette richesse intérieure qui fait l’objet de l’autoréalisation ? Ce sont mes virtualités, mes possibilités, mes capacités, mes facultés, mes aptitudes, mes talents, mes dons, mes ressources. Autrement dit : mon « potentiel ».
Alors que l’épanouissement par la transcendance situe la vérité de mon moi dans une transcendance religieuse ou métaphysique, la réalisation de soi la situe dans mon potentiel. C’est mon potentiel qui me définit. Ce sont mes attributs psychologiques, mes propriétés, ma richesse intérieure qui constituent mon être. « Je suis, écrivait le philosophe Heidegger, une promesse de possibilités. » Et Paul Valéry renchérissait : « Ce qui est le plus vrai d’un individu, c’est son possible.1» Pour me réaliser, il va falloir porter mes potentialités à leur complet développement. Je m’épanouirai à la condition de faire fructifier ce capital intérieur, de faire mûrir ces possibilités, d’exploiter ces ressources. Je dois faire croître ce qui est en germe dans mon moi, actualiser ce qui est virtuel. C’est ce qu’indique très bien l’étymologie du verbe « développer », d’où vient le nom familier de « développement personnel », lequel n’est en définitive qu’une autre façon de nommer la réalisation de soi. Le verbe « développer » est issu du latin volvere, qui signifie rouler, enrouler. Développer, c’est donc « dé-volvere », c’est-à-dire défaire le rouleau, dérouler ce qui est enroulé, déployer ce qui est enveloppé. « Me développer moi-même tel que m’a fait la nature, confiait Goethe, fut obscurément, dès mes jeunes années, mon désir et mon dessein2. » Retenons cet aveu du philosophe de Weimar. Il constitue l’article un de la philosophie de la réalisation de soi.
Mais en quoi consiste ce potentiel ? Quelles sont ces virtualités qu’il faut actualiser, ces ressources qu’il faut utiliser ? Pour répondre à cette question, tournons-nous vers la psychologie. Celle-ci nous apprend que le potentiel d’un individu est constitué de deux éléments : les aptitudes d’une part, et les motivations d’autre part. Je suis un mélange de capacités, de facultés, de pouvoirs et, par ailleurs, d’intérêts, de goûts, de mobiles, d’inclinations, d’aspirations, de désirs. Je me définis à la fois par ce que je suis capable de faire (par exemple résoudre des problèmes logiques, mémoriser un poème, battre la mesure, utiliser mon intelligence sensori-motrice, diriger une équipe) et par ce que j’ai envie de faire (jouer du violon, faire des mathématiques, écrire, chanter, fonder une entreprise). Je suis un réservoir de capacités d’agir et de raisons d’agir. Les premières déterminent le comment, les secondes le pourquoi. Les unes me permettent de faire bien ce que je fais, les autres me poussent à faire ce que je fais.
Ces deux composantes du potentiel humain sont également nécessaires à ma réalisation personnelle. L’une ne saurait aller sans l’autre. Les aptitudes doivent pouvoir s’appuyer sur des motivations, sinon elles ne débouchent sur rien. De quelle utilité serait, par exemple, une disposition pour la musique si je n’ai pas envie de faire de la musique ? À quoi me sert d’avoir un don pour les mathématiques, si celles-ci n’éveillent aucun intérêt en moi ? Et inversement : les motivations sans les aptitudes sont impuissantes. Je cours à l’échec si je désire occuper un poste de dirigeant alors que je n’ai pas d’aptitude au leadership, ou si je prétends devenir chanteur alors que je n’ai pas un beau timbre de voix. Il faut avoir les moyens de ses ambitions et les ambitions de ses moyens. Pour m’accomplir, j’ai besoin de la poussée de ces deux moteurs. Fort heureusement, il y a entre les aptitudes et les motivations une interaction, une alchimie, qui fait que, le plus souvent, elles vont dans le même sens. Elles se renforcent mutuellement.
Poursuivons notre exploration du potentiel. Nous découvrons rapidement qu’il se déploie en un vaste éventail de possibilités. Mon intériorité est riche de trésors de toutes sortes et, par conséquent, il n’y a pas une manière unique de me développer, mais une diversité de développements possibles selon que je me concentrerai sur telle ou telle dimension de mon être. J’ai devant moi une multiplicité d’existences possibles. Il y a plusieurs demeures au royaume de la réalisation personnelle.
Je peux, par exemple, conformément à la philosophie des Lumières, décider que ma destination est de me servir de ma raison, autrement dit que j’accéderai à la plénitude de mon statut d’homme en utilisant à plein mes capacités rationnelles, en exerçant mon esprit critique, en augmentant mon savoir, en usant de ma liberté d’examen, bref, en appliquant la devise de Kant : « Ose te servir de ta raison. » Je peux, au contraire, cultiver ma faculté de sentir, apprendre à vibrer, multiplier les occasions de m’émouvoir, auquel cas je prendrai pour guide Jean-Jacques Rousseau, qui écrivait dans les Confessions : « Être, c’est sentir. » Je peux développer les ressources de la passion, me plaçant ainsi dans la filiation des romantiques. Chateaubriand, Lamartine, Musset ont rompu avec une tradition millénaire qui tenait la passion pour une « maladie de l’âme », et ils ont fait d’elle l’expression la plus authentique de la subjectivité. Ils ont été les premiers à briser l’opprobre qui la frappait et à l’ériger en moyen de réalisation de soi, posant ainsi l’équation vie épanouie = vie passionnée.
D’autres possibilités s’offrent à moi. Je peux développer mes capacités inventives, mon « cerveau droit », comme le recommande le développement personnel. Je peux libérer mon imagination créatrice et tenter de devenir un artiste, en prenant modèle sur l’artiste créateur, visionnaire, sensible, libre, rebelle, prophète d’une société nouvelle, dont la figure a surgi au XIXe siècle comme le symbole même de l’actualisation des possibilités humaines. Je peux fortifier ma volonté, suivant les préceptes de Roberto Assagioli, un des maîtres à penser du développement personnel. Assagioli a fait de la volonté la cheville ouvrière de sa méthode appelée psychosynthèse3. Je peux écouter la grande voix qui, de Rimbaud aux surréalistes, m’incite à libérer les forces de l’inconscient, les puissances du rêve, de l’illumination poétique, de l’hallucination. Je peux même être tenté, comme certains de mes contemporains, de développer des pouvoirs occultes, la voyance, la télépathie, la perception extrasensorielle, la médiumnité, la magie… C’est une idée assez répandue aujourd’hui, notamment dans les milieux ésotérico-mystiques, que les pouvoirs parapsychologiques ne sont pas réservés à une minorité d’individus, mais que chacun de nous les possède sous une forme latente. Je peux aussi nourrir le projet de développer mon énergie, ma force vitale, d’améliorer mes performances physiques, mes prouesses musculaires, de sculpter mon corps, ce qui est après tout une manière parfaitement légitime d’envisager la réalisation de soi : dans ce cas, je pourrai me réclamer de Montherlant qui fut le chantre de la vie sportive. Je peux apprendre avec Bergson à « vivre dans la durée », ou à explorer avec Maine de Biran ma vie intérieure. Je peux m’inspirer de Nietzsche qui m’invite à libérer ma volonté de puissance, laquelle était, à ses yeux, la clé de la réalisation de soi car elle constituait « l’essence la plus intime de l’être4 » : il me restera alors à diriger cette volonté de puissance, à mon gré, vers la sphère politique, l’activité économique, la connaissance scientifique, la technique, la création littéraire. À moins que je ne décide d’apprendre, auprès de Schopenhauer, à renoncer à la volonté, à desserrer l’étau du vouloir, et de m’initier, avec ce philosophe nourri de bouddhisme, aux secrets du lâcher-prise.
Enfin, pour compléter cet inventaire de mon potentiel, je peux feuilleter le catalogue des stages de développement personnel, qui connaissent de nos jours un grand succès. Les thèmes du travail sur soi proposé dans ces stages compléteront l’éventail déjà fort étendu des choix qui s’offrent à moi : par exemple, la capacité de communiquer, l’apprentissage du leadership, la gestion du stress, l’estime de soi, la confiance en soi, le contrôle des émotions, la créativité…
Cette première exploration de la notion de potentiel me révèle d’ores et déjà une chose importante. Pour connaître toutes les possibilités que recèle mon moi, je peux me tourner vers le développement personnel, c’est-à-dire le courant psychologique né dans les années 1960 sous l’égide d’Abraham Maslow et de Carl Rogers, courant qui, de façon révélatrice, s’appelait aussi « Mouvement du potentiel humain ». Le développement personnel est actuellement le principal représentant de la philosophie de la réalisation de soi. Mais je peux aussi puiser dans l’héritage des philosophes et des écrivains qui, depuis deux siècles, ont réfléchi au problème de l’existence. De Hegel à Bergson, de Kierkegaard à Emmanuel Mounier, de Marx à Heidegger, les philosophes n’ont pas cessé de s’interroger sur la réalisation de soi. Il serait dommage d’entamer une démarche de réalisation de soi sans utiliser leur apport. De son côté, la littérature a fait du développement de l’individu un de ses thèmes privilégiés. L’égotisme prôné par Stendhal, le culte du moi célébré par Maurice Barrès, la quête hédoniste de Gide dans les Nourritures terrestres, le message de Goethe dans Wilhelm Meister, la découverte de soi par la mémoire dans la Recherche du temps perdu sont autant de réponses à la question capitale de l’être humain : comment vivre pleinement ? Oui, décidément, j’ai tout intérêt à profiter de la richesse qui est contenue dans les œuvres de ces grands auteurs. La culture qu’ils ont édifiée est une mine inépuisable. Elle est le résumé chatoyant des possibilités humaines. Elle constitue un véritable thésaurus de la réalisation de soi.
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1- Paul Valéry, Introduction à la méthode de Léonard de Vinci, Gallimard, collection « Folio », 1992. 2- Lettre à Werner, citée in René Le Senne, Traité de morale générale, PUF, 1967. Cette phrase est prononcée aussi par Wilhelm Meister dans le roman éponyme de Goethe. 3- Roberto Assagioli, Psychosynthèse : principes et techniques, Desclée de Brouwer, 1997. 4- Friedrich Nietzsche, Fragments posthumes, tome XIV, Gallimard, 1977.
Il est l’auteur d’une thèse d’État sur « L’idée de politesse dans les manuels de bienséance (XIXe et XXe siècles) » dont le président du jury était Jean Guitton.
Fils du médecin colonel Roger Lacroix (AOF-AEF-Indochine), il est aussi le neveu de Michel Bernstein, un des responsables du mouvement de Résistance Défense de la France, chargé des faux papiers. Il est marié à Sophie Ader, philosophe. Ils ont trois enfants.
J’ai beaucoup aimé ce livre de Michel Lacroix, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel. Il m’importe de vous préciser que j’ai lu l’édition originale de 2009 aux Éditions Robert Laffont car d’autres éditions sont parues, du moins si je me rapporte aux différentes premières et quatrièmes de couverture affichées sur le web. Ce livre ne doit pas être confondu avec un ouvrage plus récent de Michel Lacroix : Philosophie de la réalisation personnelle – Se construire dans la liberté parue en 2013 et qui sera l’objet d’une rapport de lecture dans ce dossier.
D’entrée de jeu, je souligne de choix du titre et du sous-titre : « Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel ». L’auteur avait le choix, écrit-il, et il a rejeté celui en référence au « développement personnel » :
« Se réaliser » est aussi une expression déconcertante. Elle est flanquée d’une foule de synonymes, qui provoquent un véritable encombrement sémantique. J’aurais pu écrire « m’épanouir », « me développer », par référence au développement personnel, ou bien « m’accomplir », en hommage à Nietzsche pour qui « l’homme est quelque chose qui s’accomplit encore ». Mon livre aurait pu s’intituler l’Épanouissement de soi, ou l’Accomplissement de soi, ou le Développement personnel. J’avais à ma disposition des expressions comme « vivre plus », « vivre pleinement », « atteindre la plénitude », « augmenter son être », « travailler au perfectionnement de soi », « être un individu complet », un « homme total », « développer l’humanité que l’on porte en soi », « accroître son humanitude », « mener une vie riche et créative », « donner le meilleur de soi-même », « aller jusqu’au bout de soi »… Il y avait d’autres possibilités encore. Avec les sages de l’Antiquité, je pouvais m’interroger sur la « vie bonne », avec Cicéron apprendre à « cultiver mon âme ». Dans les Nourritures terrestres, André Gide m’enseigne à « assumer le plus possible d’humanité ». Maurice Barrès m’assure qu’« en chacun est un être supérieur qui veut se réaliser ». Karl Marx propose de « réaliser l’essence de l’homme », Sartre d’« exister authentiquement ». Quant au philosophe personnaliste Emmanuel Mounier, fondateur de la revue Esprit dans les années 1930, il écrit simplement : « être une personne ».
En parcourant ainsi le vocabulaire, on est saisi par une impression de flou. De quoi dissuader un philosophe de se pencher sur une telle question… Mais si déconcertante soit-elle, cette abondance lexicale est, en un certain sens, rassurante. N’est-elle pas la preuve qu’il y a ici un vrai sujet de réflexion ? Si tant de mots ont été forgés, n’est-ce pas parce qu’ils répondent à une aspiration profonde de l’être humain ?
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Introduction, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, pp. 9-10.
Toutes ces variables synonymes, soutient l’auteur, « provoquent un véritable encombrement sémantique ». L’auteur donne une seule finalité à son livre, « comprendre », et ce, « dans le seul but de savoir de quoi l’on parle exactement lorsqu’on utilise ces mots » :
Le livre que l’on va lire a une seule finalité : comprendre. Il est écrit par un philosophe depuis toujours passionné par la psychologie, qui a pénétré dans le domaine de l’« épanouissement », du « développement personnel », de la « plénitude », de la « créativité », du « vivre plus », dans le seul but de savoir de quoi l’on parle exactement lorsque l’on utilise ces mots. J’ai essayé de dissiper les brumes qui recouvrent ce domaine et de construire une notion claire et distincte, comme on disait autrefois, de la réalisation de soi. Dans cet univers souvent peu cartésien, je me suis aventuré avec mon esprit cartésien.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Introduction, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 11.
Je préfère et de loin une analyse suivant une approche philosophique lorsqu’il est question d’épanouissement personnel et de développement personnel en place et lieu d’une technique :
Pas de techniques simplistes ici mais un éclairage novateur sur le potentiel humain, la confiance en soi ou la pensée positive tels que les ont imaginés nos plus grands penseurs.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Quatrième de couverture, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 11.
Dans le premier chapitre de son œuvre, Transcendance ou autoréalisation, Michel Lacroix prend ses distances de la réalisation de soi par l’approche religieuse : « Il convient tout d’abord de délimiter notre sujet. D’où une première question. La religion relève-t-elle de la réalisation de soi ? Peut-on dire que le croyant »se réalise » ? »
Il convient donc, au seuil de notre enquête, d’établir une distinction nette entre ce qui relève de l’« épanouissement par la religion » et ce qui relève de la « réalisation de soi ». Dans le verbe « se réaliser », la forme réflexive, qui s’exprime par la particule « se », a une signification précise. Elle indique, d’une part, que mon moi constitue la matière première à partir de laquelle s’opère le travail de réalisation personnelle et, d’autre part, que c’est par moi-même que cette réalisation aura lieu. La réalisation de soi est une création de moi-même par moi-même. Mon moi est à construire et c’est à moi, et moi seul, qu’il appartient de mener à bien cette construction. Entrer dans une démarche de réalisation de soi, c’est se déclarer non soumis à des règles prédéfinies, à des lois dictées de l’extérieur. Je ne suis pas l’exécutant d’un programme théologique. Ma destination n’est pas tracée d’avance. Je ne dispose pas d’un patron préétabli d’après lequel je pourrais tailler l’étoffe de mon moi. Ce n’est pas en me reliant à une transcendance divine que j’atteindrai mon maximum d’humanité. La réalisation de soi est un processus entièrement autonome. Elle est autoréférentielle. Elle constitue une autoréalisation. Dans une pièce de théâtre, Jean-Paul Sartre fait dire à un de ses personnages : « Je n’ai d’autre loi que celle que je me donnerai3. » La démarche de réalisation de soi, ou autoréalisation, s’ouvre par une déclaration semblable : « La seule loi de mon épanouissement sera celle que je me donnerai. »
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3- Les Mouches.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 1 – Transcendance ou autoréalisation, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, pp 14-15.
