Article # 140 – Philosophical Praxis, Origin, Relations, and Legacy, Gerd B. Achenbach – Translated by Michael Picard, Lexington Books, 2024

J’ai lu pour vous

« Philosophical Praxis — Origin, Relations, and Legacy »

par Gerd B. Achenbach,

fondateur de la philosophie pratique en 1981.

Ce recueil de textes traduit de l’allemand à l’anglais par Michael Picard est enfin disponible depuis 2024.

Ce livre est LE GUIDE ESSENTIEL de la philosophie pratique.

J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq.

Pour le bénéfice de nos lecteurs francophones n’ayant pas accès à l’anglais, une traduction en français accompagne le texte original en anglais des extraits et des citations dans cet article.

Merci à Lexington Books (An imprint of The Rowman & Littlefield Punlishing Group, Inc.)
pour la copie de presse qu’il nous ont offert gracieusement !


Couvertures


Philosophical Praxis
Origin, Relations, and Legacy
Gerd B. Achenbach – Translated by Michael Picard

Article # 140

Gerd B. Achenbach

Philosophical Praxis

Origin, Relations, and Legacy

Translated by Michael Picard, Lexington Books, 2024

Lexington Books

An imprint of The Rowman & Littlefield Punlishing Group, Inc.

2024

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Données au catalogue

Lexington Books

Pages: 210

Trim: 6¼ x 9⅜ (15.88 x 2.18 x 23.65 cm)

978-1-7936-5113-6 • Hardback • April 2024

978-1-7936-5114-3 • eBook • April 2024

Series: Philosophical Practice

Hier der Flyer  mit einem 30% Rabatt-Angebot.

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Présentation

Texte de présentation sur le site web de l’éditeur

Texte original en anglais

Gerd B. Achenbach’s Philosophical Praxis: Origin, Relations, and Legacy, translated by Michael Picard, offers unique insights into the compelling origin and development of what has been called a renaissance of philosophy: a storied trove of thought steeped in tradition, character, and experience, and redeployed in the service of understanding the individual life. Throughout this book, the author explores Philosophical Praxis not only through the tumultuous history of philosophy, but also through psychology, religion, literature, and more. Achenbach’s tone is subtle, humorous, and constantly surprising, demonstrating his intimacy with an expansive spirit of life and leaving behind the narrowness of academic disciplines. As the founder of Philosophical Praxis, Achenbach dissects the challenges faced in current philosophy and psychology and, in doing so, surpasses academic philosophy to reveal the possibility of a new profession for philosophical practitioners seeking to resist the seductions of theory, methods, or solutions, and personify the seriousness of being human.

Source : Lexington Books (An imprint of The Rowman & Littlefield Punlishing Group, Inc.)

Traduction en français avec DeepL

L’ouvrage de Gerd B. Achenbach, Philosophical Praxis : Origin, Relations, and Legacy, traduit par Michael Picard, offre un aperçu unique de l’origine et du développement de ce que l’on a appelé une renaissance de la philosophie : un trésor de pensée imprégné de tradition, de caractère et d’expérience, et redéployé au service de la compréhension de la vie de l’individu. Tout au long de cet ouvrage, l’auteur explore la praxis philosophique non seulement à travers l’histoire tumultueuse de la philosophie, mais aussi à travers la psychologie, la religion, la littérature, etc. Le ton d’Achenbach est subtil, humoristique et constamment surprenant, démontrant son intimité avec un esprit de vie expansif et laissant derrière lui l’étroitesse des disciplines académiques. En tant que fondateur de Philosophical Praxis, Achenbach dissèque les défis auxquels sont confrontées la philosophie et la psychologie actuelles et, ce faisant, dépasse la philosophie académique pour révéler la possibilité d’une nouvelle profession pour les praticiens de la philosophie qui cherchent à résister aux séductions de la théorie, des méthodes ou des solutions, et à personnifier le sérieux de l’être humain.

TEXTE EN QUATRIÈME DE COUVERTURE

Texte original en anglais

“This collection of Gerd Achenbach’s most important writings on Philosophical Practice is a much-awaited milestone in the history of this field. It’s been more than forty years since Achenbach baptized Philosophical Practice and gave it a solid philosophical foundation—in German. In all these years, Philosophical Practice expanded worldwide and took many different forms, while Achenbach’s incipit remained obscure to all those who could not read German. Through his excellent translation of Achenbach’s texts into English (an almost impossible task requiring outstanding linguistic and philosophical skills), Michael Picard marks a turning point in this story and makes an invaluable gift to all those interested in and caring for Philosophical Practice.” — Donata Romizi, University of Vienna

“Achenbach at his best. Thoughtful, witty, and steeped in the European philosophical tradition, he takes us along as he reflects on the philosophical impulses underlying philosophical practice, on what needs it addresses, on what mastering it may be and require, and makes a compelling case for why it matters today. This choice selection of essays, long-awaited and masterfully translated, is a must-read for anyone interested in philosophical counseling and in the therapeutic significance of philosophical thinking more generally.” — Raja Rosenhagen, Ashoka University

« Gerd Achenbach is one of the pioneers of philosophical practice. While his reputation precedes him and some of his works have been translated into English, Philosophical Praxis captures Achenbach’s unique, formidable character, philosophy, and spirit. Michael Picard has contributed an excellent service―a labor of love that comes through in his capturing of Achenbach’s style―in making this valuable contribution to philosophical practice available in English. This is a must read for anyone interested in philosophical practice! » — Rick Repetti, Kingsborough Community College

Philosophical Praxis, launched by Gerd B. Achenbach in 1981, ushers in the first alternative to current therapeutic practices, offering unique insights into the compelling origin and development of a renaissance of philosophy.

Gerd B. Archenbach is chairman of the Society of Philosophical Praxis.

Micheal Picard teaches philosophy at Douglas College in Vancouver, Canada.

Source : Lexington Books (An imprint of The Rowman & Littlefield Punlishing Group, Inc.)

Traduction en français avec DeepL

« Ce recueil des écrits les plus importants de Gerd Achenbach sur la pratique philosophique est un jalon très attendu dans l’histoire de ce domaine. Cela fait plus de quarante ans qu’Achenbach a baptisé la pratique philosophique et lui a donné une base philosophique solide – en allemand. Pendant toutes ces années, la pratique philosophique s’est développée dans le monde entier et a pris de nombreuses formes différentes, tandis que l’incipit d’Achenbach est resté obscur pour tous ceux qui ne savaient pas lire l’allemand. Grâce à son excellente traduction des textes d’Achenbach en anglais (une tâche presque impossible qui exige des compétences linguistiques et philosophiques exceptionnelles), Michael Picard marque un tournant dans cette histoire et fait un cadeau inestimable à tous ceux qui s’intéressent à la pratique philosophique et qui s’en occupent.

— Donata Romizi, Université de Vienne

« Achenbach à son meilleur. Réfléchi, plein d’esprit et imprégné de la tradition philosophique européenne, il nous emmène dans sa réflexion sur les impulsions philosophiques qui sous-tendent la pratique philosophique, sur les besoins auxquels elle répond, sur la maîtrise qu’elle peut être et qu’elle exige, et il explique de manière convaincante pourquoi elle est importante aujourd’hui. Cette sélection d’essais, attendue depuis longtemps et traduite de main de maître, est une lecture incontournable pour tous ceux qui s’intéressent au conseil philosophique et, plus généralement, à la signification thérapeutique de la pensée philosophique.

— Raja Rosenhagen, Université Ashoka

« Gerd Achenbach est l’un des pionniers de la pratique philosophique. Bien que sa réputation le précède et que certains de ses ouvrages aient été traduits en anglais, Philosophical Praxis rend compte du caractère, de la philosophie et de l’esprit uniques et formidables d’Achenbach. Michael Picard a rendu un excellent service – un travail d’amour qui transparaît dans sa façon de saisir le style d’Achenbach – en rendant disponible en anglais cette précieuse contribution à la pratique philosophique. Il s’agit d’une lecture incontournable pour quiconque s’intéresse à la pratique philosophique !

— Rick Repetti, Kingsborough Community College

Philosophical Praxis, lancé par Gerd B. Achenbach en 1981, inaugure la première alternative aux pratiques thérapeutiques actuelles, en offrant un aperçu unique de l’origine fascinante et du développement d’une renaissance de la philosophie.

Gerd B. Archenbach est président de la Society of Philosophical Praxis.

Micheal Picard enseigne la philosophie au Douglas College de Vancouver, au Canada.

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Table des matières

Texte original en anglais

Acknowledgments

Translator’s Note

Preface

Prelude

Chapter 1: Short Answer to the Question: What Is Philosophical Praxis?

Chapter 2: Philosophical Praxis Boast a Long Tradition, but No Paragon

Chapter 3: Philosophical Praxis Bears the Insignia of Lebenskönnerschaft

Chapter 4: Conversational Mastery

Chapter 5: The Ground-Rule of Philosophical Praxis

Chapter 6: On Beginnings

Chapter 7: Philosophy as a Profession

Chapter 8: Education and Philosophical Praxis: Søren Kierkegaard and the Question of Who Is a Philosophical Practitioner

Chapter 9: Philosophical Praxis and the Virtues

Chapter 10: What Matters? What Is Important in Truth? What Is Crucial in the End? Guiding Perspectives in Philosophical Praxis

Chapter 11: Character and Destiny: Philosophical Praxis Has Much to Learn from Schopenhauer

Chapter 12: Philosophical Praxis as an Alternative to Psychotherapy and Pastoral Care

Bibliography

About the Author and Translator

Traduction en français avec DeepL

Remerciements

Note du traducteur

Préface

Prélude

Chapitre 1 : Brève réponse à la question : Qu’est-ce que la praxis philosophique ?

Chapitre 2 : La praxis philosophique a une longue tradition, mais pas de parangon

Chapitre 3 : La praxis philosophique porte les insignes de la Lebenskönnerschaft (savoir vivre / compétences de vie ?)

Chapitre 4 : La maîtrise de la conversation

Chapitre 5 : La règle de base de la praxis philosophique

Chapitre 6 : Les débuts

Chapitre 7 : La philosophie en tant que profession

Chapitre 8 : Éducation et praxis philosophique : Søren Kierkegaard et la question de savoir qui est un praticien de la philosophie

Chapitre 9 : Praxis philosophique et vertus

Chapitre 10 : Qu’est-ce qui compte ? Qu’est-ce qui est important dans la vérité ? Qu’est-ce qui est crucial à la fin ? Perspectives directrices de la praxis philosophique

Chapitre 11 : Caractère et destin : La praxis philosophique a beaucoup à apprendre de Schopenhauer

Chapitre 12 : La praxis philosophique comme alternative à la psychothérapie et à la pastorale

Bibliographie

A propos de l’auteur et du traducteur

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P.S. : le mot « Lebenskönnerschaft » peut se traduire par « savoir vivre » ou « compétences de vie ».

P.S.: Le mot « praxis » peut se traduire par « pratique ».

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Extraits

PHILOSOPHICAL PRACTICE

Series editor: Lydia Amir, Tufts University

The last decades have witnessed a renewed interest in the power of philosophy to address everyday problems, on both an individual and a social scale. The outcome has been a theoretical and practical field called “philosophical practice,” an original approach that highlights the timely and perennial need for philosophy. This series aims to bring to the academic public the best reflections that bear on the relation of philosophy to everyday life and to the contemporary world, as grounded in experience or arguments or both. It honors the founders of this innovative field while calling for new ways of empowering philosophy by demonstrating its relevance to individual and social concerns both inside and outside academia. It thus hopes to strengthen philosophy by bringing its potency to the attention of philosophers and scholars from other disciplines, as well as to students and the general public.

Traduction en français avec DeepL

« Les dernières décennies ont été marquées par un regain d’intérêt pour le pouvoir de la philosophie dans la résolution des problèmes quotidiens, tant à l’échelle individuelle que sociale. Il en est résulté un champ théorique et pratique appelé « pratique philosophique », une approche originale qui met en évidence le besoin actuel et permanent de philosophie. Cette série vise à mettre à la disposition du public universitaire les meilleures réflexions qui portent sur la relation de la philosophie à la vie quotidienne et au monde contemporain, qu’elles soient fondées sur l’expérience ou sur des arguments ou les deux. Elle rend hommage aux fondateurs de ce domaine novateur tout en appelant à de nouvelles façons de renforcer la philosophie en démontrant sa pertinence par rapport aux préoccupations individuelles et sociales, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du monde universitaire. Il espère ainsi renforcer la philosophie en attirant l’attention des philosophes et des chercheurs d’autres disciplines, ainsi que des étudiants et du grand public sur son potentiel. »

Titles in the Series

Philosophical Praxis: Origin, Relations, and Legacy, by Gerd B. Achenbach, translated by Michael Picard

Philotherapy: An Integration of Psychotherapy, by Aleksandar Fatić

Philosophy in Philosophical Counseling: Unasked Questions, Open Answers, by Ora Gruengard

Wonder, Silence, and Human Flourishing: Toward a Rehumanization of Health, Education, and Welfare, edited by Finn Thorbjørn Hansen, Solveig Eide Botnen, and Carlo Leget

The Philosophy of Practical Affairs: An Introduction, by Joseph Agassi.


 Acknowledgments

Texte original en anglais

Many are owed much and teeming thanks for all the aid that has been extended to help this book come to be. As translator, and on behalf of the author, I would like to recognize them all here. Though they cannot all be named, there are a few who must not go unmentioned.

Let me save the greatest debt of thanks for last, but to begin, no small thanks are due to Douglas College, where I work, for twice granting education leave (an academic year of half-time teaching duties), without which this project could not have gotten off the ground. Thanks are especially due to Dean Carla Hotel and VP-Academic Thor J. Borgford for supporting these semi-sabbaticals, as well as to the education leave committee for trusting in me twice. Much work accomplished during these two periods will appear in planned future publications, so that advance thanks for that are already in order.

To Jana Hodges-Kluck of Lexington Books we owe thanks for her stellar combination of patience and pressure. Thanks are certainly also due to Lydia Amir, who, although general editor of Lexington’s book series in Philosophical Practice, performed something closer to angel-overseer duties. A squad of Douglas College librarians, seemingly ever-ready to help, tracked down references, located existing English translations, painstakingly sought and got permissions to reprint this or that snippet, beleaguered neigh- boring universities with interlibrary loan requests, and more than once stayed open late a few minutes so I could get there to borrow a book. The tireless scholarly communications librarian, Gretchen Goertz; at interlibrary loans, the resourceful Christine Fojas; the persistent associate director of learning resources, Katherine E. Shipley; along with others at Douglas College libraries (e.g., Jacquie Ticknor and Rob Leeson-Stotesbury): all are very well aware of how I have overtaxed and overworked them these past few years, and strangely don’t seem to mind.

Special thanks are due to the poet Robert Gernhardt for his poem, Immer, which appears in translation in chapter 10, and also to his publishers, S. Fischer Verlag, for permission to publish that translation here, which, though lightly-amended, is due to Johannes Litger, whom we also thank.

For permission to print the chapter epigraphs, we are grateful to:

Efforts—unfortunately unsuccessful—were made over the course of several months to obtain permission to use as chapter epigraph my own translation of a quotation from a publication by Hartmut von Hentig.

Thanks and perhaps an appeal for pardon are due to my family: my beloved wife, Nilu Nemati, and my long-lost and late-returned son, Arya Nemati Zardalo, who bore my extended absences while my head was in a thesaurus. I thank them for their patience and for their presence.

I have left till last the greatest debt of gratitude we owe. No one did more to make this book not only come to be, but come to be as good as it could be, than did Laura V. Adrian. A resourceful go-between for both author and translator, but also a substantial presence in all our meetings and on every resulting page, Laura richly deserves the book’s dedication and a share in its fate.

____________

P.S.: The link are added by us – Les liens sont ajoutés par nous

Traduction en français avec DeepL

Nombreux sont ceux qui doivent être remerciés pour toute l’aide qu’ils ont apportée à la réalisation de ce livre. En tant que traducteur et au nom de l’auteur, j’aimerais les remercier tous ici. Bien qu’il soit impossible de les nommer tous, il y en a quelques-uns qui ne doivent pas passer inaperçus.

Permettez-moi de garder le plus grand remerciement pour la fin, mais pour commencer, je tiens à remercier le Douglas College, où je travaille, qui m’a accordé à deux reprises un congé d’études (une année académique d’enseignement à mi-temps), sans lequel ce projet n’aurait pas pu voir le jour. Je remercie tout particulièrement la doyenne Carla Hotel et le vice-président académique Thor J. Borgford pour leur soutien à ces congés semi-sabbatiques, ainsi que le comité des congés d’études pour m’avoir fait confiance à deux reprises. Une grande partie du travail accompli au cours de ces deux périodes figurera dans les futures publications prévues, et il convient donc de les remercier d’ores et déjà.

Nous devons remercier Jana Hodges-Kluck, de Lexington Books, pour son excellente combinaison de patience et de pression. Nous remercions également Lydia Amir, qui, bien que rédactrice en chef de la série de livres de Lexington sur la pratique philosophique, a exercé des fonctions plus proches de celles d’un ange surveillant. Une escouade de bibliothécaires du Douglas College, apparemment toujours prêts à aider, a recherché des références, localisé des traductions anglaises existantes, cherché et obtenu laborieusement les autorisations de réimprimer tel ou tel extrait, harcelé les universités voisines avec des demandes de prêt entre bibliothèques et, plus d’une fois, est restée ouverte quelques minutes de plus pour que je puisse emprunter un livre. L’infatigable bibliothécaire chargée des communications savantes, Gretchen Goertz ; la débrouillarde Christine Fojas, chargée des prêts entre bibliothèques ; la tenace directrice adjointe des ressources pédagogiques, Katherine E. Shipley ; ainsi que d’autres personnes des bibliothèques du Douglas College (par exemple Jacquie Ticknor et Rob Leeson-Stotesbury) : tous sont parfaitement conscients de la façon dont je les ai surchargés de travail et de travail ces dernières années, et, étrangement, ne semblent pas s’en préoccuper.

Nous remercions tout particulièrement le poète Robert Gernhardt pour son poème Immer, dont la traduction figure au chapitre 10, ainsi que son éditeur, S. Fischer Verlag, pour avoir autorisé la publication de cette traduction, qui, bien que légèrement modifiée, est due à Johannes Litger, que nous remercions également.

Pour l’autorisation d’imprimer les épigraphes des chapitres, nous sommes reconnaissants à :

  • The Revue de Théologie et de Philosophie, for a translation of a line from an article by Paul Ricœur from “Philosophie après Kierkegaard”;
  • Standford University Press, for use of Adrian Del Caro’s translation of a line by Friedrich Nietzsche;
  • Reclam, for a quotation I translated from Odo Marquard’s Der Einzelne. Vorlesungen zur Existenzphilosophie;
  • Christopher Janaway and Cambridge University Press, for a quotation from the translation by Judith Norman, Alistair Welchman, and Christopher Janaway of volume 1 of Arthur Schopenhauer’s The World as Will and Representation;
  • Henry W. Pickford, for permission to quote from his translation of Adorno’s Critical Models: Interventions and Catchwords;
  • Polity Books, for permission to quote from Wieland Hoban’s translation of Peter Sloterdijk’s God’s Zeal: The Battle of the Three Monotheisms;
  • Frederick Ungar, for a quotation from the Walter D. Morris translation of Thomas Mann’s, Reflections of a Nonpolitical Man;
  • Princeton University Press, for a quotation from the David F. Swenson and Lillian Marvin Swenson translation of volume 1 of Søren Kierkegaard’s Either-Or.

Des efforts—malheureusement infructueux—ont été déployés pendant plusieurs mois afin d’obtenir l’autorisation d’utiliser, en guise d’épigraphe de chapitre, ma propre traduction d’une citation tirée d’une publication de Hartmut von Hentig.

Des remerciements, voire une demande de pardon, sont sans doute dus à ma famille : ma chère épouse, Nilu Nemati, et mon fils longtemps perdu puis tardivement retrouvé, Arya Nemati Zardalo, qui ont supporté mes longues absences alors que mon esprit était plongé dans un thésaurus. Je les remercie pour leur patience et leur présence.

J’ai gardé pour la fin la plus grande dette de gratitude qui nous incombe. Nul n’a fait davantage pour que ce livre non seulement voie le jour, mais atteigne toute la qualité dont il était capable, que Laura V. Adrian. À la fois intermédiaire ingénieuse entre l’auteur et le traducteur et présence essentielle à chacune de nos rencontres et sur chaque page de ce livre, Laura mérite amplement la dédicace qui lui est adressée ainsi qu’une part de son destin.


Preface

Texte original en anglais

To ‘Upper America’—as I would like to call the northern half of the American continent—belongs the honor in the last century of having originated, within the wide, perhaps over-extended terrain of the schools of psychotherapy, certain essential inspirations and innovations which were later taken up in Europe and adapted to the old European way. This is not to deny that Vienna (above all) and Switzerland are the birthplace of the original forms of all later therapies—Freud’s psychoanalysis, C. G. Jung’s analytical psychology, and Adler’s individual psychology. Significant further developments from this triple root then spread to North America; it is enough to recall the innumerable variants of so-called “humanistic psychology.”

And now it looks as if this back-and-forth inter-continental movement is swinging back again. This time it is the renewal of the practice of philosophy, which in 1981 I called into being as Philosophical Praxis1 in Germany, but which very quickly gained a foothold in the neighboring European countries—first of all in Austria and the Netherlands—and then very soon spread from the old continent across the pond into the ‘New World.’ There it gained attention and recognition in its own right, first in Vancouver, Canada (where in 1994 the First International Congress for Philosophical Practice2 took place at the University of British Columbia), and then shortly thereafter in New York by Lou Marinoff,3 who in 1999 wrote Plato, Not Prozac! Applying Philosophy to Everyday Problems. Thanks in no small part to English being the current lingua franca, this in turn bolstered the presence of Philosophical Praxis worldwide.

It is therefore all the more urgent to make a small selection of writings available in the language now advanced to a near universal idiom—texts that, while founding Philosophical Praxis, initiated a revival of the oldest philosophical impulses. The significance of this latest rebirth of philosophy out of the spirit of its original endeavor to create an exemplary form of life—as understood in antiquity and made contemporary by Pierre Hadot4 and Michel Foucault5—is by no means limited to a mere return in practical terms to the original mission and aspiration of philosophy. Rather, the proper task of this new configuration of philosophy is to establish itself as the first real alternative to ‘therapy-culture.’ Those who might hitherto have gone into therapy will more and more turn to the philosopher-practitioner in their distress. Thus, the practice of philosophy, for the first time ever, opens up the possibility of establishing itself as a proper profession.

From amongst my publications6 devoted to this rebirth of philosophy, or intellectually paving the way for it, I have endeavored to select pieces that would offer philosophically interested people in the Anglo-American world some insight into this pioneering project. And now I am sending these texts, accompanied by friendly greetings, to the Western continent, from which the call to Philosophical Praxis may go out to all parts of the world.

However, I must not hand over the typescript of this book without expressly thanking three people.

First and foremost, to my friend—and companion since we met at the International Congress of Philosophical Praxis in Mexico—Michael Picard, the philosophical practitioner and professor of philosophy at Douglas College in Vancouver, who devoted himself with never-flagging love and veritably angelic patience to the extraordinarily daunting task of translating the texts collected here into subtly tempered English of equal rank. This required not only an extremely sensitive knowledge of the language, but at the same time also confronted him as translator with the almost insurmountable task of bridging—if at all possible, even partially overcoming—the peculiar gulf that separates Anglo-American cultural space and understanding from that of continental Europe. Such a task could hardly be accomplished by even a Hermes. Secondly—and in the same breath, so to speak—my heartfelt thanks go to my wife, Laura V. Adrian, who has been equally tireless in her support of Michael during this months-long translation marathon. In countless meetings, most of which lasted many hours, they jointly wrangled to determine the best rendering in each case. Thanks to her extraordinary expertise in Philosophical Praxis, as well as her truly sublime sense of language, she was called upon to do this as no one else could have.

Last but not least, we would all like to thank our American-Israeli colleague Professor Lydia Amir, both generally for her unparalleled contributions to Philosophical Practice—with worldwide impact—but also particularly for her editorship of this Lexington Books series in Philosophical Practice, which this book, but for unavoidable delays, was to inaugurate.

Gerd B. Achenbach Preface

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NOTES

1 Odo Marquard, “Praxis, Philosophische.” In the Historischen Wörterbuch der Philosophie, ed. Joachim Ritter et al., Vol. VII (Basel, 1989), 1307f. Also accessible online at http://www.achenbach-pp.de/.

2 The first international congress for philosophical practice took place at the University of British Columbia in Vancouver in 1994, almost exactly forty years ago.

3 Lou Marinoff, Plato, Not Prozac! Applying Philosophy to Everyday Problems (New York, 1999).

4 Pierre Hadot, Exercices spirituels et philosophie antique (Paris: Etudes augustiniennes, 1981). Several of Hadot’s books have appeared in English, most notably (translated by Michael Chase): Philosophy as a Way of Life (Oxford: Blackwell, 1995); The Inner Citadel: the Meditations of Marcus Aurelius (Harvard University Press, 1998); What is Ancient Philosophy? (Harvard University Press, 2002). See the bibliography for full details and other works.

5 Michel Foucault, Histoire de la sexualité, vol. 1: La volonté de savoir, 1976, vol. 2: L’usage des plaisirs, 1984, and especially vol. 3: Le souci de soi, 1984. These volumes appeared respectively in English (translated by Robert Hurley) as: The History of Sexuality (New York: Vintage, 1980); The Use of Pleasure (Vintage, 1985); Care of the Self (Vintage, 1986). See the bibliography for full details.

6 Gerd B. Achenbach, Philosophische Praxis (Köln: Verlag für Philosophie/Dinter, 1984, 2nd ed., 1987); with T. H. Macho, Das Prinzip Heilung (Köln: Verlag für Philosophie/Dinter, 1985); Das kleine Buch der inneren Ruhe (Freiburg: Herder, 2000; rev. and exp., 2016); Lebenskönnerschaft (Freiburg: Herder, 2001; Köln: Dinter, 2010); Vom Richtigen im Falschen (Freiburg: Herder, 2003; Köln: Dinter, 2014); Zur Einführung der Philosophischen Praxis (Köln: Dinter, 2010); On Right in Wrong. Trans. by Michael Picard (Lanham, MD: Lexington Books, forthcoming). See the bibliography for full details.

Traduction en français avec DeepL et ChatGPT

C’est à la « Haute Amérique » – comme j’aimerais appeler la moitié nord du continent américain – que revient l’honneur d’avoir été à l’origine, au siècle dernier, sur le vaste terrain, peut-être trop étendu, des écoles de psychothérapie, de certaines inspirations et innovations essentielles qui ont été reprises plus tard en Europe et adaptées à l’ancienne manière européenne. Il ne s’agit pas de nier que c’est à Vienne (surtout) et en Suisse que sont nées les formes originales de toutes les thérapies ultérieures – la psychanalyse de Freud, la psychologie analytique de C. G. Jung et la psychologie individuelle d’Adler. Des développements significatifs de cette triple racine se sont ensuite répandus en Amérique du Nord ; il suffit de rappeler les innombrables variantes de ce que l’on appelle la « psychologie humaniste ».

Or, il semble que ce mouvement intercontinental de va-et-vient soit en train de repartir dans l’autre sens. Cette fois, il s’agit du renouveau de la pratique de la philosophie, que j’ai instaurée en 1981 en Allemagne sous le nom de Praxis philosophique. Celle-ci s’est rapidement implantée dans les pays européens voisins—d’abord en Autriche et aux Pays-Bas—avant de traverser l’Atlantique pour gagner le « Nouveau Monde ». Elle y a suscité attention et reconnaissance, d’abord à Vancouver, au Canada (où s’est tenu en 1994 le premier Congrès international de pratique philosophique à l’Université de la Colombie-Britannique), puis peu après à New York, grâce à Lou Marinoff, qui publia en 1999 Plato, Not Prozac! Applying Philosophy to Everyday Problems. Grâce, en grande partie, au fait que l’anglais est aujourd’hui la lingua franca, cet essor a contribué à la diffusion mondiale de la Praxis philosophique.

Il devient donc d’autant plus urgent de rendre disponible une sélection de textes dans cette langue qui tend désormais à s’imposer comme un idiome quasi universel—des textes qui, tout en fondant la Praxis philosophique, ont initié une renaissance des plus anciennes impulsions philosophiques. L’importance de cette dernière renaissance de la philosophie, conçue comme un art de vivre exemplaire—ainsi qu’elle était comprise dans l’Antiquité et que Pierre Hadot et Michel Foucault l’ont réactualisée—ne se limite en aucun cas à un simple retour aux aspirations originelles de la philosophie sous une forme pratique. La véritable mission de cette nouvelle configuration philosophique est plutôt de s’établir comme la première véritable alternative à la « culture thérapeutique ». Ceux qui, jusqu’ici, se seraient tournés vers la thérapie se tourneront de plus en plus vers le praticien-philosophe dans leur détresse. Ainsi, la pratique de la philosophie ouvre, pour la première fois, la possibilité de se constituer en véritable profession.

Parmi mes publications consacrées à cette renaissance philosophique, ou intellectuellement préparatoires à celle-ci, j’ai tenté de sélectionner des écrits susceptibles d’offrir aux esprits philosophiquement curieux du monde anglo-américain un aperçu de ce projet novateur. Et c’est ainsi que j’envoie aujourd’hui ces textes, accompagnés de salutations amicales, vers le continent occidental, d’où l’appel à la Praxis philosophique pourra se propager aux quatre coins du monde.

Cependant, je ne saurais remettre le manuscrit de ce livre sans exprimer ma gratitude envers trois personnes.

En tout premier lieu, à mon ami et compagnon de route depuis notre rencontre au Congrès international de pratique philosophique au Mexique, Michael Picard, praticien-philosophe et professeur de philosophie au Douglas College de Vancouver. Il s’est consacré avec un amour inlassable et une patience quasi angélique à la tâche redoutable de traduire ces textes dans un anglais finement nuancé et d’égale dignité. Cela exigeait non seulement une connaissance extrêmement sensible de la langue, mais aussi d’affronter le défi quasi insurmontable de combler—ou du moins d’atténuer—le gouffre singulier qui sépare l’espace culturel et intellectuel anglo-américain de celui de l’Europe continentale. Une tâche qu’à peine même un Hermès aurait pu accomplir.

Ensuite—et dans le même souffle, pour ainsi dire—mes plus sincères remerciements vont à mon épouse, Laura V. Adrian, qui a tout autant soutenu Michael au cours de ce marathon de traduction de plusieurs mois. À travers d’innombrables séances de travail, souvent longues de plusieurs heures, ils ont lutté ensemble pour déterminer la meilleure formulation en chaque cas. Grâce à son expertise exceptionnelle en Praxis philosophique ainsi qu’à son sens véritablement sublime de la langue, elle était la personne toute désignée pour ce rôle.

Enfin, nous souhaitons tous exprimer notre gratitude à notre collègue américano-israélienne, la professeure Lydia Amir, tant pour sa contribution inégalée à la pratique philosophique—dont l’impact est mondial—que pour son rôle particulier de directrice de cette collection en Praxis philosophique chez Lexington Books, laquelle devait être inaugurée par cet ouvrage, n’eussent été des retards inévitables.


Prelude

Texte original en anglais

With dubious persistence, voices here and there are raised calling for a ‘theory of Philosophical Praxis.’ And I have made a habit of ignoring such voices with equal and opposite persistence. For what should we say to them, if pre-educated people—nota bene: their pre-education is their problem1—if scientifically trained people think that they cannot know what Philosophical Praxis is until they are in possession of a ‘theory’ of it? These unfortunate friends of theory are like those who find themselves in a most beautiful land- scape, take a look around, then declare that they see nothing because they possess no map of it.

Perhaps we do yet better to construe such persistence as the contemporary rule over our minds of the algorithm, if indeed its reign has not already been instituted within them. Thereunder it holds true: one ‘understands’ only in knowing the schema according to which processes run. We can do no better than the telling analogy of process engineering.

Yet I feel like asking those askers: have any of you who demand a ‘theory’ of Philosophical Praxis ever heard tell of a ‘theory of philosophy’? Unlikely, I should think. Still, it is possible—after all, one does read all sorts of things! In that case, the one who poses the question (and—even more so—the one who is subjected to it) would do us all a favor by leaving such ‘contributions to research’ on the dusty library shelves where they may be abandoned without causing any harm.

No—in the spheres of philosophy the contrary has always held true: the philosopher thinks and at the same time bethinks his thinking and even, within his thinking, the very possibility of thinking as such. Thus not only has he no need of the well-worn rut that keeps the theory-driven man in his predetermined path; on the contrary, such constraints would lie upon him as a yoke, and he would feel as if bound in fetters by the head and limbs. Let us not shy away from one of the leading ideas of the philosophical tradition: whereas others fancy themselves safe and secure at the end of the leash of a chosen theory, the philosopher suffers from the loss of that freedom, without which thinking wastes itself away in mere correctness until it degenerates at last into dull routine, and finally dies.

In order to forestall a widespread misunderstanding: the responsibility of the philosopher is not only, possibly not even primarily, to what he ‘thinks’ but instead to rethink, to become thoughtful, or—to resort to quaint old terms—to become judicious. Under this mandate, wherever possible, he rescues thoughts trapped under rubble, and pries open new springs of dried-up thinking, that they may once again begin to flow.

What’s more: taken in its widest scope, such thinking is not a ring-fenced nature park in which the philosopher would let himself be confined. On the contrary: he feels; senses; looks; detects; suspects; sees coming; distrusts and believes; fears, trembles and hopes; remembers the forgotten; calls attention to the overlooked; insists where others are ‘already further along’; irritates the questions whose answers are already known; keeps calm when the armies march; makes a fuss where others look aside—in sum: he lives, and it does not elude him that, or how, he lives. That is his base, that is where he gathers experiences. But here I break off, though clearly enough this list could be extended ad libitum.

Only one more point to be noted at this juncture: the domain of philosophy is no longer that of ‘knowledge’ [Wissens]—or, as one would say today to preserve generality, ‘putative’ knowledge. It is this that accounts for why it no longer misconceives itself as sister to the sciences, but rather is to be found in the neighborhood of the arts, of music, and of a literature that in its own way aspires to be knowledge [Erkenntnis].

So, instead of glorying in conquests within the narrow, stipulatory quarters of Knowledge,2 a philosophy that must stand the test of practice, in which the figure of the philosopher-practitioner attends to the cares and needs of the people who turn to us—such a philosophy at least comes down to deliberate bearing, learned kindness,3 and a self-wrought constitution; in other words: to being granted entry into the realm of education where we can come to be at home, as well in the here-and-now as in past ages.

What this means in relation to the guest in our practice is that we are challenged to do what the typical academically refined seminar graduate is least able to do. Even as Orpheus once followed his Eurydice, so too the philosophical practitioner must find his way to, and then within, the world in which his guest has entangled himself, or has been entangled, and in which he endures, hoping for a way out.

There we find him and take him with us to where doors are open to him, if he dares to go with us and is able to do so. So we ourselves become for him what, according to Schopenhauer’s deeply thought image, Death is to every rigorous, non-indulgent philosophizing: namely, Apollo Musagetes, Apollo as Leader of the Muses. He, however, does not lead us down into the lightless realm of shadows, but awakens us as one and guides us up into the well-woven vivifying spirit realm, which awaits and now warmly welcomes and receives the philosophers.

What, finally, will I then say, if there continues to be a demand for a ‘theory of Philosophical Praxis,’ as can be assumed with sad certainty?

I will say: The reply must be efforts toward a philosophy of Philosophical Praxis, the pieces of which are nothing but essays (in the literal sense) put together to form a polyphonic fugue.

It may also be said, however, that the essays I gather here are harvest bounty, as they certainly did not fall by chance to one who over a period of forty years labored to harrow, sow, and reap, which has been both an honor and a limitation. The individual—to speak exactly, the unique—preconditions that I as a particular being bring forward have bathed the newly opened terrain in a light, the color of which is completely tempered personally. This rules out that any training in theory could suffice for a subordinate practice, or for the creation of application-oriented methods as a helping hand to zealous ‘practitioners.’

At the same time, the texts in this book are so many contributions to a conversation that has already been going on for decades, first in the form of a series of colloquia organized with international participation by the Gesellschaft für Philosophische Praxis founded in 1982 in Bergisch Gladbach;4 but then above all in the ever-expanding context of the (so far) seventeen international congresses on Philosophical Praxis.5

It was to be expected that straight away—as per usual: as soon as academics meet on the public scene—‘trends’ emerged, in the worst case even so-called ‘schools,’ which may offer a certain identity-insurance to those who find shelter there, even if a truly independent, self-responsible, especially philosophically imbued thinking has always eschewed such comforts.6

With fitting seriousness, however, it ought at least to be noted that Philosophical Praxis is attracting attention in seemingly philosophically distant but practically engaged, scientifically ambitious circles; for instance, when it comes to providing a ‘philosophical foundation’ for the ‘counseling professions’7 or entering into conversation with psychotherapeutically oriented practitioners.8

Most significantly, however, the importance of Philosophical Praxis is now increasingly being perceived in medical circles, where doubts about the ‘scientific turn’ that occurred in the nineteenth century are emerging and, in the wake of this, a renewed insistent interest in philosophy in practical terms is emerging.9

It remains to be seen to what extent Philosophical Praxis will succeed in being taken up with prestige at high schools—as is already the case at numerous universities worldwide,10 though so far not yet in its ‘home country.’

The conviction may even be argued for: however much Philosophical Praxis has to learn from academic philosophy, there is very likely far more that university-established philosophy has to learn to its own benefit from the experiences in Philosophical Praxis, if only it opens itself to them. Undoubtedly there are already plenty of confidence-building examples. For it suffices only to recall Montaigne, Pascal, Spinoza, Schopenhauer, Kierkegaard, and Nietzsche, to show that the fire of philosophy often first blazed outside the walled-in academy before advancing as a revitalizing force into the well-kept fortress of higher learning.

And it is the spirit that scales all walls.

From Vienna, May 2023

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NOTES

1 Pre-education—Vorbildung; pre-educated—vorgebildete. This mocking concept ought to be understood over against the central role in Achenbach (and in this book) of Bildung (education, culture, self-formation); see especially chapter 8, notes 3, 8 and 30–33. The notion may also be profitably juxtaposed with Vorbild, the paragon, standard-bearer or role model, the existence of which for the philosophical practitio- ner Achenbach denies (as for example in the very title of chapter 2).

2 Narrow, stipulatory quarters of Knowledge—ausbedungenen Wissensquartieren.

3 Kindness—Gesonnenheit. An Achenbach construction derived from the expression, “wohl gesonnnen,” meaning well-disposed. It is a benevolent solicitude toward a situated individual. “Self-wrought constitution” is “erlangte Verfassung.”

4 See the documentation of the early years in the Kleine Chronik der Philosophische Praxis, 1981–1995, which is available online at https://www.achenbach-pp.de.

5 In Vancouver (1994), Leusden/Netherlands (1996), New York (1997), Bergisch Gladbach (1998), Oxford (1999), Oslo (2001), Copenhagen (2004), Seville (2006), Carloforte/Italy (2008), Leusden (2010), Chuncheon/Korea (2012), Athens (2013), Belgrade (2014), Bern (2016), Mexico City (1018), Petersburg (2021), and Timisoara/ Romania (2023); see the website at https://icpp.site/.

6 Donata Domizi, Philosophische Praxis. Eine Standortbestimmung, Information Philosophie, Heft 4 (2019), 86–94.

7 See, for example: Luitgard Brem-Gräser, Handbuch der Beratung für helfende Berufe, 3 vols. (Munich-Basel: 1993), most notably volume 1, pages 121–131.

8 See psycho-logik. Jahrbuch für Psychotherapie, Philosophie und Kultur. Pub- lished since 2006 in Freiburg-München by Karl Alber Verlag.

9 A representative selection: Klaus Dörner, Der gute Arzt. Lehrbuch der ärztli- chen Grundhaltung, 2nd ed. (Stuttgart: Schattauer, 2003), therein especially: Sorge um mich selbst. / Das gute Leben / Medizin als Philosophie / Philosophische Grundhaltung des Arztes. But see also the volumes edited by Giovanni Maio, Auf den Menschen hören. Für eine Kultur der Aufmerksamkeit in der Medizin (Freiburg- Basel-Vienna: Herder, 2017) and Vertrauen in der Medizin. Annäherungen an ein Grundphänomen menschlicher Existenz (Freiburg-Basel-Vienna: Herder, 2023). One may also consult G. B. Achenbach, “Aussichten auf ein Ende des kalten Krieges im Reich der Medizin. Philosophisches Plädoyer für eine praktische Weisheit, die den Streit der Theorien schlichtet,” in Patientenorientierung und Professionalität, edited by Peter F. Matthiessen, 2nd expanded ed. (Bad Homburg: Verlag Akademishe Schriften, 2011); and G. B. Achenbach, “Der Patient und sein Arzt,” in Ärztekammer Nordrhein: Kommunikation, 117. Deutscher Ärztetag (Düsseldorf: 2014), 67–92.

10 Thus, among others, in the University of Tokyo, Kyungpool National Uni- versity, Korea Counseling Graduate University, Catholic University of Portugal, Ca’Foscari University for Venice, University of Roma 3, Université de Liège, Uni- versity of Vienna, Timisoara University/Romania, Institute of Psycoanalysis/Russia, Milkwaukee School of Engineering/USA, Universidad Vasco de Quiroga/Mexico, National University of Buenos Aires, Universidad de Chile, and University of the State of Rio de Janeiro. (List incomplete.)

Traduction de l’anglais au français avec ChatGPT

Avec une persistance douteuse, des voix s’élèvent ici et là pour réclamer une « théorie de la Praxis philosophique ». Et j’ai pris l’habitude d’ignorer ces voix avec une persistance tout aussi résolue. Que devrions-nous leur répondre, si des personnes préformées—nota bene : leur préformation est leur problème—si des personnes formées scientifiquement estiment qu’elles ne peuvent savoir ce qu’est la Praxis philosophique tant qu’elles ne disposent pas d’une « théorie » à son sujet ? Ces malheureux amis de la théorie ressemblent à ceux qui, se trouvant dans un paysage des plus magnifiques, regardent autour d’eux et déclarent ne rien voir parce qu’ils ne possèdent aucune carte du lieu.

Peut-être vaut-il mieux encore interpréter une telle persistance comme le signe de la domination contemporaine de l’algorithme sur nos esprits, si tant est que son règne n’y soit pas déjà établi. Selon cette logique, on ne « comprend » qu’en connaissant le schéma selon lequel les processus s’exécutent. Nous ne saurions trouver meilleure analogie que celle de l’ingénierie des processus.

J’ai pourtant envie de demander à ceux qui réclament une « théorie » de la Praxis philosophique : l’un d’entre vous a-t-il jamais entendu parler d’une « théorie de la philosophie » ? J’en doute fort. Il se peut, bien sûr—après tout, on lit de tout ! Mais dans ce cas, celui qui pose la question (et—plus encore—celui qui en est la cible) nous rendrait à tous service en laissant ces « contributions à la recherche » sur les rayonnages poussiéreux des bibliothèques, où elles peuvent être abandonnées sans causer le moindre dommage.

Non—dans le domaine de la philosophie, c’est l’inverse qui a toujours prévalu : le philosophe pense et, en même temps, réfléchit à sa pensée et même, dans sa pensée, à la possibilité même de penser. Ainsi, non seulement il n’a nul besoin de l’ornière qui maintient l’homme obsédé par la théorie sur son chemin prédéterminé, mais, bien au contraire, un tel carcan serait pour lui un joug, une entrave qui le lierait tête et membres. N’hésitons pas à rappeler l’une des idées directrices de la tradition philosophique : tandis que d’autres se croient en sécurité, attachés à la laisse d’une théorie choisie, le philosophe souffre de la perte de cette liberté, sans laquelle la pensée se réduit à une simple conformité jusqu’à dégénérer en routine stérile, puis s’éteindre.

Afin de prévenir tout malentendu répandu : la responsabilité du philosophe ne réside pas uniquement, et peut-être même pas principalement, dans ce qu’il « pense », mais dans sa capacité à repenser, à devenir réfléchi, ou—pour reprendre d’anciens termes devenus rares—à faire preuve de jugement. Sous cette exigence, il secourt, chaque fois que possible, les pensées ensevelies sous les décombres, et rouvre de nouvelles sources de pensée taries, afin qu’elles recommencent à couler.

Mieux encore : pris dans son acception la plus large, un tel penser n’est pas un parc naturel délimité dans lequel le philosophe se laisserait enfermer. Au contraire, il ressent ; il perçoit ; il observe ; il détecte ; il soupçonne ; il anticipe ; il se méfie et il croit ; il craint, tremble et espère ; il se souvient de l’oublié ; attire l’attention sur ce qui a été négligé ; insiste là où d’autres « sont déjà plus loin » ; perturbe les questions dont les réponses sont déjà établies ; garde son calme quand les armées marchent ; fait du bruit là où d’autres détournent le regard—en somme : il vit, et il ne lui échappe ni le fait qu’il vit, ni la manière dont il vit. Voilà son socle, c’est là qu’il puise son expérience. Mais je m’arrêterai ici, bien que cette liste puisse manifestement être poursuivie ad libitum.

Une dernière remarque s’impose cependant à ce stade : le domaine de la philosophie ne relève plus de la « connaissance » (Wissen)—ou, pour parler en termes contemporains plus généraux, de la « pseudo-connaissance ». C’est précisément pour cette raison qu’elle ne se méprend plus elle-même comme une sœur des sciences, mais qu’elle se situe désormais dans le voisinage des arts, de la musique et d’une littérature qui, à sa manière, aspire à être une forme de connaissance (Erkenntnis).

Ainsi, au lieu de s’enorgueillir de conquêtes dans l’étroite enceinte de la Connaissance, une philosophie qui doit faire ses preuves dans la pratique, où le praticien-philosophe s’occupe des préoccupations et des besoins de ceux qui viennent à lui, repose au moins sur une posture délibérée, une bienveillance cultivée et une constitution forgée par soi-même ; en d’autres termes : sur une entrée accordée dans le domaine de l’éducation, où l’on peut véritablement se sentir chez soi, autant dans le présent que dans les âges passés.

Appliqué à l’invité de notre pratique, cela signifie que nous sommes mis au défi d’accomplir ce dont le diplômé académique raffiné est le moins capable. Tout comme Orphée suivait jadis son Eurydice, le praticien-philosophe doit, lui aussi, retrouver le chemin du monde dans lequel son invité s’est embourbé, ou a été embourbé, et dans lequel il demeure, espérant une issue.

C’est là que nous le trouvons et l’emmenons vers un lieu où des portes lui sont ouvertes, s’il ose nous suivre et s’il en est capable. Ainsi, nous devenons pour lui ce que, selon l’image profondément méditée de Schopenhauer, la Mort est pour tout philosophe rigoureux et intransigeant : à savoir, Apollon Musagète, Apollon chef des Muses. Cependant, celui-ci ne nous mène pas vers l’obscur royaume des ombres, mais nous éveille un à un et nous guide vers le lumineux royaume de l’esprit vivifiant, qui attend les philosophes et les accueille chaleureusement.

Que dirai-je enfin, si la demande d’une « théorie de la Praxis philosophique » persiste, comme on peut tristement le présumer ?

Je dirai : La réponse doit être un effort vers une philosophie de la Praxis philosophique, dont les fragments ne sont rien d’autre que des essais (au sens propre du terme) formant ensemble une fugue polyphonique.

On peut également dire que les essais que je rassemble ici sont le fruit d’une récolte, puisqu’ils ne sont certainement pas tombés par hasard entre les mains de celui qui, pendant quarante ans, a labouré, semé et moissonné—ce qui a été à la fois un honneur et une contrainte. Les conditions individuelles—ou, pour être exact, uniques—que j’apporte en tant qu’être singulier ont baigné ce terrain nouvellement ouvert d’une lumière dont la teinte est entièrement marquée par ma personne. Cela exclut qu’une formation théorique puisse suffire à une pratique subordonnée ou à la création de méthodes applicatives mises à la disposition de praticiens zélés.

En même temps, les textes de ce livre constituent autant de contributions à une conversation qui dure depuis des décennies, d’abord sous la forme d’une série de colloques internationaux organisés par la Gesellschaft für Philosophische Praxis, fondée en 1982 à Bergisch Gladbach ; puis, surtout, dans le cadre toujours plus large des dix-sept congrès internationaux (jusqu’à présent) sur la Praxis philosophique.

Il était à prévoir que, dès l’instant où des universitaires se rencontrent sur la scène publique, des « tendances » émergent, voire, dans le pire des cas, des « écoles », offrant un certain refuge identitaire à ceux qui s’y abritent, même si une pensée véritablement indépendante, responsable et surtout philosophique a toujours fui ces conforts.

Cependant, il convient au moins de noter avec le sérieux approprié que la Praxis philosophique attire l’attention de cercles a priori éloignés de la philosophie, mais engagés dans la pratique et ambitieux scientifiquement.

Et c’est bien l’esprit qui franchit tous les murs.

Vienne, mai 2023


Chapter 1

Texte original en anglais

Short Answer to the Question: What Is Philosophical Praxis?

One must make something new to see anything new.

—Lichtenberg1

I started the world’s first Philosophical Praxis in 1981,2 and coined the term that same year.3 In 1982 the Society for Philosophical Praxis was instituted in Bergisch Gladbach near Cologne; later it became the international umbrella organization for numerous national societies. So much for the institutional part. Now for the question: What, in short, is Philosophical Praxis?

The philosophical life-counseling that takes place in Philosophical Praxis establishes itself as an alternative to psychotherapies. It is an adaptation for those who, tormented by their sorrows or problems, and unable to ‘come to terms’ with their lives, find themselves somehow ‘stuck.’ Philosophical Praxis is for people beset by life-questions that they can neither solve nor get rid of, or for those who are able to prove themselves equal to everyday life, but nevertheless feel ‘under-burdened,’ perhaps because they suspect that their reality does not correspond to their potential. Others turn to Philosophical Praxis when they are not satisfied merely to exist or muddle through, but demand instead to examine their life, to see clearly its contours, its whence and why and whither-to.

Their need is often simply to reflect on the unique circumstances, the peculiar entanglements, and the often oddly ambiguous course of our lives. Briefly put, people seek out practicing philosophers because they want to understand and to be understood. They almost never arrive with the Kantian question “What ought I do?”4 but rather with the question of Montaigne, which runs: “What am I doing?”5 Perhaps in the background, operative as an insight, lurks that most ancient philosophical wisdom—namely the maxim of Socrates, that only the examined life is worth living. It may make its presence felt as a shadowy fear that a life so ‘lifeless’ is hardly even lived at all, and instead somehow ‘wasted,’ ‘forfeit,’ ‘squandered’—a life about to undo itself. Schopenhauer:

Most people, when they look back at the end, find that they have lived their whole life through provisionally, and are amazed to see that what they allowed to pass by so unappreciated and unenjoyed was their very life, the very thing in whose expectation they lived. And so the course of one’s life, as a rule, is such that, made a fool of by hope, one dances into the arms of death.6

Whoever has shared this terrifying prospect may through philosophical reflection find the burden of life appear like a promise [Verheißung]; for the philosophical attitude to life is in fact—like a promise—a respectful overburdening that lends gravity to our existence, a sense to our being here, and a meaning to our present.

Usually there are distinctive occasions which bring the guest to the decision to consult the philosophical practitioner. Commonly they involve disappointments, unforeseen or at least unexpected experiences, clashes with other people, strokes of fate, the experiences of failure, importunate or just plain blah life-outcomes. In such circumstances, one assumes (however unclearly) the task of Philosophical Praxis, as outlined by Sir Karl Popper before the practice even existed:

We all have our philosophies, whether or not we are aware of this fact, and our philosophies are not worth very much. But the impact of our philosophies upon our actions and our lives is often devastating. This makes it necessary to try to improve our philosophies by criticism. This is the only apology for the continued existence of philosophy which I am able to offer.7

If we are to be concise here, we must ask: in what way do practicing philosophers help their visitors along? The usual way to frame the question is con- fusing: ‘what method do practical philosophers follow?’ To speak correctly, philosophy works not with, but at best upon methods. Obedience to method is the pride of the sciences, not the point of philosophy. Philosophical thinking does not move along ready-made paths; it looks anew in each case for the ‘right way.’ Rather than deploy well-worn thought-routines, it sabotages them to clarify itself.

It is not a matter of leading guests of Philosophical Praxis on a philosophically predetermined course, but rather of helping them along their own way. Incidentally, this presupposes on the part of the philosopher the ability to appreciate others without necessarily agreeing with them; indeed, as Goethe said, in a way that “neither approves nor censures.”8

Philosophy cannot simply be ‘applied,’ as if the concerns brought by the guest could be ‘treated’ with a dose of Plato, or Hegel or whomever else. Philosophical readings are not remedies to be prescribed. Does the patient go to the doctor to take in a medical lecture? Nor should the visitor to Philosophical Praxis be taught by the philosopher, still less deceived by clever words, and certainly not served up with theories. The question is whether the philosopher, through their own reading, has become wise and understanding and attentive, whether they have acquired in this way a sensitivity for the otherwise well-overlooked, and learned to become at home in wayward and offbeat thinking, feeling, and judgment. For only as co-thinker and sympathizer can one liberate visitors from their loneliness—or forlornness—and thus perhaps to move them to other appraisals of life and its circumstances.

Isn’t it the same for psychologists and psychotherapists? For the pastor, too? The question inevitably arises—a sign of our yet blooming therapeutic culture—as to the boundary between Philosophical Praxis and psychotherapies. The psychologist and psychotherapist are specialists, specially trained to perceive the specific in a special way, specifically psychogenic or psycho- logically conditioned disorders. Where they are not specialists, they are dilettantes. Paradoxically, the philosopher is a specialist in the non-special, both the general and the plain (as well as in the rich tradition of reasoned thought), but also in the contradictory and the deviant, with particular emphasis on the individual and the unique.

In this way, the philosopher in practice takes visitors seriously: not in the grips of any theory (that is, not through schematic understanding) and not as a mere ‘instance of a rule,’ but as this very one. No value scale is held over above the visitor, not even that of health. The question is whether visitors are living up to themselves or, to paraphrase Nietzsche’s famous words, whether they have become who they are.

It should be added that Philosophical Praxis by no means only takes the form of individualized consultations. It also supports companies, organizations and associations in their attempts to find their mission, sound principles and orienting guidelines.

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NOTES

1 Georg Christoph Lichtenberg, Sudelbücher, Heft J, 1756–1770, No. 1770. Picard Translation.

2 See Odo Marquard, “Praxis, Philosophische.” In the Historischen Wörterbuch der Philosophie, ed. Joachim Ritter et al., Vol. VII (Basel, 1989), 1307f.

3 This chapter was previously translated by Dr. Patrick Neubauer. That translation was consulted but little used and not relied upon.

4 “1) What can I know? 2) What should I do? And 3) What may I hope?” Imman- uel Kant, The Critique of Pure Reason. Trans. by Paul Guyer and Allen W. Wood. (CUP, 1998), A805/B833.

5 What Achenbach calls “the question of Montaigne” is not the question “Que sçais-je?” or, “What do I know?” that Montaigne took “as a motto, inscribed over a pair of scales” (Apology for Raymond Sebond, in The Complete Essays of Mon- taigne, Donald Frame translation [Standford University Press, 1958], 392–393), and which is often called ‘the question of Montaigne.’ That question, as Montaigne tells us, expresses his dalliance with “the Pyrrhonian philosophers.” But the ques- tion Achenbach considers to be far more characteristic of Montaigne than even his motto arises often enough in the Essays, and is decidedly less epistemic; it asks after self-understanding in action: ‘What am I actually doing?’ (“Was tue ich eigentlich?”). Montaigne: “I do not make it my business to tell the world what it should do—enough others do that—but what I do in it.” Essays, I, 142. Look also to “On some verses of Virgil,” Essays, III for illustration: “My philosophy is in action, in natural and present practice, little in fancy” (639–640); or “I am hungry to make myself known, and I care not to how many, provided it be truly” (643); and “I owe a complete portrait of myself to the public. The wisdom of my lesson is wholly in truth, in freedom, in real- ity; disdaining, in the list of its real duties, those petty, feigned, customary, provincial rules, altogether natural, constant, and universal; of which propriety and ceremony are daughters, but bastard daughters” (677).

6 Arthur Schopenhauer, On the doctrine of the nothingness of existence, §145. In Parerga and Paralipomena: Short Philosophical Essays, 2. Trans. by Adrian Del Caro and Christopher Janaway (CUP: 2014), 304.

7 Karl Popper, Objective Knowledge: An evolutionary Approach (Clarendon, 1972), 33. The passage, Popper’s “excuse” for doing philosophy, is preserved in the Revised edition of 1979, reprinted 1994. Achenbach cites the German translation, Objektive Erkenntnis. Ein evolutionärer Entwurf (Hamburg: Hoffmann Und Campe Verlag, 1973), 44.

8 Achenbach Note: With regard to his novel, Die Leiden des jungen Werther, which some of his contemporaries had expected to display a “didactic purpose,” Goethe notes: “the true work of art has none. It neither approves nor censures, but instead develops sentiments and actions in sequence, and thereby illuminates and instructs.” Goethe, From My Life: Poetry and Truth, Part 3. Vol. 4 of Goethe: Col- lected Works (Princeton, NJ: Princeton University Press, 1994), 433. Thus does Goethe describe what is also the mission of Philosophical Praxis.

Traduction de l’anglais au français avec ChatGPT

Chapitre 1

Réponse brève à la question : qu’est-ce que la Praxis philosophique ?

Il faut créer du nouveau pour voir du nouveau.
— Lichtenberg

J’ai fondé la première Praxis philosophique au monde en 1981, et j’ai forgé ce terme la même année. En 1982, la Société pour la Praxis philosophique fut instituée à Bergisch Gladbach, près de Cologne ; elle devint plus tard l’organisation faîtière internationale de nombreuses sociétés nationales. Voilà pour l’aspect institutionnel. Passons maintenant à la question : en bref, qu’est-ce que la Praxis philosophique ?

Le conseil philosophique de vie qui se pratique dans la Praxis philosophique se présente comme une alternative aux psychothérapies. Il s’adresse à ceux qui, tourmentés par leurs peines ou leurs problèmes, et incapables de « s’accommoder » de leur existence, se retrouvent d’une manière ou d’une autre dans une impasse. La Praxis philosophique concerne ceux qui se débattent avec des questions existentielles qu’ils ne parviennent ni à résoudre ni à écarter, ou encore ceux qui, bien que capables de faire face au quotidien, se sentent « sous-chargés », peut-être parce qu’ils pressentent que leur réalité ne correspond pas à leur potentiel. D’autres encore s’adressent à la Praxis philosophique non pas parce qu’ils se satisfont simplement d’exister ou de se débrouiller tant bien que mal, mais parce qu’ils exigent d’examiner leur vie, d’en voir clairement les contours, l’origine, la raison d’être et la destination.

Leur besoin est souvent simplement de réfléchir aux circonstances uniques, aux enchevêtrements singuliers et au cours souvent étrangement ambigu de nos existences. En résumé, les gens consultent les philosophes praticiens parce qu’ils veulent comprendre et être compris. Ils n’arrivent presque jamais avec la question kantienne : « Que dois-je faire ? », mais plutôt avec celle de Montaigne : « Que fais-je ? » Peut-être, en arrière-plan, opère une intuition qui relève de la plus ancienne sagesse philosophique—à savoir la maxime socratique selon laquelle seule une vie examinée mérite d’être vécue. Celle-ci peut se manifester sous la forme d’une peur diffuse, celle qu’une vie trop « inerte » ne soit en réalité qu’à peine vécue, qu’elle soit en quelque sorte « gaspillée », « abandonnée », « dilapidée »—une vie en train de se défaire elle-même.

Schopenhauer l’exprime ainsi :

La plupart des hommes, lorsqu’ils regardent en arrière à la fin de leur vie, réalisent qu’ils l’ont vécue entièrement à titre provisoire et s’étonnent de voir que ce qu’ils ont laissé passer sans l’apprécier ni en jouir, c’était précisément leur propre existence, cette chose même dont ils avaient toujours attendu l’avènement. Ainsi, en règle générale, le cours de la vie est tel que, dupé par l’espoir, on danse dans les bras de la mort.

Quiconque a éprouvé cette perspective terrifiante peut, par la réflexion philosophique, voir le poids de la vie se transformer en promesse (Verheißung), car l’attitude philosophique envers l’existence est en effet — comme une promesse — une charge respectueuse qui confère à notre existence une gravité, un sens à notre présence ici-bas et une signification à notre présent.

Il y a souvent des circonstances marquantes qui amènent l’invité à prendre la décision de consulter un praticien-philosophe. Ce sont généralement des déceptions, des expériences inattendues, des conflits avec autrui, des coups du sort, des échecs, des désillusions ou encore des résultats de vie qui laissent un sentiment de vide. Dans de telles situations, on suppose — bien que confusément — que la mission de la Praxis philosophique pourrait être celle qu’évoquait Karl Popper avant même que cette pratique n’existe :

Nous avons tous une philosophie, que nous en soyons conscients ou non, et nos philosophies ne valent souvent pas grand-chose. Mais l’impact de nos philosophies sur nos actions et sur nos vies est souvent dévastateur. C’est pourquoi il est nécessaire d’essayer d’améliorer nos philosophies par la critique. Voilà la seule justification que je puisse offrir à l’existence continue de la philosophie.

Si nous voulons être concis ici, nous devons poser la question suivante : comment les philosophes praticiens aident-ils leurs visiteurs ? La façon habituelle de poser cette question est source de confusion : « Quelle méthode suivent les philosophes praticiens ? » Or, il faut parler avec justesse : la philosophie ne travaille pas avec des méthodes, mais tout au plus sur elles. L’obéissance à une méthode est l’apanage des sciences, non de la philosophie. La pensée philosophique ne suit pas des chemins tout tracés ; elle cherche, à chaque fois, la voie juste. Plutôt que de s’appuyer sur des routines intellectuelles toutes faites, elle les sabote pour mieux se clarifier.

Il ne s’agit donc pas de conduire les invités de la Praxis philosophique sur un itinéraire philosophique prédéterminé, mais bien de les aider à avancer sur leur propre chemin. Cela suppose chez le philosophe la capacité d’apprécier autrui sans nécessairement être d’accord avec lui ; en effet, comme le disait Goethe, « ni n’approuver ni condamner ».