Il soutient ensuite que « le philosophe métaphysicien est, à sa manière, un croyant. Il croit en une réalité suprasensible, celles des Essences, des Idées pures. Sa démarche d’épanouissement consiste à rejoindre cette réalité transcendante, à l’assimiler, à se nourrir d’elle. » Michel Lacroix n’associe donc pas l’épanouissement de soi par transcendance. Il conclut ce premier chapitre en ces mots :
Ni le croyant ni le philosophe métaphysicien ne se situent, à proprement parler, dans une perspective de réalisation de soi. Leur démarche est celle d’un épanouissement par la transcendance. Le but que nous poursuivons dans ce livre est, au contraire, de suivre l’individu dans son effort pour s’autoréaliser, c’est-à-dire pour s’épanouir en dehors des voies prétracées de la transcendance religieuse ou métaphysique. Nous voulons assumer tous les risques inhérents à cette aventure. Car se réaliser, c’est prendre des risques. Le risque de manquer de repères. Le risque de cheminer sans boussole transcendante. De s’enfermer dans son moi. De s’égarer. Le risque de la liberté.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 1 – Transcendance ou autoréalisation, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 17.
Michel La croix nous invite « à développer quelque chose qui est en moi, quelque chose qui requiert d’être libéré et cultivé » et nous oriente rapidement vers le « potentiel » :
Je déclare que la destination de mon être réside non pas dans une extériorité religieuse ou métaphysique, mais en moi-même, dans ma subjectivité. « Me réaliser » consiste non pas à me relier à un Dieu ou à des Essences éternelles qui prescrivent ce que je dois être, mais à développer quelque chose qui est en moi, quelque chose qui requiert d’être libéré et cultivé. De quoi s’agit-il ? Quel est ce bien que je possède et que je dois mettre en valeur ? Quelle est cette richesse intérieure qui fait l’objet de l’autoréalisation ? Ce sont mes virtualités, mes possibilités, mes capacités, mes facultés, mes aptitudes, mes talents, mes dons, mes ressources. Autrement dit : mon « potentiel ».
Alors que l’épanouissement par la transcendance situe la vérité de mon moi dans une transcendance religieuse ou métaphysique, la réalisation de soi la situe dans mon potentiel. C’est mon potentiel qui me définit. Ce sont mes attributs psychologiques, mes propriétés, ma richesse intérieure qui constituent mon être. « Je suis, écrivait le philosophe Heidegger, une promesse de possibilités. » Et Paul Valéry renchérissait : « Ce qui est le plus vrai d’un individu, c’est son possible.1» Pour me réaliser, il va falloir porter mes potentialités à leur complet développement. Je m’épanouirai à la condition de faire fructifier ce capital intérieur, de faire mûrir ces possibilités, d’exploiter ces ressources. Je dois faire croître ce qui est en germe dans mon moi, actualiser ce qui est virtuel. C’est ce qu’indique très bien l’étymologie du verbe « développer », d’où vient le nom familier de « développement personnel », lequel n’est en définitive qu’une autre façon de nommer la réalisation de soi. Le verbe « développer » est issu du latin volvere, qui signifie rouler, enrouler. Développer, c’est donc « dé-volvere », c’est-à-dire défaire le rouleau, dérouler ce qui est enroulé, déployer ce qui est enveloppé. « Me développer moi-même tel que m’a fait la nature, confiait Goethe, fut obscurément, dès mes jeunes années, mon désir et mon dessein2. » Retenons cet aveu du philosophe de Weimar. Il constitue l’article un de la philosophie de la réalisation de soi.
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1- Paul Valéry, Introduction à la méthode de Léonard de Vinci, Gallimard, collection « Folio », 1992. 2- Lettre à Werner, citée in René Le Senne, Traité de morale générale, PUF, 1967. Cette phrase est prononcée aussi par Wilhelm Meister dans le roman éponyme de Goethe.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 2 – « Le plus vrai d’un individu, c’est son possible » (Paul Valéry), Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, pp. 19-20.
Est-ce que les potentiels de chacun conduisent tous vers « une manière unique de se développer » ? Michel Lacroix affirme qu’il y a « un vaste éventails de possibilités » parce qu’il y a « une multiplicité d’existences possibles » :
Poursuivons notre exploration du potentiel. Nous découvrons rapidement qu’il se déploie en un vaste éventail de possibilités. Mon intériorité est riche de trésors de toutes sortes et, par conséquent, il n’y a pas une manière unique de me développer, mais une diversité de développements possibles selon que je me concentrerai sur telle ou telle dimension de mon être. J’ai devant moi une multiplicité d’existences possibles. Il y a plusieurs demeures au royaume de la réalisation personnelle.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 2 – « Le plus vrai d’un individu, c’est son possible » (Paul Valéry), Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 21.
Il donne un exemple d’exploitation de son potentiel par le choix d’une destination d’épanouissement personnel conforme à la philosophie des Lumières.
Je peux, par exemple, conformément à la philosophie des Lumières, décider que ma destination est de me servir de ma raison, autrement dit que j’accéderai à la plénitude de mon statut d’homme en utilisant à plein mes capacités rationnelles, en exerçant mon esprit critique, en augmentant mon savoir, en usant de ma liberté d’examen, bref, en appliquant la devise de Kant : « Ose te servir de ta raison. » Je peux, au contraire, cultiver ma faculté de sentir, apprendre à vibrer, multiplier les occasions de m’émouvoir, auquel cas je prendrai pour guide Jean-Jacques Rousseau, qui écrivait dans les Confessions : « Être, c’est sentir. » Je peux développer les ressources de la passion, me plaçant ainsi dans la filiation des romantiques. Chateaubriand, Lamartine, Musset ont rompu avec une tradition millénaire qui tenait la passion pour une « maladie de l’âme », et ils ont fait d’elle l’expression la plus authentique de la subjectivité. Ils ont été les premiers à briser l’opprobre qui la frappait et à l’ériger en moyen de réalisation de soi, posant ainsi l’équation vie épanouie = vie passionnée.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 2 – « Le plus vrai d’un individu, c’est son possible » (Paul Valéry), Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 22.
Mais quand le philosophe Michel Lacroix recommande de feuilleter le catalogue du développement personnel « pour connaître toutes les possibilités que recèle mon moi », je décroche, d’autant plus qu’il l’associe à « un courant psychologique ».
Cette première exploration de la notion de potentiel me révèle d’ores et déjà une chose importante. Pour connaître toutes les possibilités que recèle mon moi, je peux me tourner vers le développement personnel, c’est-à-dire le courant psychologique né dans les années 1960 sous l’égide d’Abraham Maslow et de Carl Rogers, courant qui, de façon révélatrice, s’appelait aussi « Mouvement du potentiel humain ». Le développement personnel est actuellement le principal représentant de la philosophie de la réalisation de soi. (…)
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 2 – « Le plus vrai d’un individu, c’est son possible » (Paul Valéry), Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 24.
J’en ai une fois de plus confirmation (comme s’il m’en fallait une de plus), le développement personne s’inscrit dans un courant psychologique. Me voici une fois de plus dans l’obligation de citer le livre de William Kirk KILPATRICK (1940- ), La séduction psychologique – L’échec de la psychologie moderne publié en 1983.
« L’ÉCHEC DE LA FOI PSYCHOLOGIQUE
Quelque bien intentionné et agréable qu’il soit, il n’est pas évident que l’« establishment » sache aider. Partout il existe de sombres signes que cette foi n’est pas efficace. En dépit de la création d’une armée virtuelle de psychiatres, psychologues, psychométriciens, conseillers et éducateurs sociaux, il n’y a eu aucune diminution du taux de maladies mentales, suicides, alcoolisme, toxicomanie, enfants maltraités, divorces, meurtres et voies de fait de toutes sortes. Contrairement à ce qu’on pourrait espérer dans une société analysée si soigneusement et assistée par tant d’experts de la santé mentale, il y a eu un accroissement dans tous ces domaines. Il semble parfois exister un rapport direct entre le nombre grandissant de ceux qui aident et le nombre grandissant de ceux qui ont besoin d’aide. Plus nous avons de psychologues, plus nous récoltons de maladies mentales; plus nous avons d’éducateurs sociaux et de délégués à la liberté surveillée, plus la criminalité s’accroît; plus nous avons d’enseignants et plus l’ignorance grandit.
Il nous faut nous interroger devant tout cela. En clair, cela est suspect. Nous sommes contraints de concevoir la possibilité que la psychologie et les professions qui gravitent autour d’elle proposent des solutions aux problèmes qu’elles ont elles-mêmes contribué à faire naître. Ainsi, nous voyons des psychologues élever chez les gens l’espoir de bonheur ici-bas à un niveau démesuré, pour ensuite dispenser leurs conseils sur la crise qui survient vers la mi-vie et à la mort. Nous voyons des psychologues faire de l’attention portée à soi-même une vertu, pour ensuite s’étonner du nombre croissant de narcissiques. Nous voyons des psychologues alléguer devant les tribunaux que les mauvais garçons et même les mauvais adultes n’existent pas, pour ensuite formuler des théories afin d’expliquer l’augmentation de la criminalité. Nous voyons des psychologues mettre à rude épreuve les liens de la vie familiale, pour ensuite mener une thérapie dans les foyers brisés.
ATTENTES ET RÉSULTATS
Il y a trop de « si », de « et » et de « mais » pour prouver une relation fortuite entre la montée de la psychologie et la détérioration du lien social, mais il existe certainement assez de preuves pour douter du profit que la psychologie prétend nous apporter. Dans les domaines où les professionnels savent véritablement ce qu’ils font, nous nous attendons à un résultat. Stanislas Andreski, sociologue britannique, fait la lumière sur ce point en comparant la psychologie et la sociologie à d’autres professions. Il note que lorsqu’une profession est fondée sur une connaissance bien établie, il devrait y avoir une relation entre le nombre de personnes qui exercent cette profession et les résultats accomplis :
« Ainsi, dans un pays où il y a pléthore d’ingénieurs en télécommunication, l’équipement téléphonique sera normalement meilleur que dans un pays où il n’y a que quelques spécialistes dans ce domaine. Le taux de mortalité sera plus bas dans les pays ou les régions où il y a beaucoup de docteurs et d’infirmières que dans les lieux où ils sont rares et éloignés. Les comptes seront généralement tenus avec plus d’efficacité dans les pays où il y a de nombreux comptables expérimentés que là où ils font défaut. »18
Mais quel est donc le profit produit par la psychologie et la sociologie? Le professeur Andreski poursuit :
« … Partant, nous devrions constater que dans les pays, les régions, les institutions ou encore les secteurs où les services des psychologues sont très largement requis, les foyers sont plus résistants, les liens entre conjoints, frères et sœurs, parents et enfants, plus solides et plus chaleureux; les relations entre collègues plus harmonieuses, le traitement des patients meilleur; les vandales, les criminels et les toxicomanes moins nombreux, que dans les endroits et les groupes qui n’ont pas recours aux talents des psychologues. En conséquence, nous pourrions déduire que les États-Unis sont la patrie bénie de l’harmonie et de la paix; et qu’il aurait dû en être toujours plus ainsi durant le dernier quart de siècle en relation avec la croissance numérique des sociologues, des psychologues et des experts en sciences politiques. »19
Cependant, ce n’est pas ce qui s’est produit. Au contraire, les choses semblent empirer. Les rues ne sont pas sûres. Les foyers se désintègrent. Le suicide sévit parmi les jeunes. Et quand la psychologie tente de régler de tels problèmes, il semble souvent qu’elle les aggrave. La création dans les villes de centres de prévention du suicide s’accompagne, par exemple, d’une augmentation de celui-ci. Les conseils matrimoniaux conduisent fréquemment au divorce. Par ailleurs, l’observation la plus élémentaire nous montre que l’introduction de l’éducation sexuelle dans un public très étendu n’a aucunement enrayé la hausse des grossesses non désirées, de la promiscuité et des maladies vénériennes. Il est plutôt manifeste que de tels programmes encouragent la sexualité précoce et les problèmes qui en découlent.
Il est difficile de ne pas conclure que l’ordonnance est à l’origine de la maladie. « Si nous constations », écrit Andreski, « que toutes les fois que les pompiers arrivent, le feu redouble d’intensité, nous finirions par nous demander ce qu’il peut bien sortir de leurs lances et si, par hasard, ils ne sont pas en train de verser de l’huile sur le feu »20 ».
Heureusement, en bon philosophe, Michel Lacroix ne se limite pas au catalogue du développement personnel :
Mais je peux aussi puiser dans l’héritage des philosophes et des écrivains qui, depuis deux siècles, ont réfléchi au problème de l’existence. De Hegel à Bergson, de Kierkegaard à Emmanuel Mounier, de Marx à Heidegger, les philosophes n’ont pas cessé de s’interroger sur la réalisation de soi. Il serait dommage d’entamer une démarche de réalisation de soi sans utiliser leur apport. De son côté, la littérature a fait du développement de l’individu un de ses thèmes privilégiés. L’égotisme prôné par Stendhal, le culte du moi célébré par Maurice Barrès, la quête hédoniste de Gide dans les Nourritures terrestres, le message de Goethe dans Wilhelm Meister, la découverte de soi par la mémoire dans la Recherche du temps perdu sont autant de réponses à la question capitale de l’être humain : comment vivre pleinement ? Oui, décidément, j’ai tout intérêt à profiter de la richesse qui est contenue dans les œuvres de ces grands auteurs. La culture qu’ils ont édifiée est une mine inépuisable. Elle est le résumé chatoyant des possibilités humaines. Elle constitue un véritable thésaurus de la réalisation de soi.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 2 – « Le plus vrai d’un individu, c’est son possible » (Paul Valéry), Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 24.
Dans le troisième chapitre de son livre, Du Ciel sur la Terre, le philosophe Michel Lacroix souligne que la réalisation de soi est une idée fondamentalement moderne apparue au XVIIIè siècle.
Entre le stoïcien qui cherche à se fondre dans l’ordre divin du cosmos, le platonicien qui se nourrit des Idées et le chrétien qui prend modèle sur la vie de Jésus, il n’y avait, en définitive, pas de différences. Jusqu’au XVIIIè siècle, le idées de Dieu, de salut, d’ordre cosmique, d’essence métaphysique de l’homme constituèrent l’horizon indépassable de la réalisation de soi. En dehors d’elles, il n’y avait pas d’épanouissement possible.
La réalisation de soi est une idée fondamentalement moderne. Elle est apparue au XVIIIè siècle. Elle coïncide avec la naissance de l’individualisme. Elle traduit la volonté de l’homme moderne de s’affranchir de tout modèle transcendant et de penser son épanouissement à partir de la seule idée du potentiel humain. Elle reflète l’état d’esprit de l’individu qui, à partir du tournant du XVIIIè siècle, ont décidé d’être les souverains de leur subjectivité, les seuls et uniques législateur de leur intimité. Le philosophe Matin Heidegger a parfaitement résumé le changement intervenu à cette époque : « Le propre de l’humanité moderne, écrit-il dans son ouvrage sur Nietzsche, est de vouloir le développement autonome de toutes ses facultés1.
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1 Martin Heidegger, Nietzsche, tome II, Gallimard, 1972.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 3 – Du Ciel sur la Terre, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 28.
Michel Lacroix ne relève pas une disparition de la réalisation de soi par transcendance (religion et métaphysique) mais plutôt un nouveau choix, intérieur plutôt qu’extérieur. Nous avons donc le choix entre l’extra-détermination à l’intra-détermination.
Ainsi, nous entrons dans la philosophie de l’existence.
(…) La philosophie de l’existence considère que, comme l’écrit Sarte, « l’homme se fait lui-même à partir de son propre projet », c’est-à-dire par intro-détermination et non en vertu d’une extra-détermination. À l’âge de l’auto-réalisation (âge dans lequel on est entré à la fin du XVIIIè siècle), le psychologue, le spécialiste du développement personnel et le philosophe de l’existence se posent en concurrents du théologien et du métaphysicien en tant que maître de vie. Ce sont eux, désormais, qui fixent les normes de la vie bonne.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 3 – Du Ciel sur la Terre, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 27.
Bref, « Ma destination n’est pas en dehors de moi mais en moi », là où se trouve mon potentiel.
Dans l’autoréalisation, au contraire, je me définis par les attributs, les propriétés, les dons, les talents, les aptitudes, les besoins, les aspiration que recèle mon moi. Mon horizon d’épanouissement est formé par mon potentiel, c’est-à-dire ma raison, ma sensibilité, ma mémoire, mon énergie vitale, ma volonté, ma puissance physique, mon imagination, ma créativité, mes passions, mes émotions, mes rêves, mes désirs. Je n’ai plus besoin de sortir de moi pour me trouver. La vérité anthropologique que je poursuis est immanente à moi-même. Ma destination n’est pas en dehors de moi mais en moi. Ma tâche consiste à cultiver les propriétés de mon être intime. J’accéderai à la plénitude de mon humanité en les portant à leur degré maximal de développement.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 3 – Du Ciel sur la Terre, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, pp. 25-26.
Dans sa liste des composantes du potentiel humain, le philosophe Michel Lacroix place en premier lieu la « raison ». Or, comme nous de constatons de nos jours, l’individu qui prend l’habitude de « se donner raison » pour alimenter sa « confiance en soi » bloque souvent tout le reste de mon potentiel. Il est en lutte avec le doute.
La réalisation de soi est la mise en valeur de mon potentiel. Telle est la définition à laquelle nous sommes parvenus. Dès lors, tout paraît aller de soi. J’ai en moi une richesse et je n’ai plus qu’à l’exploiter. Je vais utiliser au mieux mes potentialités afin de « donner le meilleur de moi-même », de « vivre plus », d’« augmenter mon être ».
En réalité, les choses ne sont pas si simple. Le chemin dans lequel je m’engage est hérissé de difficultés. La première difficulté qui surgit tient à l’incertitude qui pèse sur ma démarche. Car ce trésor intérieur que je veux faire fructifier, je ne suis pas sûr, après tout, qu’il existe. Ce potentiel n’est peut-être qu’une chimère. Qui sait si je ne me raconte pas des histoires ?
Il en va, à cet égard, de l’autoréalisation comme de l’épanouissement par transcendance. Ces deux options présente une similitude car, dans les deux cas, l’individu est confronté au doute.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 4 – La pensée positive, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 31.
Selon le philosophe Michel Lacroix, l’individu sortira vainqueur de cette confrontation au doute grâce à la « pensée positive » :
Installer en soi la croyance dans son potentiel est, très précisément, l’objet de ce que l’on appelle la pensée positive. À cet égard, les coachs, les conseiller en développement personnel, les animateurs de stages ont tout a fait raison de lui accorder une place stratégique dans les démarches qu’ils proposent à leurs clients. Il est indispensable, en effet, de commencer par là. Penser de façon positive est la condition préalable à la réalisation de soi.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 4 – La pensée positive, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 33.
Pour lutter contre le doute de son potentiel, il faut y croire et on y parviendra avec la pensée positive. JE NE SUIS PAS D’ACCORD ! Jamais je recommanderai à une personne de surmonter une difficulté, un doute, par la pensée positive. Le potentiel n’est pas avant tout une affaire de croyance mais de dévoilement empirique, d’expérience, et de reconnaissance. Le doute, c’est la faille par laquelle la lumière entre dans la caverne de Platon. Si un individu est malade de pensée négative, le remède est certainement pas la pensée positive. Si je me déprécie au point de renier mon potentiel, je dois douter, douter du doute. Suis-je raisonnable ? Puis-je me raisonner ? Je me dois d’exploiter ma raison et ce faisant d’exploiter la première composante de mon potentiel.
Pourquoi je n’aurai pas de potentiel et que les autres en auraient ? Pourquoi je n’aurai pas les moyens de l’exploiter que les autres en auraient ? Le potentiel n’existe pas parce qu’on y croit positivement. L’expérience le prouve, tous les êtres humains ont du potentiel. Si j’en doute, il me faut le prouver sur le plan universel et non plus individuel. Le potentiel est dans l’être de l’Homme, dans tous les êtres humains. Que j’y crois ou non, mon être possède un potentiel. Le doute s’inscrit dans ce potentiel. Douter de soi revèle son potentiel.
Je dois tirer le bénéfice du doute : la certitude. Non pas une certitude définitive mais toute certitude n’est valide que jusqu’à ce que nous ayons raison d’en douter, généralement par acquis d’expérience. Ainsi, à l’instar de la connaissance scientifique qui s’érige sur la destruction du déjà-su, ma certitude en mon potentiel sera remise en cause par une certitude encore plus valide, de par mon expérience.
Nier en bloc tout son potentiel sans avoir fait l’expérience des possibilités, sans avoir essayer tel ou tel aspect, pose un grave problème que la pensée positive ne peut pas corriger. La condition préalable à la réalisation de soi, c’est d’en penser l’expérimentation et ainsi la préparer, c’est-à-dire ÊTRE dans l’Action. Peu m’importe de croire en tel ou tel potentiel, je vais le prouver ou non que dans l’action de expérimentation. Certes, je peux hésiter mais mon devoir est d’agir.
(…) Là où le savoir s’arrête, il faut que la croyance prenne le relais. (…)
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 4 – La pensée positive, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 33.
Il n’est pas obligé « que la croyance prenne le relais ». Je peux fort bien me limiter au savoir.
Tel est, présenté succinctement, le développement du travail sur soi appelé « pensée positive ». Il attire notre attention sur un fait essentiel que nous ne devons jamais perdre de vue : l’autoréalisation est d’abord une autopersuasion.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 4 – La pensée positive, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 35.
Si, par malheur, le fondement de l’autoréalisation est une autopersuasion, c’est-à-dire une croyance, tout risque de s’effondrer au moindre doute, au moindre défaut de confiance en soi. Il ne s’agit donc pas de s’autopersuader mais plutôt de reconnaître en sa conscience son potentiel humain. C’est là une pensée rationnelle et non pas émotive. Le potentiel vient avec l’Être. On pourrait dire : « Je suis donc j’ai du potentiel ». Les pensées autodépréciatives, du type « Je ne vaux rien » ou « Je suis bon à rien », ne peuvent être éliminées par des pensées positives car elles s’équivalent en nature et en force. Ce sont des pensées relevant d’une croyance et, j’insiste, les croyances n’ont pas besoin de preuve. Il est question ici de sentiments inutiles à la réalisation de soi contrairement à la rationalité.
Au chapitre 5, Se réaliser, au risque de l’immoralité ?, le philosophe Michel Lacroix souligne que « c’est peut-être avec Nietzsche que l’exigence d’épanouissement apparut le plus nettement dans la lumière crue de l’immoralisme ». Parlant de la volonté de puissance introduite par Nietzsche, monsieur Lacroix ajoute :
(…) S’épanouir, à ses yeux, consistait à libérer cette volonté de puissance, à lui donner un exutoire, à permettre son expansion. Pour cela, il fallait briser le carcan des préjugés moraux. Il fallait se débarrasser des valeurs morales qui étouffent la volonté de puissance : l’humilité, l’entraide, la compassion, l’égalité, la protection des faibles. (…)
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 5 – Se réaliser, au risque de l’immoralité ?, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 38.
Bref, pour Nietzsche, c’est chacun pour soi. Au diable les valeurs morales qui nous relient aux autres dans « l’humilité, l’entraide, la compassion, l’égalité, la protection des faibles ». Et que dire du regain du développement personnel dans les années 1960 ?
Il y a un autre fait troublant. Dans les années 1960, la réalisation de soi a connu un regain sous l’influence du « développement personnel » fondé par les psychologues Carl Rogers et Abraham Maslow. Or, ce regain à coïncidé avec le relâchement des normes morales au sein de la société. Il s’est accompagné d’un déclin des valeurs. On ne peut plus nier cette concomitance. La promotion du « souci de soi » à partir des années 1960 est allée de pair avec une généralisation du « chacun pour soi ». N’y aurait-il pas entre ces deux phénomènes une relation de cause à effet ? Ce qu’on donne à la réalisation personnelle, ne le retire-t-on pas, comme par un jeu de vase communicants, au souci d’autrui ? Peut-on servir deux maîtres ?
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 5 – Se réaliser, au risque de l’immoralité ?, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 39.
À mon humble avis, se réaliser soi-même implique nécessairement des valeurs morales fortes, sans quoi l’épanouissement personnel ne se déploiera pas sainement.
Le message de Goethe reste très actuel. Il nous concerne tous, femmes et homme du XXIè siècle. Car une certaine démagogie s’est répandue dans le développement personnel. Les formateurs, les conseillers, les coachs font entendre un slogan séduisant et flatteur qui résonne inlassablement dans les stages et dans les manuels. Ils répètent à leurs client : « Explorer toutes vos possibilités. » Vraiment toutes ? Est-ce bien raisonnable ? Goethe émet un avis contraire : il faut, nous dit-il en substance, accepter de n’exploiter qu’une partie de nos ressources. Il faut consentir à laisser dans les limbes du virtuel certaines de nos potentialités.
Mais, objectera-t-on, si l’empêche certains de mes possibles d’accéder à l’existence. est-ce que je ne me condamne pas à un « déficit d’être » ? Me limiter, n’est-ce pas me diminuer ? Puis-je parler de « plénitude de vie », d’ «accomplissement », d’ « épanouissement intégral », d’ « augmentation de mon être » si, possesseur d’un riche potentiel, j’en laisse en friche une partie ? N’est-ce pas contradictoire avec le projet gidien d’ «assumer le plus possible d’humanité » ?
La sagesse de Wilhelm Meister est de montrer que, en fait, il y a plus de richesse dans la spécialisation que dans la polyvalence. Ce qu’on perd en extension, on le regagne en profondeur. Par une sorte de paradoxe, c’est quand elle consent à la finitude que notre âme s’élargit. La philosophie de l’autoréalisation fait un pied de nez à l’arithmétique. L’arithmétique enseigne que, pour « avoir plus », il faut faire une opération d’ «addition ». La philosophie de la réalisation déclare au contraire que, pour vivre à un degré supérieur, il faut opérer une retranchement. Pour s’enrichir, il faut… s’appauvrir. Pour être plus, ce n’est pas une addition qu’il faut faire, mais… une soustraction.
Fait révélateur, toutes les philosophies de l’existence ont reconnu le rôle clé de l’acte de choix. Elles en ont fait la cheville ouvrière de la construction de la personnalité.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 7 – Le baptême du choix, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, pp. 54-55.
En recherche marketing, l’expert demandera à son client : « Votre produit vise quelle clientèle ? » La réponse habituelle du manufacturier : « Mon produit, c’est pour tout le monde ». Le manufacturier s’est convaincu que son produit a le potentiel de motiver TOUT LE MONDE à l’achat. Or, l’expert le sait, « en marketing, »tout le monde », c’est personne ». Il a donc l’obligation d’informer son client de la Loi de la convergence.
“Voici le principe de convergence : c’est en rétrécissant la cible que l’on s’insinue dans les esprits. Lorsqu’elle se réduit à un seul mot ou à un seul concept, tels les rayons lumineux convergeant en un point à travers la loupe, toute l’énergie du message se trouve concentrée en ce point − et il passe! ”.
Al Ries et Jack Trout, Les 22 lois du marketing, p. 44.
L’exercice est parfois difficile pour le manufacturier. Il vise « tout le monde » et le voilà forcé de « réduire sa cible ». Rare sont les manufacturiers qui dispose des ressources pour rejoindre « tout le monde ». Il faut d’abord concentrer les ressources sur une seule cible, à la manière d’une loupe qui converge les rayons du soleil en leur point le plus petit pour en tirer le maximum de chaleur (et allumer un feu). L’argument des ressources du manufacturier aide à comprendre l’importance d’ajuster sa cible aux ressources dont il dispose pour la mise en marché.
La Loi de la convergence s’applique aussi dans le cas de la réalisation personnelle. Il faut savoir choisir en raison des ressources à sa disposition et, ce choix implique une spécialisation donnée, une partie de son potentiel devient ainsi plus prometteuse que les autres.
Dans le chapitre 8, De la vita contemplativa à la vita activa (De la vie contemplative à la vie active), le philosophe Michel Lacroix écrit : « (…) Pour (Emmanuel) Mounier, ce n’est pas en se plongeant dans la vie intérieure, en s’aventurant dans on ne sait quelle expérience mystique qu’on accède au statut de “personne”, mais en tendant au maximum le ressort de l’action : “La personne prend conscience d’elle-même non pas dans une extase, affirme-t-il, mais dans une lutte de force.” »
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 8 – De la vita contemplativa à la vita activa, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p.67.
Autre domaine où la promotion de la vita activa s’est manifestée de façon spectaculaire : la philosophie. De Kant à Bergson, de Hegel à Emmanuel Moutier, on discerne nettement la courbe d’une évolution qui aboutit à place l’action au sommet de la philosophie de l’existence. L’une des idées les plus fréquemment admises dans la philosophie moderne est que l’existence se définit, avant tout, par l’action. Au « je pense donc je suis » formulé jadis par Descartes dans Le Discours de la méthode s’est substitué un « j’agis donc je suis ».
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 8 – De la vita contemplativa à la vita activa, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p.66.
Mais attention ! Il faut tout de même RÉFLÉCHIR AVANT D’AGIR ! Accéder au statut de « personne » implique de se connaître, de comprendre notre personnalité, ses forces et ses faiblesses. Et puisque l’action n’est jamais solitaire, il y a nécessité de maîtriser son style interpersonnel et d’identifier celui des autres. Le style interpersonnel inclut des besoins auxquels il faut savoir répondre pour entretenir un lien respectueux de la personnalité de ses interlocuteurs.
Tiré du document Connaissance de soi, diffusé dans le cadre du cours Tirez votre épingle du jeu pour la création ou l’expansion de votre entreprise offert par le Centre de création et d’expansion d’entreprise du Collège d’enseignement général et professionnel de Limoilou, Québec, Québec, Canada, juin 1992. Site web de Larry Wilson – Wilson Learning Worldwide Inc. : https://global.wilsonlearning.com/
Dans Chapitre 9, « Se réaliser, c’est agir », le philosophe Michel Lacroix revient sur la « vie active » plutôt que contemplative et constate « que l’action est un élément nécessaire » de l’autoréalisation.
Plaçons-nous d’abord au début du processus. Qu’est-ce qui, au point de départ, motive une démarche de réalisation de soi ? Qu’est-ce qui la déclenche ? C’est, la plupart du temps, le sentiment d’insatisfaction que l’on éprouve. Si j’exprime l’intention de me réaliser, c’est que je ressens une insatisfaction. Je ne suis pas tout à fait content de ce que je suis. Je ne m’enferme pas, de façon tautologique et complaisante, dans l’affirmation « je suis ce que je suis » ou « moi = moi ». J’élève, au contraire, une protestation contre moi-même. Je me projette en avant vers un devoir-être. Je me perçois comme ayant à développer mon potentiel, à mettre-en-oeuvre-mes-virtualités, à réveiller-les-puissances-endormies-en moi. Comme l’écrit Heidegger, j’existe sur le mode de l’ «avoir à être ». Je refuse de n’être que ce que je suis. Je suis ce que je ne suis pas et suis pas ce que je suis. Entrer dans une démarche d’autoréalisation, c’est donc, en premier lieu, traverse l’épreuve de la négativité, de l’antagonisme par rapport à soi-même. L’autoréalisation prend sa source dans cette autonégation, dans cette contradiction avec soi-même. Or, cette autonégation constitue, d’une certaine façon, une action. Une action embryonnaire, intériorisé, internalisée, mais une action quand même.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 9 – Se réaliser, c’est agir, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, pp. 71-72.