La philosophie ne peut être simplement « appliquée », comme si les préoccupations de l’invité pouvaient être « traitées » par une dose de Platon, de Hegel ou de tout autre penseur. Les lectures philosophiques ne sont pas des remèdes à prescrire. Un patient va-t-il voir un médecin pour assister à une conférence médicale ? De même, l’invité de la Praxis philosophique ne doit pas être instruit par le philosophe, encore moins être trompé par des jeux de mots habiles, et certainement pas être servi en théories.

La véritable question est de savoir si le philosophe, à travers ses propres lectures, est devenu sage, compréhensif et attentif, s’il a acquis une sensibilité pour ce qui est habituellement ignoré, et s’il a appris à se sentir chez lui dans les pensées, sentiments et jugements atypiques ou marginaux. Car seul un co-penseur et un sympathisant peut libérer les visiteurs de leur solitude — ou de leur isolement intérieur — et peut-être ainsi les amener à une nouvelle appréciation de leur vie et de leur situation.

Philosophie et psychothérapie : une frontière ?

N’est-ce pas le cas aussi des psychologues et des psychothérapeutes ? Et des pasteurs ? Cette question surgit inévitablement — signe de notre culture encore largement dominée par le paradigme thérapeutique — et interroge la frontière entre la Praxis philosophique et les psychothérapies.

Le psychologue et le psychothérapeute sont des spécialistes, spécialement formés à percevoir le spécifique d’une manière spécialisée, c’est-à-dire les troubles d’origine psychogène ou psychologique. Lorsqu’ils ne sont pas spécialistes, ils sont des dilettantes. Paradoxalement, le philosophe est un spécialiste du non-spécifique, du général et du simple (ainsi que d’une tradition riche de pensée raisonnée), mais aussi du contradictoire et du singulier, avec une attention particulière portée à l’individuel et à l’unique.

En ce sens, le philosophe praticien prend ses visiteurs au sérieux : non pas à travers le prisme d’une théorie (c’est-à-dire non pas par une compréhension schématique), ni comme un simple « cas » illustratif d’une règle, mais en tant qu’individu en soi. Aucune échelle de valeur ne lui est imposée, pas même celle de la santé. La question n’est pas de savoir si l’invité est « normal », mais s’il est fidèle à lui-même—ou, pour paraphraser Nietzsche, s’il est devenu ce qu’il est.

Enfin, la Praxis philosophique ne se limite pas aux consultations individuelles. Elle accompagne également des entreprises, des organisations et des associations dans leur quête de mission, de principes fondateurs et de repères orientants.


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About the Author and Translator

AUTHOR

Dr. Gerd B. Achenbach was born 1947 in Hameln, Germany, and is the founder of the Philosophical Praxis as well as the founder and chairman of the first Society of Philosophical Praxis (GPP e.V., 1982). He is author of several books (Die reine und die praktische Philosophie, Das Prinzip Heilung, Vom Richtigen im Falschen, Lebenskönnerschaft, Liebe—der göttliche Wahn, Das kleine Buch der inneren Ruhe, Philosophie der Philosophischen Praxis), taught at numerous universities, and has been a keynote speaker on various international congresses.

Traduction en français avec DeepL

Gerd B. Achenbach est né en 1947 à Hameln, en Allemagne. Il est le fondateur de la Praxis philosophique ainsi que le fondateur et le président de la première société de Praxis philosophique (GPP e.V., 1982). Il est l’auteur de plusieurs ouvrages (Die reine und die praktische Philosophie, Das Prinzip Heilung, Vom Richtigen im Falschen, Lebenskönnerschaft, Liebe-der göttliche Wahn, Das kleine Buch der inneren Ruhe, Philosophie der Philosophischen Praxis), a enseigné dans de nombreuses universités et a été l’orateur principal de divers congrès internationaux.

TRANSLATOR

Michael Picard teaches philosophy at Douglas College in Vancouver, Canada. He holds an MSc and PhD in philosophy from Massachusetts Institute of Technology and is a longtime animator of public participatory philosophy, as well as creator of the web app and game Tug of Logic. Picard is author of This Is Not a Book (2007) and How to Play Philosophy (2022).

Traduction en français avec DeepL

Michael Picard enseigne la philosophie au Douglas College de Vancouver, au Canada. Il est titulaire d’une maîtrise et d’un doctorat en philosophie du Massachusetts Institute of Technology et est un animateur de longue date de la philosophie participative publique, ainsi que le créateur de l’application web et du jeu Tug of Logic. Picard est l’auteur de This Is Not a Book (2007) et de How to Play Philosophy (2022).


About Dr. Gerd B. Achenbach

(German-to-English translation with DeepL)

Dr. Gerd B. Achenbach is the Founder of Philosophical Practice, which he established in 1981 and which has since developed into a worldwide movement.

Born in Hameln in 1947. Doctorate in 1981 [“Selbstverwirklichung oder: Die Lust und die Notwendigkeit”] with Odo Marquard.

Married to Laura Achenbach, father of eight children: Alef, Hanne, Friederike, Alma, Cara, Valentin, Anna and Otto.

1981 Founds the world’s first philosophical practice in Bergisch Gladbach/Refrath.

1982 Founding of the Gesellschaft für Philosophische Praxis GPP e.V., the later International Society for Philosophical Practice, of which he is a teaching practitioner and from its founding in 1982 onwards its Chairman of the Board, until he gave up this position in the fall of 2003 to make way for younger people.

2004: Founding of the “Gesellschaft für Philosophische Praxis” (GPP) in Bergisch Gladbach, whose board he has chaired ever since.

Since 2003: Scientific Advisory Board of the “Gesellschaft zur Erforschung und Förderung angewandten Philosophierens e.V.”.

2006-2009: Scientific Advisory Board of the German Mining Museum Bochum.

Since 2007: Scientific Advisory Board of the journal “psycho-logik” – Yearbook for Psychotherapy, Philosophy and Culture (Alber-Verlag)

Since 2015: Scientific Advisory Board of the “University Course Philosophical Practice” at the University of Vienna.

Teaches at various universities, including in Klagenfurt, Vienna and Berlin.

2018: Awarded the “Reconocimiento por la travectoria en la práctica filosófica, Ira edicion, Mexico 2018”/“Acknowlegdment for the trayectory in philosophical practice; 1st edition 15th ICPP, Mexico 2018” (translated: “In recognition of the achievement of having put philosophical practice on track” [ICPP = International Conference on Philosophical Practice].

Activities since 2005

Read this text in its original German


Web site : Dr. Gerd B. Achenbach.

Web page on Wikipedia

Web Page YouTube

Web page dedicated to the book « Philosophical Praxis, Origin, Relations, and Legacy » on the web site of Dr. Gerd B. Achenbach.

« La Société internationale pour la pratique de la philosophie a été fondée en partie par le Dr Gerd B. Achenbach en 1982 sous le nom de Société pour la pratique de la philosophie et renommée en 1998. »

In the spring of 2005, a regional Society for Philosophical Practice (chaired by Gerd B. Achenbach) was founded in Bergisch-Gladbach, abbreviated to GPP. This company is a member of the IGPP and not to be confused with the former foundation of 1982.

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By the same author

What matters? ? What is important in truth? What is crucial in the end? – Leading principles in philosophical practice.  (Lecture at the opening of the 15th International Colloquium on Philosophical Practice in Mexico on June 25, 2018.)

What is Philosophical Practice?

On Wisdom in Philosophical Pracice  Lecture for the „Third International Conference on Philosophical Practice”, New York, July 1997, published in: Inquiry: Critical Thinking Across the Disciplines, Spring, 1997. Vol. XVII, No. 3, p. 5 – 20

Philosophical Practice opens up the Trace of „Lebenskönnerschaft”  Lecture for the „ 6th International Conference on Philosophical Practice”, Oslo, 2001

Philosophical Practice – A Question of Bildung? Lecture for the „International Conference on Philosophical Practice”, Kopenhagen, 2004

On Wisdom in Philosophical Practice, Gerd B. Achenbach (Inquiry: Critical Thinking Across the Disciplines – Volume 17, Issue 3, Spring 1998, Pages 5-20)

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Book Review

Book Review of Philosophical Praxis: Origin, Relations, and Legacy, by Gerd B. Achenbach [Book Review] by Jaco Louw

Gerd B. Achenbach’s ‘Beyond-Method’ Method by Zinaich Jr, International Journal of Philosophical Practice 2 (2):52-62 (2004)

Philosophical Praxis: Origin, Relations, and Legacy by Gerd Achenbach | A Biased Fermented Book Review – fermentedphil (76) – dans Hive Book Club

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Mon rapport de lecture

Philosophical Praxis

Origin, Relations, and Legacy

Gerd B. Achenbach

Translated by Michael Picard

Lexington Books, 2024


NOTE IMPORTANTE

Les numéros de page des citations dans ce rapport de lecture sont celles de la version originale anglaise imprimée


D’entrée de jeu, Gerd D. Archenbach reconnaît à l’Amérique du Nord l’origine « des écoles de psychothérapie, de certaines inspirations et innovations essentielles qui ont été reprises plus tard en Europe et adaptées à l’ancienne manière européenne ». Il est question d’un premier mouvement intercontinental de « la « Haute Amérique » – comme j’aimerais appeler la moitié nord du continent américain – » vers l’Europe. Il note un deuxième mouvement, cette fois, de l’Europe à l’Amérique du Nord.

Il ne s’agit pas de nier que c’est à Vienne (surtout) et en Suisse que sont nées les formes originales de toutes les thérapies ultérieures – la psychanalyse de Freud, la psychologie analytique de C. G. Jung et la psychologie individuelle d’Adler. Des développements significatifs de cette triple racine se sont ensuite répandus en Amérique du Nord ; il suffit de rappeler les innombrables variantes de ce que l’on appelle la « psychologie humaniste ».

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Préface, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. xvii.

Enfin, écrit Gerd B Archenbac, « (…) il semble que ce mouvement intercontinental de va-et-vient soit en train de repartir dans l’autre sens. »

Cette fois, il s’agit du renouveau de la pratique de la philosophie, que j’ai instaurée en 1981 en Allemagne sous le nom de Praxis philosophique. Celle-ci s’est rapidement implantée dans les pays européens voisins—d’abord en Autriche et aux Pays-Bas—avant de traverser l’Atlantique pour gagner le « Nouveau Monde ». Elle y a suscité attention et reconnaissance, d’abord à Vancouver, au Canada (où s’est tenu en 1994 le premier Congrès international de pratique philosophique à l’Université de la Colombie-Britannique), puis peu après à New York, grâce à Lou Marinoff, qui publia en 1999 Plato, Not Prozac! Applying Philosophy to Everyday Problems. Grâce, en grande partie, au fait que l’anglais est aujourd’hui la lingua franca, cet essor a contribué à la diffusion mondiale de la Praxis philosophique.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Préface, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. xvii.

Il n’en demeure pas moins que les textes de Gerd B. Archenbach annonçant et explicitant ce « renouveau de la pratique de la philosophie » sont demeurés, à quelques exceptions près, dans sa langue maternelle, l’allemand. La traduction formelle en anglais ne viendra qu’en 2024. Gerd B. Archenbach écrit :

Il devient donc d’autant plus urgent de rendre disponible une sélection de textes dans cette langue qui tend désormais à s’imposer comme un idiome quasi universel—des textes qui, tout en fondant la Praxis philosophique, ont initié une renaissance des plus anciennes impulsions philosophiques. L’importance de cette dernière renaissance de la philosophie, conçue comme un art de vivre exemplaire—ainsi qu’elle était comprise dans l’Antiquité et que Pierre Hadot et Michel Foucault l’ont réactualisée—ne se limite en aucun cas à un simple retour aux aspirations originelles de la philosophie sous une forme pratique. La véritable mission de cette nouvelle configuration philosophique est plutôt de s’établir comme la première véritable alternative à la « culture thérapeutique ». Ceux qui, jusqu’ici, se seraient tournés vers la thérapie se tourneront de plus en plus vers le praticien-philosophe dans leur détresse. Ainsi, la pratique de la philosophie ouvre, pour la première fois, la possibilité de se constituer en véritable profession.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Préface, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), pp. xvii-xviii.

Dans cet citation, Gerd B. Archenbach, parlant de la praxis philosophique qu’il a initiée en 1981, précise que « L’importance de cette dernière renaissance de la philosophie, conçue comme un art de vivre exemplaire (…) ne se limite en aucun cas à un simple retour aux aspirations originelles de la philosophie sous une forme pratique. »

Il est donc question d’une « nouvelle configuration philosophique » dont la « mission » est de « s’établir comme la première véritable alternative à la “culture thérapeutique” ».

Parmi mes publications consacrées à cette renaissance philosophique, ou intellectuellement préparatoires à celle-ci, j’ai tenté de sélectionner des écrits susceptibles d’offrir aux esprits philosophiquement curieux du monde anglo-américain un aperçu de ce projet novateur. Et c’est ainsi que j’envoie aujourd’hui ces textes, accompagnés de salutations amicales, vers le continent occidental, d’où l’appel à la Praxis philosophique pourra se propager aux quatre coins du monde.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Préface, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. xvii.

Dans son « Prelude » (anglais à traduire en français par « Introduction », ce qui vient habituellement à la suite de la préface), Gerd B. Archenback dénonce vivement la quête d’une théorie de la pratique philosophique.

Avec une persistance douteuse, des voix s’élèvent ici et là pour réclamer une « théorie de la Praxis philosophique ». Et j’ai pris l’habitude d’ignorer ces voix avec une persistance tout aussi résolue. Que devrions-nous leur répondre, si des personnes préformées—nota bene : leur préformation est leur problème—si des personnes formées scientifiquement estiment qu’elles ne peuvent savoir ce qu’est la Praxis philosophique tant qu’elles ne disposent pas d’une « théorie » à son sujet ? Ces malheureux amis de la théorie ressemblent à ceux qui, se trouvant dans un paysage des plus magnifiques, regardent autour d’eux et déclarent ne rien voir parce qu’ils ne possèdent aucune carte du lieu.

Peut-être vaut-il mieux encore interpréter une telle persistance comme le signe de la domination contemporaine de l’algorithme sur nos esprits, si tant est que son règne n’y soit pas déjà établi. Selon cette logique, on ne « comprend » qu’en connaissant le schéma selon lequel les processus s’exécutent. Nous ne saurions trouver meilleure analogie que celle de l’ingénierie des processus.

(…)

Non—dans le domaine de la philosophie, c’est l’inverse qui a toujours prévalu : le philosophe pense et, en même temps, réfléchit à sa pensée et même, dans sa pensée, à la possibilité même de penser. Ainsi, non seulement il n’a nul besoin de l’ornière qui maintient l’homme obsédé par la théorie sur son chemin prédéterminé, mais, bien au contraire, un tel carcan serait pour lui un joug, une entrave qui le lierait tête et membres. N’hésitons pas à rappeler l’une des idées directrices de la tradition philosophique : tandis que d’autres se croient en sécurité, attachés à la laisse d’une théorie choisie, le philosophe souffre de la perte de cette liberté, sans laquelle la pensée se réduit à une simple conformité jusqu’à dégénérer en routine stérile, puis s’éteindre.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Prelude, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. xxi.

Personnellement, j’ai observé chez certains philosophes praticiens une approche fondée sur différentes théories dont la mise en pratique témoigne de cette perte de liberté relevée par Gerd B. Archesbach : « (…)  tandis que d’autres se croient en sécurité, attachés à la laisse d’une théorie choisie, le philosophe souffre de la perte de cette liberté, sans laquelle la pensée se réduit à une simple conformité jusqu’à dégénérer en routine stérile, puis s’éteindre ».

Afin de prévenir tout malentendu répandu : la responsabilité du philosophe ne réside pas uniquement, et peut-être même pas principalement, dans ce qu’il « pense », mais dans sa capacité à repenser, à devenir réfléchi, ou — pour reprendre d’anciens termes devenus rares— à faire preuve de jugement. Sous cette exigence, il secourt, chaque fois que possible, les pensées ensevelies sous les décombres, et rouvre de nouvelles sources de pensée taries, afin qu’elles recommencent à couler.

Mieux encore : pris dans son acception la plus large, un tel penser n’est pas un parc naturel délimité dans lequel le philosophe se laisserait enfermer. Au contraire, il ressent ; il perçoit ; il observe ; il détecte ; il soupçonne ; il anticipe ; il se méfie et il croit ; il craint, tremble et espère ; il se souvient de l’oublié ; attire l’attention sur ce qui a été négligé ; insiste là où d’autres « sont déjà plus loin » ; perturbe les questions dont les réponses sont déjà établies ; garde son calme quand les armées marchent ; fait du bruit là où d’autres détournent le regard — en somme : il vit, et il ne lui échappe ni le fait qu’il vit, ni la manière dont il vit. Voilà son socle, c’est là qu’il puise son expérience. Mais je m’arrêterai ici, bien que cette liste puisse manifestement être poursuivie ad libitum.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Prelude, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. xxii.

Bref, à l’instar du philosophe, le philosophe praticien se doit de chérir sa liberté, de ne pas se laisser formaté par une quelconque théorie ou, pis encore, une méthodologie donnée.

J’insiste : « (…) la responsabilité du philosophe ne réside pas uniquement, et peut-être même pas principalement, dans ce qu’il “pense” ». On ne consulte donc pas un philosophe praticien pour savoir ce qu’il pense.

À la question en titre du premier chapitre de son recueil de textes, Réponse brève à la question : qu’est-ce que la Praxis philosophique, Gerd B. Archenbach écrit :

Le conseil philosophique de vie qui se pratique dans la Praxis philosophique se présente comme une alternative aux psychothérapies. Il s’adresse à ceux qui, tourmentés par leurs peines ou leurs problèmes, et incapables de « s’accommoder » de leur existence, se retrouvent d’une manière ou d’une autre dans une impasse. La Praxis philosophique concerne ceux qui se débattent avec des questions existentielles qu’ils ne parviennent ni à résoudre ni à écarter, ou encore ceux qui, bien que capables de faire face au quotidien, se sentent « sous-chargés », peut-être parce qu’ils pressentent que leur réalité ne correspond pas à leur potentiel. D’autres encore s’adressent à la Praxis philosophique non pas parce qu’ils se satisfont simplement d’exister ou de se débrouiller tant bien que mal, mais parce qu’ils exigent d’examiner leur vie, d’en voir clairement les contours, l’origine, la raison d’être et la destination.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 1 – Réponse brève à la question : qu’est-ce que la Praxis philosophique, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 1.

Depuis, la création de cette Observatoire de la philothérapie en 2020, j’ai souvent remarqué la crainte quasi-systématique de certains philosophes praticiens à confronter la philothérapie à la psychychothérapie. Gerd B. Archenbach est pourtant très clair à ce sujet : « Le conseil philosophique de vie qui se pratique dans la Praxis philosophique se présente comme une alternative aux psychothérapies ». Le livre de Lou Marinoff, avec lequel j’ai découvert la pratique philosophique à l’aube des années 2000, est tout aussi clair et sans équivoque face à la psychologie : « Platon, pas Prozac! ».

Il décrit le besoin des personnes en consultation philosophique en ces termes :

Leur besoin est souvent simplement de réfléchir aux circonstances uniques, aux enchevêtrements singuliers et au cours souvent étrangement ambigu de nos existences. En résumé, les gens consultent les philosophes praticiens parce qu’ils veulent comprendre et être compris. Ils n’arrivent presque jamais avec la question kantienne : « Que dois-je faire ? », mais plutôt avec celle de Montaigne : « Que fais-je ? » Peut-être, en arrière-plan, opère une intuition qui relève de la plus ancienne sagesse philosophique—à savoir la maxime socratique selon laquelle seule une vie examinée mérite d’être vécue. Celle-ci peut se manifester sous la forme d’une peur diffuse, celle qu’une vie trop « inerte » ne soit en réalité qu’à peine vécue, qu’elle soit en quelque sorte « gaspillée », « abandonnée », « dilapidée »—une vie en train de se défaire elle-même.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 1 – Réponse brève à la question : qu’est-ce que la Praxis philosophique, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), pp. 1-2.

J’insiste aussi sur ce point : « En résumé, les gens consultent les philosophes praticiens parce qu’ils veulent comprendre et être compris ».

À la question « Pourquoi consulte-t-on un philosophe praticien ? » Gerd B. Archenbach donne cette réponse.

Il y a souvent des circonstances marquantes qui amènent l’invité à prendre la décision de consulter un praticien-philosophe. Ce sont généralement des déceptions, des expériences inattendues, des conflits avec autrui, des coups du sort, des échecs, des désillusions ou encore des résultats de vie qui laissent un sentiment de vide. Dans de telles situations, on suppose — bien que confusément — que la mission de la Praxis philosophique pourrait être celle qu’évoquait Karl Popper avant même que cette pratique n’existe :

Nous avons tous une philosophie, que nous en soyons conscients ou non, et nos philosophies ne valent souvent pas grand-chose. Mais l’impact de nos philosophies sur nos actions et sur nos vies est souvent dévastateur. C’est pourquoi il est nécessaire d’essayer d’améliorer nos philosophies par la critique. Voilà la seule justification que je puisse offrir à l’existence continue de la philosophie.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 1 – Réponse brève à la question : qu’est-ce que la Praxis philosophique, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 2.

La personnes en consultation philosophique a déjà une philosophie, qu’elle en soit ou non consciente, il ne s’agit donc pas de la nier mais d’en dresser les contours pour la soumettre à une critique constructive. Vouloir lui imposer une autre philosophie ne contitue pas une démarche souhaitable. Aucune méthode n’est de mise :

Si nous voulons être concis ici, nous devons poser la question suivante : comment les philosophes praticiens aident-ils leurs visiteurs ? La façon habituelle de poser cette question est source de confusion : « Quelle méthode suivent les philosophes praticiens ? » Or, il faut parler avec justesse : la philosophie ne travaille pas avec des méthodes, mais tout au plus sur elles. L’obéissance à une méthode est l’apanage des sciences, non de la philosophie. La pensée philosophique ne suit pas des chemins tout tracés ; elle cherche, à chaque fois, la voie juste. Plutôt que de s’appuyer sur des routines intellectuelles toutes faites, elle les sabote pour mieux se clarifier.

Il ne s’agit donc pas de conduire les invités de la Praxis philosophique sur un itinéraire philosophique prédéterminé, mais bien de les aider à avancer sur leur propre chemin. Cela suppose chez le philosophe la capacité d’apprécier autrui sans nécessairement être d’accord avec lui ; en effet, comme le disait Goethe, « ni n’approuver ni condamner ».

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 1 – Réponse brève à la question : qu’est-ce que la Praxis philosophique, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), pp. 2-3.

Il faut donc au philosophe praticien « la capacité d’apprécier autrui sans nécessairement être d’accord avec lui ; en effet, comme le disait Goethe, « ni n’approuver ni condamner ». Bref, éviter de juger ! Cette capacité d’apprécier autrui repose, à mon humble avis, sur l’amour de son prochain et l’empathie.

La philosophie ne peut être simplement « appliquée », comme si les préoccupations de l’invité pouvaient être « traitées » par une dose de Platon, de Hegel ou de tout autre penseur. Les lectures philosophiques ne sont pas des remèdes à prescrire. Un patient va-t-il voir un médecin pour assister à une conférence médicale ? De même, l’invité de la Praxis philosophique ne doit pas être instruit par le philosophe, encore moins être trompé par des jeux de mots habiles, et certainement pas être servi en théories.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 1 – Réponse brève à la question : qu’est-ce que la Praxis philosophique, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 3.

Ce passage du livre PHILOSOPHICAL PRAXIS de Gerd B. Archenbach est l’un des plus importants de son recueil de textes. La consultation philosophique ne consiste pas en un cours de philosophie, pas qu’en en exercice visant à prendre en défaut de contradiction ou de logique l’invité.

La véritable question est de savoir si le philosophe, à travers ses propres lectures, est devenu sage, compréhensif et attentif, s’il a acquis une sensibilité pour ce qui est habituellement ignoré, et s’il a appris à se sentir chez lui dans les pensées, sentiments et jugements atypiques ou marginaux. Car seul un co-penseur et un sympathisant peut libérer les visiteurs de leur solitude—ou de leur isolement intérieur—et peut-être ainsi les amener à une nouvelle appréciation de leur vie et de leur situation.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 1 – Réponse brève à la question : qu’est-ce que la Praxis philosophique, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 3.

Wow ! Nous sommes loin, très loin, à l’opposé de la majorité des propos de la littérature francophone européenne au sujet de la philosophie pratique. En témoigne ces extraits de l’article « J’ai testé une consultation de philosophie » de Psychologie Magazine :


J’ai testé une consultation de philosophie

La consultation philosophique est l’occasion d’une mise à l’épreuve de vos idées reçues. Le manque d’écoute, l’incapacité à dérouler lentement le fil d’une réflexion cohérente, le malaise face aux questions que vous posez indiquent que vous avez frappé à la mauvaise porte.

(…)

Il existe très peu de véritables consultants en philosophie ; en revanche, certains animateurs de cafés philo reçoivent en « cabinet ». L’un d’eux m’a reçue gentiment. Après avoir pris quelques notes sur ce qui m’a conduit à le consulter, son verdict est tombé : « Dans votre cas, je préconise Epictète et Spinoza ! » Le temps d’un bref topo sur leur pensée, il m’a abreuvée d’exemples pour tenter d’éclaircir mon problème. J’ai eu l’impression d’assister à un cours de philo du lycée, en plus brouillon. A la fin, j’ai eu droit à quelques devoirs : « Prendre cinq maximes du “Manuel” d’Epictète, les reformuler avec vos mots. Justifier tout, puis contredire tout. » Cinquante euros pour cela me paraît excessif… N’est pas « philosophe libéral » qui veut.

Source : Benhamou, Olivia, J’ai testé une consultation de philosophie, Psychologie Magazine, 30 juillet 2009.


Ou encore cet extrait de l’article « La consultation philosophique, une alternative au rendez-vous chez le psy ? » de Madame Figaro :


(…) Pour le philosophe Oscar Brenifier, elle (consultation philosophique) s’adresse aux personnes qui ont accès à la « rationalité ».  » Il y a des gens que je renvoie vers une thérapie au bout de dix minutes, car il y a trop de douleur. Il y a aussi ceux qui veulent se raconter, or ce n’est pas le principe de la consultation philosophique « , explique-t-il, en précisant qu’il ne  » soigne pas une pathologie « , contrairement aux médecins.  » Quand vous vous demandez quel est le sens de votre vie, vous n’êtes pas malade « , tempête-t-il.

Source : Chadenat, Tatiana, La consultation philosophique, une alternative au rendez-vous chez le psy ? Madame Figaro, 3 juillet 2015.


Quand Oscar Brenifier affirme « Il y a aussi ceux qui veulent se raconter, or ce n’est pas le principe de la consultation philosophique », il se prive de la contextualisation de la question ou de la situation à laquelle son client veut trouver une réponse.

Un tel philosophe praticien se prive aussi de la prise recul que permet très souvent le simple fait de s’entendre mettre des mots sur nos idées en cours de verbalisation. Les uns entendent pour la toute première fois l’expression de leurs idées sur leur question ou sur leur situation dans leur propre langage. Les autres s’apperçoivent que leurs idées ne tiennent pas la route lorsqu’ils s’écoutent parler. L’écoute revet une importance capitale dans une consultation philosophique.

Dans le deuxième chapitre, La praxis philosophique a une longue tradition, mais pas de parangon, Gerd B. Archenbach situe la pratique philosophique dans notre présent plutôt que dans le passé de sa tradition.

Bien entendu, ici comme ailleurs, ce n’est pas le passé qui nous enseigne le présent, mais plutôt le présent qui nous éclaire sur le passé — de même que la galerie des ancêtres de la praxis philosophique ne nous montre pas le chemin, mais (bien au contraire) la praxis philosophique s’étend en arrière et, avec de nouveaux et d’autres intérêts, ravive les perspectives de la préhistoire philosophique. (…)

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 2 – La praxis philosophique a une longue tradition, mais pas de parangon, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 6.

Nous avons « de nouveaux et d’autres intérêts ». Ce n’est pas le passé qui éclaire le présente mais le présent qui éclaire le passé. Reconnaître l’apport historique de la tradition va de soi mais s’y ancrer en mimant l’apport des philosophes du passé sera une erreur… méthodologique.

Et pourtant, après avoir été libérée de la stricte adhésion au monopole chrétien sur le salut, une philosophie a émergé, précurseur de la praxis philosophique. Je fais ici référence à l’intelligence sceptique de Montaigne et à son raffinement de vie auto-réflexif. Ici, la philosophie est entièrement réinstallée : au lieu d’aller de l’avant comme une sorte de commandant sur le chemin de notre vie (nous ordonnant le bon chemin en aboyant toutes sortes d’ordres, de règles et de devoirs incontournables, avec comme point d’arrivée rien de moins que la perfection), la philosophie, pour Montaigne, suit plutôt derrière, généralement tranquillement et sans se faire remarquer. Il est rare que l’homme la recherche, et encore, uniquement pour essayer de clarifier la vie avec son aide. « Mes mœurs sont naturelles » 14, écrit Montaigne dans l’« Apologie de Raymond Sebond » :

Je n’ai fait appel à aucune discipline pour les ériger; mais, si faibles qu’elles soient, quand il m’est venu à l’esprit de les exposer à la vue du monde, et que pour les exposer à la lumière dans un habit un peu plus décent, je suis allé les orner de raisons et d’exemples, j’ai été étonné par hasard de les trouver conformes à tant de discours et d’exemples philosophiques. Je n’ai jamais su quel était le régime de ma vie jusqu’à ce qu’elle soit presque usée et dépensée; une nouvelle figure — un philosophe non prémédité et accidentel.15

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 2 – La praxis philosophique a une longue tradition, mais pas de parangon, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), pp. 8-9.

Ce passage entre parenthèses nous en dit très long : « (nous ordonnant le bon chemin en aboyant toutes sortes d’ordres, de règles et de devoirs incontournables, avec comme point d’arrivée rien de moins que la perfection) ». La philosophie n’est pas là pour nous ordonner comment vivre, nous imposer des règles à respecter et des devoirs à accomplir et encore de nous dicter un objectif de perfection. La liberté de l’invité (du client) importe tout autant que celle du philosophe praticien. Le philosophe praticien doit faire preuve de sagesse et, à ce titre, il est un seul accomplissement, être un sage responsable de sa liberté. Il se doit de donner l’exemple.

« La galerie des ancêtres de la praxis philosophique n’est aujourd’hui ni complète ni fermée » sur l’Antiquité et « (…) depuis au moins le début de l’époque moderne, les pionniers et les prédécesseurs de la praxis philosophique sont nombreux et peuvent être nommés. » « Et ils sont intéressants précisément parce qu’ils constatent que les calculs de leur vie ne fonctionnent plus rondement et sans reste, de sorte qu’ils sont devenus gênés même pour donner des conseils. »

Il faut citer Karl Philipp Moritz, le jeune ami de Goethe, qui a publié de 1783 à 1793 le « Magazin zur Erfahrungsseelenkunde » sous le titre Gnothi Sauton (ΓΝΩΘΙ ΣΑΥΤΟΝ) — encore aujourd’hui un trésor d’observations pour le praticien de la philosophie. Vient ensuite, de Copenhague, le Danois Søren Kierkegaard qui, dans son livre Either-Or, a romancé une longue et exemplaire consultation philosophique, menée au nom de B, magistrat du tribunal et de la ville, sur un ton tout à fait distinct de celui de la droiture grossière de la bourgeoisie ou de la complaisance spirituelle du personnel clérical au sol, mais avec une « Liberté du Chrétien “24 jusqu’alors inouïe contre toutes les ordonnances supérieures, sous la devise ”la seule chose salutaire, c’est toujours qu’une personne par rapport à sa propre vie n’est pas son oncle, mais son père. « 25

Schopenhauer a également sa place dans ce spectacle. Malgré ses efforts pour couler une fois de plus une métaphysique globale dans un moule unique, il n’a pas seulement regardé de près, mais a réorienté le regard lui-même d’un point de vue pratique (et avec une intention sotériologique subtile), ce qui a donné lieu à des fragments d’une philosophie populaire de premier ordre.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 2 – La praxis philosophique a une longue tradition, mais pas de parangon, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 10.

Les références à Arthur Schopenhauer se multiplient sous la plume de Gerd B. Archenbach.

À tout le moins, nous devons à Schopenhauer le fait que la philosophie n’ait pas été complètement oubliée en dehors des cercles académiques — à lui et à Nietzsche, qui, malgré tous les doutes soulevés par son large impact, a été une véritable tempête de feu (qui fait toujours rage, comme nous le voyons encore aujourd’hui), et pas seulement de la cendre savante.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 2 – La praxis philosophique a une longue tradition, mais pas de parangon, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 10.

De son analyse de la tradition et son influence, Gerd B. Archenbach écrit :

Il faut donc admettre que les idées aussi sont mortelles. Et si un projet de vie philosophique, arraché à son contexte temporel, s’efforçait de se revêtir du pathos de la validité éternelle, il serait instantanément déshonoré.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 2 – La praxis philosophique a une longue tradition, mais pas de parangon, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 11.

Permettez-moi de revenir sur l’importance de l’écoute par le sage.

(…) Il faut veiller à ce que la vie, qui se comprend en parlant et en s’exprimant, même si c’est de façon provisoire et ténue, ne se laisse pas contaminer par le silence mou, le désintérêt arrogant des intellectuels distants ou l’ignorance apparemment supérieure, qui se la joue cool, comme si tout était dans le rétroviseur.

C’est là que résident les dangers auxquels les personnes prétendument expérimentées succombent trop facilement. La philosophie, qui s’oppose à cette posture critique, n’abandonne pas le questionnement, même lorsque les réponses ne viennent pas. Mais la philosophie ne « cherche » pas non plus sans raison des réponses qu’elle n’espère secrètement plus trouver, comme l’affirme un autre cliché; elle s’attache plutôt à la question, afin de la révolutionner si possible. Elle dédaigne de servir les besoins tels qu’ils se présentent, mais s’efforce plutôt de différencier les besoins eux-mêmes — dans le vieux vocabulaire — pour les « cultiver ».

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 2 – La praxis philosophique a une longue tradition, mais pas de parangon, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 14.

Gerd B. Archenbach propose une autre question en fin de chapitre :

Enfin, la Praxis philosophique soulève une nouvelle question philosophique : ne serait-il pas possible, voire nécessaire, que la philosophie ravive sa communauté séculaire d’intérêt et d’action avec la médecine ? En ce qui concerne cette question, j’ai l’impression qu’elle est plus souvent abordée par des médecins qui ont reconnu la signification philosophique de leurs évaluations et de leurs interventions que par des philosophes qui comprennent comment la maladie, ou une maladie particulière, et finalement le patient individuel, représentent un défi pour la compréhension philosophico-médicale et pour la mise en pratique de la philosophie.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 2 – La praxis philosophique a une longue tradition, mais pas de parangon, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 16.

Aujourd’hui, on retrouve des philosophes en milieu hospitalier auprès des patients et du personnel. Un pas en avant.


Jérôme Bouvy, Philosophe hospitalier

Après des études en philosophie à l’UNamur et quelques années en tant qu’enseignant, Jérôme Bouvy est devenu le premier philosophe hospitalier au sein du Grand Hôpital de Charleroi. Ses missions : faire entrer la philosophie en tant que pratique vivante au cœur du quotidien de son institution et accompagner les travailleurs en quête de sens dans leur travail.

Omalius : Vous êtes philosophe hospitalier, pouvez-vous nous en dire plus sur ce métier ?
Jérôme Bouvy : Il y a trois ans, le Grand Hôpital de Charleroi a souhaité travailler sur la perte de sens à l’hôpital. De nombreuses questions agitent ce milieu depuis toujours, et cela s’est accentué plus récemment suite à la pandémie qui a notamment révélé beaucoup de souffrance éthique chez les soignants. Le rôle d’un philosophe hospitalier, face à ces nombreux questionnements, est alors d’ouvrir des espaces de réflexion au sein de l’institution. Mon travail vise donc à déployer des pratiques réflexives, en particulier dans un environnement où la recherche de sens peut être prégnante, comme c’est souvent le cas dans le domaine de la santé. Mon objectif est d’encourager les membres du personnel hospitalier à prendre le temps de penser de manière critique et à partager leurs préoccupations afin de favoriser un dialogue constructif. Une des spécificités de ma fonction est que je ne m’adresse pas directement aux patients. Je suis engagé pour travailler avec les membres du personnel, qu’ils soient soignants, informaticiens, comptables… cela représente plus de 200 métiers.

Source : Boito, Margot, Jérôme Bouvy, Philosophe hospitalier, UNamur • Université de Namur, Belgique, 29 Août 2024.


On trouve aussi une « Chaire de Philosophie à l’Hôpital ».


Chaire de Philosophie à l’Hôpital

Depuis janvier 2016, la Chaire de Philosophie à l’Hôpital se déploie, après avoir été créée à l’Hôtel-Dieu de Paris, dans différents lieux hospitaliers et de soin, et aujourd’hui au sein du GHU-Paris, Psychiatrie et Neurosciences. Cette chaire hospitalo-académique, liée à la Chaire Humanités du Conservatoire National des Arts et Métiers et dirigée par la philosophe et psychanalyste Cynthia Fleury, a pour but la diffusion des connaissances scientifiques et philosophiques à destination des étudiants, des professionnels de santé, des patients et du grand public, au travers d’activités d’enseignement, de formation, de recherche, d’expérimentation et d’organisation d’évènements. La Chaire de Philosophie à l’Hôpital fonctionne en « creative commons », en mettant à disposition ses travaux, pour mieux inventer la fonction soignante en partage et l’alliance efficiente des humanités et de la santé.

Source : Chaire de philosophie à l’Hôpital.


UN PHILOSOPHE À L’HÔPITAL

GUILLAUME DURAND

A l’hôpital se croisent des existences singulières, des histoires ordinaires et des destins parfois bouleversants. Face aux choix cruciaux que nous imposons le réel, il s’agit toujours de préserver notre liberté. Plus que du soin, on vient y trouver du sens. Faut-il s’acharner à vouloir vivre ou accepter de partir ? Peut-on supporter de voir les yeux de son fils, donneur d’organes, dans le regard d’un autre ? Aujourd’hui plus que jamais, les questions se complexifient : que répondre à cette jeune femme qui désire se faire ligaturer les trompes pour raisons écologiques ? Faut-il aider les couples abstinents sexuels à devenir parents ? Pour être au cœur de ces dilemmes, Guillaume Durand a choisi de diriger la consultation d’éthique clinique au Centre hospitalier de Saint-Nazaire. Son expérience unique nous prouve que soigner est l’un des plus forts enjeux de notre humanité.

Source : Flammarion.

P.S. : Voir aussi : Consultation philosophique avec Guillaume Durand, philosophe à l’hôpital, Radio France, 22 octobre 2021.

La philosophie peut-elle jouer un rôle dans l’accompagnement du malade ?

Par Éric Delassus

Aujourd’hui, pour aider tous ceux de nos semblables qui traversent une épreuve pénible et sont plongés soudainement dans un malheur qui peut leur paraître tout aussi absolu qu’absurde, le recours à la psychologie est devenu une pratique courante et, il est vrai, apportant le plus souvent un soutien non négligeable aux personnes ayant subi un traumatisme important ou vivant une situation dont le caractère traumatisant s’inscrit dans la durée, ce qui est le cas de celui qui est atteint d’une maladie grave, pouvant être handicapante et dont l’issue peut être incertaine voire fatale.

Cependant, si un soutien psychologique peut indéniablement aider le malade à mieux supporter sa condition et à mieux lutter contre l’affection dont il est victime, ne serait-il pas envisageable également d’apporter au patient un soutien par la philosophie ?

En effet, la souffrance morale à laquelle est confronté le malade relève-t-elle toujours d’une réelle pathologie pouvant donner lieu à une démarche psychothérapeutique ?

Alors que la psychologie aide le malade à mieux se situer et à mieux comprendre sa manière de réagir par rapport à son histoire particulière, la philosophie ne pourrait-elle pas lui permettre de mieux appréhender sa condition du point de vue de l’universel, afin de mieux affronter la question du sens d’une existence dont le caractère fragile vient soudain s’imposer en mettant le sujet, de manière souvent brutale, en face de la finitude de l’existence humaine ?

Le recours à la philosophie dans le cadre d’un soutien aux malades ne peut cependant être envisagé sans qu’auparavant ait été développée une réflexion sur le sens même de la philosophie et sur la place qu’occupe l’éventualité de la maladie dans la condition humaine en général.

Source : Delassus, É. (2012). La Philosophie Peut-Elle Jouer un Rôle Dans L’accompagnement du Malade ? L’Enseignement philosophique, 62e Année(2), 19-31. https://doi.org/10.3917/eph.622.0019.


Reste à savoir comment cette pratique philosophique
en milieur hospitalier se réalise concrètement.


Dans le titre du troisième chapitre de son recueil de textes, Gerd B. Archenbac introduit un mot de son cru : « La praxis philosophique porte l’insigne de la Lebenskönnerschaft ». « (…) je peux facilement relier Lebenskönnerschaft à la notion de vertu (…) » souligne-t-il.

Pendant ce temps, la question essentielle reste exclue, celle-là même qui nous invite à un malaise philosophique salutaire. Il s’agit de la question de savoir à quoi se résume d’abord et finalement la vie, ce que serait une vie prise au sérieux. Seuls ceux dont la vie prend la forme d’une réponse à cette question trouvent la gaieté qui naît du calme, la souplesse qui naît d’une compréhension judicieuse. C’est à ces personnes que se consacre la Praxis philosophique. Elle les accueille sous le signe de la Lebenskönnerschaft.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 3 – La praxis philosophique porte l’insigne de la Lebenskönnerschaft, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 25.


J’ai demandé à ChatGPT de me traduire le mot allemand « Lebenskönnerschaft » en français et voici les réponses.

Le mot allemand « Lebenskönnerschaft » est un terme assez rare et poétique, composé de :

    « Leben » = vie

    « Könnerschaft » = maîtrise, savoir-faire, expertise

Donc, « Lebenskönnerschaft » peut se traduire en français par :

👉 « la maîtrise de la vie » ou « l’art de savoir vivre », selon le contexte.

Il évoque l’idée d’une compétence ou d’un savoir profond pour bien vivre, pour naviguer avec sagesse, créativité ou sérénité à travers les défis de la vie.

Souhaitez-vous une traduction plus littéraire, philosophique ou pratique ?

OUI

Parfait, en optant pour une traduction philosophique, on peut approfondir le sens du mot « Lebenskönnerschaft » en le reliant à une idée plus existentielle et humaniste.

Une bonne traduction philosophique serait :

👉 « l’art de vivre avec maîtrise »,

ou encore :

👉 « la sagesse pratique de la vie »

👉 « la virtuosité dans l’existence »

Il s’agit de bien plus que de simplement « savoir vivre » : c’est une forme de compétence existentielle, une capacité à habiter sa vie avec intelligence, sens, justesse et profondeur, dans l’esprit des philosophies antiques (comme l’eudaimonia chez les Grecs) ou de penseurs comme Nietzsche ou Michel de Montaigne.

Ce mot évoque une maîtrise intuitive, expérimentée et incarnée de la vie, non pas technique ou académique, mais forgée par l’expérience, la réflexion et le courage d’être soi.

Souhaites-tu que je développe ça dans un petit texte philosophique ou une citation originale ?

OUI

La Lebenskönnerschaft, ou l’art de vivre avec maîtrise

Il est des savoirs que l’on n’enseigne pas dans les livres. La Lebenskönnerschaft — cette maîtrise de la vie — n’est pas une compétence que l’on acquiert par diplômes ou par recettes. Elle est un art subtil, une forme de sagesse incarnée, forgée lentement à travers les épreuves, les joies, les chutes et les recommencements.

Celui qui possède la Lebenskönnerschaft ne cherche pas à tout contrôler, mais sait danser avec l’incertitude, embrasser l’imprévisible, et reconnaître dans chaque instant un lieu possible de vérité. Il ne fuit pas l’absurde, mais le transfigure en sens. Il ne cherche pas la perfection, mais la justesse — dans ses gestes, ses paroles, ses silences.

C’est une virtuosité existentielle, discrète et profonde, comme un art de vivre sans masque, au plus près de soi, au plus proche des autres. Une philosophie vécue, à mi-chemin entre Montaigne, Nietzsche et le stoïcisme, où chaque jour devient une page blanche à habiter pleinement.

Maîtriser sa vie, non pas pour en faire une réussite selon les critères extérieurs, mais pour en faire une œuvre fidèle à son être — voilà peut-être le véritable sens de la Lebenskönnerschaft.

Qu’elle est votre source ?

Après quelques recherches, il apparaît que le terme « Lebenskönnerschaft » a été introduit par le philosophe allemand Gerd B. Achenbach, fondateur de la première pratique philosophique en 1981 . Il utilise ce terme pour décrire une forme de maîtrise de la vie, une compétence pratique et existentielle visant à vivre avec sagesse et authenticité . Ce concept est central dans son ouvrage intitulé « Lebenskönnerschaft », publié en 2001 .


Il me semble que la meilleure trauction de « Lebenskönnerschaft », est « compétences de vie ». Gerd B. Archenbach insiste sur la distinction de « Lebenskönnerschaft » à ne pas confondre avec « art de vivre ».

The aim of the art of life is happiness; Lebenskönnerschaft aims at being

worthy of happiness.

Life-artists shape their lives; the Lebenskönner prove themselves in life. Artists of life win over; the Lebenskönner stands upon what is right.

Artists of life are flexible; the Lebenskönner is upright.

Artists of life attach a meaning to their life; the Lebenskönner lives up to one.

The art of living seeks joy in life; Lebenskönnerschaft seeks to survive a vain, pale and wrongful life.

The one knows to makes virtue out of necessity; the other proves virtue in need.

The art of life flees shadow and seeks light; Lebenskönnerschaft flees twi- light, seeks both light and shadow.

Artists of life give an answer to life’s questions; the Lebenskönner seeks the question to which life is the answer.5

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 3 – La praxis philosophique porte l’insigne de la Lebenskönnerschaft, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 25.

Traduction en français avec DeepL

Le but de l’art de vivre est le bonheur; la Lebenskönnerschaft vise à être digne du bonheur.

Les artistes de la vie façonnent leur vie, les Lebenskönner font leurs preuves dans la vie. Les artistes de la vie séduisent; les Lebenskönner s’en tiennent à ce qui est juste.

Les artistes de la vie sont flexibles; le Lebenskönner est droit.

Les artistes de la vie donnent un sens à leur vie; le Lebenskönner en donne un.

L’art de vivre recherche la joie de vivre; la Lebenskönnerschaft cherche à survivre à une vie vaine, pâle et erronée.

L’un sait faire de la vertu par nécessité, l’autre prouve la vertu par besoin.

L’art de la vie fuit l’ombre et cherche la lumière; Lebenskönnerschaft fuit le crépuscule, cherche à la fois la lumière et l’ombre.

Les artistes de la vie donnent une réponse aux questions de la vie; le Lebenskönner cherche la question à laquelle la vie est la réponse.5

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 3 – La praxis philosophique porte l’insigne de la Lebenskönnerschaft, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 25.

Gerd B. Archenbach consacre le quatrième chapitre de son recueil à la communication sous le titre « La maîtrise de la conversation ». Ce sujet revêt une très grande importance à mes yeux depuis mon adolescence. Je m’inscris dans cette génération croyant que tout problème peut être solutionner avec une meilleure communication. Gerd B. Archenback introduit ce chapitre en ces mots :

Parler de maîtrise de la conversation [Gesprächskönnerschaft], c’est d’abord en introduire l’idée même dans la conversation. En effet, j’entends ici introduire ce terme — calqué sur celui de Lebenskönnerschaft, avec lequel il a un air de famille évident — comme une entrée dans la conversation sur la conversation. Tel est l’objet de l’étude qui suit.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 4 – La maîtrise de la conversation, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 35.

Parler avec aisance ne signifie que l’on sait communiquer et encore moins converser avec l’Autre. Étudier la communication interpersonnelle m’apparaît essentiel dans la philosophie pratique. Gerd B. Archenbach écrit « l’écoute doit être maîtrisée », « elle n’est pas un don naturel ».

L’ÉCOUTE EST L’ÂME DE LA CONVERSATION

Un proverbe allemand dit : « On apprend à parler plus tôt qu’à écouter ». Et, d’ailleurs, à entendre plus tôt qu’à écouter. L’ouïe est un don de la nature; la capacité d’écoute, en revanche, est une ressource dont peu de gens disposent. En effet, elle n’est pas un don naturel, mais doit être cultivée pour devenir une compétence. En d’autres termes, l’écoute doit être maîtrisée, être capable d’écouter [zuhören zu können] est l’essence même de la maîtrise de la conversation.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 4 – La maîtrise de la conversation, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 36.

« Ce qui importe, ajoute Gerd B. Archenbach, c’est de comprendre l’écoute non pas comme une pure passivité ou une simple réception, mais, comme une activité ». Mais encore faut-il en avoir le désir et la volonté.

Gerd B. Archenbach appelle à la prudence « car, pour parler exactement, on ne peut pas savoir comment l’autre se comprend lui-même; même dans le meilleur des cas, c’est plutôt une question de conjecture. »

Pourquoi une telle prudence ? N’y a-t-il pas des tas de théories prêtes à décoder l’être humain ? Certes, mais ne perdons pas de vue qu’au mieux, c’est « L’être humain » que nos théories décodent, et non pas et jamais celui-là même avec lequel nous conversons. Dans tous les cas, ce n’est qu’avec lui que la conversation est possible. On ne peut pas converser avec l’humanité, mais seulement avec un humain.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 4 – La maîtrise de la conversation, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 38.

Gerd B. Archenbach parle de « conversation en quête de conseils » dont il cerne les contours en donnant la parole à Blaise Pascal et à Walter Benjamin.

Quand on veut corriger avec avantage, et faire voir à un autre qu’il se trompe, il faut remarquer de quel côté il regarde la chose, car de ce côté elle est ordinairement vraie, et lui avouer cette vérité, mais lui découvrir le côté où elle est fausse. Il en est satisfait, car il voit qu’il ne s’est pas trompé, et qu’il a seulement manqué de voir tous les côtés.

Blaise Pascal, Pensées. Traduites par W.F. Trotter
(New York : E. P. Dutton, 1958), n° 9.


Ne cherchez pas à dissuader. Quiconque se voit demander son avis ferait bien de commencer par découvrir l’opinion de son interlocuteur, puis de l’approuver. Personne n’est facilement persuadé de la plus grande intelligence d’un autre, et peu de gens demandent des conseils avec l’intention de suivre ceux d’un autre. Le fait est qu’ils ont déjà [pris leur décision dans l’intimité de leur esprit] et qu’ils souhaitent maintenant l’entendre de l’extérieur, l’accepter comme le « conseil » d’un autre. C’est cette confirmation qu’ils recherchent, et ils ont raison de le faire. En effet, il est très risqué d’entreprendre de mettre en œuvre ses propres décisions sans les faire passer par les échanges de la conversation, comme à travers un filtre. C’est pourquoi celui qui demande conseil est déjà à mi-chemin d’une décision; et si ce qu’il projette de faire est une erreur, il vaut mieux lui apporter un soutien sceptique que de le contredire avec conviction.

Walter Benjamin

Légèrement adapté de Walter Benjamin, Selected Writings, vol. 2, part 2, 19311934. Ed. par Michael W. Jennings, Howard Eiland et Gary Smith (Cambridge, MA : Belknap, 1999), 588. Voir la Séquence d’Ibiza, avril-mai 1932. J’ai (le traducteur Michael Picard) dû ajouter les mots « prendre leur décision dans l’intimité de leur propre esprit » pour souligner l’intention de « im Stillen schon gefaßt », une phrase à laquelle Achenbach fait spécifiquement référence plus tard, mais qui n’est pas rendue littéralement dans la traduction existante. Achenbach cite les Gesammelte Schriften, vol. IV/1, 403.

Blaise Pascal et Walter Benjamin cités par : ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 4 – La maîtrise de la conversation, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 41.


P.S.: Nous ajoutons ces références :

La confrontation dans la pratique philosophique de conseil n’a pas sa place : « (…) il vaut mieux lui apporter un soutien sceptique que de le contredire avec conviction » (Walter Benjamin).

Si ces citations de conseils attirent et retiennent mon attention depuis les premières ligne de mon rapport de lecture, c’est en raison de mon expérience avortée de formation au conseil philosophique avec Oscar Brenifier. Je vous réfère donc à mon article « Article # 12 – Fin du chapitre : Oscar Brenifier, philosophe praticien ».

Article # 41
La philothérapie – Un état des lieux
par Serge-André Guay
Observatoire québécois de la philothérapie

8. Un peu de psychothérapie dans la philothérapie

L’histoire révèle un lien étroit entre la psychologie et la philosophie, la première ayant été longtemps considérée comme une branche de la seconde. Malheureu­sement, ce lien est plutôt ténu entre la philothérapie et la psychothérapie. Or, le philothérapeute doit être un fin psychologue lors de la consultation avec son client, non seulement pour établir une relation de confiance et prouver sa bienveillance, mais aussi et surtout pour identifier les biais cognitifs chez son client. Or, rare trouve-t-on en philothérapie une attention portée à ces biais cognitifs, principal obstacle à la logique nécessaire à la quête de sens.

Les chercheurs Xiaojun Ding (Xi’an Jiaotong University) et Feng Yu (Wuhan University) écrivent :

Le quatrième aspect est la relation entre la pratique philosophique et d’autres disciplines ou professions d’aide telles que le conseil psychologique et la thérapie. Une mission importante de la pratique philosophique contemporaine au début de son émergence était de remettre en question les présupposés théoriques ainsi que les méthodes et les effets du conseil et de la thérapie psychologiques. La plupart des chercheurs considèrent le conseil philosophique comme une alternative au conseil et à la thérapie psychologiques, visant à fournir aux personnes des conseils pour une vie rationnelle de manière autonome et à éviter l’utilisation de tout moyen psychothérapeutique (Achenbach 1998 ; Marinoff 2002 ; Raabe 2010). Cependant, Russell (2001) soutient qu’il n’y a pas de distinction claire et sans ambiguïté entre le conseil philosophique et la psychothérapie, ne serait-ce qu’en comparant ce que font les conseillers philosophiques et les psychothérapeutes et pourquoi ils le font. Amir (2004) souligne également qu’une partie décisive du conseil philosophique est la connaissance et l’expérience psychologiques pertinentes des conseillers philosophiques ; sinon, les conseillers philosophiques seront très probablement perdus dans leur propre labyrinthe philosophique.

Source : Ding, X.; Yu, F. Philosophical Practice as Spiritual Exercises towards Truth, Wisdom, and Virtue. Religions 2022, 13, 364. https://doi.org/10.3390/rel13040364. Les auteurs : Xiaojun Ding, Department of Philosophy, School of Humanities and Social Sciences, Xi’an Jiaotong University, China. Feng Yu, Department of Psychology, School of Philosophy, Wuhan University, China. Article distributed under the Creative Commons Attribution License (https://creativecommons.org/licenses/by/4.0/).

Le philothérapeute se doit de disposer d’une connaissance psychologique des relations interpersonnelles pour servir adéquatement son client en consultation. Dans leurs propos ci-dessous, le chercheurs Xiaojun Ding (Xi’an Jiaotong University) et Feng Yu (Wuhan University) parle aussi de l’expérience psychologique pertinente des philothérapeutes.

Entreprendre une consultation philosophique exige donc de prendre grand soin de ne pas éveiller les mécanismes de défense du client, plus souvent qu’autrement de nature psychologique. La provocation tout comme la répression des émotions et des justifications poussent ces mécanismes de défense à entrer en action et engendrer des frustrations ne facilitant pas le dialogue.

Source et lire la suite: Article # 41 – La philothérapie – Un état des lieux par Serge-André Guay, Observatoire québécois de la philothérapie.


Le chapitre 5, « La règle du jeu de la praxis philosophique », Gerd B. Archenback nous introduit à son sujet en ces mots :

La praxis philosophique est confrontée à une exigence qui a été étrangère à la philosophie académique : au lieu de présenter aux gens les problèmes de base qui préoccupent le philosophe académique, la praxis philosophique doit se calibrer sur les thèmes, les problèmes et les formulations de questions qui accablent les autres, ceux qui, dans leur besoin, se sont tournés vers la philosophie pour obtenir de l’aide. Ce n’est donc pas la philosophie qui ouvre le bal, mais les questions posées au philosophe.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 5 – La règle du jeu de la praxis philosophique, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 51.

Plus loin, Gerd B. Archenbac nous invite a porter attention au philosophe Bertrand Russel et à son livre « Problèmes de la philosophie » et, plus particulièrement au chapitre “La valeur de la philosophie” :

(…) Intitulé « La valeur de la philosophie », ce chapitre (en contradiction louable avec le ton initial, dans lequel nous reconnaissons le pathos de la philosophie fondationnaliste) expose une philosophie si peu prétentieuse, si sceptiquement sage, si vivement orientée vers la vie, qu’il est difficile d’en imaginer une qui soutiendrait mieux les aspirations de la Praxis philosophique.

Sans prétendre examiner le chapitre dans son intégralité, je soulignerai au moins quelques passages particulièrement mémorables, passages que j’admets joyeusement avoir trouvés inspirants. Son tout premier point décrivant l’utilité unique et caractéristique de la philosophie suppose déjà qu’elle est totalement distincte du profit que nous tirons avant tout de la recherche scientifique et technique. La philosophie, affirme-t-il, tire son efficacité, à la différence des autres sciences, « de ses effets sur la vie de ceux qui l’étudient ». 25

____________

NOTE

25. Russell, Problems, 89. Russell conclut : « L’utilité n’appartient pas à la philosophie », bien que, comme nous le verrons plus tard, il parle de “son utilité pour montrer des possibilités insoupçonnées” (91).

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 5 – La règle du jeu de la praxis philosophique, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 60.

Il revient donc au philosophe praticien de pouvoir confesser les effets de la philosophie sur sa propre vie, le moment conversationnel venu. Et on parle des effets « sur la vie », non pas seulement en sa conscience, son intellect, son esprit, mais aussi et surtout dans son comportement dans son quotidien. L’invité (le client) doit se trouver en conversasion avec un philosophe, un philosophe lui-même philosophe, un exemple de ce qu’est un vrai philosophe. Il ne suffit pas de philosopher pour être philosophe mais d’ÊTRE philosophe dans son âme et son corps, dans ses idées, certainement, dans son compotement, nécessairement. Et cela dès le premier contact avec l’invité (le client).

Gerd B. Archenbach cite donc un passage du chapitre “La valeur de la philosophie” du livre « Problèmes de la philosophie » de Bertrand Russel :

L’homme qui n’a aucune teinture de philosophie traverse la vie emprisonné dans les préjugés dérivés du sens commun, des croyances habituelles de son âge ou de sa nation, et des convictions qui ont grandi dans son esprit sans la coopération ou le consentement de sa raison délibérée. Pour un tel homme, le monde tend à devenir défini, fini, évident; les objets communs ne suscitent aucune question et les possibilités inconnues sont rejetées avec mépris. Dès que nous commençons à philosopher, au contraire, nous découvrons que même les choses les plus quotidiennes conduisent à des problèmes auxquels on ne peut donner que des réponses très incomplètes. La philosophie, bien qu’incapable de nous dire avec certitude quelle est la vraie réponse aux doutes qu’elle soulève, est en mesure de suggérer de nombreuses possibilités qui élargissent notre pensée et la libèrent de la tyrannie de la coutume. Ainsi, tout en diminuant notre sentiment de certitude quant à ce que sont les choses, elle augmente considérablement notre connaissance de ce qu’elles peuvent être; elle supprime le dogmatisme quelque peu arrogant de ceux qui n’ont jamais voyagé dans la région du doute libérateur, et elle entretient notre sens de l’émerveillement en montrant des choses familières sous un aspect peu familier.27

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NOTE

27. Russell, Problèmes, 91.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 5 – La règle du jeu de la praxis philosophique, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), pp. 60-61.

Le chapitre 6, « Sur les commencements » traite de l’amorce de la conversation.

Dans la praxis philosophique, ce n’est pas la philosophie qui commence. Dans la praxis philosophique, c’est l’invité qui fait le commencement. Pour illustrer cette relation par une image tirée du jeu d’échecs, je dirais que le visiteur choisit les pièces blanches. C’est-à-dire que celui qui vient à nous commence.

Mais si nous devions penser cela comme une règle, la première chose et l’ouverture ne serait précisément pas le visiteur, mais au début il y aurait la règle, cette direction, ou — pour le dire formellement — le cadre. N’y a-t-il pas là une contradiction ? C’est évident. Mais on peut y remédier.

Je modifie la phrase d’introduction et je dis : Moi, le praticien de la philosophie, je dois faire le début pour que le visiteur puisse commencer. Ou encore : je commence par lui faciliter le début en lui rendant le début possible. Je n’ouvre pas la conversation, mais j’ouvre l’espace qui doit être ouvert à l’invité, afin qu’il puisse à son tour entamer la conversation.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 6 – Sur les commencements, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 65.

Consacrer tout un chapitre aux commencements avec l’invité démontre à quel point il faut l’accueillir avec bienveillance et une solidarité exemplaire.

REMARQUES FINALES

Le commencement ne se fait pas par la compréhension d’un problème. Ce qui est montré au début, c’est plutôt si nous avons compris le problème du début, si, dès le début, nous nous comprenons nous-mêmes. (C’est ce que nous appelons la connaissance de soi [Umgangswissen]).

Le commencement ne se fait pas non plus à partir du problème que l’autre personne est censée avoir. Nous commençons par notre invité, et seulement ensuite, en second lieu, par ses problèmes.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 6 – Sur les commencements, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 78.

L’invité devant vous est d’abord un individu et non pas d’abord le problème qu’il porte à votre attention. La maxime « Vous n’aurez jamais une deuxième chance de faire une bonne première impression » (David Swanson) s’applique en tout temps, en tout lieu et en toute circonstance. Pour les commencements, le philosophe praticien doit prendre garde de ne pas déclencher les mécanismes de défense de son invité.

Dans le huitième chapitre, « La philosophie comme professions », Gerd B. Archenbach affirme d’entrée de jeu et sans dérour que « Non seulement la praxis philosophique n’est pas une nouvelle thérapie, mais elle n.est absolument pas une thérapie.3 » « (3. Note d’Achenbach : je ne propose ici qu’un court extrait d’une première conférence sur la praxis philosophique que j’ai donnée à l’université d’Osnabrück en 1982. Pour la version complète, voir Gerd B. Achenbach, Zur Einführung der Philosophischen Praxis (Cologne : Dinter, 2010), 147-159.) » Voilà qui m’interroge sur le nom que j’ai donné à cette observatoire « Observatoire de la philothérapie ». Mais le débat au sujet de l’aspect thérapeutique de la philosophie pratique reste ouvert.