Dans mon cas, un sentiment d’insatisfaction ne fut pas à l’origine de mon autoréalisation. Ce fut plutôt un besoin irrépressible de création dans la communication, à commencer par la poésie, les nombreux projets scolaires et le journalisme. Adolescent, je ne me sentais pas redevable à une quelconque insatisfaction. Certes, j’étais déçu de constater que le monde dans lequel j’allais vivre n’était pas comme celui qu’on m’avait annoncé dans mon enfance ou encore celui que j’avais imaginé suivant une logique naïve, mais je n’ai pas été animé par un sentiment d’insatisfaction. Et je ne me suis pas laisser diriger par cette déception au point de me déprécier, d’être insatisfait de ma vie, de vouloir la changer… Il me semblait être dans l’action depuis toujours et même dans ma solitude que je chérissais tant. En réalité, j’étais dans l’action sans le savoir, sans m’y arrêté. Je constatais un problème ou un manque et cela me motivais à l’action. Bref, je ne suis passé par une étape d’autonégation.
Je comprend les gens qui prennent conscience à un moment donné qu’ils sont insatisfaits de leur vie. Mais ce n’est pas une raison suffisante pour tomber dans l’autonégation. Il y aura toujours ce que je contrôle et ce que je ne contrôle pas, ce dont j’ai conscience et ce dont je n’ai pas conscience, ce que j’ai compris et ce que je n’ai pas compris. “Ne pas être là où je voulais me rendre” ou “Être là où je ne voulais pas rendre” n’impose à personne une autonégation de soi. À elle seule la prise de conscience de la situation est source de valorisation, non pas dévalorisation.
Le philosophe Michel Lacroix met en garde le lecteur face à « La tentation activiste » (Chapitre 10) ou l’hyperactivité :
L’action est indispensable à l’autoréalisation. Elle ne saurait être retranchée sans que celle-ci soit remise en cause. Ce point est maintenant acquis. Mais ici, deux dangers vont surgir. Deux tentations, directement liées à l’action, guettent l’individu sur le chemin de sa réalisation personnelle.
La première tentation est de l’hyperactivité. L’action peut exacerber, devenir une obsession, dégénérer en addiction. Dans mon impatience à me réaliser, je me précipite vers l’avenir. Je suis tendu vers le futur dans une sorte de survoltage. Incapable de m’attarder, de « me poser », je passe à côté du présent sans pouvoir en goûter la saveur. Je deviens indisponible à l’ici et maintenant. Comme Raphaël dans La Peau de chagrin, je ne songe qu’à « vivre avec excès ». Ma réalisation personne n’est plus qu’une haletante course aux obstacles, une hasardeuse compétition.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 10 – La tentation activiste, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 77.
Il explique ensuite que « Le fantasme de la grandeur et de la supériorité » (Chapitre 11) nous guette :
Une deuxième tentation guette l’individu sur le chemin de la réalisation personnelle : la tentation de grandeur. Elle se traduit par une injonction obsédante, que l’individu s’adresse à lui-même : « Pour me réaliser, je dois faire de grandes choses… Pour avoir une vertu épanouissante, il faut que mon action soit spectaculaire, glorieuse, éclatante… ».
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 11 – Le fantasme de la grandeur et de la supériorité, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 81.
Au Chapitre 12, le philosophe Michel Lacroix pose une question surprenante en titre, « Y a-t-il un désir spécifique de la réalisation de soi ? », et il se réfère à Abraham Maslow pour y répondre :
Maslow insistait également sur le point suivant : le besoin de réalisation personnelle est, à l’instar des besoins psychologiques de base, un besoin inné. Il est constitutif de la nature humaine. De même que nous sommes programmés pour ressentir le besoin de tendresse, d’amitié, d’écoute, d’estime, d’appartenance, de sécurité, c’est-à-dire les besoins psychologiques, nous sommes programmés pour la réalisation de soi. (…)
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 12 – Y a-t-il un désir spécifique de la réalisation de soi ?, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 93.
(…) Pour Maslow, la capacité de réalisation personnelle est présente en chacun. Elle est inscrite dans la nature de l’être humain. Comme la raison chez Descartes, elle est « la chose du monde la mieux partagée ». Tout le monde peut mener une vie créative. Tout le monde a un désir de progrès, une propension au dépassement, une aspiration au plus-être. Ce postulat universalisme, qui est au cœur de la théorie de Maslow, est resté l’un des traits distinctifs du mouvement du développement personnel.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 13 – Réalisation de sou ou sublimation ? Le développement personnel face à la psychanalyse, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 100.
La réalisation personnelle est-elle vraiment « Innée », « Inscrite dans la nature de l’être humain » ? Est-ce que « Tout le monde a un désir de progrès, une propension au dépassement, une aspiration au plus-être » ? Ces affirmations demeurent une théorie, une idée. Abraham Maslow va beaucoup trop loin à mon humble avis. Sa théorie est un jugement :
En second lieu, expliquait Maslow, il y a les personnes qui, par une espèce d’autocensure, se défendent contre leur propre désir de réalisation de soi. Elles se laissent gagner par la paresse, la léthargie, le contentement de soi, la résignation. Elles ont peur de croître, peur d’affronter la nouveauté, peur de s’élever. Elles exercent une sorte de répression sur leur autoréalisation. Maslow n’hésitait pas à faire usage, à leur propos, du concept de « résistance ». (…)
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 12 – Y a-t-il un désir spécifique de la réalisation de soi ?, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 94.
Pour s’autocensurer, il faut d’abord connaître et admettre ce que l’on censure. Ici, il nous faudrait faire appel à un déni de son potentiel, à un déni du désir de connaître.
Cette théorie de Maslow ne peut pas être appréciée en dehors du contexte des années 1960 alors que celui ou celle qui ne suit pas le mouvement du développement personnel, ne s’y éveille pas, est relégué au sous-sol de l’édifice de la réalisation de soi et jugé comme résistant à lui-même. Or, en cette période de changement radicale des mœurs, il est normal de le constater, qu’elle met en cause les valeurs reconnues comme universelles jusque-là. Bref, il y a une résistance naturelle, innée, face au changement comme en toutes les autres périodes historiques où s’opère une rupture. Celui ou celle qui actionne le frein de sécurité n’est pas pour autant une personne qui refoule son désir de réalisation de soi. Et elle n’est pas obligatoirement « gagner par la paresse, la léthargie, le contentement de soi, la résignation ». Le sécurité s’accorde alors avec la Sagesse.
Le philosophe Michel Lacroix souligne ensuite l’apport d’autrui dans la réalisation de soi. : « La réalisation de soi nécessite la relation à autrui ». Il pose la question à savoir quels « nutriments psychologiques » m’apportent mes semblables.
Le premier de ces nutriments est l’amour. Il faudrait un livre entier pour analyser ses multiples formes. Je me bornerai à en mentionner deux. D’abord, l’amour qui s’empare de nous lorsque nous « tombons amoureux ». C’est un fait d’expérience que l’éclosion du sentiment amoureux s’accompagne d’une sensation d’épanouissement. Quand nous commençons à aimer un être et que nous découvrons que nous sommes aimés de lui, notre expérience est, pour ainsi dire, portée à un diapason supérieur. Nous ressentons une intensité de vie plus grande. l’euphorie amoureuse balaie, comme par enchantement, ce qu’il y a de négatif en nous. Une éclosion de notre moi se produit. L’expérience amoureuse est la plus parfaite illustration de la pensée exprimée par Hegel dans La Phénoménologie de l’esprit, selon laquelle l’être humain accède à la conscience de soi dans « le rapport des consciences ». Sous le regard aimant de l’autre, je déchiffre mon identité. (…)
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 14 – La vertu transformatrice de l’amour, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 105.
Le philosophe Michel Lacroix propose aussi l’amour fraternel : « L’amour que l’on porte à son prochain, l’amour fraternel, est de nature différente, mais il a lui aussi une puissance transformatrice ». À la suite de l’amour, vient le deuxième nutriment : « la confiance d’autrui ».
J’ai besoin d’un deuxième nutriment psychologique pour me réaliser : la confiance d’autrui. (…) Mais les plus savantes méthodes de gestion mentale, les plus sophistiquées des techniques d’autosuggestion sont impuissantes à maintenir durablement la confiance en soi. Celle-ci requiert autre chose. J’ai besoin d’un environnement humain favorable. Je ne peux avoir confiance en moi que si l’on me fait confiance. Je ne croirai en moi que si, en face de moi, se tient quelqu’un qui croit en moi. la vision positive que j’ai de moi n’est, en définitive, que l’ombre portée de la vision que les autres ont de moi.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 15 – La confiance d’autrui, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 107.
Ai-je commis au cours de mon adolescence un grave erreur en ne me souciant de savoir si j’étais aimé ou non par les autres étudiants de mon collège alors que j’investissais toutes mes énergies dans la réalisation de différents projet ?
Ce fut un choc d’apprendre que parmi ces étudiants non seulement certains ne m’aimaient pas mais aussi que l’un d’eux a souhaité ouvertement ma mort (plutôt que celle d’un ami étudiant) en ma présence.
J’étais occupé, très occupé, je n’avais pas le temps pour réfléchir à l’idée d’être aimé par mes pairs. Je conserve un mauvais souvenir de cette situation.
J’étais déjà un solitaire endurci, autonome, audacieux et débrouillard. Je refusais le travail en équipe. J’ai poursuivi la réalisation de mes nombreux projets scolaires tout en posant un premier pied dans le monde des médias de ma région.
Je dois aussi avouer que je ne réalisais pas mes projets dans le but d’être aimé mais plus simplement pour explorer mon potentiel. Ce fut une période grisante et passionnante.
J’étais, je l’ai appris plus tard, un fonceur pur (voir la grille des Styles interpersonnels de Larry Wilson ci-dessus). Le fonceur fonce et est orienté vers la Tâche plutôt que la Personne. J’avais une confiance aveugle en moi et je ressentais inconsciemment la confiance envers moi dans l’acceptation de mes projets par les autorités scolaires et les dirigeants des médias locaux. « Inconsciemment » parce que je me réjouissais avant tout de l’acceptation de mes projets que de la confiance que l’on me manifestait en acceptant mes projets. À cette époque, je pensais qu’il n’y avait qu’un seul style interpersonnel, celui du Fonceur. Tout changera au cours des années 1990 au début de la trentaine mais c’est une autre histoire.
Dans le chapitre suivant, e philosophe Michel Lacroix introduit le troisième nutriment nécessaire à la réalisation de soi : l’autorité.
Au cours des années 1960 et 1970, les psychologues et les philosophes qui s’intéressaient au développement personnel étaient très sensibles à cet argument en forme de syllogisme. Ils s’accordaient sur l’idée, hérité de la tradition anarchiste, selon laquelle, pour permette l’épanouissement des individus, il fallait détruire toutes les formes d’autorité, celle de l’État, de la justice, de l’armée, de la police, de la loi, de la famille, des professeurs, des règles morales, des interdits sexuels.
Caractéristique à cet égard était la pensée de Carl Rogers, l’un des pères fondateurs du « développement personnel ». Rogers plaçait au centre de sa doctrine une notion à laquelle son nom est resté, depuis lors, attaché : la « non-directivité ». Pour Rogers, la réalisation de soi requérait un climat totalement non directif. Développement personnel et non-directivité étaient indissociables. (…) Autrui m’aide à prendre conscience de moi-même, à me révéler à moi-même, à découvrir le potentiel que je possède. Mais il doit se garder de parasiter le processus de mon autoréalisation en déversant sur moi des conseils, des jugements, des critiques, des directives. Rogers exprimait cette exigence en disant qu’autrui doit avoir une attitude d’ «acceptation inconditionnelle » (encore une notion forgée par lui…).
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 16 – L’autorité qui entraîne, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, pp. 111-112.
En soi, cette non-directivité est elle-même une directive. Sans conseils, sans jugements, sans critiques, sans directives, on peut parler d’un chemin à parcourir à l’aveugle. » Or, conseils, jugements, critiques et directives sont souvent énoncé par amour d’autrui et non pas par un désir de restreindre la liberté de l’autre et encore moins par une expression d’autorité sur autrui. Est-ce que si autrui, avançant à l’aveugle, au abord d’une falaise où il peut tomber et se blesser sérieusement, je lui doit une « acceptation inconditionnelles » ? Dans l’Amour, il n’y a jamais d’acceptation inconditionnelle mais plutôt une acceptation éclairée.
Mais l’autorité ne se réduit pas au pouvoir d’interdire et de réprimer. Celui-ci n’est, en définitive, qu’un aspect mineur. Le détenteur de l’autorité n’est pas seulement quelqu’un qui interdit et qui réprime. Il est aussi, et surtout, quelqu’un qui « autorise ». L’erreur des années 1960 et 1970 a été de méconnaître cet aspect fondamental. À côté de l’autorité qui s’oppose, il y a l’autorité qui permet, qui encourage, qui pousse vers l’avant. La première exerce une fonction d’empêchement, la seconde une fonction d’entraînement. Le chef n’est pas celui qui dit : « ne fais pas », mais celui qui dit : « fais ». Un chef d’entreprise, un chef de service, un professeur, un leader politique n’ont pas pour rôle de déclarer : « Je vous interdis de », mais « Je vous incite à … ». Ils lancent des projets, ils accompagnent leur exécution. Il facilite l’action, la stimulent, la dynamisent.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 16 – L’autorité qui entraîne, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, pp. 113-114.
J’ai rencontré un grand nombre de personnes en autorité au cours de ma vie et très peu d’entre elles s’évertuèrent à m’interdire de faire ceci ou cela. La très grande majorité de ces personnes en autorité facilitèrent mon autoréalisation. Je me soumettais volontiers à leur autorité considérant la supériorité de leur expérience. Mon attitude laissait transparaître ma disposition à leurs conseils, leurs critiques et leurs jugements. Comme je le répétais sans cesse : « Si vous avez une meilleure idée que la mienne ne tardez pas à me la transmette car je n’ai pas de temps à perdre ».
Le quatrième nutriment psychologique de la réalisation de soi est exposé dans le titre du chapitre 17 : « La puissance des modèles ». Le philosophe Michel Lacroix écrit : « J’ai besoin d’exemple à imiter. Ma réalisation personnelle se nourrit d’exemplarité ».
Sur ce point, nous sommes amenés de nouveau à prendre le contre-pied de la conception de l’épanouissement qui prévalait dans les années 1960 et 1970. Les psychologue et les philosophes qui s’intéressaient alors au problème de l’épanouissement ne voulaient pas entendre parler de modèle. Le mot même les hérissait. Non contents d’évacuer l’autorité, ils évacuèrent donc aussi l’exemplarité. Au nom d’une conception radicale de l’autonomie, ils destituèrent les figures identificatoires. Pour se construire, affirmaient-ils, le sujet doit puiser au fond de lui-même, à la source d’une singularité absolue. Il doit s’inventer à partir d’une table rase. Dans cette conception de l’épanouissement, l’identité d’un individu devait être aussi dissemblable que possible de celle des autres, sous peine d’être « inauthentique ». Pour être soi-même, il ne fallait ressembler à personne. Le principe de la construction de soi était la différence et non similitude.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 17 – La puissance des modèles, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 117.
Au Québec (Canada), nous avons connu ce que nous appelons une « Révolution tranquille ».
La Révolution tranquille désigne une période de transformation et de modernisation du Québec dans les années 1960. Elle est caractérisée par l’action intensément réformiste et nationaliste du gouvernement du Québec de l’époque, initiée par l’équipe du tonnerre de Jean Lesage de 1960 à 1966 et continuée par l’équipe de Daniel Johnson de 1966 à 1968.
Cette période peut se définir par une série de réformes sociales, économiques et politiques à l’intérieur d’un cadre démocratique et d’une économie libérale, inspirées par des idées keynésiennes renforçant l’intervention de l’État dans la vie des citoyens. Elles ont mené à la réforme complète du système d’éducation, du système de santé, ainsi qu’à la création de plusieurs institutions et structures modernes. Portées par un sentiment national nouveau axé sur le progrès, ces mesures avaient pour but de donner un État national aux Québécois, à la mesure de leurs besoins et de leurs aspirations collectives.
La Révolution tranquille désigne également une période d’ouverture et d’effervescence sociale et culturelle. Elle a reflété le désir des Québécois de rompre avec un passé qualifié de « Grande Noirceur », de se redéfinir selon leurs intérêts nationaux propres, ainsi que leurs préoccupations face à l’émergence d’une certaine modernisation.