Pour le dire brièvement, en une phrase qui, amplifiée philosophiquement, ferait jaillir toute la philosophie de la Praxis philosophique : La praxis philosophique est une conversation libre.

Mais qu’est-ce que cela signifie ? Ou du moins : Qu’est-ce que cela signifie, si une amplification complète de cette affirmation ne peut être réalisée pour le moment ? Cela signifie que la praxis ne s’embarrasse pas de systèmes philosophiques, ne construit pas de philosophie, n’administre pas d’idées philosophiques, ne prescrit pas de philosophe. Elle se contente de mettre la pensée en mouvement : elle philosophe.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 7 – La philosophie comme profession, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 84.

Là, je suis ravi ! Une conversation LIBRE. J’entends OUVERTE, NON DIRIGÉE ! Il ne s’agit d’une conversation sur tout et n’importe quoi pour le défoulement de l’invité et du philosophe praticien.

En journalisme, une seule question est de mise et sera servie en commencement de l’entrevue par l’intervieweur à l’interviewé. Un entretien dit professionnel ne portera donc pas sur tout et n’importe. Quoi, les questions s’enchaineront toujours à partir des réponses données librement.

Évidemment, cette procédure ne s’applique pas à conversion de la philosophie pratique mais il faut ici en retenir un lien avec le dialogue socratique.

Malheureusement, certains philosophes praticiens se lancent dans le dialogue socratique avec une grande violence qui tue toute les possibilités d’une conversation. Personnellement, j’ai eu l’impression, lors d’ateliers tenus en ligne à l’initiative de philosophes praticiens, que ces derniers voulaient prendre en défaut de contradiction chacun des participants, comme s’il était question pour eux de remporter un trophée. Donner une telle impression devrait préoccuper haut plus point le philosophe praticien comme l’obstétricien devrait se préoccuper de la première impression qu’il donne à sa patiente lors de l’accouchement.


L’art du questionneur

François Renaud, professeur, département de philosophie, Université de Moncton (Nouveau-Brunswick, Canada)

Extrait

Le dialogue, conçu par Socrate lui-même comme un échange entre égaux, apparaît comme un idéal qui n’est pas réalisé dans les dialogues (dits socratiques). Le principe de réciprocité des rapports dialectiques, qui permet à chaque interlocuteur de questionner et de répondre, reste purement formel. En réalité, seul Socrate connaît l’art du questionnement et ses diverses stratégies. Le dialogue socratique constitue d’abord et avant tout un dialogue pédagogique. Le but ultime du dialogue, soit la pleine formation philosophique (et donc la pleine indépendance) de l’interlocuteur n’est jamais atteint: l’interlocuteur reste au stade de l’apprenti, dépendant (et souvent récalcitrant) par rapport au maître (Szlezk 1987). En remplissant les deux rôles à la fois, celui de questionneur et de répondeur, Socrate démontre qu’il peut au besoin se passer de l’interlocuteur malgré ses déclarations contraires à cet effet (cf. 519d7-el). De plus, en formulant et la question et la réponse, Socrate prédétermine les propos de l’autre (cf. Loraux 1998). À cet égard, la méthode de Socrate peut apparaître manipulative, voire autocratique. Certains commentateurs n’hésitent pas à opposer le dialogue socratique à la discussion ouverte et équilibrée, qu’ils associent par exemple à Protagoras (cf. Havelock 1958).

RENAUD, François, (2004), L’art du questionneur (9p), Professeur, Département de philosophie, Université de Moncton (Nouveau-Brunswick, Canada).


Les intéressés peuvent se référer aux propos de Gerd B, Archenbach au sujet de dialogue socratique au sous titre « OBSTETRIQUES : UN BREF RETOUR SUR SOCRATE » (OBSTETRICS: A BRIEF LOOK BACK AT SOCRATES) au chapitre 4 « La maîtrise de la conversation », page 43.

Le huitième chapitre du receuil de Gard B. Archenbach, « Éducation et praxis philosophique — Søren Kierkegaard et la question de savoir qui est un praticien de la philosophie ». En introduction, il cite Nietzsche et ajoute :

La seule critique possible d’une philosophie, et la seule qui prouve quelque chose, est d’essayer de voir si l’on peut vivre selon cette philosophie, et cela n’a jamais été enseigné dans aucune université. La seule pensée qui y est enseignée est la critique des mots sur les mots.

― Friedrich Nietzsche3

« La question qui se pose à nous4 est de savoir si — et si oui, de quelle manière — la praxis philosophique est une pratique d’éducation [Bildung].

Puisque cette question est posée à Copenhague, nous pourrions tout aussi bien nous interroger sur la relation entre la praxis philosophique et Søren Kierkegaard lui-même. Dans ce contexte, nous pourrions même justifier le titre « Praxis philosophique sur les traces de Søren Kierkegaard », puisque le Danois est certainement appelé à devenir l’une des principales sources d’orientation de notre philosophie pratique, si ce n’est pas déjà le cas. J’ajoute : Pour moi, il compte en effet parmi les plus importants contributeurs et incitateurs d’idées.

____________

NOTES

2. Friedrich Nietzsche, Unfashionable Observations. Dans les Œuvres complètes de Friedrich Nietzsche, II. Traduit par Richard T. Gray (Stanford, CA : Stanford University Press, 1995), 246. Utilisé avec l’autorisation de l’auteur.

3. Le mot allemand Bildung est notoirement impossible à traduire; c’est pourquoi, dans les travaux universitaires, il est parfois laissé sans traduction. Ici, malgré ses limites, le mot « éducation » est utilisé pour Bildung tout au long du texte, à quelques exceptions près, notamment dans les citations de traductions existantes de sources qui utilisent d’autres mots (tels que « culture » ou « image » ou « forme »). Les termes « autoformation », « éducation » ou « enculturation » ont des connotations plus appropriées dans de nombreux contextes, mais la cohérence semblait importante. Ces interprétations alternatives valides montrent clairement ce qui devient évident dans ce chapitre, à savoir que le terme « éducation » ne doit en aucun cas être considéré comme une éducation formelle ou une accréditation. Voir également le chapitre 7 ci-dessus sur la « Praxis philosophique en tant que profession ».

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 8 – Éducation et praxis philosophique, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 89.


P.S.: Nous vous suggérons ces références :


Le neuvième chapitre, « La praxis philosophique et les vertus », Gerd B. Archenbach présente la vertu comme un « art de vivre » dont le philosophe praticien doit lui-même faire l’expérience.

Ainsi, pour résumer ces premières considérations, je dirai que la vertu est un art qui s’acquiert et se développe tout au long de la vie : La vertu, en tant qu’art de vivre acquis tout au long de la vie, est au centre même de la praxis philosophique. Car c’est ce que les visiteurs de la pratique recherchent pour eux-mêmes — le savoir-faire pour bien mener sa vie, ou au moins mieux — que le philosophe-praticien recherche également, si cette recherche ne constitue pas déjà la philosophie en tant que telle dans son plus grand sérieux. Il en est ainsi depuis Socrate. Il en a été ainsi (historiquement à mi-chemin entre Socrate et nous) pour mon ami Michel de Montaigne : « Notre grand et glorieux chef-d’œuvre est de vivre convenablement. Toutes les autres choses — gouverner, amasser, construire — ne sont que de petits appendices et des accessoires, tout au plus ».4 Et, pour citer un témoin contemporain très respecté, il en est encore ainsi aujourd’hui, comme l’atteste avec désinvolture le philosophe Hilary Putman : « la question philosophique centrale est de savoir comment vivre »5.

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4. Michel de Montaigne, Les Essais complets de Montaigne, traduits par Donald M. Frame (Standford, Standford University Press, 1958), 851. La citation originale est la traduction allemande de Tietz (Zürich : Diogenes, 1992), vol. 3, 428.

5. Le contexte immédiat est remarquable et contient une qualification, plus précisément une attribution, qu’Achenbach supprime. Putnam écrit : « pour James, comme pour Socrate, la question philosophique centrale est de savoir comment vivre » (italiques dans l’original). Mais le contexte plus large montre clairement que Putnam lui-même approuve le point de vue qu’il attribue ici à d’autres. La suite mérite également d’être citée : « Mais pour James, comme pour Socrate et ses successeurs, l’opposition entre la philosophie qui s’intéresse à la façon de vivre et la philosophie qui s’intéresse à des questions techniques difficiles est une fausse opposition ». Hilary Putnam, Pragmatisme : An open question (Oxford : Blackwell, 1995), 22.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 9 – La praxis philosophique et les vertus, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 104.

Le dixième chapitre pose trois questions en titre : « Qu’est-ce qui est important ? Qu’est-ce qui est important dans la vérité ? Qu’est-ce qui est crucial en fin de compte ? ». Une seule citation s’impose :

Voici donc la thèse selon laquelle l’important n’est pas ce que Socrate a dit aux gens, mais ce qui compte, c’est ce qu’il était lui-même. J’ai affirmé cette thèse afin d’en élucider une autre, à savoir : ce que nous disons à ceux qui viennent nous rendre visite dans notre pratique est secondaire; bien plus crucial est ce que nous avons nous-mêmes « laissé dire ».22

____________

NOTE

22. Il y a une allusion à l’Eingelassenheit; voir chapitre 4.

ARCHENBACH, Gerd B., Philosophical praxis, Chapitre 10 – Qu’est-ce qui est important ? Qu’est-ce qui est important dans la vérité ? Qu’est-ce qui est crucial en fin de compte ?, Lexington Books (An imprint of Rowman & littlefield), p. 119.

Le onzième chapitre, « Caractère et destin – La pratique philosophique a beaucoup à apprendre de Schopenhauer », et le douzième chapitre, « La praxis philosophique comme alternative à la psychothérapie et à la pastorale » ferment la marche proposée par cet ouvrage.


En guise de conclusion de ce rapport de lecture

Les propos du fondateur d’une innovation, en l’occurence ici ceux de Gard B. Archenbach sur la Paxis pilosophique, et dans ce cas sur des dizaines d’années d’expérimentation, offre aux lecteurs de boire à la source une eau pure avant toute autre interprétation et misinterprétation.

Tout ce que j’ai lu dans ce livre, je ne le retrouve pas dans la littérature francophone. Aussi, je me demande si la praxis philosophique dans le monde francophone n’évolue pas dans un ghetto en raison de la barrière de la langue, dans ce cas, celle entre l’allemand et le français. Aujourd’hui, la traduction de l’allemand à anglais d’une douzaine d’interventions de Gerd B. Archenbach, fondateur de la praxis philosophique, ouvre une porte à une plus grande diffusion de son expérience auprès de la population maîtrisant l’anglais.

Pour ma compréhension personnelle et puisque je ne me maîtrise pas l’anglais suffisamment pour en capter toutes nuances, j’ai traduit de l’anglais au français ce recueil de texte avec des logiciels spécialisés, d’où les extraits et les citations traduits dans ce rapport de lecture pour le bénéfice du monde francophone.

Ma lecture de « Philosophical Praxis – Origin, Relations, and Legacy » de Gerd B. Achenbach me donne beaucoup à penser. Il s’agit, pour moi, d’une nouvelle compréhension de la pratique philosophique dans sa version originale.

Mon premier contact avec la pratique philosophique a lieu en l’an 2000 lors de la parution de la traduction de l’anglais au français du livre « Platon, pas Projac ! » de Lou Marinoff. Je comprends alors que la philosophie peut nous aider à mieux vivre en se proposant comme piste de résolution de nos problèmes personnels et professionnel. La découverte m’enchante.

Puis, en 2020, je découvre la « philothérapie » dans la francophonie européenne à de nombreux livres portant en titre cette nouvelle appellation de la philosophie pratique. La théorie exposée dans ces publications me semble presque parfaite. Seules quelques propos soulèveront des appréhensions et seront l’objet de mes critiques, notamment, le copinage avec la psychologie qui sera le sujet de mon deuxième article le 11 octobre 2020.

J’ai déjà une dent contre la psychologie en raison de son manque d’efficacité depuis ma lecture en 1989 du livre « Séduction psychologique – Échec de la psychologie moderne » du psychologue américain William Kirk Kilpatrick. On peut imaginer ma réaction à la lecture du livre « Happycratie » en 2018.

Notez que l’appellation « philothérapie » dispraîtra presqu’entièrement de la bibliographie francophone européenne au fil des ans. On ne veut plus associer la pratique philosophique à une « thérapie »; un débat fait rare à savoir si la philosophie possède ou non un aspect thérapeutique.

Ce débat restera et demeure encore aujourd’hui ouvert mais il cédera sa place à une confrontation directe de la pratique philosophique avec le développement personnnel, du moins dans la francophonie européenne :

J’observe que la pratique philosophique dans le monde francophone européen souffre d’un manque de balises parce qu’elle éjecte les émotions de l’invité (le client) et lui manque ainsi de respect.

Mon expérience avec Oscar Brenifier, fondateur de l’Institut de philosophie pratique en France, sera désastreuse.

Mais cet accident ne m’empêche pas de conserver mon intérêt pour la philosophie pratique et je poursuis mes lectures et la publication de mes rapports de lecture.

De temps à autre, je consulte le site web de Gerd B. Archenbach jusqu’au jour, eurêka, j’apprends la publication en anglais de son livre « Philosophical praxis ». Ma lecture de ce recueil de texte me réconcilie avec la philosophie pratique parce qu’il place la personne (l’invité – le client) en priorité avec le plus grand des respects.


Je conseille à tous le livre Philosophical Praxis, Origin, Relations, and Legacy de Gerd B. Achenbach , traduit par Michael Picard, et paru chez Lexington Books – An imprint of The Rowman & Littlefield Punlishing Group, Inc. en 2024. Ce livre mérite cinq étoiles sur cinq.

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Article # 94 – L’étonnement philosophique – Une histoire de la philosophie, Jeanne Hersch, Gallimard, coll. Folio Essai, 1993

Article # 94

J’AI LU POUR VOUS

L’étonnement philosophique

Une histoire de la philosophie

Jeanne Hersch

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L’étonnement philosophique

Une histoire de la philosophie

Jeanne Hersch

Gallimard, Collection Folio Essais (n° 216)

Première édition française

Date de parution : 25 juin 1993

Réimpression : juin 2023

Langue  : ‎Français

Poche ‏ :‎ 464 pages

ISBN-10 ‏ : ‎2070327841

ISBN-13 ‏ : ‎978-2-07-032784-3

Poids de l’article ‏ : ‎242 g

Dimensions ‏ : ‎11 x 1.9 x 18 cm


Publié pour la première fois en 1981 :

(Das philosophische Staunen (l’Etonnement philosophique), Zürich, Benziger; Munich, Piper, 1981, 354 p.)


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J’accorde 5 étoiles sur cinq au livre L’étonnement philosophique :
Une histoire de la philosophie de Jeanne Hersch paru chez Gallimard, Collection Folio Essais (n° 216) en 1993.

J’en recommande la lecture.

Lire mon rapport de lecture à la suite la présentation du livre et de son auteur


Texte en quatrième de couverture

L’originalité de cet ouvrage, très vite devenu une référence, est de réorganiser le développement de la philosophie en Occident à partir, non plus de ses principales thèses, mais de sa nature même, de son objet premier : l’étonnement.

L’étonnement est cette capacité qu’il y a à s’interroger sur une évidence aveuglante. La première des évidences est qu’il y a de l’être, qu’il existe matière et monde. De cette question apparemment toute simple est née voilà des siècles en Grèce un type de réflexion qui depuis lors n’a cessé de relancer la pensée : la philosophie.

L’histoire de cet étonnement, toujours repris, sans cesse à vif, continûment reformulé, Jeanne Hersch nous la raconte à partir de quelques philosophes occidentaux : les présocratiques, Socrate, Platon, Aristote, les épicuriens, les stoïciens, saint Augustin, Thomas d’Aquin, Descartes, Spinoza, Leibniz, Locke, Kant, Hegel, Comte, Marx, Freud, Bergson, Kierkegaard, Nietzsche, Husserl, Heidegger, Jaspers. Aussi cette histoire de la philosophie nous dit-elle, en réalité, comment la philosophie fut en tout temps, actuelle.


Jeanne Hersch (juillet 1910 – juin 2000 à Genève) fut pendant vingt ans professeur de philosophie à l’université de Genève. Elle dirigea la division de philosophie à l’Unesco et publia, entres autres ouvrages, L’illusion philosophique, L’être et la forme, Idéologie et réalité, Le droit d’être un homme, Éclairer l’obscur. Elle a traduit Philosophie de Karl Jaspers.


TABLE DES MATIÈRES

Avertissement

L’École de Milet : Thalès (environ 600 av. J.-C.)

Ecole ionienne et Ecole éléate : Héraclite (env. – 550-480 av. J.-C.) et Parménide (env. 500 av. J.-C.)

Zénon (env. 490 – 430 av. J.-C.)

Socrate (470-430 av. J.-C.)

Platon (427-347 av. J.-C.)

Aristote (384 -322 av. J.-C.)

Les Épicuriens (IVème et IIIème siècles av. J.-C.)

Les Stoïciens (IIIème siècle av. J.-C.)

Saint Augustin (354 – 430 ap. J.-C.)

La philosophie médiévale

Thomas d’Aquin (1225 – 1274)

La Renaissance (XVème et XVIème siècles)

René Descartes (1576-1650)

Spinoza (1632-1650)

Leibniz (1646-1716)

L’empirisme anglais

John Locke (1632-1704)

George Berkeley (1685-1753)

David Hume (1711-1776)

Emmanuel Kant (1724-1804)

De Kant à l’idéalisme allemand

Georg Wilhelm Friedrich Hegel (1770-1831)

Auguste Comte (1789-1857)

Karl Marx (1818-1883)

Sigmund Freud (1873-1939)

Henri Bergson (1859-1941)

Sören Kierkegaard (1813-1900)

Friedrich Nietzsche

Après Kierkegaard et Nietzsche

Edmund Husserl (1859-1938)

Martin Heidegger (1889-1976)

Karl Jaspers (1883-1969)

La philosophie aujourd’hui


EXTRAIT

AVERTISSEMENT

Le présent ouvrage n’est pas une histoire traditionnelle de la philosophie. Je vais seulement tenter de montrer, à propos de quelques exemples choisis dans plus de deux mille ans de pensée occidentale, comment et à propos de quoi certains hommes ont été saisis d’étonnement, de cet étonnement dont la philosophie est née.

Quelle a été la nature, quelle a été l’occasion de cet étonnement ? Comment s’est-il exprimé ?

Il ne m’est pas possible ici de le suivre à la trace de façon continue, d’établir un exposé relativement complet. Je ferai délibérément un choix pour m’attacher à quelques points de repère, quelques tournants de la pensée, quelques moments privilégiés où un regard plus neuf ou plus naïf a fait surgir les quelques questions essentielles qui, désormais, ne cessent de se poser pour peu qu’on renonce à les dissimuler par le bavardage ou la banalité.

Savoir s’étonner, c’est le propre de l’homme. Il s’agit ici de susciter à nouveau cet étonnement. Le lecteur, je l’espère, retrouvera sa capacité d’étonnement dans l’étonnement d’autrui. Il saura le reconnaître. Il dira : « Oui, c’est bien ça. Comment se fait-il que je ne me sois pas encore étonné à ce sujet ? »

Tel est chez l’homme le processus créateur, capable d’amener le lecteur à philosopher lui-même.

J’espère aussi, chemin faisant, lui transmettre un minimum de moyens qui lui permettront d’exprimer son étonnement, ou du moins de lire les textes de ceux qui se sont « étonnés » avant lui.

Mais l’homme du XXe siècle peut-il encore « s’étonner » ou même s’émerveiller ? Nous vivons à l’âge de la science. Nous croyons presque tout savoir, ou du moins pouvoir tout savoir. Et pourtant, il y a toujours et il y aura toujours des êtres humains pour s’étonner. L’étonnement est essentiel à la condition d’homme. Il ne suffit pas d’être le contemporain de grands hommes de science pour échapper déjà à l’ignorance. Et parmi les physiciens eux-mêmes, il y en a qui continuent à s’étonner — non les « demis » ou les « quarts » de

physiciens, mais les plus grands. Leurs œuvres sont pleines d’un étonnement métaphysique et philosophique, semblable à celui des enfants. «… Comme des enfants…», dit la Bible, c’est ce que nous devons devenir pour comprendre de quoi il s’agit. Il nous faut dépouiller l’arrogance adulte, qui considère tout le passé avec condescendance, du haut de la magnificence de la science moderne.

Nous traiterons d’abord de l’étonnement des hommes qui vécurent au début de la période antique grecque, et qui « s’étonnèrent » autour du VIe siècle avant J.-C., en Grande-Grèce, en Asie Mineure, en Sicile. Nous ne nous hâterons pas de juger : « Quelles sottes questions ils ont posées, et quelles sottes réponses ils ont trouvées ! Tout cela n’a plus aucun intérêt pour nous aujourd’hui. »

Nous ne parlerons pas de la philosophie en général, mais nous nous attacherons à tel ou tel philosophe pour apprendre à connaître sa manière de s’étonner et surmonter ainsi l’étrangeté supposée de la philosophie. Chacun d’entre nous possède en vérité une certaine expérience philosophique qui lui est propre : chaque fois que nous nous trouvons devant une véritable décision à prendre, nous nous interrogeons nous-mêmes, sans le savoir, philosophiquement. Les enfants, autour de leur cinquième année, posent des questions philosophiques ; les jeunes de quinze ou seize ans aussi.

Nous nous garderons donc de toute condescendance face aux penseurs du passé, fût-ce les plus anciens. En vérité leur étonnement philosophique radical, qui en leur temps était tout neuf, témoigne de la force créatrice et de la capacité d’invention de l’homme. C’est ce qui leur a permis de poser leurs étranges questions. Ils étaient de très grands esprits. Ne l’oublions pas. Dès le début, nous avons affaire à des philosophes capables d’étonnement, capables de dépasser ce qui, dans la vie quotidienne, va sans dire pour poser des questions fondamentales.


REVUE DE PRESSE

Jeanne Hersch, L’étonnement philosophique par Robin Guilloux, Université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne, Graduate Student, professeur de Lettres et de Philosophie à la retraite de l’Education nationale.


AU SUJET DE L’AUTEUR

Jeanne Hersch

(1910-2000)
"Licence: CC BY-SA 4.0. You must give appropriate credit (Library Am Guisanplatz, Collection Rutishauser), provide a link to the license, and indicate if changes were made." Quote from [2]
« Licence: CC BY-SA 4.0. You must give appropriate credit (Library Am Guisanplatz, Collection Rutishauser), provide a link to the license, and indicate if changes were made. » Quote from [2]

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Jeanne Hersch (née le 13 juillet 1910 à Genève et morte le 5 juin 2000 dans la même ville) est une philosophe suisse, reconnue internationalement, dont l’œuvre a pour centre la notion de liberté et les concepts qui s’y rattachent. Elle a été professeure de philosophie à l’université de Genève, directrice de la division philosophique de l’UNESCO, et représentante de la Suisse au conseil exécutif de cette même organisation. Wikipédia

Œuvres

Jeanne Hersch est l’autrice d’une quinzaine d’ouvrages. Malgré sa retraite en 1977, elle a continué à écrire ; c’est même de cette période que datent certains de ces ouvrages les plus importants, notamment Éclairer l’Obscur. Ce titre résume sa démarche telle qu’elle l’a expliquée à la fin du long entretien accordé à la Télévision romande en 1972 : la clarté de la parole est le meilleur moyen de révéler la profondeur et la complexité d’un concept, comme une torche qui éclaire le fond d’un puits, dit-elle (En Direct avec, 21 février 1972, entretien avec Gaston Nicole et Roland Bahy, archives RTS). En 1993 paraît L’Étonnement philosophique, dans lequel elle refait l’histoire de la philosophie à partir de l’étonnement, compris comme capacité fondamentale d’interroger et de mettre en doute les évidences.

1936 : L’Illusion philosophique, Plon, 1964 [1936].
1940 : Temps alternés, Metropolis, 1990, (ISBN 2-88340-009-1).
1946 : L’être et la forme, La Baconnière, 1946.
1956 : Idéologies et réalité. Essai d’orientation politique, Plon, 1956
1956 : Traduction du polonais en français de Sur les bords de l’Issa, de Czesław Miłosz
1968 : Le droit d’être un homme, UNESCO, Payot, 1956.
1978 : Karl Jaspers, Éd. L’Âge d’Homme, poche, 2007 [1978], (ISBN 2-8251-1727-7)
1981 : L’étonnement philosophique (De l’école Milet à Karl Jaspers, Poche, Gallimard, 1999 [1981], (ISBN 2-07-032784-1))
1981 : L’ennemi c’est le nihilisme, Genève, Georg, 1981.
1985 : Textes, Fribourg, Le feu de nuict (sic), 1985
1986 : Éclairer l’obscur, Lausanne, l’Âge d’Homme, 1986
1986 : Traduction en français de Philosophie, de Karl Jaspers
1986 : Temps et musique, Fribourg, Le feu de nuict ( [sic]), 1986
1991 : La Suisse, État de droit : le retrait d’Elisabeth Kopp, (J. Hersch, Dir.) Lausanne, L’Âge d’Homme, 1991 (ISBN 2-8251-0186-9).
2008 : L’exigence absolue de la liberté : textes sur les droits humains (1973-1995), MētisPresses, coll. « Voltiges », 2008 (ISBN 2-940406-06-5).

Wikipédia


Site web de la Société Jeanne Hersch

CapturePage

Site web de la Société Jeanne Hersch


Ressources relatives à la recherche :

Cairn

Isidore

Persée

Scopus


Ressource relative à la vie publique

 Documents diplomatiques suisses 1848-1975


Jeanne Hersch, l’exigence de la liberté

TOLERANCE ENTRE LIBERTE ET VERITE – Jeanne Hersch, Philosophica 65 (2000, 1) pp. 71-78 (PDF)

Le point de vue philosophique de Jeanne Hersch sur les droits de l’homme par Giacomoa Costa (PDF)

Hommage à Jeanne Hersch par François-Xavier PUTALLAZ*, Sion (PDF)

Le droit d’être un homme – Recueil de textes – Préparé par Jeanne Hersch (PDF)

LE POIDS DU POUVOIR ET LA LIBERTE par Jeanne Hersch – Philosophica 52 (1993, 2) pp. 45-48 (PDF)




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Mon rapport de lecture

L’étonnement philosophique

Une histoire de la philosophie

Jeanne Hersch

Gallimard, Collection Folio Essai, 1993

J’aime beaucoup ce livre. Les nombreuses mises en contexte historique en lien avec celui dans lequel nous sommes aujourd’hui permettent de mieux comprendre cette histoire de la philosophie et d’éviter les mésinterprétations. L’auteure Jeanne Hersch nous fait découvrir les différentes étonnements philosophiques de plusieurs grands philosophes à l’origine de leurs quêtes d’une meilleure compréhension de l’Être et du monde.

À la lecture de ce livre, j’ai situe beaucoup mieux la philosophie dans le monde des idées, des idées qui innovent, des idées qui se complètent, des idées qui se contredisent, des idées qui questionnent, des idées qui critiquent d’autres idées… Dans ce contexte, les hypothèses développées par les philosophes au cours des siècles demeurent subjectives, sous l’influence de la subjectivité des philosophes. Par conséquent, chacun de nous peut exercer sa liberté d’adhésion aux différentes hypothèses. Je comprends mieux le profit de notre liberté dans ma propre compréhension des différentes philosophies, des différents mouvements philosophiques, et de ma propre subjectivité. Ce qui retient mon attention me livre de sérieux indices sur ma subjectivité.

Cette liberté fut mon étonnement philosophique au cours de cette lecture. Je n’ai plus à m’imposer une adhésion obligatoire parce que je comprends l’objectivité de l’hypothèse avancée par l’un et l’autre des philosophes. Je m’illusionnais. Jeanne Hersch m’a libéré et je suis désormais fort aise de comprendre ou non la logique de chaque philosophe pour m’attarder librement aux idées suggérées par les philosophes.

C’est sans doute le recul exercé par Jeanne Hersch qui me donne cette nouvelle liberté. Elle ne propose pas l’histoire de la philosophie mais bel et bien «Une histoire de la philosophie». On relève dans ce sous titre de son ouvrage une certaine distance face à sa propre compréhension de l’histoire de philosophie. D’ailleurs, Jeanne Hersch ne se gêne pas pour commenter personnellement ici et là certaines idées historiques de la philosophie.


L’École de Milet : Thalès (environ 600 av. J.-C.)

Dans ces temps anciens, la profession de « philosophe » n’existait pas. Les philosophes étaient en même temps des savants, des mathématicien, des géomètres, des astronomes. Ils s’intéressaient aux éclipses du soleil et de la lune, aux nombres et aux calculs, aux figures de la géométrie et à leurs propriétés. Ainsi l’école philosophique la plus ancienne, la célèbre École de Milet, en Asie Mineure, a été fondée par Thalès, l’inventeur du théorème faisant du cercle le lieu géométrique des angles droits construits sur un segment de droite.

Il s’agit donc de puissants esprits, qui étaient, par rapport au savoir de leur temps, des esprits universels. Ce qui suscita avant tout leur étonnement, ce fut le changement. Nous visons dans un monde où tout ne cesse de changer. (…)

La première question se pose à peu près ainsi : « Qu’y a-t-il donc qui persiste à travers tout le changement ? » La première réponse philosophique donnée à cette question fut la suivante : c’est la substance qui persiste dans tout ce qui change et ne cesse de passer. Il doit bien y avoir quelque chose qui se maintient dans l’être ; sinon, il n’y aurait depuis longtemps plus rien.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, l’École de Milet, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 11-12.

Ecole ionienne et Ecole éléate : Héraclite (env. – 550-480 av. J.-C.) et Parménide (env. 500 av. J.-C.)

En ces temps anciens, on s’est encore posé d’autres problèmes, par exemple celui du temps qui passe. On ne le pose pas encore directement, mais en liaisons avec les cycles de l’univers — une idée d’origine orientale, que d’anciens philosophes lièrent à celle de l’éternel retour. Ils supposèrent un vaste cycle universel, englobant la totalité des changements, et comme ils admettaient rien ne se perd, ils admirent un perpétuel recommencement, un « éternel retour ».

Nous allons maintenant considérer deux écoles, contemporaines et contrastées, l’École ionienne, dont le grand philosophe fut Héraclite, et l’École éléate, dont le grand philosophe fut Parménide.

(…)

Héraclite reprend la question posée à Milet : Qu’est-ce qui persiste à travers le changement ? Sa réponse : le changement lui-même.

Le changement, c’est l’être des choses. (…)

(…)

Retenons donc ceci : Héraclite met l’accent sur le multiple, sur les contraires, sur le changement, sur le combat, sur l’écoulement. La seule substance, c’est pour lui le changement lui-même. Mais il y a un principe régulateur, le logos.

Parménide était contemporain  d’Héraclite et son grand adversaire. Il fonda l’École éléate.

La pensée d’Héraclite se développe à partir du monde qu’il a sous les yeux, du changement, des données sensibles, de l’univers naturel. La pensée de Parménide se fonde sur les exigences de la logique. Il affirme avec une puissance exceptionnelle les principe d’identité et il l’installe dans l’être même. Ainsi les impossibilités logiques so9nt du même coup des impossibilité ontologiques (au niveau de l’être). Il dit : Je peux dire « L’être est », mais je ne peux pas dire « les non-être est ». Pourquoi ? Parce que ce serait une contradiction, ce serait me contredire.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Héraclite et Parménide, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 14-18.