À cette époque, j’étudiais à l’école primaire (obligée à partir de six ans et d’une durée de six ans). En cinquième année primaire, au milieu des années 1960, j’ai été témoin d’un grand bouleversement avec, ce que le minsitère de l’éducation appelait, « l’école active », en complète rupture avec le passé historique de l’éducation au Québec.
Une rupture passionnelle car on jeta alors le bébé avec l’eau du bain, c’est-à-dire plus de 2,600 ans d’histoire et d’accumulation du Savoir par l’Homme. Dans la vingtaine, je découvrirai les derniers manuels scolaires des années 1950 rejetés par la Révolution tranquille et je me rendrai compte de cette coupure avec les Savoirs accumulés par l’Homme au fil des siècles passés. Ce fut « table rase ». Et un grand nombre des modèles façonnés par des siècles d’histoire de l’Homme disparurent de nos manuels scolaires ou furent réduits à de simples mentions.
Je donne en exemple le retrait du programme scolaire du cours Leçons de logique (Leçons de logique, ABBÉ ARTHUR ROBERT (1876-1939), Manuel scolaire, Première édition : 1914 – Québec, Réédition de la huitième édition parue en 1940, Collection du domaine public de la Fondation littéraire Fleur de Lys, Laval, Québec, Canada, 20 novembre 2009, 236 pages). Heureusement, je l’ai réédité et je l’offre gratuitement en format PDF.
La société québécoise se demandera dans les années 1980 où est passé la logique. Réponse facile : « Elle n’est plus enseignée depuis la Révolution tranquille ».
Relevons aussi le retrait du cours de Stylistique française des programmes scolaires. Aujourd’hui, la société québécoise se demande encore pourquoi la qualité du français baisse constamment et drastiquement d’une génération à l’autre, pourquoi que l’usage des verbes Être et Avoir prime sur tous les autres. « Voici l’un de ces vénérables manuels de stylistique propres à consoler l’écrivain novice que l’école a déçu » (22 novembre 2000) peut-on lire sur le site web québécois L’Agora, une agora, une encyclopédie.
Stylistique Française, E. Legrand, Éditions J. De Gigord, Éditeur, 1928, 327 pages, dimensions : 16 x 22 x 1,9 cm.
Les tables rases des modèles, dans l’éducation tout comme dans le développement personnel, expriment un profond manque de respect pour l’histoire de l’Homme et toutes les sciences.
(…) Toute dénivellation, toute suggestion d’une différence de valeurs entre les individus heurtait de plein fouet l’idéologie égalitariste qui régnait dans les années 1960 et 1970. Préconiser des modèles eût été reconnaître qu’il y a dans le monde humain une hiérarchie, que certains êtres s’élèvent au-dessus des autres. C’eût été approuver une imitation ascendante, orientée vers ces modèles.
Mais la thèse d’une « réalisation de soi sans modèles » ne résiste pas à un examen approfondi. Trois arguments majeurs peuvent lui être opposés. D’abord une argument pschanalitique. La psychanalyse a bien montré le rôle décisif que joue l’idéal du moi dans la formation de la personnalité. Or, l’idéal du moi est, en grande partie, le résultat d’une intériorisation de modèles familiaux et sociaux. Il est étayé sur les figures identificatoires que le sujet trouve dans son environnement — un parent, un ami, un professeur, un héros, une célébrité, un personnage public. La loi psychanalytique selon laquelle « on se construit grâce à l’idéal du moi » équivaut à dire : « on se construit grâce à des modèles ».
Le deuxième argument est d’ordre historique. À toutes les époques de l’histoire, ont observe que se sont constitués des types d’humains idéaux. Ces types d’humains idéaux incarnaient les valeurs les plus hautes auxquelles adhérait la société du moment. (…) Ces types d’humains idéaux jouaient un rôle essentiel dans la réalisation de soi. Chacun s’efforçait de les imiter. Ils prescrivaient les normes de la vie bonne, de la vie accomplie. Ils indiquaient comment on doit se comporter, quel style de vie on doit adopter pour devenir un être complet. En se conformant à ces types d’humains idéaux, les individus accédaient au niveau de ce qui était considéré comme l’excellence humaine.
(…)
Le troisième argument que l’on peut opposer à la thèse d’une autoréalisation sans modèles est tiré, banalement, de l’introspection. Il ne faut jamais s’interdire d’en appeler à l’introspection, c’est-à-dire à l’expérience subjective. Or, que nous apprend celle-ci ? Quand nous nous penchons sur notre vie intime, nous découvrons que nous avons, enfoui au plus profond de nous, une sorte de panthéon personnel, privée, singulier, peuplé de héros auxquels nous vouons de l’admiration. Chacun de nous a un jardin secret de figures idéales. (…)
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 17 – La puissance des modèles, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, pp. 118-120.
Personnellement, je me blinde à toute influence de modèle dès mon plus jeune âge parce que je me sais très influençable. Je tente alors à protéger l’originalité de ma créativité, mon authenticité. Si je veux voir ce dont je suis capable par moi-même, je dois me soustraire au pouvoir potentiel de modèles. Poète dès mon adolescence, je refuserai de lire les grands poètes. Aussi, j’admire plusieurs personnes mais je n’en fais pas pour autant des modèles. Et plus une personne a surmonté de difficultés pour réaliser son projet, plus elle m’apparaît admirable.
Venons-en au cinquième nutriment de la réalisation de soi. Quand nous réfléchissons aux personnes qui ont contribué à notre progrès personnel, nous nous apercevons qu’il y en a parmi elles qui, en toute rigueur, ne nous rien apporté. C’est nous, au contraire, qui leur avons apporté quelque chose. Nous leur avons apporté une aide. un soutien ; nous leur avons donné du temps ; nous les avons écoutées, nous leur avons témoigné de l’empathie et de la compréhension. Et, curieusement, cette aide nous été profitable.
Tel est le paradoxe de la bienveillance. Elle produit son effet aux deux bouts de la chaîne. Elle agit dans les deux sens. Elle bénéficie à celui qui en est le destinataire et à celui qui en est la source. Je m’épanouis quand les autres me veulent du bien, mais je m’épanouis tout autant quand je leur veux du bien. Autrui contribue à mon développement non seulement par ce qu’il m’apporte, mais par ce que je lui apporte. (…)
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 18 – La dialectique de la bienveillance, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 123.
Je suis bienveillant quand une personne ou une collectivité vit un problème dont je prend conscience et que j’entreprends de le résoudre, sans pour autant me déclarer. Je test alors ma capacité à identifier et à comprendre les problèmes et par la suite ma capacité à y apporter une solution. Dans le cas d’une collectivité, je n’en fais pas toute une histoire; je demeure anonyme autant que faire se peut. Dans le cas d’une personne, je suis prêt à mettre en jeu ma relation avec elle pour l’aider à résoudre son problème. Lorsque je constate qu’une personne ne parvient pas à dire « non », c’est à moi, à mon initiative, qu’elle apprendra à dire « non ».
La réalisation de soi requiert la médiation d’autrui. Le « Moi » ne peut se développer sans l’aide d’un « Tu ». Tel est le constat auquel nous sommes parvenus dans les chapitres précédents. La question qui se pose maintenant est de savoir si ce qui vaut pour le « Tu » vaut aussi pour le « Nous », c’est-à-dire le groupe. J’ai besoin de l’aide d’individus particuliers pour m’épanouir : mais ai-je besoin également d’une communauté, d’une société ? Pour me réaliser pleinement, faut-il faire partie d’un « Nous » ? Quel rapport y a-t-il entre la réalisation de soi et l’appartenance groupale ?
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 19 – Le « Je » et le « Nous », Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 127.
Solitaire, je demeure en marge du « Nous » tout en conservant ma bienveillance face à la collectivité dans laquelle j’évolue. Je ne m’accorde pas le temps utile pour rejoindre un groupe. Je suis trop occupé par mes études et mes projets. Il y aura bien quelques « Tu » dont je souhaite l’amitié et avec lesquels je serai effectivement ami… secrètement. Car plus tu bouges au sein d’une collectivité, plus tu t’exposes aux jugements impitoyables des uns et des autres. Être l’ami d’une personne solitaire et en marge de la collectivité implique d’être soi-même jugé.
(…) En ce point, la philosophie de la réalisation de soi est tentée d’aller plus loin. Elle est tenter de renverser l’équilibre entre le Je et le Nous en déclarant : s’il veut se réaliser, l’individu à l’obligation de s’intégrer à un groupe. Dans cette optique, l’appartenance au groupe ne constitue plus seulement une option facultative, une possibilité offerte, mais une nécessité, un contrainte. Hors du groupe, point de salut… Il ne s’agit pas seulement de se relier à un groupe par une adhésion consentie et révocable. La réalisation de soi exige maintenant la dissolution de soi, le reddition de son ego dans le communautaire, et c’est uniquement par cette reddition que l’on atteindra une plénitude de vie.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 20 – Réalisation de soi ou communautarisation de soi ?, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 133.
« Hors du groupe, point de salut… » ? Si je découvre et exploite mon potentiel, si je me réalise, avec un apport indéniable des autres, il ne faut pas minimiser l’importance de l’indépendance de soi. Il n’est pas question de répondre à l’exigence de « la dissolution de soi » et encore moins de « reddition de son ego dans le communautaire ». Et il n’est pas plus question de reconnaître que « cette reddition que l’on atteindra une plénitude de vie ». Bref, il n’est pas obligé de rejoindre un groupe pour assurer la réalisation de soi. Au sein d’un groupe la dépendance se développe au détriment de l’indépendance de l’individu. Cette indépendance est essentielle pour échapper à une réalisation de soi suivant un consensus de groupe. Il y a au sein d’un groupe beaucoup de temps perdu, notamment avec les membres qui se donnent raison à tout vent pour dominer le groupe. J’ai toujours privilégié une position d’observateur en marge du groupe, une position qui aide à prendre du recul non seulement face au groupe mais aussi et surtout face à soi-même.
Si je chérie mon indépendance, ma liberté, je ne cède pas pour autant à la tentation solipsiste ; je ne suis pas un esthète solitaire. Tous mes projets se sont toujours adressés au « Tu » et au « Nous », d’où le besoin de relations interpersonnelles intenses, bienveillantes.
Le philosophe Michel Lacroix introduit le chapitre 24, Le développement personnel victime de la contre-culture, en ces mots :
Thélème est une éclatante illustration du lien étroit qui unit la réalisation de soi et la culture littéraire et artistique. Mais ce lien est fragile. «il peut se rompre et c’est ce qui s’est produit, nous allons le voir dans ce chapitre, à partir des années 1960. Au tournant des années 1960, la réalisation de soi a pris en effet une nouvelle orientation, une orientation qui s’est traduite tout d’abord par l’adoption d’une nouvelle appellation. On s’est mis à parler de « développement personnel » et non plus comme autrefois de « réalisation de soi ». Ce ne fut pas là seulement un changement de vocabulaire. Ce fut un véritable changement d’état d’esprit. Un changement qui a entraîné la rupture des liens traditionnels avec la culture littéraire et artistique. Voyons cela d’un peu plus près.
Depuis sa naissance (qui se situe à la fin du XVIIIè siècle), l’idéal de réalisation de soi avait été porté par des philosophes, des écrivains, des poètes, des artistes. De Hegel à Nietzsche, de Chateaubriand à Barrès, de Marx à Gide, du socialiste Charles Fourier au philosophe Emmanuel Mounier, cet idéal n’avait pas cessé d’être discuté, travaillé, enrichi dans les milieux de la culture. Conçu par des gens de culture, il portait l’empreinte de la culture. Toute personne qui se posait le problème de la réalisation de soi, toute personne désireuse de s’épanouir, considérait qu’il fallait pour cela face une place dans sa vie aux instruments de culture, c’est-à-dire aux œuvres artistiques ou littéraires.
Cette situation s’est brusquement modifiée au cours des années 1960. L’idée de la réalisation de soi est entrée dans une nouvelle ère, une ère qui s’est annoncée par le changement sémantique que nous venons d’évoquer `on s’est mis à parler de « développement personnel ». Or, il ne faut jamais sous-estimer les mutations langagières. L’ère qui s’est ouverte dans les années 1960 s’est traduite également par l’entrée en scène d’une foule de psychologues, formateurs, coachs, thérapeutes, conseillers en ressources humaines. Ces acteurs nouveaux se sont présentés comme des spécialiste du développement personnel.. Sous leur influence, d’innombrable techniques ont vu le jour. Des stages, des séminaires, des consultations ont attiré un public de plus en plus large. Les manuels de développement personnel ont inondé les rayons des libraires. Un véritable marché de l’épanouissement s’est constitué. De son côté, le monde de l’entreprise a commencé à s’intéresser au développement personnel. Les directions des ressources humaines ont compris le parti qu’elles pouvaient en tirer pour « dynamiser » les salariés.
Quand on considère tous les changements intervenus depuis les années 1960, le sens de l’évolution ressort très nettement. La réalisation de soi s’est tout à la fois psychologisée, technicisée et professionnalisée. Elle s’est appauvrie culturellement. Son lien avec la culture s’est distendu. (…)
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 24 – Le développement personnel victime de la contre-culture, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, pp. 157-158.
(…) Alors que, au XIXè et dans la première moitié du XXè siècle, la réalisation de soi avait été conçue par des gens de culture, c’est-à-dire des écrivains, des philosophes, des poètes, des artistes, le développement personnel, lui, a été conçu par les partisan de la contre-culture. (…)
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 24 – Le développement personnel victime de la contre-culture, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, pp. 161-162.
Première conséquence : le développement personnel s’est détourné des écrivains, philosophes, artistes qui, depuis deux siècles, avaient mené la réflexion sur la réalisation de soi. (…) Deux siècles de questionnement sur la réalisation de soi, d’interrogation sur le sens de l’existence, de méditation sur la condition humaine, on été balayés au nom de l’impératif contre-culturel. D’où l’impression de pauvreté que l’on ressent quand on feuillette un manuel de développement personnel ou que l’on participe à un stage. Cette pauvreté était programmée dès l’instant où le développement personnel se rangeait sous la bannière de la contre-culture.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 24 – Le développement personnel victime de la contre-culture, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 162.
La naissance du développement personnel en milieu contre-culturel a eu une deuxième conséquence paradoxale qui continue de se faire sentir de nos jours. Le rejet de la culture créa un appel d’air qui, finalement, profita à… la technique. En évacuant la culture des démarches de développement personnel, les pères fondateurs ouvrirent un boulevard aux spécialistes de psychologie appliquée. Ceux-ci s’empressèrent d’inonder le marché d’outils, d’instruments de toutes sortes. (…)
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 24 – Le développement personnel victime de la contre-culture, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 163.
Ainsi, faute de s’appuyer sur des gens de culture, le développement personnel moderne a été pris en main par des techniciens. Le technicisme s’est emparé de la réalisation de soi. Il lui a insufflé son esprit. Si bien que, depuis cinq décennies, le public a pris l’habitude d’associer « développement personnel » et « techniques. On l’a persuadé qu’il ne pouvait y avoir de développement personnel sans recours à des techniques.
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 24 – Le développement personnel victime de la contre-culture, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 164.
Le développement personnel est l’un des sujets les plus abordée dans cette Observatoire de la philothérapie car il détourne les individus de plus de 2,600 ans de la philosophie comme mode de vie. Avec la prise de contrôle de réalisation de soi par le développement personnel, c’est chacun pour soi.
La contre-culture des années 1960 n’a pas seulement éloigné le développement personnel de la culture classique en l’engageant dans la voie du technicisme psychologique. Elle l’a influencé aussi d’une autre manière. La cible que visaient les partisans de la contre-culture n’était pas tant, en effet, la culture générale que la culture occidentale. En revanche, on considérant avec sympathie les culture extra-occidentales, celles des sociétés amérindiennes, africaines, océanienne, et surtout de l’orient. L’orientalisme jouissait d’une grande faveur à Esalen. On s’y référait volontiers au bouddhisme, à l’hindouisme, au taoïsme, au confucianisme.
Du coup, le pères fondateurs du développement personnel introduisirent la référence à l’Orient dans leur conception de la réalisation de soi. Ils lui donnèrent un « biais oriental » qui est resté, depuis lors,l’un de ses traits caractéristiques. Nombreux son aujourd’hui les « adeptes », les clients du développement personnel qui pratique le yoga ou zazen. Certains d’entre eux ont séjourné dans un ashram, ou suivi l’enseignement d’un maître spirituel. Le Bhagavad-gita, le livre du Tao, les grands livres du bouddhisme sont sur leur table de chevet.