Zénon (env. 490 – 430 av. J.-C.)

Zénon d’Élée fut un disciple de Parménide. Il inventa des sophismes et des paradoxes. En grec, sophos signifie « sage » ; les sophismes sont des raisonnements qui ont l’air vrais et qui sont pourtant manifestement faux. Il y a eu recours pour venir en aide à son maître.

Quand Parménide disait : seul l’être existe, il n’y a pas de non-être, le devenir et l’éphémère n’appartiennent qu’au domaine de l’opinion, non de la vérité. ses paroles heurtaient par trop l’expérience quotidienne des hommes. Zénon, pour combattre cette évidence empirique trop puissante, entreprend de montrer que si le mouvement et le changement règnent en effet sur notre expérience de la réalité, nous sommes pourtant incapables de les penser.. Toute une série de sophisme lui serviront à la prouver. En voir un exemple, particulièrement simple et beau : un archer tend son arc et fait partir une flèche. Cette flèche trace une trajectoire dans l’espace. Zénon, fait observer ceci : vous voyez cette flèche. À un certain instant, elle se trouve en un lieu A de sa trajectoire. Un peu plus tard, elle occupe le lieu B. Entre les deux, elle a occupé un lieu A, et entre le lieu A et le lieu A, elle a occupé un lieu A ». A tout instant, la flèche a occupé un lieu déterminé.

(…)

Zénon touche ainsi, avec une simplicité qui émerveille, la problématique du mouvement en son centre.

(…)

Zénon d’Élée nous montre que, tout bien considéré. nous ne pensons pas le mouvement. Certes, nous voyons voler la flèche, mais nous ne pouvons pas penser son mouvement parce que notre esprit est fait pour l’immuable, l’identique, l’éternel. Et pourtant, nous voici vivant et peinant dans ce monde où tout est éphémère et changeant.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Zénon, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 23-24.

Socrate (470-430 av. J.-C.)

Socrate était d’origine modeste. On a souvent fait de lui un portrait contrasté avec celui de son disciple, Platon. Platon, aristocrate, beau comme un dieu, Socrate, lourd et laid. Il n’était pas un grand orateur, selon le goût antique. Seul de toute la tradition philosophique européenne, il n’a pas écrit une ligne. Et pourtant, c’est ce philosophe qui a exercé la plus forte influence au cours des siècles.

Pourquoi n’a-t-il rien écrit ? On peut supposer que ce fut parce qu’il ne croyait pas à une vérité séparable de celui qui l’énonce et de l’instant où elle est énoncée.

Pour lui, les « vérité » ne sont pas comme des choses, elles sont philosophiques. Qu’est-ce donc un vérité philosophique ?

Une vérité philosophique n’est pas simplement un énoncé se rapportant de façon adéquate à un état de fait objectif, indépendamment de celui qui parle ou qui écrit. C’est un énoncé par lequel un être humain responsable, libre, assume une vérité, la fait sienne, la fait « vérité » par la manière dont il s’engage envers elle. C’est dire que pour Socrate, une vérité dite théorique est toujours en même temps une vérité pratique, qui dépend de celui qui la saisit — de l’action qu’elle exerce sur lui, de ce qu’elle fait de lui. On l’appellerait aujourd’hui vérité existentielle.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Socrate, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 27.


La question principale posée par Socrate fut : comment faut-il vivre pour vivre selon le bien ? Nous le voyons : sa préoccupation centrale est bien différente de celle des penseurs précédents. Il est le premier à s’être étonné de cette obligation qu’a l’être humain de diriger sa vie, d’orienter ses actes vers le bien, selon des voies qu’il lui faut trouver lui-même.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Socrate, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 29.


Selon Socrate, donc, nous ne faisons le mal que par ignorance. Par conséquent, si nous voulons connaître le vrai et développer en nous notre exigence du vrai, il nous faut co9mmencer par travailler sur nous-mêmes. D’où la célèbre maxime de Socrate : « Connais-toi toi-même ». Connais-toi toi-même, la formule n’a rien à voir avec des interprétations psychanalytiques, avec l’introspection, avec la contemplation intérieure.

Nous connaître nous-même, cela signifie : découvrir en nous la racine la plus profonde de notre sens pour le vrai, mais aussi les faiblesses et les manques de cette racine ; découvrir également notre non-savoir ; nos tendances à l’illusion ; notre penchant à nous tromper nous-mêmes. Tout cela est contenu dans le « Connais-toi toi-même ».

Il ne s’agit pas d’un simple regard dans le miroir de la réflexion, d’une façon de se voir et de se décrire. Il s’agit d’une action. Ici encore, au cœur de l’influence socratique s’unissent théorie et pratique.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Socrate, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 31-32.

Platon (427-347 av. J.-C.)

Les Idées

Toute prétention à une connaissance, toute possession d’un savoir doit être en quelque sorte traversée et dépassée afin que soit aiguisé par là le sens que nous avons du vrai, du bien. Telle est l’intention centrale de la pensée platonicienne. Au coeur de cet enseignement, nous trouvons la théorie des idées. Platon est le philosophe des Idées.

On peut dire que Platon a repris l’ancien problème posé par l’école de Milet : qu’est-ce qui persiste à travers le devenir éphémère ? Tout passe, tout ce que nous percevons à travers nos sens finit par dépérir et disparaître. Qu’y a-t-il donc de permanent ? Réponse de Platon : ce sont les Idées. Que sont-elles, ces Idées ? Elles sont la vraie vérité, celle dont dérive l’être des choses dans le monde.

Les Idées ne sont pas « réelles » dans le même sens que les choses. Elles sont, en un, être et valeur. Elles sont source de l’être des choses, et, en même temps, source du bien. L’être est en même temps valeur. L’être est valeur. Être, c’est valoir.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Platon, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 37-38.


Au niveau des choses sensibles, nous ne pouvons, selon Platon, avoir que des opinions, plus ou moins probables, puisque le réalité empirique elle-même appartient au domaine de l’approximation. La connaissance vraie n’existe qu’au niveau des Idées. L’homme se tient dans l’entre-deux, entre le monde sensible et les Idées. Il ne peut pas renoncer aux idées car – qu’il veuille ou non – elles lui sont essentielles; il ne peut pas davantage négliger les choses sensibles car – qu’il le veuille ou non – c’est à travers elles qu’il doit cherche à se ressouvenir.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Platon, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 41.

Aristote (384 -322 av. J.-C.)

Le système d’Aristote représente un sommet, mais un sommet d’une sorte différente de l’œuvre de Platon. Celle-ci domine la pensée philosophique par son intensité et sa profondeur. La réflexion qu’elle exige fait mûrir l’esprit dans toutes les directions.

Chez Aristote, nous trouvons l’une des trois grandes synthèses réalisées par la pensée philosophique au cours de son histoire. Dans l’Antiquité, au Moyen-Âge, à l’époque moderne, il y eut chaque fois un philosophe pour tenter d’unifier en un système tout le savoir de son temps : Aristote, Thomas d’Aquin, Hegel. Leurs œuvres constituent les trois plus grands système de la pensée européenne.

Systèmes

Il ne faudrait pas s’y tromper : aucun des ces synthèses ne représente un simple somme de savoir, ni même une simple mise en ordre du savoir à l’intérieur du système, qui serait comme une armoire bien rangée. Un système, c’est autre chose, c’est un concept, en philosophie, assez difficile à cerner.

Certains philosophes ont horreur de tout système, nécessairement mensonger par nature à leur yeux : l’image qu’ils donnent d’un savoir unitaire se refermant sur lui-même est contraire dans son essence à une pensée vraiment philosophique. (…)

D’autres penseurs, à l’inverse, comme par exemple Aristote, refusent, au nom de l’exigence philosophique elle-même, de s’en tenir à des problèmes partiels ou ponctuels, et leur réflexion a besoin de s’achever dans un tout. Ils considèrent que toute démarche philosophique a pour tâche de donner forme à une totalité.

Aujourd’hui, on abuse souvent du concept de totalité, mais bien employé il remplit en philosophie une fonction légitime et nécessaire. L’esprit philosophique naît de l’unité d’une personne. Il témoigne de l’unité d’un processus de pensée. La signe extérieur de l’unité d’un sujet spirituel, c’est justement la forme unitaire qu’il donne à ce que sa pensée produit. Cette unité qu’il nous présente, c’est justement son système. Un système, c’est l’invention, la création d’une forme. Pour un penseur systématique, tout le savoir de son temps, qu’il organise en un système, est comme le matériau dont se sert un artiste. Il donne forme par le système, qui est du même coup son interprétation du matériau. Mais il y a plus : la forme systématique imprègne de son sens, en profondeur, toute la matière qu’elle contient.

Rien de plus révélateur que d’approfondir la nature de l’élément systématique des grandes œuvres qui constituent des systèmes. C’est là qu’on peut découvrir, plus encore que dans les énoncés particuliers, la figure essentielle, le « geste » fondamental qui, du point de vue philosophique, caractérise chacune d’elles.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Aristote, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 51-53.


La philosophie, exige Aristote, doit s’interroger sur l’être en tant qu’être.

Nous saisissons ici l’extrême tension de cette pensée entre son intérêt passionné pour réalités concrètes singulières et son exigence philosophique : il faut connaître la cause première, l’être en tant qu’être.

L’être en tant qu’être, nous nous sommes déjà interrogés à son sujet, et au sujet de son rapport avec les réalités éphémères du monde sensible : c’était chez Parménide. La doctrine de l’être, c’est l’ontologie. Poser la question « qu’est-ce que l’être ? », c’est poser une question ontologique.

Aristote appelle l’être en soi, ou l’être en tant qu’être, substance. L’École de Milet se servait de cette notion, Parménide également. Mais Aristote pose la question avec une netteté nouvelle. La substance, l’être en tant qu’être, qui fait que quelque chose est, sera considérée en elle-même. La philosophie devient tentative de connaissance de la substance, donc essentiellement ontologie.

La science a pour objet d’étude ce qui est en mouvement, ce qui passe, ce qui est perceptible par les sens. La philosophie en revanche, en tant qu’ontologie, en tant que métaphysique – ici on peut à peu près employer ces deux mots l’un pour l’autre – vise l’être, qui est immuable. Non pas immuable au sens où il exclurait tout devenir et tout dépérissement, mais au sens où il reste l’être à travers tous les changements. Ceux-ci n’atteignent pas l’être. L’être « porte » les changements, il fait que les choses qui changent sont, mais il est lui-même immuable en tant qu’il est l’être, et rien d’autre.

Il me faut prévenir un malentendu possible. La cause première dans parle Aristote ne doit pas être comprise comme « commencement » du monde. Il ne s’agit pas de cela. Il s’agit de la cause première fondamentale, qui porte dans l’être tout le reste.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Aristote, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 56-57.


Revenons au concept de cause, si central dans la pensée d’Aristote. Au sens moderne, le terme « cause » s’applique dans une série cohérente dont chaque terme est un effet du terme précédent et cause du terme suivant. Chez Aristote, le sens du mot est différent. Ce qu’il appelle cause de quelque chose, c’est en somme une des conditions de réalité de cette chose. Toutes les conditions de la réalité d’une chose s’appellent des causes.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Aristote, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 59.

Les Épicuriens (IVème et IIIème siècles av. J.-C.)

Épicure vécut à la fin du IVème et IIIème siècle. Le poète Lucrèce, qui vécut à Rome au 1er siècle avant J.-C., a développé dans doctrine dans un long et célèbre poème intitulé De rerum natura (De la nature).

La doctrine épicurienne se divise en trois parties.

La première, c’est la canonique ou logique, qui contient l’ensemble des normes et des règles nécessaires à la recherche de la vérité. La seconde, c’est la physique, c’est-à-dire la théorie de la nature, où les normes et les règles de la première partie sont mises en œuvre. La troisième, la plus importante et la raison d’être des deux autres, c’est la morale, qui détermine les buts à poursuivre dans la vie et qui nous donne les moyens de les atteindre.

Selon les épicuriens, le but de la philosophie – de la morale éclairée par la canonique et la physique -, c’est d’aider les hommes à trouver le bonheur. Mais ce qu’ils appelait bonheur, c’était avant tout la sérénité de l’âme. Il s’agit de réaliser un état intérieur de paix, de calme, que les épicuriens appelaient ataraxie. Cette ataraxie, c’était le contraire d’une indifférence, ou d’un laisser-aller. Elle avait pour fondement une radicale indépendance intérieure à l’égard de toute menace qui pourrait survenir, comme aussi à l’égard de toutes les sources de plaisir. Le point central, c’est le refus de s’asservir à quelque chose que ce soit. Devenir dépendant à l’égard d’un plaisir – pas seulement d’une drogue -, c’est devenir vulnérable au-dehors, c’est exposer sa paix intérieure, et donc son bonheur à une menace de privation ; car tout ce qui est extérieur, et à quoi nous sommes tentés de nous soumettre, peut nous être pris.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Les épicuriens, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 73-74.


Le sage est heureux et sûr de son bonheur, car il ne craint aucune perte. Il ne redoute ni la fin du monde, ni la mort, ni les dieux.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Les épicuriens, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 79.

Les Stoïciens (IIIème siècle av. J.-C.)

La structure de la doctrine stoïcienne est semblable à celle de la doctrine épicurienne. Elle aussi comporte trois parties, dont la troisième est la plus importante. Elle a le même but : enseigner comment il convient de vivre. Tout ce qui, en elle, n’est pas d’ordre moral sert en vérité à préparer la morale, C’est la morale (l’éthique) qui est ici l’essentiel, Ici encore on trouve une logique (ou théorie de la connaissance), un physique (ou théorie de la nature), dont on finit par tirer des conclusions quant à un juste comportement des hommes.

La logique stoïcienne est complexe. Nous n’en retiendrons ici qu’un seul élément : ce qu’elle appela l’aperception compréhensive. Ce terme désigne une impression claire, évidente, produite dans l’âme par les choses. Par sa clarté, cette impression emporte le consentement de l’âme, ce qui fonde la savoir et la science. On peut dire que l’aperception compréhensive est une forme particulière de l’«expérience de l’évidence» dont nous sommes capables. Faire l’expérience de l’évidence, c’est saisir par la pensée une représentation synthétique dont les éléments constitutifs imposent la cohérence au point qu’ils forment un tout. Quand nous disons : je saisis, je comprends,, nous déclarons qu’une évidence s’est imposé à notre esprit. Nous avons « vu » une certaines évidence briller entre les éléments divers, avec un éclat qui exclut toute espèce de doute. L’aperception compréhensive, par la clarté avec la quelle son unité synthétique est perçue, s’impose ainsi à l’esprit avec la force de l’évidence.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Les stoïciens, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 80-81.


Il n’y a plus guère aujourd’hui, autour de nous, d’épicuriens ou de stoïciens. Et pourtant il se pourrait que chacun d’entre nous ait encore en lui quelque chose de l’un et de l’autre.

Nous ne pouvons plus être des épicuriens : notre civilisation est trop active, son tissu trop serré, comportant pour chacun trop de chances et de menaces, pour que nous nous contentions de gérer notre compte personnel de plaisir et de douleur. D’autre part, des siècles d’histoire cruelle et douloureux approfondissements nous ont rendus trop vulnérables – et aussi trop conscient de notre vulnérabilité – pour que l’héroïsme impassible des stoïciens nous soit encore accessible.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Les stoïciens, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 86.

Saint Augustin (354 – 430 ap. J.-C.)

(…) Augustin trouve la célèbre formule : credo, ut intelligam. Non pas : je crois, bien que je comprenne, ou bien : je crois mais je veux comprendre, mais à l«,inverse : je crois pour comprendre. Nous saisissons ici ce qui caractérise essentiellement l’attitude du croyant à l’égard de la raison.

Il nous faut aller à la racine. Quiconque se contente de rejeter une telle manière de penser en tant que « dépassée » ou en tant que « démarche philosophique impure » s’interdit toute possibilité de véritable compréhension philosophique. Cette manière de penser ne livre son sens qu’à celui qui consent à la reproduire existentiellement. Au fond, elle n’a de sens que pour le croyant. Le non-croyant qui désire malgré tout saisir ce sens doit par conséquent, dans toute la mesure du possible, imiter intérieurement l’attitude du croyant, faute de quoi il ne lui reste qu’à la mettre de côté – ce qui n’est pas, à vrai dire, une solution philosophique.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Saint Augustin, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 92.


Une courte parenthèse : la remarque que nous venons de faire ne concerne pas le seul problème du temps, elle met en lumière, par cet exemple, un trait essentiel de la pensée philosophique en général. La pensée philosophique ne peut se déployer que lorsque celui qui pense use de sa liberté. Penser philosophiquement, c’est penser avec sa liberté. La liberté n’est pas seulement un « organe » de décision, elle est aussi un « organe » de la pensée. En philosophie, elle fait partie de notre « appareil » de connaissance et de compréhension. C’est pourquoi, quand nous posons un problème philosophique, nous ne pouvons pas en isoler et en objectiver les termes et faire abstraction de nous-mêmes.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Saint Augustin, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 99-100.

La philosophie médiévale – Thomas d’Aquin (1225 – 1274)

Nous reprenons, plus de six cents ans après Augustin, aux environs de 1100, la philosophie médiévale.

Pourquoi la philosophie médiévale porte-t-elle le nom de scolastique ? Ce mot vient du latin schola, qui veut dire « école ». Il s’agit donc d’une philosophie d’école. La pensée scolastique se développe dans le cadre de l’église chrétienne. Elle obéit au principe que nous avons déjà mentionné : Fides quaerens intellectum, « La foi à la recherche de la compréhension ».

Nous verrons que quelques exemples de cette recherche – ce qui ne signifie nullement qu’il s’agisse d’une période où la pensée fut primitive ou maladroite. En fait, les scolastiques, en discutant sur les rapports de la foi et de l’entendement, ont élaboré un langage philosophique dont les concepts sont remarquablement précis et profonds. En comparaison, les moyens d’expression de maints philosophes modernes apparaissent grossiers et simplistes. Il est vrai que les subtiles distinctions des scolastiques ont parfois conduit à une virtuosité artificielle et purement verbale : mais beaucoup de termes qu’ils ont créés pourraient encore donner plus de clarté et de concision au style philosophique contemporain.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, La philosophie médiévale, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 107.

Thomas d’Aquin (1225 – 1274)

Il y a donc pour le théologien quelque chose de donné au départ, et un verrou qui arrête l’interrogation. Dans la philosophie proprement dite, en revanche, qui n’est pas imprégnée de théologie, ni subordonnée à elle, l’interrogation est radicale. Cela signifie que nous pouvons continuer à poser toutes les questions qui se présentent aussi longtemps qu’il s’en présente ; rie nous nous arrêtera ; et nous pouvons poser nos questions avec une énergie telle que nous n’aurons d’égard pour rien d’autre que pour l’exigence de notre quête ; de telle sorte que les résultats de notre réflexion pourront finalement se tourner contre l’autorité, contre ses interprétations, contre le Livre*.

Le chemin de la philosophie n’a probablement pas de fin. Certains philosophes ont tellement écrit que leurs œuvres remplissent à elles seules une bibliothèque – pensons par exemple à Hegel. Peut-être ont-ils tant écrit justement parce que ce qu’ils voulaient vraiment écrire, ils n’ont jamais pu l’exprimer. Au cœur d’un système comme celui de Hegel, une question reste béante. Certains penseurs repoussent les problèmes non résolus vers l’extérieur du système, Chez d’autres, ces problèmes rentent au centre et les répandent de là dans l’œuvre entière. Mais un édifice achevé, statique, qui couronnerait une recherche philosophique, cela n’existe pas.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Thomas d’Aquin, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 124-125.

 * Le « livre » : « (…) la pensée théologique possède au départ un savoir préalable – du moins dans la tradition européenne. Au départ, il y a déjà un Texte sacré, un Livre, une Révélation, une Institution, une Église, donc : des autorités ou une autorité. »

La Renaissance (XVème et XVIème siècles)

On ne peut pas délimiter clairement cette période, pendant laquelle se prépare l’époque moderne.

Elle bouillonne d’idée nouvelles. Institutions, croyances, systèmes de pensée sont contestés ou profondément transformée. Le bouleversement des idées, leur diversité, les attitudes nouvelles, la mise en question des valeurs et de leur hiérarchie, les facteurs de dissolution et de recréation font penser à notre temps. Toutes les interprétations deviennent possibles, même les plus diverses, les plus contradictoires. Des tendances opposées s’affirment simultanément.

Ainsi, l’époque est marquée par une volonté de retour à l’expérience. Alors que la scolastique s’attachait avant tout aux textes (que dit Aristote ? que dit l’écriture ? que dit l’Encyclique ?), des méthodes empiriques s’élaborent, permettant d’interroger directement la nature.

D’autre part, la raison jusqu’alors limitée dans ses démarches par son accord nécessaire avec les dogmes et l’Écriture, se libère totalement et conquiert le droit d’imaginer. (On se plant souvent aujourd’hui de ce que l’intelligence des enfants soit développé au dépend de leur imagination. Mais c’est méconnaître une vérité fondamentale : l’intelligence elle-même doit être imaginative, sinon elle n’est pas intelligence.)

La raison libérée lors de la Renaissance, imagine donc : de nouveaux schèmes de pensée, de nouvelles questions, de nouvelles méthodes. Elle envisage des hypothèses inédites et élabore des modèles neufs.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, La Renaissance, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 126-127.


(…) La Renaissance agite les esprits d’aujourd’hui, avec raison : nous cherchons à travers elle à comprendre où nous allons.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, La Renaissance, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 133.


Nicolas de Cuse (1401-1464)

Il est philosophe que l’on peut considérer comme étant la charnière entre le Moyen Âge et la Renaissance : c’est Nicolas de Cuse, Il a été le dernier grand penseur médiéval. Et pourtant il a été considéré par Bruno, par Kepler, et même plus tard par Descartes, comme celui à qui revient le mérite ou la faute – selon le jugement que l’on porte à ce sujet – d’avoir affirmé que l’univers était infini.

Comment a-t-il acquis cette conviction ? Dès le XIIIè siècle on avait, recourant à une métaphore, décrit Dieu comme étant un sphère dont le centre est partout et la circonférence nulle part. Cette définition reconnaît à Dieu l’ubiquité et le dépouille de toute spatialité.

Nicolas de Cuse transposa cette description de Dieu pour l’appliquer à l’univers. D’après lui, l’univers a son centre partout et sa circonférence nulle part, puisque c’est Dieu qui est son centre et sa périphérie, et que Dieu est partout et nulle part. Cette formulation remarquable montre que la représentation rationnelle de l’univers infini n’a pas été d’abord une découverte de la science, mais qu’elle provient d’une impulsion religieuse : elle est né de l’idée de Dieu, ou plutôt de l’échec de toute idée de Dieu, projeté ensuite sur l’univers. Cela se passait au début de la Renaissance.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, La Renaissance, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 133.

René Descartes (1576-1650)

Pour Descartes, le modèle idéal que la pensée doit tenter de rejoindre, c’est le modèle mathématique.

Cette admiration pour la pensée mathématique, nous la retrouvons constamment chez les philosophes depuis Pythagore. Ce qui provoquait leur admiration, souvent mêlée d’envie, c’était la clarté, la transparence parfaite du raisonnement et l’évidence contraignante, l’apodicticité, qui en résultait.

À notre époque, en revanche, nombreux sont les penseurs qui considèrent avec une certaine condescendance le rationalisme d’un Descartes. Fiers de notre savoir psychologique, de notre psychanalyse, de la conscience que nous avons prise de l’ambiguïté, de la complexité, de l’interpénétration de l’esprit et du corps, de l’individuel et du social, du naturel et de l’historique, etc., nous sommes facilement tentés de juger simpliste la claire pensée classique du XVIIe siècle.

Je voudrais ici au contraire reconnaître que nous ne sommes plus guère capables aujourd’hui de revivre en profondeur l’expérience intellectuelle que l’évidence mathématique représentait pour les penseurs de ce temps. Ils admiraient les mathématiques justement parce qu’elle leur procuraient l’expérience de l’évidence, et que leur sens pour l’évidence était vif, alors qu’en nous il s’est émoussé. Nous apprenons à l’école à démontrer que les trois angles d’un triangle valent deux droits. Une fois la preuve acquise, elle reste inerte dans le cahier ou le livre. Nous n’en vivons pas l’évidence, ou à peine. Nous ne l’intégrons pas dans notre expérience.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, René Descartes, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 136-136.


Pour rester sur le terrain de la certitude, il lui fallait élaborer des concepts et des raisonnements ne permettant aucune erreur. Il pose donc l’exigence des concepts clairs et distincts. Je voudrais insister sur ce point car nous vivons en un temps où beaucoup se servent avec prédilection de concepts confus, gonflée ou ambigus. Un concept est clair lorsqu’il est parfaitement défini, c’est-à-dire nettement délimité par rapport à d’autres concepts. Et un concept est distinct lorsque sa compréhension apparaît à l’esprit avec une parfaite transparence. La clarté préserve pour ainsi dire le pourtour du concepts ; la distinction, ce qui est à l’intérieur de ce pourtour. Il nous faut des concepts clairs et distincts afin que nous puissions penser selon la vérité.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, René Descartes, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 141.

Spinoza (1632-1650)

Baruch de Spinoza naquit à Amsterdam, dans une famille de Juifs portugais, et il passa toute sa vie en Hollande. Pour lui, rien au monde n’avait autant d’importance que l’indépendance de sa pensée et son indépendance d’être humain. Il gagna sa vie en polissant des verres de lunettes. Toute sa vie, il vécut dans une relative pauvreté, et lorsqu’il mourut il fallut que Leibniz et quelques autres amis assument les frais de ses funérailles et s’occupent de ses manuscrits.

Il n’avait, de son vivant, publié que deux œuvres : les Principes de la philosophie cartésienne, et le Traité théologico-politique. Et comme ses œuvres, la seconde surtout, déclenchèrent un vaste scandale, Spinoza résolut de ne plus rien publier. C’est ainsi que la plupart de ses ouvrages ne parurent qu’après sa mort – entre autres son œuvre principale, l’Éthique, l’un des grands chef-d’œuvre de la philosophie occidentale.

Spinoza n,avait que quarante-cinq ans lorsqu’il mourut. Il aurait pu avoir une vie bien différente : on lui avait offert une chaire à l’Université de Heildelberg, l’une des plus fameuse de ce temps. Il refusa, pensant qu’il y perdrait son indépendance, qu’on ne le laisserait pas penser et enseigner ce qu’il croyait.

Indépendance à tout prix, tel est le trait caractéristique de sa vie et de sa pensée. ce trait nous paraît d’autant plus impressionnant que nous considérons la notion dont il a fait le centre de sa philosophie. Cette notion, c’est celle de la nécessité. Indépendance-nécessité, avec un trait d’union, c’est Spinoza.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Spinoza, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 149-150.


(…) Nous nous trouvons dès lors au cœur de la pensée de Spinoza : liberté et nécessité ne font qu’un. Finalement, la liberté est nécessaire, la nécessité est liberté. Mais il nous faut suivre le chemin qui conduit à un tel résultat et qui lui donne son sens.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Spinoza, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 151.


Revenons encore une fois au rapport liberté-nécessité chez Spinoza, pour essayer maintenant de le saisir plus concrètement, grâce à une expérience personnelle.

Chacun d’entre nous, lorsqu’on l’interroge, s’efforce de justifier une décision qu’il a prise en en donnant la ou les raisons. Il arrive cependant que cette décision se soit imposée même sans les raisons qu’il évoque, parce qu’elle s’enracine au plus profond de son être. Lorsqu’il en est saisi, il sent bien que les raisons alléguées, dans être fausses, restent insuffisantes et n’atteignent pas le fond. Il a pris cette décision parce que, étant celui qu’il est, il ne pouvait pas agit autrement.

C’est de cela qu’il s’agit : être libre à un tel point qu’on ne peut agir autrement, c’est vivre la coïncidence de la liberté et de la nécessité. Une telle expérience, qu’il nous arrive de faire dans notre vie personnelle, où nous éprouvons que nous n’aurions pas pu agit autrement, est comme le signe d’une décision jaillie de l’absolu de notre liberté.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Spinoza, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 160-161.

Leibniz (1646-1716)

(…) Aucune science de son temps ne lui resta étrangère. En mathématique notoamment, il a inventé le calcul différentiel. (…)

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Leibniz, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 165.


Chez Descartes , on s’en souvient, la substance de la « chose étendue » (res extensa), c’était l’étendue elle-même des corps, à la différence de l’espace vide, abstrait, de la géométrie, qui n’est qu’un espace conçu. L’étendu, et non l’espace, constituait à ses yeux la véritable essence des corps.

Leibniz s’interroge aussi sur la substance – c’est une que question que nous connaissons depuis l’école de Milet. Mais pour lui, l’étendue ne saurait être la substance des choses. La substance des choses, c’est l’énergie. Il conçoit l’énergie comme le principe de l’activité, un principe qui est constamment en action si on ne l’entrave pas. Leibniz ne part donc pas d’une réalité inerte, pour se demander ensuite comment le mouvement peut intervenir. Au contraire : il part d’un principe d’activité, et il s’agit ensuite de comprendre ce qui peut empêcher d’agir. Ce sont les obstacles qui entravent l’activité qu’il s’agit d’expliquer. Le point de départ, c’est donc une énergie originelle, qui dans son état présent contient en elle le passé tout entier, comme aussi, dans un certain sens, l’avenir. Elle est grosse de tout le possible futur. Pour exprimer cela, Leibniz utilise un concept auquel il donne la plus grande importance : celui de puissance. (On se souvient de l’ «être en puissance » chez Aristote.) L’énergie est l’activité qui contient en elle l’avenir, pour autant que rien ne vienne l’empêcher d’advenir.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Leibniz, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 166-167.

L’empirisme anglais

John Locke (1632-1704)

En abordant la philosophie anglaise, nous changeons de climat.

Deux traits caractérisent ces penseurs : 1) au niveau du savoir, c’est expérience sensible qui est pour eux fondamentale et 2) au niveau de l’éthique, ils s’attachent avant tout à la manière dont les hommes organisent leur vie commune dans la société et l’État.

Ainsi, l’empirisme des Anglais et leur sens civique sont étroitement liés. La plupart des penseurs continentaux se sont intéressés à la fois à la connaissance de l’absolu et à l’action. S’ils croient avoir atteint une certaine connaissance de l’absolu, ils s’efforcent d’en tirer une éthique sociale. Les Anglais, en revanche, développent leurs vertus civiques tout en évitant, dans la mesure du possible, de se référer à un absolu.

Il y a dans l’absolu, à leurs yeux, quelque chose d’exclusif qui s’oppose à l’adaptation, alors que la vie normale dans un État implique que l’on consente à s’adapter. Ils ont donc tendance à faciliter les compromis nécessaires à la vie civile en laissant l’absolu hors du jeu. Ils se fondent sur des constatations et des expérience, ou alors sur des accords ou des traités, qui n’ont rien d’absolu, qui ne prétendent à aucune validité éternelle, et auxquels on peut jusqu’à un certain point s’adapter. On perçoit chez eux une préférence pour ce qui est relatif – qui correspond peut-être, étrangement, à un sens profond qu’implique historiquement concret et d’unique tout acte de libre décision.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, L’empirisme anglais – John Locke, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 184-185.