Nul ne conteste la richesse de la sagesse orientale. Celle-ci a élaboré un remarquable art de vivre. Elle a mis au point des pratiques de méditation, de respiration, de concentration, de relaxation, de découverte du corps. Elle propose une éthique de la compassion qui répond aux aspirations de l’individu contemporain. Elle indique la voie d’une spiritualité épanouissante, ouverte sur le cosmos. Mais les trésors de l’orient ne nous font-ils pas parfois oublier… ceux de l’Occident ? À force de regarder du côté de l’Orient et de lui demander le secret de la réalisation de soi, n’avons-nous pas oublié que notre culture était capable, elle aussi, d’enrichir l’âme ? Ne négligeons-nous pas notre patrimoine ?
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 25 – L’Occident et l’Orient, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, pp. 167-169.
P.S. : Les liens dans la citation sont de nous.
Quoiqu’il en soit la contre-culture a terminé sa course dans le système qu’elle critiquait, à l’instar de tous nos collègues de classe révolutionnaires aujourd’hui bien rangés. Le capitalisme a gagné une fois de plus son pari en récupérant la contre-culture pour en faire une industrie soumise aux impératifs économiques du système où chaque individu est un client potentiel. Aujourd’hui, il faut donc parler d’une véritable « industrie du développement personnel », une industrie de techniques psychologiques. Or, la réalisation de soi fait appel à la culture classique occidentale de la philosophie comme mode de vie.
“Nous proclamons donc au terme de cet ouvrage, en une sorte d’ultime profession de foi qui parachève notre philosophie de la réalisation de personnelle : « La Cité existe pour permettre à tous les individus, sans exception, de se réaliser . »”
LACROIX, Michel, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Chapitre 26 – La réalisation de soi, moteur de changement social, Éditions Robert Laffont, Paris, 2009, p. 177.
Un mot manque à cette déclaration du philosophe Michel Lacroix : « (…), de se réaliser ENSEMBLE. Même si je demeure un solitaire, peu enclin au travail d’équipe, ma réalisation de soi fut et demeure une épopée de relations interpersonnelles. Je ne peux pas soutenir la réalisation de soi pour soi comme une finalité philosophiquement et culturellement acceptable. Nous sommes tous nés dans la Cité. Elle est en nous et nous en elle.
J’accorde 4½ étoiles sur 5 au livre Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel paru en 2009 sous la plume du philosophe Michel Lacroix.
Témoignage de ma recherche personnelle au sujet de la philothérapie (philosophie + thérapie) ou, si vous préférez, de la pratique de la philosophie en clinique. Il s’agit de consultation individuel ou de groupe offert par un philosophe praticien pour nous venir en aide. Elle se distingue de la « psychothérapie » (psychologie + thérapie) en ce qu’elle utilise des ressources et des procédés et poursuit de objectifs propres à la philosophie. On peut aussi parler de « philosophie appliquée ».
La philothérapie gagne lentement mais sûrement en popularité grâce à des publications de plus en plus accessibles au grand public (voir l’Introduction de ce dossier).
L’un des titres tout en haut de la liste s’intitule « Platon, pas Prozac! » signé par Lou Marinoff paru en français en l’an 2000 aux Éditions Logiques. Ce livre m’a ouvert à la philothérapie.
L’auteur est professeur de philosophie au City College de New York, fondateur de l’Association américaine des praticiens de la philosophie (American Philosophical Practitioners Association) et auteurs de plusieurs livres.
Présentation du livre Sur le divan d’un philosophe – La consultation philosophie : une nouvelle démarche pour se connaître, changer de perspective, repenser sa vie suivie de mes commentaires de lecture.
Cet article présente et relate ma lecture du livre « Philosopher pour se retrouver – La pratique de la philo pour devenir libre et oser être vrai », de Laurence Bouchet aux Éditions Marabout. Malheureusement ce livre n’est plus disponible à la vente tel que mentionné sur le site web de l’éditeur. Heureusement on peut encore le trouver et l’acheter dans différentes librairies en ligne.
Le livre « La consultation philosophique – L’art d’éclairer l’existence » de Madame Eugénie Vegleris aux Éditions Eyrolles se classe en tête de ma liste des meilleurs essais que j’ai lu à ce jour au sujet de la « philothérapie ».
À ce jour, tous les livres dont j’ai fait rapport de ma lecture dans ce dossier sont l’œuvre de philosophes consultants témoignant de leurs pratiques fondées sur le dialogue. Le livre « Guérir la vie par la philosophie » de Laurence Devillairs aux Presses universitaires de France (PUF) diffère des précédents parce que l’auteure offre à ses lecteurs une aide direct à la réflexion sur différents thèmes.
J’ai lu ce livre à reculons. J’ai appliqué les feins dès les premières pages. L’objectivité sociologique de l’auteur m’a déplu. Ce livre présente aux lecteurs des observations, que des observations. L’auteur n’en tire aucune conclusion.
J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq parce qu’il m’a révélé les coulisses de la quête du bonheur au cœur de notre société néo-libérale. Je savais que cette obsession du bonheur circulait au sein de la population, notamment par le biais des coach de vie et des agents de développement personnel, mais je n’aurais jamais imaginé qu’elle cachait une véritable industrie soutenue par une idéologie psychologisante. Jusque-là, je ne connaissais de cette industrie que le commerce des livres et la montée en puissance des coachs de vie dédiés à la recherche du bonheur.
J’ai adoré ce livre. Il est dense, très dense. On ne peut pas le lire comme un roman. Me voici enfin devant un auteur qui dit tout, où, quand, comment il observe, comment il pense, comment il chemine, comment il voit, comment il entend, comment il anticipe, comment il tire ses conclusions… Bref, un auteur qui expose son propre système de pensée dans un essai plus que formateur pour le nôtre.
La lecture du livre «La consultation philosophique» signé par le philosophe praticien Oscar Brenifier (voir article #11 de notre dossier «Consulter un philosophe – Quand la philosophie nous aide») nous apprend qu’il adresse un document à ses clients potentiels. J’ai écrit à monsieur Brenifier pour lui demander s’il pouvait me faire parvenir ce document.
Cet article présente et relate ma lecture du livre du «La philo-thérapie» de Éric Suárez, Docteur en philosophie de l’Université Laval (Québec), philosophe praticien (Lausanne), publié en 2007 aux Éditions Eyrolles. Ce livre traite de la consultation philosophique ou, si vous préférez, de la philo-thérapie, d’un point de vue pratique. En fait, il s’agit d’un guide pour le lecteur intéressé à acquérir sa propre approche du philosopher pour son bénéfice personnel. Éric Suárez rassemble dans son ouvrage vingt exemples de consultation philosophiques regroupés sous cinq grands thèmes : L’amour, L’image de soi, La famille, Le travail et le Deuil.
Ce livre se caractérise par l’humour de son auteur et se révèle ainsi très aisé à lire. D’ailleurs l’éditeur nous prédispose au caractère divertissant de ce livre en quatrième de couverture : «Étudier in extenso la pensée des grands théoriciens et en extraire un mode de réflexion agissant est une mission impossible pour l’honnête homme/femme. C’est pourquoi l’auteur de cet ouvrage aussi divertissant que sérieux propose des voies surprenantes au premier abord, mais qui se révèlent fort praticables à l’usage. L’une passe par la rencontre avec la vie et la personnalité du philosophe : la voie des affinités électives».
Référencé par un auteur à mon programme de lecture, le livre «La philosophie comme manière de vivre» m’a paru important à lire. Avec un titre aussi accrocheur, je me devais de pousser plus loin ma curiosité. Je ne connaissais pas l’auteur Pierre Hadot : «Pierre Hadot (né à Paris, le 21 février 1922, et mort à Orsay, le 24 avril 20101) est un philosophe, historien et philologue français, spécialiste de l’Antiquité, profond connaisseur de la période hellénistique et en particulier du néoplatonisme et de Plotin. Pierre Hadot est l’auteur d’une œuvre développée notamment autour de la notion d’exercice spirituel et de la philosophie comme manière de vivre.» (Source : Wikipédia)
Jeanne Hersch, éminente philosophe genevoise, constate une autre rupture encore, celle entre le langage et la réalité : « Par-delà l’expression verbale, il n’y a pas de réalité et, par conséquent, les problèmes ont cessé de se poser (…). Dans notre société occidentale, l’homme cultivé vit la plus grande partie de sa vie dans le langage. Le résultat est qu’il prend l’expression par le langage pour la vie même. » (L’étonnement philosophique, Jeanne Hersch, Éd. Gallimard.) / On comprend par là qu’aujourd’hui l’exercice du langage se suffit à lui-même et que, par conséquent, la philosophie se soit déconnectée des problèmes de la vie quotidienne.» Source : La philosophie, un art de vivre, Collectif sous la direction de Jean-François Buisson, Les Éditions Cabédita, 2021, Préface, p. 9.
J’ai trouvé mon bonheur dès l’Avant-propos de ce livre : «Laura Candiotto, en insistant sur le rôle joué par les émotions dans le dialogue socratique ancien et sur l’horizon éthique de celui-ci, vise à justifier théoriquement un «dialogue socratique intégral», c’est-à-dire une pratique du dialogue socratique qui prend en compte des émotions pour la connaissance.» Enfin, ai-je pensé, il ne s’agit plus de réprimer les émotions au profit de la raison mais de les respecter dans la pratique du dialogue socratique. Wow ! Je suis réconforté à la suite de ma lecture et de mon expérience avec Oscar Brenifier dont j’ai témoigné dans les articles 11 et 12 de ce dossier.
Lou Marinoff occupe le devant de la scène mondiale de la consultation philosophique depuis la parution de son livre PLATON, PAS PROJAC! en 1999 et devenu presque’intantément un succès de vente. Je l’ai lu dès sa publication avec beaucoup d’intérêt. Ce livre a marqué un tournant dans mon rapport à la philosophie. Aujourd’hui traduit en 27 langues, ce livre est devenu la bible du conseil philosophique partout sur la planète. Le livre dont nous parlons dans cet article, « La philosophie, c’est la vie – Réponses aux grandes et aux petites questions de l’existence », est l’une des 13 traductions du titre original « The Big Questions – How Philosophy Can Change Your Life » paru en 2003.
J’ai acheté et lu « S’aider soi-même » de Lucien Auger parce qu’il fait appel à la raison : « Une psychothérapie par la raison ». Les lecteurs des articles de ce dossier savent que je priorise d’abord et avant tout la philothérapie en place et lieu de la psychothérapie. Mais cette affiliation à la raison dans un livre de psychothérapie m’a intrigué. D’emblée, je me suis dit que la psychologie tentait ici une récupération d’un sujet normalement associé à la philosophie. J’ai accepté le compromis sur la base du statut de l’auteur : « Philosophe, psychologue et professeur ». « Il est également titulaire de deux doctorats, l’un en philosophie et l’autre en psychologie » précise Wikipédia. Lucien Auger était un adepte de la psychothérapie émotivo-rationnelle créée par le Dr Albert Ellis, psychologue américain. Cette méthode trouve son origine chez les stoïciens dans l’antiquité.
J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq et je peux même en rajouter une de plus, une sixième, pour souligner son importance et sa pertinence. Il faut le lire absolument ! Je le recommande à tous car il nous faut tous sortir de ce monde où l’opinion règne en roi et maître sur nos pensées.
Dans la première partie de ce rapport de lecture du livre « Penser par soi-même – Initiation à la philosophie » de Michel Tozzi, je vous recommandais fortement la lecture de ce livre : « J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq et je peux même en rajouter une de plus, une sixième, pour souligner son importance et sa pertinence. Il faut le lire absolument ! Je le recommande à tous car il nous faut tous sortir de ce monde où l’opinion règne en roi et maître sur nos pensées.» Je suis dans l’obligation d’ajouter cette deuxième partie à mon rapport de lecture de ce livre en raison de ma relecture des chapitres 6 et suivants en raison de quelques affirmations de l’auteur en contradiction avec ma conception de la philosophie.
J’accorde au livre Agir et penser comme Nietzsche de Nathanaël Masselot cinq étoiles sur cinq. Aussi facile à lire qu’à comprendre, ce livre offre aux lecteurs une excellente vulgarisation de la philosophie de Friedricha Wilhelm Nietzsche. On ne peut pas passer sous silence l’originalité et la créativité de l’auteur dans son invitation à parcourir son œuvre en traçant notre propre chemin suivant les thèmes qui nous interpellent.
Tout commence avec une entrevue de Myriam Revault d’Allonnes au sujet de son livre LA FAIBLESSE DU VRAI à l’antenne de la radio et Radio-Canada dans le cadre de l’émission Plus on de fous, plus on lit. Frappé par le titre du livre, j’oublierai le propos de l’auteur pour en faire la commande à mon libraire.
Le développement personnel fourmille de personnes de tout acabit qui se sont improvisées conseillers, coachs, thérapeutes, conférenciers, essayistes, formateurs… et auxquelles s’ajoutent des praticiens issus des fausses sciences, notamment, divinatoires et occultes, des médecines et des thérapies alternatives. Bref, le développement personnel attire toute sorte de monde tirant dans toutes les directions.
Je n’aime pas cette traduction française du livre How we think de John Dewey. « Traduit de l’anglais (États-Unis) par Ovide Decroly », Comment nous pensons parait aux Éditions Les empêcheurs de penser en rond / Seuil en 2004. – Le principal point d’appui de mon aversion pour traduction française repose sur le fait que le mot anglais « belief » est traduit par « opinion », une faute majeure impardonnable dans un livre de philosophie, et ce, dès les premiers paragraphes du premier chapitre « Qu’entend-on par penser ? »
Hier j’ai assisté la conférence Devenir philothérapeute : une conférence de Patrick Sorrel. J’ai beaucoup aimé le conférencier et ses propos. J’ai déjà critiqué l’offre de ce philothérapeute. À la suite de conférence d’hier, j’ai changé d’idée puisque je comprends la référence de Patrick Sorrel au «système de croyance». Il affirme que le «système de croyance» est une autre expression pour le «système de penser». Ce faisant, toute pensée est aussi une croyance.
J’éprouve un malaise face à la pratique philosophique ayant pour objectif de faire prendre conscience aux gens de leur ignorance, soit le but poursuivi par Socrate. Conduire un dialogue avec une personne avec l’intention inavouée de lui faire prendre conscience qu’elle est ignorante des choses de la vie et de sa vie repose sur un présupposé (Ce qui est supposé et non exposé dans un énoncé, Le Robert), celui à l’effet que la personne ne sait rien sur le sens des choses avant même de dialoguer avec elle. On peut aussi parler d’un préjugé philosophique.
Si votre opinion est faite et que vous n’êtes pas capable d’en déroger, vous êtes prisonnier de votre opinion. Si votre opinion est faite et que vous êtes ouvert à son évolution ou prêt à l’abandonner pour une autre, vous êtes prisonnier de l’opinion. Si votre opinion compte davantage en valeur et en vérité que les faits, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si votre opinion est la seule manière d’exprimer vos connaissances, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si vous pensez que l’opinion est le seul résultat de votre faculté de penser, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si vous prenez vos opinion pour vraies, vous êtes prisonnier de vos opinions.
J’ai mis beaucoup de temps à me décider à lire « La pratique philosophique » de Jérôme Lecoq. L’auteur est un émule d’Oscar Brenifier, un autre praticien philosophe. J’ai vécu l’enfer lors de mes consultations philosophiques avec Oscar Brenifier. Ainsi toute association de près ou de loin avec Oscar Brenifier m’incite à la plus grande des prudences. Jérôme Lecoq souligne l’apport d’Oscar Brenifier dans les Remerciements en première page de son livre « La pratique philosophique ».
Quelle est la différence entre « savoir » et « connaissance » ? J’exprime cette différence dans l’expression « Je sais parce que je connais ». Ainsi, le savoir est fruit de la connaissance. Voici quatre explications en réponse à la question « Quelle est la différence entre savoir et connaissance ? ».
J’ai décidé de publier les informations au sujet des styles interpersonnels selon Larry Wilson parce que je me soucie beaucoup de l’approche de la personne en consultation philosophique. Il m’apparaît important de déterminer, dès le début de la séance de philothérapie, le style interpersonnel de la personne. Il s’agit de respecter la personnalité de la personne plutôt que de la réprimer comme le font les praticiens socratiques dogmatiques. J’ai expérimenté la mise en œuvre de ces styles inter-personnels avec succès.
Le livre « La confiance en soi – Une philosophie » de Charles Pépin se lit avec une grande aisance. Le sujet, habituellement dévolue à la psychologie, nous propose une philosophie de la confiance. Sous entendu, la philosophie peut s’appliquer à tous les sujets concernant notre bien-être avec sa propre perspective.
J’ai vécu une sévère répression de mes émotions lors deux consultations philosophiques personnelles animées par un philosophe praticien dogmatique de la méthode inventée par Socrate. J’ai témoigné de cette expérience dans deux de mes articles précédents dans ce dossier.
Vouloir savoir être au pouvoir de soi est l’ultime avoir / Le voyage / Il n’y a de repos que pour celui qui cherche / Il n’y a de repos que pour celui qui trouve / Tout est toujours à recommencer
Que se passe-t-il dans notre système de pensée lorsque nous nous exclamons « Ah ! Là je comprends » ? Soit nous avons eu une pensée qui vient finalement nous permettre de comprendre quelque chose. Soit une personne vient de nous expliquer quelque chose d’une façon telle que nous la comprenons enfin. Dans le deux cas, il s’agit d’une révélation à la suite d’une explication.
Âgé de 15 ans, je réservais mes dimanches soirs à mes devoirs scolaires. Puis j’écoutais l’émission Par quatre chemins animée par Jacques Languirand diffusée à l’antenne de la radio de Radio-Canada de 20h00 à 22h00. L’un de ces dimanches, j’ai entendu monsieur Languirand dire à son micro : « La lumière entre par les failles».
Le succès d’une consultation philosophique (philothérapie) repose en partie sur la prise en compte des biais cognitifs, même si ces derniers relèvent avant tout de la psychologie (thérapie cognitive). Une application dogmatique du dialogue socratique passe outre les biais cognitifs, ce qui augmente les risques d’échec.
Depuis mon adolescence, il y a plus de 50 ans, je pense qu’il est impossible à l’Homme d’avoir une conscience pleine et entière de soi et du monde parce qu’il ne la supporterait pas et mourrait sur le champ. Avoir une pleine conscience de tout ce qui se passe sur Terre et dans tout l’Univers conduirait à une surchauffe mortelle de notre corps. Il en va de même avec une pleine conscience de soi et de son corps.
Le Dr Jean-Christophe Seznec, psychiatre français, a été interrogé par la journaliste Pascale Senk du quotidien Le Figaro au sujet de son livre Savoir se taire, savoir parler, coécrit avec Laurent Carouana et paru en 2017. Le titre de l’article a retenu mon attention : Psychologie: «il faut sortir de l’hystérie de la parole».
Reproduction de l’article « Comment dialoguer de manière constructive ? », un texte de Julien Lecomte publié sur son site web PHILOSOPHIE, MÉDIAS ET SOCIÉTÉ. https://www.philomedia.be/. Echanger sur des sujets de fond est une de mes passions. Cela fait plusieurs années que je m’interroge sur les moyens de faire progresser la connaissance, d’apprendre de nouvelles choses. Dans cet article, je reviens sur le cheminement qui m’anime depuis tout ce temps, pour ensuite donner des pistes sur les manières de le mettre en pratique concrètement.
Dans le récit initiatique, il s’agit de partir du point A pour aller au point B afin que le lecteur ou l’auditeur chemine dans sa pensée vers une révélation permettant une meilleure compréhension de lui-même et/ou du monde. La référence à la spirale indique une progression dans le récit où l’on revient sur le même sujet en l’élargissant de plus en plus de façon à guider la pensée vers une nouvelle prise de conscience. Souvent, l’auteur commence son récit en abordant un sujet d’intérêt personnel (point A) pour évoluer vers son vis-à-vis universel (point B). L’auteur peut aussi se référer à un personnage dont il fait évoluer la pensée.
Cet article présente un état des lieux de la philothérapie (consultation philosophique) en Europe et en Amérique du Nord. Après un bref historique, l’auteur se penche sur les pratiques et les débats en cours. Il analyse les différentes publications, conférences et offres de services des philosophes consultants.
J’ai découvert le livre « L’erreur de Descartes » du neuropsychologue Antonio R. Damasio à la lecture d’un autre livre : L’intelligence émotionnelle de Daniel Goleman. L’édition originale de ce livre est parue en 1995 en anglais et j’ai lu la traduction française à l’été 1998 parue un an auparavant chez Robert Laffont. Diplômé de l’université Harvard et docteur en psychologie clinique et développement personnel, puis journaliste au New York Times, où il suit particulièrement les sciences du comportement, Daniel Goleman nous informe dans son livre « L’intelligence émotionnel » au sujet de la découverte spectaculaire pour ne pas dire révolutionnaire de Antonio R. Damasio à l’effet que la raison a toujours besoin d’un coup des émotions pour prendre des décisions. Jusque-là, il était coutume de soutenir que les émotions perturbaient la raison, d’où l’idée de les contrôler.
Ma lecture du livre ÉLOGE DE LA PRATIQUE PHILOSOPHIQUE de la philosophe praticienne SOPHIE GEOFFRION fut agréable et fort utile. Enfin, un ouvrage court ou concis (le texte occupe 65 des 96 pages du livre), très bien écrit, qui va droit au but. La clarté des explications nous implique dans la compréhension de la pratique philosophique. Bref, voilà un éloge bien réussi. Merci madame Geoffrion de me l’avoir fait parvenir.
Dans cet article, je m’interroge à savoir la consultation philosophique doit s’attarder à l’opinion ou au système pensée du client. OPINION – Le philosophe praticien cible l’opinion de son client en vue de démontrer l’ignorance sur laquelle elle repose et, par conséquent, l’absence de valeur de vérité qu’elle recèle. Cette pratique repose sur le « questionnement philosophique ».
Dans son livre « Sentir et savoir », Antonio Damasio propose « Une nouvelle théorie de la conscience ». Il démontre que la conscience ne peut pas exister sans le corps. Il identifie dans le corps la capacité de sentir comme préalable à la conscience.
Un si petit livre, seulement 46 pages et en format réduit, mais tellement informatif. Une preuve de plus qu’il ne faut se fier aux apparences. Un livre signé ROBERT REDEKER, agrégé de philosophie originaire de la France, connaît fort bien le sujet en titre de son œuvre : DÉPRESSION ET PHILOSOPHIE.
La plupart des intervenants en psychologie affirment des choses. Ils soutiennent «C’est comme ceci» ou «Vous êtes comme cela». Le lecteur a le choix de croire ou de ne pas croire ce que disent et écrivent les psychologues et psychiatres. Nous ne sommes pas invités à réfléchir, à remettre en cause les propos des professionnels de la psychologie, pour bâtir notre propre psychologie. Le lecteur peut se reconnaître ou pas dans ces affirmations, souvent catégoriques. Enfin, ces affirmations s’apparentent à des jugements. Le livre Savoir se taire, savoir dire de Jean-Christophe Seznec et Laurent Carouana ne fait pas exception.
Chapitre 1 – La mort pour commencer – Contrairement au philosophe Fernando Savater dans PENSER SA VIE – UNE INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE, je ne définie pas la vie en relation avec la mort, avec son contraire. Je réfléchie et je parle souvent de la mort car il s’agit de l’un de mes sujets préféré depuis mon adolescence. Certaines personnes de mon entourage pensent et affirment que si je parle aussi souvent de la mort, c’est parce que j’ai peur de mourir. Or, je n’ai aucune peur de la mort, de ma mort, de celles de mes proches. Je m’inquiète plutôt des conséquences de la mort sur ceux et celles qui restent, y compris sur moi-même.
À la lumière du documentaire LE SOLEIL ET DES HOMMES, notamment l’extrait vidéo ci-dessus, je ne crois plus au concept de race. Les différences physiques entre les hommes découlent de l’évolution naturelle et conséquente de nos lointains ancêtres sous l’influence du soleil et de la nature terrestre, et non pas du désir du soleil et de la nature de créer des races. On sait déjà que les races et le concept même de race furent inventés par l’homme en se basant sur nos différences physiques. J’abandonne donc la définition de « race » selon des critères morphologiques…
Dans le cadre de notre dossier « Consulter un philosophe », la publication d’un extrait du mémoire de maîtrise « Formation de l’esprit critique et société de consommation » de Stéphanie Déziel s’impose en raison de sa pertinence. Ce mémoire nous aide à comprendre l’importance de l’esprit critique appliqué à la société de consommation dans laquelle évoluent, non seule les jeunes, mais l’ensemble de la population.
Je reproduis ci-dessous une citation bien connue sur le web au sujet de « la valeur de la philosophie » tirée du livre « Problèmes de philosophie » signé par Bertrand Russell en 1912. Mathématicien, logicien, philosophe, épistémologue, homme politique et moraliste britannique, Bertrand Russell soutient que la valeur de la philosophie réside dans son incertitude. À la suite de cette citation, vous trouverez le texte de Caroline Vincent, professeur de philosophie et auteure du site web « Apprendre la philosophie » et celui de Gabriel Gay-Para tiré se son site web ggpphilo. Des informations tirées de l’Encyclopédie Wikipédia au sujet de Bertrand Russell et du livre « Problèmes de philosophie » et mon commentaire complètent cet article.
Passez donc sans vous arrêter, amis, au milieu des Marchands de Sommeil; et, s’ils vous arrêtent, répondez-leur que vous ne cherchez ni un système ni un lit. Ne vous lassez pas d’examiner et de comprendre. (…) Lisez, écoutez, discutez, jugez; ne craignez pas d’ébranler des systèmes; marchez sur des ruines, restez enfants. (…) Socrate vous a paru un mauvais maître. Mais vous êtes revenus à lui; vous avez compris, en l’écoutant, que la pensée ne se mesure pas à l’aune, et que les conclusions ne sont pas l’important; restez éveillés, tel est le but. Les Marchands de Sommeil de ce temps-là tuèrent Socrate, mais Socrate n’est point mort; partout où des hommes libres discutent, Socrate vient s’asseoir, en souriant, le doigt sur la bouche. Socrate n’est point mort; Socrate n’est point vieux. (…) – Alain, (Emile Charrier), Vigiles de l’esprit.
Tout au long de ma vie, j’ai vu la vérité malmenée, tassée d’un bord puis de l’autre, devenir une propriété personnelle (ma vérité — ta vérité — à chacun sa vérité), tantôt objet de monopôle, tantôt reconnue, tantôt niée et reniée… Ah ! La vérité. Quel chaos ! Je me demande depuis longtemps pourquoi la vérité, si elle existe, ne triomphe pas à tout coup, pourquoi elle ne s’impose à tous d’elle-même. Contestée de toutes parts, la vérité, si elle existe, n’a d’intérêt que pour l’opinion qu’on en a et les débats qui s’ensuivent. On va jusqu’à donner à la vérité une mauvaise réputation eu égard à son influence néfaste sur la société et les civilisations. Et que dire de toutes ces croyances qui se prennent pour la vérité ? Et c’est sans compter l’observation récente à l’effet que nous venons d’entrer dans une « ère de post-vérité ».
J’accorde à ce livre trois étoiles sur cinq. Le titre « Petit manuel philosophique à l’intention des grands émotifs » a attiré mon attention. Et ce passage du texte en quatrième de couverture m’a séduit : «En proposant une voyage philosophique à travers l’histoire des émotions, Iaria Gaspari bouscule les préjugés sur notre vie émotionnelle et nous invite à ne plus percevoir nos d’états d’âme comme des contrainte ». J’ai décidé de commander et de lire ce livre. Les premières pages m’ont déçu. Et les suivantes aussi. Rendu à la moitié du livre, je me suis rendu à l’évidence qu’il s’agissait d’un témoignage de l’auteure, un témoignage très personnelle de ses propres difficultés avec ses émotions. Je ne m’y attendais pas, d’où ma déception. Je rien contre de tels témoignages personnels qu’ils mettent en cause la philosophie, la psychologie, la religion ou d’autres disciplines. Cependant, je préfère et de loin lorsque l’auteur demeure dans une position d’observateur alors que son analyse se veut la plus objective possible.
Tout repose sur le Savoir. L’expérience personnelle et/ou professionnelle qu’on fait du Savoir, après en avoir pris conscience, se retrouve à la base des Connaissances que nous possédons. Les Opinions expriment des Jugements des connaissances et inspirent souvent les Croyances.
La philosophie, mère de toutes les sciences, recherche la sagesse et se définie comme l’Amour de la Sagesse. La sagesse peut être atteinte par la pensée critique et s’adopte comme Mode de vie. • La philosophie soutient la Science et contribue à la naissance et au développement de la méthode scientifique, notamment avec l’épistémologie.
La philothérapie, principale pratique de la philosophie de nos jours, met sans cesse de l’avant les philosophes de l’Antiquité et de l’époque Moderne. S’il faut reconnaître l’apport exceptionnel de ces philosophes, j’ai parfois l’impression que la philothérapie est prisonnière du passé de la philosophie, à l’instar de la philosophie elle-même.
Au Québec, la seule province canadienne à majorité francophone, il n’y a pas de tradition philosophique populaire. La philosophie demeure dans sa tour universitaire. Très rares sont les interventions des philosophes québécois dans l’espace public, y compris dans les médias, contrairement, par exemple, à la France. Et plus rares encore sont les bouquins québécois de philosophie en tête des ventes chez nos libraires. Seuls des livres de philosophes étrangers connaissent un certain succès. Bref, l’espace public québécois n’offre pas une terre fertile à la Philosophie.
J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq parce qu’il me permet d’en apprendre beaucoup plus sur la pensée scientifique telle que pratiquée par de grands scientifiques. L’auteur, Nicolas Martin, propose une œuvre originale en adressant les mêmes questions, à quelques variantes près, à 17 grands scientifiques.
Cet article répond à ce commentaire lu sur LinkedIn : « L’équilibre entre développement personnel et développement spirituel ou philosophique est indispensable. » Il m’apparaît impossible de viser « L’équilibre entre développement personnel et développement spirituel ou philosophique » et de prétendre que cet équilibre entre les trois disciplines soit « indispensable ». D’une part, le développement personnel est devenu un véritable fourre-tout où l’ivraie et le bon grain se mélangent sans distinction, chacun avançant sa recette à l’aveugle.
En ne s’unissant pas au sein d’une association nationale professionnelle fixant des normes et des standards à l’instar des philosophes consultants ou praticiens en d’autres pays, ceux de la France nous laissent croire qu’ils n’accordent pas à leur disciple tout l’intérêt supérieur qu’elle mérite. Si chacun des philosophes consultants ou praticiens français continuent de s’affairer chacun dans son coin, ils verront leur discipline vite récupérée à mauvais escient par les philopreneurs et la masse des coachs.
“ Après les succès d’Épicure 500 vous permettant de faire dix repas par jour sans ballonnements, après Spinoza 200 notre inhibiteur de culpabilité, les laboratoires Laron, vous proposent Philonium 3000 Flash, un médicament révolutionnaire capable d’agir sur n’importe quelle souffrance physique ou mentale : une huile essentielle d’Heidegger pour une angoisse existentielle, une substance active de Kant pour une douleur morale…. Retrouvez sagesse et vitalité en un instant ”, s’amusaient les chroniqueurs radio de France Inter dans une parodie publicitaire diffusée à l’occasion d’une émission ayant pour thème : la philosophie peut-elle soigner le corps ?
J’attribue quatre étoiles sur cinq à ce livre. Les lecteurs assidus de mes articles connaissent fort bien ma position plus que défavorable face au développement personnel. À l’instar de Thiery Jobard, je suis contre le développement personnel. Je qualifie le développement personnel d’arnaque extrêmement dangereuse pour ses adeptes et notre société.