Bien que Locke ait vécu dans la deuxième moitié du XVIIe siècle, il s’apparente par bien des traits aux penseurs du XVIIIe siècle. Il a fait des étude de médecine.

Comme d’autres penseurs anglais, il combat la théorie platonicienne des idées innées. Il n’y croit pas. Descartes l’avait acceptée, Leibniz à sa manière aussi. Locke argumente ainsi : il ne peut rien y avoir dans l’esprit sans que l’esprit en ait conscience. On le voit, Locke rejette radicalement « les petites perceptions » qui, sans devenir claires dans la conscience, assurait chez Leibniz la continuité et d’identité de la nomade. Locke ne reconnaît donc que la conscience claire, et ce trait aussi est caractéristique. Pour lui, il y a contradiction à dire que quelque chose est dans la conscience sans être conscient. Il rejette tout recours à la réminiscence, à la virtualité, etc. Il rejette donc l’idée d’une connaissance originelle absolue, que nous aurions eue dans une vie antérieure à l’existence terrestre.

L’âme commence donc par être une tabula rasa. Locke veut inciter les philosophes à tenir les yeux ouverts face au monde réel, c’est-à-dire celui de l’expérience. Toutes nos idées sont des idées acquises, et non innées ; et elles ont été acquises grâce aux sensations.

Les idées n’ont qu’une source : l’expérience. Il y a deux sortes d’expérience : l’expérience extérieure, qui provient des sensations, et l’expérience intérieur. Sans les sensations, l’esprit ne peut rien faire – quand il en est privé il tourne à vide ; car l’âme, d’abord, n’est rien. Selon Locke, nous ne pensons jamais avant d’avoir des sensations. D’abord sentir, après penser. Locke appelle nos sensations des idées simples, idée  signifiant ici représentation, matière première de la connaissance. L’esprit, par son travail, en fait des idées composées en comparant les idées entre elles, en dégageant des abstractions, tec.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, L’empirisme anglais, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 185-186.

George Berkeley (1685-1753)

(…) Nous prenons pour des choses sensibles des idées. Tout ce qui existe n’existe qu’en tant que perçu par un sujet percevant.

Berkeley aboutit ainsi à la célèbre formule double : esse est percipe (être, c’est être perçu) ou : esse est pefcipere (être, c’est percevoir). L’être n’existe pas en soi, mais seulement en tant qu’il est perçu. Or, pour qu’il soit perçu, il faut qu’il y ait quelqu’un qui perçoive. D’où la seconde formule : être, c’est percevoir. Les deux seules formes d’existences qui nous soient accessibles sont celle de percevoir et celle d’être perçu. Si nous tentons de nous représenter une réalité qui ne soit ni l’un ni l’autre, nous n’obtenons qu’un être illusoire, une non-chose. Les idées (perceptions) ne peuvent en aucune façon être causes d’autre chose puisqu’elles sont, par rapport à nos sens, d’une totale passivité. La cause des idées, ce ne sont pas les choses, c’est l’esprit qui perçoit. L’esprit est un être simple, indivisible, actif, qui produit la perception en percevant. Mais il ne faudrait pas cherche une quelconque « idée de l’esprit » car cela serait contradictoire : idée signifie passivité, esprit signifie activité.

Berkeley énonce la formule : les idées sont les choses mêmes. Aujourd’hui nous dirions : les représentations des choses sont les choses (mêmes). Ou, autrement dit : les choses ne sont rien d’autre que les représentations que nous en avons. Cette conception porte le nom d’idéalisme absolu.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, L’empirisme anglais – George Berkeley, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 191-192.

David Hume (1711-1776)

Hume est un penseur écossais du XVIIIe siècle. Il pose la même question que les autres empiriste : comment la connaissance est-elle possible ? Que connaît-on quand on connaît ? Où sont les limites de la connaissance ? Selon les empiristes, l’unique source de la connaissance est la perception sensible, donc l’expérience, la rencontre avec le donne. (Mais pour Berkeley déjà il n’y avait aucun donné hormis les perceptions et l’esprit qui perçoit.) Hume demande si l’homme est capable de résoudre le problème de l’être : « Qu’est-ce que l’être ? » Il répond ainsi : pour aborder cette question, il faut adopter une attitude critique.

Nous verrons bientôt que ce terme, « critique », va jouer un rôle essentiel pour Kant, qui le fera figurer dans les titres de ses trois principaux ouvrages. Par la suite, la mode s’en est mêlée et le mot a perdu la précision de son sens.

Philosophiquement, le terme « critique » a un sens très précis, qui provient de cette époque. Une attitude critique consiste en ceci : l’esprit s’examine lui-même, observe ses opérations et ses méthodes, afin de décrire clairement son propre appareil à connaître, d’en saisir le nature et d’en apprécier la portée et la validité – au lieu de se tourner vers les objets qui l’entourent. Il s’agit de se connaître soi-même, mais non pas tant comme sujet moral ou existentiel (Socrate), que comme sujet connaissant. Que fait l’esprit qui cherche à connaître ? Quelle est l’essence de ce qu’on appelle « comprendre » ? Quelles sont les opérations fondamentales assurant la connaissance ?

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, L’empirisme anglais – David Hume, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 195-196.


La question la plus importe posée par Hume concerne la causalité : qu’est-ce que la causalité ? Provient-elle de notre esprit ? Faut-il admettre que notre esprit, dès qu’il entre en action, implique déjà la finalité ? Ou la causalité est-elle au contraire dérivée de nos perceptions sensibles ?

(…)

La causalité, selon Hume, dérive donc simplement de l’expérience des successions constantes. Nous constatons que deux phénomènes se produisent toujours l’un après l’autre et nous disons que le premier est cause du second. Ainsi donc l’idée de causalité, avec l’élément des nécessité qu’elle implique, résulte tout simplement de l’habitude empirique de successions qu’on voit se produire constamment, sans qu’il y ait eu d’exception.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, L’empirisme anglais – David Hume, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 196-197.

Emmanuel Kant (1724-1804)

Kant va nous occuper plus longtemps que les autres philosophes. Il a en effet transformé radicalement, en profondeur, les perspectives et les concepts de la pensée philosophique. Si nous négligions Kant, nous ne comprendrions pas grand-chose à tout le développement philosophique ultérieur, y compris aux nombreux penseurs qui ne se sont vraiment mis à philosopher pour le combattre. C’est chez lui qu’ils ont trouvé les moyens d’expression nécessaires à leur attaque.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Emmanuel Kant, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 201.


Kant a dit de Hume qu’il l’avait tiré de son sommeil dogmatique. Qu’était-ce donc que ce « sommeil dogmatique » ? Kant était comme emprisonné dans le vaste système, cohérent, assuré, construit par Leibniz – dans une philosophie embrassant un savoir si riche et si rigoureusement organisé qu’il est possible de s’y tenir et d’y vivre. Le « sommeil dogmatique », c’est le contraire de l’attitude critique. Kant vivait, content, exempt de doute critique, à l’intérieur d’un doctrine solide.

Hume, en revanche, en mettant en question la connaissance elle-même, en s’interrogeant sur le concept de causalité, à tiré Kant de son sommeil dogmatique. Et si Kant s’est éveillé, ce n’est pas que la pensée du Hume lui donnait satisfaction ; au contraire : c’est qu’elle ne le satisfaisait aucunement. Hume a posé le problème de la causalité, et il l’a résolu d’une manière inacceptable pour Kant. C’est ce qui l’éveilla – par un processus bien caractéristique pour la philosophie.

Kant s’étonne. Il s’étonne, fait au fait que la science, en général, puisse exister ; qu’il y ait un savoir nécessaire et universel.

Il avait pour Hume la plus grande admiration. Or Hume affirme que la causalité ne repose que sur l’habitude. Kant, épris de la certitude et de l’évidence des mathématiques, où tout doute est exclu, ne peut se satisfaire d’une telle explication : l’habitude est incapable de fonder aucune sorte de certitude. Hume a eu le grand mérite de poser le problème du fondement de la causalité, en un temps où la physique se fondait sur le déterminisme. Aujourd’hui, la causalité a perdu quelque chose de l’importance exclusive qu’elle avait pour la physique au XVIIIe siècle, pour laquelle elle était une exigence absolue et décisive.

Ainsi donc, Kant se dit qu’il est impossible de fonder une science qui se veut certaine sur quelque chose d’aussi incertain que l’habitude.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Emmanuel Kant, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 202-203.


(…) Cela veut dire : croire n’est pas en contradiction avec la raison. Cela ne signifie pas qu’il y ait un domaine où la raison a des droits, et un autre où elle n’en a pas. Mais comme notre nous révèle elle-même ses limites, il est raisonnable de les reconnaître. Là où, dès lors, on ne peut ni démontrer ni réfuter, il est permis de croire – et on croit, ou bien on ne croit pas. Citons encore la célèbre phrase de Kant : « Il me fallait limiter le savoir pour faire place à la croyance. »

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Emmanuel Kant, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 226.

De Kant à l’idéalisme allemand

On dit souvent de Kant qu’il représente le sommet des Lumières. Et l’on désigne par les Lumières la foi optimiste et exclusive que son époque mettait dans la raison humaine, en tant qu’instrument adéquat pour la connaissance du monde, sans aucun compromis avec une aide quelconque d’origine surnaturelle ou irrationnelle. La raison serait autosuffisante pour la morale, l’État, la religion ; elle suffirait à garantir – pour peu qu’on s’en serve correctement – le progrès de l’humanité. L’homme, dès lors, se tenait pour indépendant, l’humanité n’avait pas d’autre fin qu’elle même, que son propre épanouissement.

Il faut comprendre que, dans ce sens, Kant n’est nullement le sommet des Lumières ; il en est le dépassement.

Il engage l’homme dans un processus sans fin, dans un combat qui n’aura pas de terme, non pas vers l’extérieur, mais vers l’intérieur, un combat contre sa propre finitude et sa propre relativité, qu’il lui faut pourtant découvrir et reconnaître. Ainsi, lorsque Kant parle des chemins qui s’ouvrent à l’homme, il introduit aussitôt des facteurs de limitation, de rupture, de discontinuité, de non-totalité. Et lorsqu’il justifie cet effort à accomplir sans fin comme étant nécessaire à cause précisément des indépassables limites et des irrémédiables ruptures, il s’affirme comme un penseur anti-démiurgique, au sens le plus profond. Il n’est pas permis à l’homme de se prendre pour le double du Créateur. Il n’engendre rien dans l’être en soi, il ne lui ajoute rien ; au sens ontologique il n’a rien d’un créateur.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, De Kant à l’idéalisme allemand, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 255-256.

Georg Wilhelm Friedrich Hegel (1770-1831)

Il nous faut maintenant comprendre pourquoi les deux premiers concepts, l’être et le non-être, sont dits par Hegel « abstrait », alors que le devenir, cette première synthèse, est un concept concret.

Il emploie ces mots de façon très particulière. Si l’être et le non-être sont des concepts abstrait, c’est au sens étymologique de ce terme « abs-trait », qui signifie : tiré hors de…, séparé de… Pour Hegel, l’être est un concept abstrait parce qu’il est unilatéral, exclusif. Il ne se prête à aucune combinaison avec autre chose. La négation n’y a pas encore pénétré. Son antithèse, le non-être, est un concept abstrait, lui aussi, parce qu’il exclut de soi l’être, il se maintient dans son stérile isolement. En revanche, le devenir est le premier concept dans lequel être et non-être se fondent pour engendre quelque chose de nouveau. « Concret » vient de concrescere, concretum, croître ensemble, se lier dans une croissance commune. Ce sens de de « concret » et d’« abstrait » est très important pour qui veut comprendre la pensée de Hegel.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Friedrich Hegel, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 264.


Hegel a dit : « Le soleil et la lune ont moins d’influence sur nous que les forces morales et sociales. » Nous sommes loin désormais de la grande tradition classique, selon laquelle une grande personnalité impose son exemple en toute indépendance du lieu, du temps et de l’histoire où elle se situe. Selon Hegel, mous sommes immergés dans l’histoire et la société. Et désormais, après Hegel, c’est ainsi que l’homme moderne continuera à se concevoir lui-même.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Friedrich Hegel, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 274.

Auguste Comte (1789-1857)

Nous allons nous occuper de penseurs beaucoup moins considérables, mais qui essayé, chacun à leur manière, à l’époque de la science et en étant eux-même fascinés par la connaissance scientifique, de poursuivre et de renouveler l’effort de la révolution philosophique.

Voyons d’abord un penseur français, ne l’année de la Révolution française, qui vécut pendant la première moitié du XIXe siècle : Auguste Comte. Il a été le fondateur de ce qu»’»on a appelé l’École positiviste. Aujourd’hui, ce terme de « positiviste » a pris souvent une nuance péjorative : quand ont traite quelqu’un de « pur positiviste », on veut dire qu’il ne s’est pas encore libéré d’une foi excessive, naïve, dans le pouvoir de la science et qu’il en est resté dépendant comme on l’était au XIXe siècle.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Auguste Comte, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 280-181.


(…) L’ouvrage le plus célèbre d’Auguste Comte, le Cours de philosophie positive, a été publié entre 1830 et 1842. « Positif » n’a donc nullement chez lui le sens d’un contraire de « négatif », mais bien du contraire de « spéculatif » : une théorie est « positive » lorsqu’elle est scientifiquement fondée sur des faits. Une « philosophie positive » ne doit présenter aucune trace de métaphysique et ne s’occuper que d’un classement des faits et des lois. Ainsi, Cours de philosophie positive développe une philosophie que ne repose que sur des faits et des lois, qui ne s’intéresse à rien d’autre et qui n’admet rien d’autre.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Auguste Comte, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 282-183.

Karl Marx (1818-1883)

Sigmund Freud (1873-1939)

Je voudrai ici faire un rappel : on s’en souvient, au Ve siècle avant J,-C. le principe fondamental de Socrate était : « Connais-toi toi-même. » Serait-il possible de faire un rapprochement entre la célèbre maïeutique de Socrate et la méthode psychanalytique de Freud ? Ne pourrait-on pas mettre en exergue de l’œuvre de Freud la devise socratique elle-même : « Connais-toi toi-même » ?

Tous deux s’attachent à l’idée authentiquement philosophique selon laquelle l’homme a pour tâche de se connaître « lui-même ». Que signifie « toi-même » ou « moi-même » ? Pour Socrate, le « moi-même », c’est le libre sujet moral qui cherche le bien, et pour qui le bien est toujours au-delà de ce qu’il a déjà atteint. Cela signifie que chez Socrate, il y a dans le « Connais-toi toi-même » quelque chose que nous, en langage moderne, appellerions « existentiel » : le sujet s’appréhende dans sa liberté essentielle en voyant devant lui un bien qui ne pourra jamais lui appartenir. La connaissance de soi qui est ici visée est une connaissance visant la liberté, ou une connaissance à travers la liberté. Pour Socrate, z se connaître soi-même », c’est se demander quel est le bien, quelle est la justice, quel est le bonheur – autant de concepts qui n’ont un sens que pour la liberté, mais qui n’ont aucun sens objectif au sens des choses qui sont tout juste ce qu’elles sont.

Freud, en revanche, inspiré par l’esprit scientifique de son temps, en énonçant l’exigence « Connais-toi toi-même », demande à l’homme de découvrir son inconscient, qui est en quelque sorte en lui une donnée empirique, mais refoulée. L’inconscient est à la fois donné et dissimulé. Nous pourrions aussi avoir recours à Kant : la chose en soi, la liberté en tant que chose en soi – quelque chose de tout autre que chez Freud. Kant se tient aux côtés de Socrate, mais non pas Freud.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Sigmund Freud, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 316-317.

Henri Bergson (1859-1941)

Changement de direction : nous allons considérer maintenant des penseurs qui ont fortement réagi contre les tendances du monde contemporain aux diverses superstitions scientistes. Ils se sont efforcés de reconquérir justement ce qui, étant essentiel et d’un grand poids, ne se laisse maîtriser par la science. Il s’agira, d’une part, d,Henri Bergson, en France, et d’autre part, de Nietzsche en Allemagne, et de Kierkegaard, au Danemark.

La philosophie d’Henri Bergson constitue une réaction spécifique à tout le courant de pensée qui comptait avant tout sur la science pour expliquer l’essence de l’homme et de la société, et permettre ainsi de résoudre les problèmes posés par la condition humaine. Sa réflexion se développa à contre-courant, contre une Sorbonne et un environnement culturel largement dominés par le positivisme et la crédulité scientiste d’Auguste Comte. Aujourd’hui, nous vivons dans une monde tout différent. Nous pourrions dire, dans un certain sens, que le succès de Bergson en son temps a réduit l’influence sur la postérité. Il a consacré toutes ses forces à enfoncer des portes qui aujourd’hui nous paraissent ouvertes, mais qui étaient à son époque solidement closes. (…)

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Henri Bergson, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 328.


Bergson souligne combien il est difficile à l’homme de se libérer de ses besoins et de ses intérêts pratiques, par lesquels il se trouve asservi à la fois à son intelligence mécaniste et à son aveugle instinct, afin de parvenir à la connaissance du vivant que seule permet cette sympathie désintéressée qu’il appelle « intuition ». Pour réussir il lui faut pour ainsi dire s’opposer à lui-même jusqu’à ce qu’il s’ouvre à une autre réalité et à une connaissance d’un autre ordre.

Cela ne nous rappelle-t-il pas l’histoire du captif dans la caverne de Platon ? Il a fallu que ce captif se détourne du monde des ombres, des prévisions compétentes concernant leur succession, à propos desquels ses compagnons faisaient preuve de tant d’habileté. il a fallu qu.il s’arrache à la sécurité des ses habitudes quotidiennes, pour se mettre à grimper vers la sortie de la caverne. Là, devant le monde des Idées, il fut saisi d’un éblouissement, et il dut s’exercer à regarder leurs ombres et leurs reflets dans l’eau avant de devenir capable de supporter la vue su souverain bien lui-même. Mais il est finalement retourné dans la caverne, où tous alors se moquèrent de son incompétence et de sa maladresse. Tel pourrait bien être le sort de celui qui aurait conquis, à grand effort, la capacité de l’intuition. Par la sympathie celle-ci est capable de fondre en elle l’immédiateté de l’instinct avec la capacité de connaître de l’intelligence, ce qui permet à la conscience de s’ouvrir à la profondeur de la vie.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Henri Bergson, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 350.

Sören Kierkegaard (1813-1900)

Nous commençons par Kierkegaard. Pour lui, comme pour Nietzsche, il est important, plus que pour des penseurs anciens, de savoir ce que fut sa vie. C’est là encore un trait de la modernité : la réflexion philosophique ne peut plus être séparée de la biographie. Nietzsche et Kierkegaard ont vécu leur philosophie, et leur philosophie est issue de leur vie. Mais non pas dans un sens naturaliste, comme si nous pouvions dériver leur pensée des données sociales, politiques, familiales de leur existence. Tous deux tenaient passionnément à authenticité et à la crédibilité de ce qu’ils exprimaient. Tous deux avaient la rhétorique en horreur lorsqu’elle se prend elle-même pour fin. Lorsque leur ton devient pathétique, c’est le plus souvent malgré eux. Ils ont souvent tourné leur ironie contre eux-mêmes, tenant leurs réflexions à distance de leur vie vécue, comme si celle-ci risquaient d’être compromises par les insuffisances de leur existence propre. Il faut donc avoir une certaine connaissance de leur vie pour pouvoir les comprendre.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Sören Kierkegaard, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 353-354.


 Qu’est-ce que l’existence ? Pour Kierkegaard, il s’agit du surgissement de la liberté responsable d’un sujet. Un exemple pour illustrer ce concept : on peut, considérant les choses de l’extérieur, voir de l’eau couler, des branches tomber, une personne accomplir un acte – et tout cela se passe dans le même temps, qu’il s’agisse de l’eau qui coule, des branches qui tombent, de l’homme qui accomplit un acte. Mais l’acte librement accompli de l’homme ne peut pas être dérivé de ce qui s’est passé avant dans ce temps qui est commun à la nature et à l’homme qui agit. L’acte de l’homme provient de ce qui s’est passé au cœur de sa subjectivité et c’est pourquoi il en assume lui-même la responsabilité. En agissant, il ne se laisse pas simplement insérer dans la série des causes et des effets, il n’est pas simplement lui-même un effet d’autre chose, mais il devient une sorte d’absolu commencement. Il insère, dans la texture des causes et des effets, son acte libre venu d’une origine différente, il accompli un rupture, que l’existentialisme, ou philosophie de l’existence, appelle rupture existentielle.

Le terme « existence », avec cette signification, vient de Kierkegaard. C’est lui qui lui a donné ce sens. Dès lors, le verbe « exister » a pris en philosophie une nouvelle signification. Il ne signifie plus seulement : la présence de quelque chose dans le réel. Il faut revenir à son étymologie, comme l’a fait Heidegger : ek-sistere signifie : émerger hors du magma des choses, provoquer une rupture, n’est pas le dérivé d’une continuité homogène.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Sören Kierkegaard, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 362-363.

Friedrich Nietzsche

La séduction poétique que Nietzsche n’hésite pas à mettre en œuvre ne change rien au fait que sa volonté de vérité était une passion dévorante. Mais pour lui, comme pour Kierkegaard, la vérité qu’il s’agit de sauver et de réhabiliter se situe au-delà du concept de vérité objective que connaît la recherche scientifique. Ce n’est pas qu’il veuille dénigrer ou dévaluer la vérité objective ou rationnelle des sciences. Mais celle-ci, selon Nietzsche, dépend de ses prémisses et n’est pas toute la vérité. La vérité philosophique vise quelque chose qui est au-delà de cette simple vérité de surface. Nietzsche a mis l’accent sur l’interprétation, et c’est une raison de plus qui explique l’influence qu’il exerce aujourd’hui. On a été, de nos jours, jusqu’à dire qu’il n’existe en général aucune vérité, qu’il n’y a que des interprétations, et des interprétations d’interprétations, à perte de vue. Ainsi, on entend dire qu’il y a de la naïveté, lorsqu’on explique un texte, à vouloir atteindre ce que l’auteur a vraiment voulu dire. Car il n’existe en réalité aucun texte originel, à proprement parler, et encore moins un sens originel. Nietzsche ne pensait pas ainsi, mais il est certainement l’un des auteurs qui ont le plus contribué au développement de cette tendance. Selon lui, tout savoir est interprétation de l’être par un sujet vivant qui cherche à connaître. La vérité ne peut donc pas se maintenir comme étant quelque chose de solide et d’indépendant du sujet. Elle est toujours déjà interprétation. Dans sa théorie interprétative de la vérité, Nietzsche a exprimé ce doute profond, resté fiché comme un aiguillon au centre de la raison qui cherche la vérité. Il se heurta ainsi à une imite indépassable pour la conscience, et il vécut du même coup l’exigence existentielle d’aller au-delà.

Nous n’avons jamais la vérité clairement en face de nous, nous nous efforçons de la saisir telle qu’elle est, donc indépendamment de nous. Mais malgré tout, une relation essentielle persiste entre la vérité à connaître e celui qui la connaît. La qualité de ce rapport entre un sujet et la réalité qui lui est donnée est elle-même un élément constitutif de la vérité qu’il cherche. Par conséquent, toute interprétation se trouve être à la fois objective et subjective; il n’existe pas d’objectivité pure, que l’on trouverait en dehors du sujet et qui serait totalement indépendante de lui. Il ne peut s’agir que d’une objectivité médiatisée, imprégnée par la vie de celui qui l’énonce, et liée à sa subjectivité. Nous rencontrons ici à nouveau la subjectivité dont nous avons vu la signification qu’elle prenait chez Kierkegaard pour l’expérience religieuse. Mais ici, chez Nietzsche, il s’agit de la vérité philosophique elle-même, telle qu’il est possible de l’atteindre indépendamment de toute foi — ou plutôt : telle qu’il est à jamais impossible de l’atteindre.

Il ne faudrait pourtant pas croire que Nietzsche invoque la subjectivité pour être moins exigeant envers la vérité. Beaucoup de nos contemporains, trop paresseux ou trop engagés pour chercher vraiment la vérité objective, se réfèrent à Nietzsche pour avancer l’argument que l’accord du sujet suffit à constituer la vérité. Non. Si Nietzsche a développé cette théorie, c’est au contraire parce qu’il se faisait une idée bien plus exigeante et bien plus profonde de la vérité que ceux qui se contentent du donné objectif.

C’est donc par passion de la vérité que Nietzsche doit s’interroger: comment la vérité se constitue-t-elle? Comment pouvons-nous l’atteindre? Lorsqu’on s’engage sur ce chemin, on découvre qu’il est impossible d’en prendre tout à fait possession. Et nous retrouvons ainsi le thème du dépassement. La quête de la vérité est une tâche sans fin, elle exige une faim de vérité illimitée et insatiable, et la vérité elle-même vit dans l’acte de dépasser toute prétendue vérité.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Friedrich Nietzsche, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 377-379.

Après Kierkegaard et Nietzsche

Dans un langage plus explicite, cela signifie : il n’est pas de pensée moderne qui puisse se dispenser de passer par le nihilisme ou par l’impossible philosophique. Impossible de s’installer à mi-chemin. Ces penseurs ne sont donc pas des modèles à suivre, mais des appels qu’il faut percevoir, ou plutôt, des exigences auxquelles il faut répondre. Et c’est pourquoi, après Kierkegaard, après Nietzsche, une certaine liberté — qui n’est pas seulement la faculté de prendre une décision, mais celle de connaître et de transcender — est absolument indispensable à la réflexion philosophique. On se rend, je crois, la tâche trop facile lorsqu’on consent, avec une certaine complaisance ou du moins une dose de paresse, à s’installer dans un pessimisme irrémédiable au sujet de notre monde occidental, déclaré vide de sens et de valeur. Ce qui permet d’y trouver une bonne place en se sentant supérieur à tout. Personne n’a réfléchi à cette situation avec plus de passion et de radicalité que Nietzsche et Kierkegaard, chacun à sa manière, et leur condamnation semble sans appel. Mais il est vain de la répéter. Ce qui est nécessaire, c’est de la comprendre, de la prendre au sérieux et d’aller au-delà ; de voir s’il est possible d’aller au-delà. Pour ancrer la liberté de l’homme par-delà les dénonciations, les mises à nu, de Kierkegaard et de Nietzsche, il faut pénétrer dans le nihilisme, le traverser et le dépasser.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Après Kierkegaard et Nietzsche, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 390-391.

Edmund Husserl (1859-1938)

Après Nietzsche et Kierkegaard, la pensée philosophique se développe selon trois directions principales. L’une de ces directions est la phénoménologie, dont l’initiateur a été le philosophe allemand Edmund Husserl. La seconde est la philosophie de l’existence ou existentialisme. Quant à la troisième, dont nous ne ferons qu’indiquer le début, elle n’est pas une philosophie à proprement parler, elle se divise et se subdivise, pour ainsi dire, selon les diverses sciences sociales et humaines.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Edmund Husserl, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 392.


D’abord il se bat contre la psychologie et l’introspection. Il ne veut en aucun cas et d’aucune manière être confondu avec ceux qui prétendent trouver le fondement de la certitude dans la description d’états de conscience intérieurs. Il souligne avec insistance — et selon nous, à juste titre — que les états psychiques que nous pouvons observer, par exemple à l’aide de l’introspection, sont des objets pour nous, tout autant que les objets du monde extérieur; ce sont, certes, des objets psychiques, mais néanmoins des objets. En cela il est encore fidèle à Kant, car pour Kant aussi, tout ce que nous pouvons décrire de notre conscience est déjà de la conscience objectivée. En tout cas, ce n’est pas a priori. Husserl ne veut pas être de ceux qui se contentent de descriptions introspectives du psychisme, et qui en viennent ainsi à se perdre dans le subjectivisme, c’est-à-dire dans une sorte d’empirisme. Et l’on en arrive bientôt, comme les empiristes anglais, à l’idéalisme. Pensons à Berkeley. Husserl ne veut rien avoir à faire avec une objectivation de la conscience, et d’une façon générale avec la psychologie. Ce qu’il cherche doit être immédiat et originel.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Edmund Husserl, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 395-396.


Sa devise bien connue « Allons aux choses mêmes ! » n’appelle nullement à un réalisme naïf. Elle signifie qu’il est indispensable de saisir l’essence de la conscience si l’on veut comprendre comment un « étant quel qu’il soit devient accessible à la conscience intentionnelle ».

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Edmund Husserl, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 398.


Ce qui subsiste alors sans être touché par la réduction phénoménologique, c’est la conscience, qui constitue en principe une région de l’être particulière, et qui peut devenir le domaine d’une science nouvelle — de la phénoménologie. Cette région de l’être, nous pouvons peut-être l’illustrer par une image. Prenons une feuille de papier. Sur l’une de ses faces se trouvent les phénomènes de l’expérience, sur l’autre face, ce qui se produit dans la conscience. Nous sommes enclins à prendre en considération l’une ou l’autre face du papier. Mais dans la méthode phénoménologique de Husserl, ce dont il s’agit c’est en quelque sorte ce qui se passe à l’intérieur de la feuille de papier, c’est-à-dire le donné même des phénomènes, l’activité de la conscience, grâce à laquelle ce donné est rendu possible.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Edmund Husserl, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 401.

Martin Heidegger (1889-1976)

Le rapport de Heidegger au langage est si particulier que ses « pensées fondamentales » ou sa « doctrine de base » ne peuvent être fidèlement reproduites que dans ses propres termes. Il a forgé tant de mots nouveaux, ou employé tant de mots anciens autrement que selon l’usage courant ou la tradition, qu’il est impossible de les faire comprendre brièvement. Les termes dont il se sert ne sont pas traduisibles par d’autres, ils ne se laissent en aucune façon séparer du mouvement philosophique qui s’accomplit à travers eux et en eux. Cette impossibilité me prouve à nouveau combien Heidegger était sur la défensive : ses pensées refusent de se laisser toucher sans leur cuirasse verbale. Au fond, ce n ‘est pas là une défensive philosophique (car un philosophe s’efforce toujours de dire encore une fois autrement ce qu’il a pensé), c’est une défensive poétique : c’est en effet une qualité fondamentale de toute poésie que d’être comme elle est et de ne pas pouvoir être autrement — elle ne se laisse ni traduire ni expliquer.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Martin Heidegger, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 410-411.


Heidegger fait donc une distinction entre « étant » et « être ». L’étant doit son être à l’être, et l’être n’est qu’en tant qu’étant. Et pourtant — c’est décisif — l’étant « dissimule » l’être. Prenons un exemple : voici un crayon sur la table ; il est en bois, il est jaune, avec une pointe dorée, et il écrit noir. Ce crayon est un étant, mais son être n’est pas en bois, il n’est ni jaune ni doré, et l’on ne peut pas se servir de son être pour écrire. D’autre part, son être n’est pas non plus quelque chose qui subsisterait si l’on retranchait le bois, la couleur jaune, la pointe dorée, l’écriture noire. L’être n’est pas « ce qui reste ». Il disparaîtrait lui-même avec toutes les qualités sensibles et avec l’utilité du crayon, et pourtant il est « quelque chose d’autre » que ces qualités et cette utilité. Dans ce sens, on peut dire que les qualités et l’utilité de l’étant dissimulent son être.

Il y a encore autre chose, selon Heidegger, qui contribue à dissimuler l’être de l’étant ou à l’obscurcir — en même temps que le sens de la question posée à son sujet —, c’est l’habitude, et surtout l’habitude « qui va sans dire », qui ne soulève aucun problème, qui consiste à se servir de l’étant conformément à son utilité — donc : le fonde de la technique tout entier, comme aussi celui des sciences exactes. Lorsqu’il s’adonne à de telles activités, ! sujet se perd dans l’anonymat du « on » impersonnel et devient incapable de poser authentiquement la question e l’être de l’étant.