Le philothérapeute (philosophe consultant ou philosophe praticien) a l’obligation de très bien connaître le contexte dans lequel évolue son client. Le développement de l’esprit critique de ce client passe inévitablement par une prise de conscience de sa cognition en vue de comprendre comment il connaît. Si, dès le départ, le client n’a pas conscience de son mode de pensées, il lui sera difficile de participer activement au dialogue avec son philothérapeute. L’objectif primaire du philosophe consultant demeure de déceler et de corriger les biais cognitifs de son client avant même d’abord une question philosophique. Bref, si la »machine à pensée » du client est corrompu par des «virus cognitifs », une «réinitialisation » s’impose en début de séance de consultation.
Dans son livre « Développement (im) personnel, Julia de Funès, docteure en philosophie, soutient que le développement personnel offre la même recette à tous et qu’à ce titre il ne peut donc pas se qualifier sa démarche de « personnel ». Selon ma compréhension, le développement personnel devrait mettre de l’avant un développement personnalisé, c’est-à-dire adapté à chaque individu intéressé pour se targuer d’être personnel.
Mon intérêt pour la pensée scientifique remonte à plus de 25 ans. Alors âgé d’une quarantaine d’année, PDG d’une firme d’étude des motivations d’achat des consommateurs, je profite des enseignements et de l’étude du processus scientifique de différentes sources. Je me concentre vite sur l’épistémologie…
Ce livre m’a déçu en raison de la faiblesse de sa structure indigne de son genre littéraire, l’essai. L’auteur offre aux lecteurs une foule d’information mais elle demeure difficile à suivre en l’absence de sous-titres appropriés et de numérotation utile pour le repérage des énumérations noyés dans un style plus littéraire qu’analytique.
En l’absence d’une association d’accréditation des philothérapeutes, philosophes consultants ou praticiens en francophonie, il est difficile de les repérer. Il ne nous reste plus que de nombreuses recherches à effectuer sur le web pour dresser une liste, aussi préliminaire soit-elle. Les intervenants en philothérapie ne se présentent pas tous sous la même appellation : « philothérapeute », « philosophe consultant » ou « philosophe praticien » « conseiller philosophique » « philosophe en entreprise », « philosophe en management » et autres.
J’ai lu le livre GUÉRIR L’IMPOSSIBLE en me rappelant à chaque page que son auteur, Christopher Laquieze, est à la fois philosophe et thérapeute spécialisé en analyse comportementale. Pourquoi ? Parce que ce livre nous offre à la fois un voyage psychologique et philosophique, ce à quoi je ne m’attendais pas au départ. Ce livre se présente comme « Une philosophie pour transformer nous souffrances en forces ». Or, cette philosophie se base davantage sur la psychologie que la philosophie. Bref, c’est le « thérapeute spécialisé en analyse comportementale » qui prend le dessus sur le « philosophe ».
Nathaniel Masselot maîtrise fort bien son écriture visiblement axée sur son accessibilité et sa compréhension par tous. Loin de la vulgarisation simpliste, l’auteur nous parle comme nous parlons. Loin de l’écriture hermétique, l’auteur n’a pas la tête dans les nuages et isolé dans une tour surplombant la société; il marche auprès de nous. Avec ses références à l’actualité, il campe son lecteur dans la réalité quotidienne où il évolue.
Ma lecture de ce livre m’a procuré beaucoup de plaisir et de bonheur. Je recherche dans mes lectures les auteurs et les œuvres permettant aux lecteurs d’évoluer de prise de conscience en prise de conscience de la première à la dernière page, de ne plus être le même à la fin de la lecture. Et c’est ce que les lecteurs vivront à la lecture de ce livre.
Je n’ai pas aimé ce livre parce que son titre, LES PHILO-COGNITIFS, se réfère à la philosophie sans pour autant faire un traitement philosophique de son sujet. Mon achat reposait entièrement sur le titre de ce livre et je m’attendais à un livre de philosophie. Mais il s’agit d’un livre de psychologie. Mon achat fut intuitif. J’avais pleinement confiance dans l’usage du mot « PHILO » en titre d’un ouvrage pour que ce dernier ne puisse traiter d’un autre sujet que philosophique. Mais ce n’est pas le cas.
À l’instar de ma lecture précédente (Qu’est-ce que la philosophie ? de Michel Meyer), le livre PRÉSENTATIONS DE LA PHILOSOPHIE du philosophe ANDRÉ COMTE-SPONVILLE m’a plu parce qu’il met en avant les bases mêmes de la philosophie et, dans ce cas précis, appliquées à une douzaine de sujets…
J’ai dévoré le livre LES THÉORIES DE LA CONNAISSANCE par JEAN-MICHEL BESNIER avec un grand intérêt puisque la connaissance de la connaissance me captive. Amateur d’épistémologie, ce livre a satisfait une part de ma curiosité. Évidemment, je n’ai pas tout compris et une seule lecture suffit rarement à maîtriser le contenu d’un livre traitant de l’épistémologie, notamment, de son histoire enchevêtrée de différents courants de pensée, parfois complémentaires, par opposés. Jean-Michel Besnier dresse un portrait historique très intéressant de la quête philosophique pour comprendre la connaissance elle-même.
Ce livre n’était pas pour moi en raison de l’érudition des auteurs au sujet de la philosophie de connaissance. En fait, contrairement à ce que je croyais, il ne s’agit d’un livre de vulgarisation, loin de là. J’ai décroché dès la seizième page de l’Introduction générale lorsque je me suis buté à la première équation logique. Je ne parviens pas à comprendre de telles équations logiques mais je comprends fort bien qu’elles soient essentielles pour un tel livre sur-spécialisé. Et mon problème de compréhension prend racine dans mon adolescence lors des études secondaires à l’occasion du tout premier cours d’algèbre. Littéraire avant tout, je n’ai pas compris pourquoi des « x » et « y » se retrouvaient dans des équations algébriques. Pour moi, toutes lettres de l’alphabet relevaient du littéraire. Même avec des cours privés, je ne comprenais toujours pas. Et alors que je devais choisir une option d’orientation scolaire, j’ai soutenu que je voulais une carrière fondée sur l’alphabet plutôt que sur les nombres. Ce fut un choix fondé sur l’usage des symboles utilisés dans le futur métier ou profession que j’allais exercer. Bref, j’ai choisi les sciences humaines plutôt que les sciences pures.
Quelle agréable lecture ! J’ai beaucoup aimé ce livre. Les problèmes de philosophie soulevés par Bertrand Russell et les réponses qu’il propose et analyse étonnent. Le livre PROBLÈMES DE PHILOSOPHIE écrit par BERTRAND RUSSELL date de 1912 mais demeure d’une grande actualité, du moins, selon moi, simple amateur de philosophie. Facile à lire et à comprendre, ce livre est un «tourne-page» (page-turner).
La compréhension de ce recueil de chroniques signées EUGÉNIE BASTIÉ dans le quotidien LE FIGARO exige une excellence connaissance de la vie intellectuelle, politique, culturelle, sociale, économique et de l’actualité française. Malheureusement, je ne dispose pas d’une telle connaissance à l’instar de la majorité de mes compatriotes canadiens et québécois. J’éprouve déjà de la difficulté à suivre l’ensemble de l’actualité de la vie politique, culturelle, sociale, et économique québécoise. Quant à la vie intellectuelle québécoise, elle demeure en vase clos et peu de médias en font le suivi. Dans ce contexte, le temps venu de prendre connaissance de la vie intellectuelle française, je ne profite des références utiles pour comprendre aisément. Ma lecture du livre LA DICTATURE DES RESSENTIS d’EUGÉNIE BASTIÉ m’a tout de même donné une bonne occasion de me plonger au cœur de cette vie intellectuelle française.
À titre d’éditeur, je n’ai pas aimé ce livre qui n’en est pas un car il n’en possède aucune des caractéristiques professionnelles de conceptions et de mise en page. Il s’agit de la reproduction d’un texte par Amazon. Si la première de couverture donne l’impression d’un livre standard, ce n’est pas le cas des pages intérieures du… document. La mise en page ne répond pas aux standards de l’édition française, notamment, en ne respectant pas les normes typographiques.
J’ai lu avec un grand intérêt le livre LE CHANGEMENT PERSONNEL sous la direction de NICOLAS MARQUIS. «Cet ouvrage a été conçu à partir d’articles tirés du magazine Sciences Humaines, revus et actualisés pour la présente édition ainsi que de contributions inédites. Les encadrés non signés sont de la rédaction.» J’en recommande vivement la lecture pour son éruditions sous les aspects du changement personnel exposé par différents spécialistes et experts tout aussi captivant les uns les autres.
À la lecture de ce livre fort intéressent, j’ai compris pourquoi j’ai depuis toujours une dent contre le développement personnel et professionnel, connu sous le nom « coaching ». Les intervenants de cette industrie ont réponse à tout, à toutes critiques. Ils évoluent dans un système de pensée circulaire sans cesse en renouvellement créatif voire poétique, système qui, malheureusement, tourne sur lui-même. Et ce type de système est observable dans plusieurs disciplines des sciences humaines au sein de notre société où la foi en de multiples opinions et croyances s’exprime avec une conviction à se donner raison. Les coachs prennent pour vrai ce qu’ils pensent parce qu’ils le pensent. Ils sont dans la caverne de Platon et ils nous invitent à les rejoindre.
Ce petit livre d’une soixantaine de pages nous offre la retranscription de la conférence « À QUOI SERT LA PHILOSOPHIE ? » animée par Marc Sautet, philosophe ayant ouvert le premier cabinet de consultation philosophique en France et également fondateur des Cafés Philo en France.
L’essai RAVIVER DE L’ESPRIT EN CE MONDE – UN DIAGNOSTIC CONTEMPORAIN par FRANÇOIS JULLIEN chez les Éditions de l’Observatoire, parue en 2023, offre aux lecteurs une prise de recul philosophique révélatrice de notre monde. Un tel recul est rare et fort instructif.
La philosophie a pour but l’adoption d’un mode de vie sain. On parle donc de la philosophie comme un mode de vie ou une manière de vivre. La philosophie ne se possède pas, elle se vit. La philosophie souhaite engendrer un changement de comportement, d’un mode de vie à celui qu’elle propose. Il s’agit ni plus ni moins d’enclencher et de soutenir une conversion à la philosophie.
La lecture de cet essai fut très agréable, instructive et formatrice pour l’amateur de philosophie que je suis. Elle s’inscrit fort bien à la suite de ma lecture de « La philosophie comme manière de vivre » de Pierre Habot (Entretiens avec Jeanne Cartier et Arnold I Davidson, Le livre de poche – Biblio essais, Albin Michel, 2001).
La lecture du livre Les consolations de la philosophie, une édition en livre de poche abondamment illustrée, fut très agréable et instructive. L’auteur Alain de Botton, journaliste, philosophe et écrivain suisse, nous adresse son propos dans une langue et un vocabulaire à la portée de tous.
L’Observatoire de la philothérapie a consacré ses deux premières années d’activités à la France, puis à la francophonie. Aujourd’hui, l’Observatoire de la philothérapie s’ouvre à d’autres nations et à la scène internationale.
Certaines personnes croient le conseiller philosophique intervient auprès de son client en tenant un « discours purement intellectuel ». C’est le cas de Dorothy Cantor, ancienne présidente de l’American Psychological Association, dont les propos furent rapportés dans The Philosophers’ Magazine en se référant à un autre article parue dans The New York Times.
Nathaniel Masselot maîtrise fort bien son écriture visiblement axée sur son accessibilité et sa compréhension par tous. Loin de la vulgarisation simpliste, l’auteur nous parle comme nous parlons. Loin de l’écriture hermétique, l’auteur n’a pas la tête dans les nuages et isolé dans une tour surplombant la société; il marche auprès de nous. Avec ses références à l’actualité, il campe son lecteur dans la réalité quotidienne où il évolue.
De lecture agréable et truffé d’humour, le livre ÊTES-VOUS SÛR D’AVOIR RAISON ? de GILLES VERVISCH, agrégé de philosophie, pose la question la plus embêtante à tous ceux qui passent leur vie à se donner raison.
Dans un article intitulé « Se retirer du jeu » et publié sur son site web Dialogon, le philosophe praticien Jérôme Lecoq, témoigne des « résistances simultanées » qu’il rencontre lors de ses ateliers, « surtout dans les équipes en entreprise » : « L’animation d’un atelier de “pratique philosophique” implique que chacun puisse se « retirer de soi-même », i.e. abandonner toute volonté d’avoir raison, d’en imposer aux autres, de convaincre ou persuader autrui, ou même de se “faire valider” par les autres. Vous avez une valeur a priori donc il n’est pas nécessaire de l’obtenir d’autrui. » (LECOQ, Jérôme, Se retirer du jeu, Dialogon, mai 2024.)
« Jaspers incarne, en Allemagne, l’existentialisme chrétien » peut-on lire en quatrième de couverture de son livre INTRODUCTION À PHILOSOPHIE. Je ne crois plus en Dieu depuis vingt ans. Baptisé et élevé par défaut au sein d’une famille catholique qui finira pas abandonner la religion, marié protestant, aujourd’hui J’adhère à l’affirmation d’un ami philosophe à l’effet que « Toutes les divinités sont des inventions humaines ». Dieu est une idée, un concept, rien de plus, rien de moins. / Dans ce contexte, ma lecture de l’œuvre INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE de KARL JASPERS fut quelque peu contraignante à titre d’incroyant. Je me suis donc concentré sur les propos de JASPERS au sujet de la philosophie elle-même.
« La philosophie a gouverné toute la vie de notre époque dans ses traits les plus typiques et les plus importants » (LAMBERTY, Max, Le rôle social des idées, Chapitre premier – La souveraineté des idées ou La généalogie de notre temps, Les Éditions de la Cité Chrétienne (Bruxelles) / P. Lethielleux (Paris), 1936, p. 41) – la démonstration du rôle social des idées par Max Lamberty doit impérativement se poursuivre de nos jours en raison des défis qui se posent à nous, maintenant et demain, et ce, dans tous les domaines. – Et puisque les idées philosophiques mènent encore et toujours le monde, nous nous devons d’interroger le rôle social des idées en philosophie pratique. Quelle idée du vrai proposent les nouvelles pratiques philosophiques ? Les praticiens ont-ils conscience du rôle social des idées qu’ils véhiculent dans les consultations et les ateliers philosophiques ?
J’aime beaucoup ce livre. Les nombreuses mises en contexte historique en lien avec celui dans lequel nous sommes aujourd’hui permettent de mieux comprendre cette histoire de la philosophie et d’éviter les mésinterprétations. L’auteure Jeanne Hersch nous fait découvrir les différentes étonnements philosophiques de plusieurs grands philosophes à l’origine de leurs quêtes d’une meilleure compréhension de l’Être et du monde.
Mon intérêt pour ce livre s’est dégradé au fil de ma lecture en raison de sa faible qualité littéraire, des nombreuses répétitions et de l’aveu de l’auteur à rendre compte de son sujet, la Deep Philosophy. / Dans le texte d’introduction de la PARTIE A – Première rencontre avec la Deep Philosophy, l’auteur Ran Lahav amorce son texte avec ce constat : « Il n’est pas facile de donner un compte rendu systématique de la Deep Philosophy ». Dans le paragraphe suivant, il écrit : « Néanmoins, un tel exposé, même s’il est quelque peu forcé, pourrait contribuer à éclairer la nature de la Deep Philosophy, pour autant qu’il soit compris comme une esquisse approximative ». Je suis à la première page du livre et j’apprends que l’auteur m’offre un exposé quelque peu forcé et que je dois considérer son œuvre comme une esquisse approximative. Ces précisions ont réduit passablement mon enthousiasme. À partir de là, ma lecture fut un devoir, une obligation, avec le minimum de motivation.
J’ai beaucoup aimé ce livre de Michel Lacroix, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel. Il m’importe de vous préciser que j’ai lu l’édition originale de 2009 aux Éditions Robert Laffont car d’autres éditions sont parues, du moins si je me rapporte aux différentes premières et quatrièmes de couverture affichées sur le web. Ce livre ne doit pas être confondu avec un ouvrage plus récent de Michel Lacroix : Philosophie de la réalisation personnelle – Se construire dans la liberté parue en 2013 et qui sera l’objet d’une rapport de lecture dans ce dossier.
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