Or, c’est seulement par la découverte du vrai sens de cette question primordiale qu’une quête de la vérité devient possible.

Pour expliquer le sens de la vérité, Heidegger a recours au mot grec aletheia : « ce qui n’est plus caché ». Il le traduit, entre autres, par le mot Entschleierung (« dévoilement ») et il entend par là le dévoilement de l’être. Pour lui, la vérité ne réside jamais dans une cohérence rationnelle, mais dans une « vision » de l’être qui, d’abord « dissimulé par les outils disponibles », se dévoile dans la question primordiale (Urfrage).

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Martin Heidegger, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 413.

Karl Jaspers (1883-1969)

Pendant les années les plus amères qu’il eut à vivre en Allemagne sous le national-socialisme, il trouva en lui- même — comme il le dit — assez de paix pour se plonger dans l’étude du problème en apparence le plus abstrait du monde : il essaya d’élucider le problème de la vérité et développa une Logique philosophique. Il examina les prémisses des méthodes générales de pensée, en se plaçant au point de vue et dans la perspective de la philosophie. Il s’agissait pour lui de comprendre, de manière à la fois plus claire et plus critique, ce qu’était la rationalité des sciences de la nature et, grâce à cette élucidation préalable, d’éclairer le rapport de cette rationalité avec la réflexion et la foi philosophiques. C’est ainsi qu’il mit en lumière ce qui constitue le paradoxe fondamental de la philosophie : dans la science, on a toujours un objet de recherche, mais en philosophie on n’en a pas. Pourquoi pas ? Ce que la philosophie cherche, au fond, c’est l’être même. Nous touchons ici à la racine kantienne de la pensée de Jaspers — et kantienne, elle l’est profondément. Pensons à la Subjekt-Objekt-Spaltung, à la scission sujet-objet. En science, cette scission règne partout, elle est claire : le chercheur étudie une réalité qui se trouve en face de lui, qui est pour lui objective. Mais la philosophie demande : qu’est-ce que l’être ? L’être n’est ni subjectif ni objectif, ou bien il est l’un et l’autre. Si j’essaie de penser une synthèse de sujet et d’objet —, je n’y arrive pas : le sujet est toujours ce que je suis et qui pense un objet, quel qu’il soit, et fut-il quelque chose dans ma propre conscience. La philosophie n’a pas d’objet ; elle est ce « penser » particulier, qui n’a pas d’objet. Son être « englobe » (umgreift) le sujet et l’objet ; il est, comme dit Jaspers, « un englobant » (ein Umgreifendes).

Mais quelle peut bien être la justification d’un « penser » qui n’a pas d’objet ? En science, on procède à la vérification des hypothèses; en logique, on examine la cohérence de la conduite de la preuve. Mais que peut-on faire en philosophie ?

Loin de nier le caractère précaire de la réflexion philosophique, Jaspers l’a mis fortement en lumière. Il le reconnaît : elle n’est, en effet, ni « contraignante » ni « généralement valable ». Elle est autre chose, et donc quelque chose de précaire. On peut toujours la « réfuter » parce qu’elle n’est pas « vraiment scientifique », parce que le philosophe ne peut jamais définitivement « prouver » ce qu’il affirme.

Mais alors, comment la philosophie a-t-elle pu se maintenir en vie au cours des millénaires ? Pour continuer à vivre, elle a besoin du consentement de l’élève. Cela n’implique nullement que l’élève doive penser la même chose que le maître ; mais il faut qu’il commence par consentir au mode de penser du maître, qui est un mode de penser philosophique. Ensuite il trouvera lui- même, par la pratique même de la philosophie, la justification existentielle de sa propre pensée.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Karl Jaspers, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 429-430.


Nous touchons ici à un caractère essentiel de la philosophie, et qui explique pourquoi certains philosophes ne comprennent rien à certains autres. Dans la mesure où la philosophie s’adresse à l’existence possible, c’est-à-dire à la liberté, il lui faut user d’un langage indirect, qu’un autre penseur comprend ou ne comprend pas. Ce sont des langages qu’on ne peut pas rendre objectivement homogènes ou comparer entre eux. Aux yeux de certains philosophes, c’est là une manière de se dérober à tout critère et de se réfugier dans un subjectivisme pur. Mais, à mon avis, c’est qu’ils se refusent simplement à voir la condition humaine telle qu’elle est, et non pas telle que Jaspers, ou la philosophie, l’aurait inventée. Lorsque l’être humain, en tant que possible liberté, cherche à éclairer l’existence, il ne dispose évidemment pas d’un langage direct, universellement valable, qui ne pourrait être qu’objectif. Aussi recourt-il à un langage indirect, dont la portée se mesure à son efficacité ; ce langage ne peut être ni technique ni objectif; il éveille la liberté en se faisant comprendre d’elle.

Le langage scientifique n’est universellement contraignant que lié à un point de vue, à une méthode, à un stade de la connaissance atteint au moment où il est utilisé. Ce qu’il énonce est donc contraignant pour tout esprit normal, mais de manière relative, alors que le langage qui éclaire l’existence n’est jamais universellement valable et contraignant, puisqu’il s’adresse à la liberté d’autrui — mais il se réfère à l’absolu.

Si donc on veut comprendre un certain philosophe, il est absurde de commencer par le refuser. Pour le comprendre, il faut d’abord consentir à penser avec lui, en lui < prêtant » sa propre liberté. Si cette liberté s’y refuse, on ne le comprendra jamais. Nous trouvons ainsi chez Jaspers deux pôles opposés, celui de la validité contraignante, mais relative, et l’autre, où s’éclaire l’absolu. La relativité se trouve du côté de la validité universelle, l’absolu du côté de l’éclairement, qui ne contraint jamais personne.

Tels sont les deux pôles de cette philosophie. Mais alors une question se pose : pourquoi constatons-nous que, tout au long de l’histoire de la philosophie, les philosophes n’ont cessé d’argumenter et d’enchaîner les déductions logiques ? Ils se sont toujours efforcés d’éviter les contradictions, d’avancer des démonstrations cohérentes et bien liées — et Kant plus que quiconque. Mais si l’on examine ces raisonnements de plus près, on découvre que, par-delà leur validité contraignante, ils possèdent une efficacité différente, par laquelle ils modifient l’esprit de celui qui les lit. Souvenons-nous : nous avons vu, à propos de Platon, que lorsque nous lisons un de ses dialogues, nous ne sommes plus les mêmes, à la fin de notre lecture, que ceux que nous étions au commencement.

La philosophie est un domaine étrange. Elle argumente en cherchant des points d’appui dans l’objectivité et la rationalité, et pourtant elle s’attend à être comprise, justement à travers cette argumentation, par une possible liberté, par une existence qui « mime » sa démarche afin de saisir en elle-même ou de devenir quelque chose de plus essentiel que cette démarche même.

Je suis convaincu qu’elle ne peut pas renoncer à ce double aspect, justement parce qu’il correspond à la situation qui est celle de l’homme. Quand l’homme cherche le vrai, c’est le vrai absolu qu’il cherche ; mais chercher le vrai absolu implique, pour l’homme, prendre appui sur l’objectivité et la rationalité — et reconnaître en même temps que les conditions en sont prisonnières de la scission sujet-objet, ce qui signifie que l’être ne saurait se laisser réduire à une connaissance de cette sorte.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Karl Jaspers, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 439-441.

La philosophie aujourd’hui

En même temps, des théories se répandent, selon lesquelles les problèmes fondamentaux de la philosophia perennis ne sont pas du tout de véritables problèmes : ils ne se posent qu’à cause du langage, par suite de formulations diverses, et il suffirait de les énoncer autrement pour les voir s’évanouir.

Cette évolution ne concerne pas seulement les problèmes de la philosophie. Ce que les hommes tenaient jusqu’ici pour le monde qui leur était « donné » a perdu sa réalité. Il n’y a plus que des interprétations ou des conventions concernant cet univers, qui découlent de langues naturelles diverses, ou alors des langues artificielles créées par les sciences. Par-delà l’expression verbale il n’y a pas de réalité, et par conséquent les « problèmes » ont cessé de se poser.

Ces sciences humaines et sociales procèdent comme les termites dans le bois : elles vident la philosophie par l’intérieur et réduisent en poudre ses mises en question et ses recherches du sens. Elles ne proposent pas de solutions à ses problèmes, elles les dissolvent, en dissolvant la réalité, l’être même. La possibilité de poser la question disparaît, avec le sens pour la vérité.

Les causes en sont aussi nombreuses que diverses. L’une d’entre elles me paraît évidente : plus une civilisation est évoluée, plus la langue et les langages spécialisés y prennent de l’importance. Dans notre société occidentale, l’« homme cultivé » vit la plus grande partie de sa vie dans le langage. Le résultat est qu’il prend l’expression par le langage pour la vie même.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, La philosophie aujourd’hui, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 457.


Wow ! Quel bouquin ! Je distingue nettement mieux LA philosophie DES philosophies à la suite de ma lecture de L’étonnement philosophique de Jeanne Hersch. Je demeure avant tout un adepte de LA philosophie comme mode de pensée, premier pas pour un mode de vie. Je m’attarde plus spécifiquement à la philosophie de la connaissance, aux « Comment nous pensons ? », « Comment nous prenons conscience ? », « Comment nous visons la connaissance ? », etc.

J’aime plus particulièrement l’épistémologie lorsqu’elle se demande « Qu’est-ce que la connaissance et le connu ? » ou simplement « Qu’est-ce que la connaissance ? » À lecture de L’étonnement philosophique de Jeanne Hersch, je constate que ces questions et bien d’autres sur la connaissance et son acquisition par l’homme a passionné et passionnent encore presque tous les philosophes, chacun ayant sa propre idée sur les réponses à apporter.


ÉPISTÉMOLOGIE

  1. Étude critique des sciences, destinée à déterminer leur origine logique, leur valeur et leur portée (théorie de la connaissance).
  2. Théorie de la connaissance ; « étude de la constitution des connaissances valables » (Piaget). Épistémologie génétique.

Le Robert – Dico en ligne


C’est quoi une étude épistémologique ?

Partie de la philosophie qui a pour objet l’étude critique des postulats, conclusions et méthodes d’une science particulière, considérée du point de vue de son évolution, afin d’en déterminer l’origine logique, la valeur et la portée scientifique et philosophique (cf. philosophie* des sciences, empirisme* logique).

Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales


Bref, je me questionne sur la pensée philosophique elle-même. Dans le livre L’étonnement philosophique de Jeanne Hersch, je trouve de nombreuses pistes de réflexion sur la pensée philosophique, qu’il soit question d’esthétique, d’éthique, de logique, de métaphysique, de morale, d’ontologie,de théologie, etc.

À mon humble avis, la connaissance de la connaissance en notre conscience avec la prise de recul nécessaire s’impose comme le premier pas du philosophe. Comment JE connais ?


5-etoiles

J’accorde 5 étoiles sur cinq au livre L’étonnement philosophique :
Une histoire de la philosophie de Jeanne Hersch paru chez Gallimard, Collection Folio Essais (n° 216) en 1993.

J’en recommande fortement la lecture.


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Articles du dossier

Liste des rapports de lecture et autres articles

Article # 1 : Introduction

Témoignage de ma recherche personnelle au sujet de la philothérapie (philosophie + thérapie) ou, si vous préférez, de la pratique de la philosophie en clinique. Il s’agit de consultation individuel ou de groupe offert par un philosophe praticien pour nous venir en aide. Elle se distingue de la « psychothérapie » (psychologie + thérapie) en ce qu’elle utilise des ressources et des procédés et poursuit de objectifs propres à la philosophie. On peut aussi parler de « philosophie appliquée ».

Article # 2 : Mise en garde contre le copinage entre la philosophie et la psychologie

La philothérapie gagne lentement mais sûrement en popularité grâce à des publications de plus en plus accessibles au grand public (voir l’Introduction de ce dossier).

L’un des titres tout en haut de la liste s’intitule « Platon, pas Prozac! » signé par Lou Marinoff paru en français en l’an 2000 aux Éditions Logiques. Ce livre m’a ouvert à la philothérapie.

L’auteur est professeur de philosophie au City College de New York, fondateur de l’Association américaine des praticiens de la philosophie (American Philosophical Practitioners Association) et auteurs de plusieurs livres.

Article # 3 : Philothérapie – Libérez-vous par la philosophie, Nathanaël Masselot, Les Éditions de l’Opportun

Présentation du livre Philothérapie – Libérez-vous par la philosophie suivie de mes commentaires de lecture.

Article # 4 : Sur le divan d’un philosophe – La consultation philosophie : une nouvelle démarche pour se connaître, changer de perspective, repenser sa vie. Jean-Eudes Arnoux, Éditions Favre

Présentation du livre Sur le divan d’un philosophe – La consultation philosophie : une nouvelle démarche pour se connaître, changer de perspective, repenser sa vie suivie de mes commentaires de lecture.

Article # 5 : Philosopher pour se retrouver – La pratique de la philo pour devenir libre et oser être vrai, Laurence Bouchet, Éditions Marabout

Cet article présente et relate ma lecture du livre « Philosopher pour se retrouver – La pratique de la philo pour devenir libre et oser être vrai », de Laurence Bouchet aux Éditions Marabout. Malheureusement ce livre n’est plus disponible à la vente tel que mentionné sur le site web de l’éditeur. Heureusement on peut encore le trouver et l’acheter dans différentes librairies en ligne.

Article # 6 : Une danse dangereuse avec le philothérapeute Patrick Sorrel

Cet article se penche sur l’offre du philothérapeute Patrick Sorrel.

Article # 7 : La consultation philosophique – L’art d’éclairer l’existence, Eugénie Vegleris

Le livre « La consultation philosophique – L’art d’éclairer l’existence » de Madame Eugénie Vegleris aux Éditions Eyrolles se classe en tête de ma liste des meilleurs essais que j’ai lu à ce jour au sujet de la « philothérapie ».

Article # 8 : Guérir la vie par la philosophie, Laurence Devillairs, Presses universitaires de France

À ce jour, tous les livres dont j’ai fait rapport de ma lecture dans ce dossier sont l’œuvre de philosophes consultants témoignant de leurs pratiques fondées sur le dialogue. Le livre « Guérir la vie par la philosophie » de Laurence Devillairs aux Presses universitaires de France (PUF) diffère des précédents parce que l’auteure offre à ses lecteurs une aide direct à la réflexion sur différents thèmes.

Article # 9 : Du bien-être au marché du malaise – La société du développement personnel – par Nicolas Marquis aux Presses universitaires de France

J’ai lu ce livre à reculons. J’ai appliqué les feins dès les premières pages. L’objectivité sociologique de l’auteur m’a déplu. Ce livre présente aux lecteurs des observations, que des observations. L’auteur n’en tire aucune conclusion.

Article # 10 : Happycratie : comment l’industrie du bonheur a pris le contrôle de nos vies, Eva Illouz et Edgar Cabanas, Premier Parallèle, 2018

J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq parce qu’il m’a révélé les coulisses de la quête du bonheur au cœur de notre société néo-libérale. Je savais que cette obsession du bonheur circulait au sein de la population, notamment par le biais des coach de vie et des agents de développement personnel, mais je n’aurais jamais imaginé qu’elle cachait une véritable industrie soutenue par une idéologie psychologisante. Jusque-là, je ne connaissais de cette industrie que le commerce des livres et la montée en puissance des coachs de vie dédiés à la recherche du bonheur.

Article # 11 : La consultation philosophique, Oscar Brenifier, Éditions Alcofribas, 2020

J’ai adoré ce livre. Il est dense, très dense. On ne peut pas le lire comme un roman. Me voici enfin devant un auteur qui dit tout, où, quand, comment il observe, comment il pense, comment il chemine, comment il voit, comment il entend, comment il anticipe, comment il tire ses conclusions… Bref, un auteur qui expose son propre système de pensée dans un essai plus que formateur pour le nôtre.

Article # 12 : Fin du chapitre : Oscar Brenifier, philosophe praticien

La lecture du livre «La consultation philosophique» signé par le philosophe praticien Oscar Brenifier (voir article #11 de notre dossier «Consulter un philosophe – Quand la philosophie nous aide») nous apprend qu’il adresse un document à ses clients potentiels. J’ai écrit à monsieur Brenifier pour lui demander s’il pouvait me faire parvenir ce document.

Article # 13 : La philo-thérapie, Éric Suárez, Éditions Eyrolles, 2007

Cet article présente et relate ma lecture du livre du «La philo-thérapie» de Éric Suárez, Docteur en philosophie de l’Université Laval (Québec), philosophe praticien (Lausanne), publié en 2007 aux Éditions Eyrolles. Ce livre traite de la consultation philosophique ou, si vous préférez, de la philo-thérapie, d’un point de vue pratique. En fait, il s’agit d’un guide pour le lecteur intéressé à acquérir sa propre approche du philosopher pour son bénéfice personnel. Éric Suárez rassemble dans son ouvrage vingt exemples de consultation philosophiques regroupés sous cinq grands thèmes : L’amour, L’image de soi, La famille, Le travail et le Deuil.

Article # 14 : Comment choisir son philosophe ? Guide de première urgence à l’usage des angoissés métaphysiques, Oreste Saint-Drôme avec le renfort de Frédéric Pagès, La Découverte, 2000

Ce livre se caractérise par l’humour de son auteur et se révèle ainsi très aisé à lire. D’ailleurs l’éditeur nous prédispose au caractère divertissant de ce livre en quatrième de couverture : «Étudier in extenso la pensée des grands théoriciens et en extraire un mode de réflexion agissant est une mission impossible pour l’honnête homme/femme. C’est pourquoi l’auteur de cet ouvrage aussi divertissant que sérieux propose des voies surprenantes au premier abord, mais qui se révèlent fort praticables à l’usage. L’une passe par la rencontre avec la vie et la personnalité du philosophe : la voie des affinités électives».

Article # 15 : La philosophie comme manière de vivre, Pierre Habot, Entretiens avec Jeanne Cartier et Arnold I Davidson, Le livre de poche – Biblio essais, Albin Michel, 2001

Référencé par un auteur à mon programme de lecture, le livre «La philosophie comme manière de vivre» m’a paru important à lire. Avec un titre aussi accrocheur, je me devais de pousser plus loin ma curiosité. Je ne connaissais pas l’auteur Pierre Hadot : «Pierre Hadot (né à Paris, le 21 février 1922, et mort à Orsay, le 24 avril 20101) est un philosophe, historien et philologue français, spécialiste de l’Antiquité, profond connaisseur de la période hellénistique et en particulier du néoplatonisme et de Plotin. Pierre Hadot est l’auteur d’une œuvre développée notamment autour de la notion d’exercice spirituel et de la philosophie comme manière de vivre.» (Source : Wikipédia)

Article # 16 : La philosophie, un art de vivre de vivre, Collectif sous la direction de Jean-François Buisson, Les Éditions Cabédita, 2021

Jeanne Hersch, éminente philosophe genevoise, constate une autre rupture encore, celle entre le langage et la réalité : « Par-delà l’expression verbale, il n’y a pas de réalité et, par conséquent, les problèmes ont cessé de se poser (…). Dans notre société occidentale, l’homme cultivé vit la plus grande partie de sa vie dans le langage. Le résultat est qu’il prend l’expression par le langage pour la vie même. » (L’étonnement philosophique, Jeanne Hersch, Éd. Gallimard.) / On comprend par là qu’aujourd’hui l’exercice du langage se suffit à lui-même et que, par conséquent, la philosophie se soit déconnectée des problèmes de la vie quotidienne.» Source : La philosophie, un art de vivre, Collectif sous la direction de Jean-François Buisson, Les Éditions Cabédita, 2021, Préface,  p. 9.

Article # 17 : Socrate à l’agora : que peut la parole philosophique ?, Collectif sous la direction de Mieke de Moor, Éditions Vrin, 2017

J’ai trouvé mon bonheur dès l’Avant-propos de ce livre : «Laura Candiotto, en insistant sur le rôle joué par les émotions dans le dialogue socratique ancien et sur l’horizon éthique de celui-ci, vise à justifier théoriquement un «dialogue socratique intégral», c’est-à-dire une pratique du dialogue socratique qui prend en compte des émotions pour la connaissance.» Enfin, ai-je pensé, il ne s’agit plus de réprimer les émotions au profit de la raison mais de les respecter dans la pratique du dialogue socratique. Wow ! Je suis réconforté à la suite de ma lecture et de mon expérience avec Oscar Brenifier dont j’ai témoigné dans les articles 11 et 12 de ce dossier.

Article # 18 : La philosophie, c’est la vie – Réponses aux grandes et aux petites questions de l’existence, Lou Marinoff, La table ronde, 2004

Lou Marinoff occupe le devant de la scène mondiale de la consultation philosophique depuis la parution de son livre PLATON, PAS PROJAC! en 1999 et devenu presque’intantément un succès de vente. Je l’ai lu dès sa publication avec beaucoup d’intérêt. Ce livre a marqué un tournant dans mon rapport à la philosophie. Aujourd’hui traduit en 27 langues, ce livre est devenu la bible du conseil philosophique partout sur la planète. Le livre dont nous parlons dans cet article, «  La philosophie, c’est la vie – Réponses aux grandes et aux petites questions de l’existence », est l’une des 13 traductions du titre original « The Big Questions – How Philosophy Can Change Your Life » paru en 2003.

Article # 19 : S’aider soi-même – Une psychothérapie par la raison, Lucien Auger, Les Éditions de l’Homme

J’ai acheté et lu « S’aider soi-même » de Lucien Auger parce qu’il fait appel à la raison : « Une psychothérapie par la raison ». Les lecteurs des articles de ce dossier savent que je priorise d’abord et avant tout la philothérapie en place et lieu de la psychothérapie. Mais cette affiliation à la raison dans un livre de psychothérapie m’a intrigué. D’emblée, je me suis dit que la psychologie tentait ici une récupération d’un sujet normalement associé à la philosophie. J’ai accepté le compromis sur la base du statut de l’auteur : « Philosophe, psychologue et professeur ». « Il est également titulaire de deux doctorats, l’un en philosophie et l’autre en psychologie » précise Wikipédia. Lucien Auger était un adepte de la psychothérapie émotivo-rationnelle créée par le Dr Albert Ellis, psychologue américain. Cette méthode trouve son origine chez les stoïciens dans l’antiquité.

Article # 20 (1/2) : Penser par soi-même – Initiation à la philosophie, Michel Tozzi, Chronique sociale

J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq et je peux même en rajouter une de plus, une sixième, pour souligner son importance et sa pertinence. Il faut le lire absolument ! Je le recommande à tous car il nous faut tous sortir de ce monde où l’opinion règne en roi et maître sur nos pensées.

Article # 20 (2/2) : Penser par soi-même – Initiation à la philosophie, Michel Tozzi, Chronique sociale

Dans la première partie de ce rapport de lecture du livre « Penser par soi-même – Initiation à la philosophie » de Michel Tozzi, je vous recommandais fortement la lecture de ce livre : « J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq et je peux même en rajouter une de plus, une sixième, pour souligner son importance et sa pertinence. Il faut le lire absolument ! Je le recommande à tous car il nous faut tous sortir de ce monde où l’opinion règne en roi et maître sur nos pensées.» Je suis dans l’obligation d’ajouter cette deuxième partie à mon rapport de lecture de ce livre en raison de ma relecture des chapitres 6 et suivants en raison de quelques affirmations de l’auteur en contradiction avec ma conception de la philosophie.

Article # 21 – Agir et penser comme Nietzsche, Nathanaël Masselot, Les Éditions de l’Opportun

J’accorde au livre Agir et penser comme Nietzsche de Nathanaël Masselot cinq étoiles sur cinq. Aussi facile à lire qu’à comprendre, ce livre offre aux lecteurs une excellente vulgarisation de la philosophie de Friedricha Wilhelm Nietzsche. On ne peut pas passer sous silence l’originalité et la créativité de l’auteur dans son invitation à parcourir son œuvre en traçant notre propre chemin suivant les thèmes qui nous interpellent.

Article # 22 – La faiblesse du vrai, Myriam Revault d’Allones, Seuil

Tout commence avec une entrevue de Myriam Revault d’Allonnes au sujet de son livre LA FAIBLESSE DU VRAI à l’antenne de la radio et Radio-Canada dans le cadre de l’émission Plus on de fous, plus on lit. Frappé par le titre du livre, j’oublierai le propos de l’auteur pour en faire la commande à mon libraire.

Article # 23 – Pour une philothérapie balisée

Le développement personnel fourmille de personnes de tout acabit qui se sont improvisées conseillers, coachs, thérapeutes, conférenciers, essayistes, formateurs… et auxquelles s’ajoutent des praticiens issus des fausses sciences, notamment, divinatoires et occultes, des médecines et des thérapies alternatives. Bref, le développement personnel attire toute sorte de monde tirant dans toutes les directions.

Article # 24 – Comment nous pensons, John Dewey, Les empêcheurs de penser en rond / Seuil

Je n’aime pas cette traduction française du livre How we think de John Dewey. « Traduit de l’anglais (États-Unis) par Ovide Decroly », Comment nous pensons parait aux Éditions Les empêcheurs de penser en rond / Seuil en 2004. – Le principal point d’appui de mon aversion pour traduction française repose sur le fait que le mot anglais « belief » est traduit par « opinion », une faute majeure impardonnable dans un livre de philosophie, et ce, dès les premiers paragraphes du premier chapitre « Qu’entend-on par penser ? »

Article # 25 – Une philothérapie libre axée sur nos besoins et nos croyances avec Patrick Sorrel

Hier j’ai assisté la conférence Devenir philothérapeute : une conférence de Patrick Sorrel. J’ai beaucoup aimé le conférencier et ses propos. J’ai déjà critiqué l’offre de ce philothérapeute. À la suite de conférence d’hier, j’ai changé d’idée puisque je comprends la référence de Patrick Sorrel au «système de croyance». Il affirme que le «système de croyance» est une autre expression pour le «système de penser». Ce faisant, toute pensée est aussi une croyance.

Article # 26 – Une pratique philosophique sans cœur

J’éprouve un malaise face à la pratique philosophique ayant pour objectif de faire prendre conscience aux gens de leur ignorance, soit le but poursuivi par Socrate. Conduire un dialogue avec une personne avec l’intention inavouée de lui faire prendre conscience qu’elle est ignorante des choses de la vie et de sa vie repose sur un présupposé (Ce qui est supposé et non exposé dans un énoncé, Le Robert), celui à l’effet que la personne ne sait rien sur le sens des choses avant même de dialoguer avec elle. On peut aussi parler d’un préjugé philosophique.

Article # 27 – Êtes-vous prisonnier de vos opinions ?

Si votre opinion est faite et que vous n’êtes pas capable d’en déroger, vous êtes prisonnier de votre opinion. Si votre opinion est faite et que vous êtes ouvert à son évolution ou prêt à l’abandonner pour une autre, vous êtes prisonnier de l’opinion. Si votre opinion compte davantage en valeur et en vérité que les faits, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si votre opinion est la seule manière d’exprimer vos connaissances, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si vous pensez que l’opinion est le seul résultat de votre faculté de penser, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si vous prenez vos opinion pour vraies, vous êtes prisonnier de vos opinions.

Article # 28 – La pratique philosophique – Une méthode contemporaine pour mettre la sagesse au service de votre bien-être, Jérôme Lecoq, Eyrolles, 2014

J’ai mis beaucoup de temps à me décider à lire « La pratique philosophique » de Jérôme Lecoq. L’auteur est un émule d’Oscar Brenifier, un autre praticien philosophe. J’ai vécu l’enfer lors de mes consultations philosophiques avec Oscar Brenifier. Ainsi toute association de près ou de loin avec Oscar Brenifier m’incite à la plus grande des prudences. Jérôme Lecoq souligne l’apport d’Oscar Brenifier dans les Remerciements en première page de son livre « La pratique philosophique ».

Article # 29 – Je sais parce que je connais

Quelle est la différence entre « savoir » et « connaissance » ? J’exprime cette différence dans l’expression « Je sais parce que je connais ». Ainsi, le savoir est fruit de la connaissance. Voici quatre explications en réponse à la question « Quelle est la différence entre savoir et connaissance ? ».

Article # 30 – Les styles interpersonnels selon Larry Wilson

J’ai décidé de publier les informations au sujet des styles interpersonnels selon Larry Wilson parce que je me soucie beaucoup de l’approche de la personne en consultation philosophique. Il m’apparaît important de déterminer, dès le début de la séance de philothérapie, le style interpersonnel de la personne. Il s’agit de respecter la personnalité de la personne plutôt que de la réprimer comme le font les praticiens socratiques dogmatiques. J’ai expérimenté la mise en œuvre de ces styles inter-personnels avec succès.

Article # 31 – La confiance en soi – Une philosophie, Charles Pépin, Allary Éditions, 2018

Le livre « La confiance en soi – Une philosophie » de Charles Pépin se lit avec une grande aisance. Le sujet, habituellement dévolue à la psychologie, nous propose une philosophie de la confiance. Sous entendu, la philosophie peut s’appliquer à tous les sujets concernant notre bien-être avec sa propre perspective.

Article # 32 – Les émotions en philothérapie

J’ai vécu une sévère répression de mes émotions lors deux consultations philosophiques personnelles animées par un philosophe praticien dogmatique de la méthode inventée par Socrate. J’ai témoigné de cette expérience dans deux de mes articles précédents dans ce dossier.

Article # 33 – Chanson « Le voyage » par Raôul Duguay, poète, chanteur, philosophe, peintre… bref, omnicréateur québécois

Vouloir savoir être au pouvoir de soi est l’ultime avoir / Le voyage / Il n’y a de repos que pour celui qui cherche / Il n’y a de repos que pour celui qui trouve / Tout est toujours à recommencer

Article # 34 – « Ah ! Là je comprends » ou quand la pensée se fait révélation

Que se passe-t-il dans notre système de pensée lorsque nous nous exclamons « Ah ! Là je comprends » ? Soit nous avons eu une pensée qui vient finalement nous permettre de comprendre quelque chose. Soit une personne vient de nous expliquer quelque chose d’une façon telle que nous la comprenons enfin. Dans le deux cas, il s’agit d’une révélation à la suite d’une explication.

Article # 35 – La lumière entre par les failles

Âgé de 15 ans, je réservais mes dimanches soirs à mes devoirs scolaires. Puis j’écoutais l’émission Par quatre chemins animée par Jacques Languirand diffusée à l’antenne de la radio de Radio-Canada de 20h00 à 22h00. L’un de ces dimanches, j’ai entendu monsieur Languirand dire à son micro : « La lumière entre par les failles».

Article # 36 – Les biais cognitifs et la philothérapie

Le succès d’une consultation philosophique (philothérapie) repose en partie sur la prise en compte des biais cognitifs, même si ces derniers relèvent avant tout de la psychologie (thérapie cognitive). Une application dogmatique du dialogue socratique passe outre les biais cognitifs, ce qui augmente les risques d’échec.

Article # 37 – L’impossible pleine conscience

Depuis mon adolescence, il y a plus de 50 ans, je pense qu’il est impossible à l’Homme d’avoir une conscience pleine et entière de soi et du monde parce qu’il ne la supporterait pas et mourrait sur le champ. Avoir une pleine conscience de tout ce qui se passe sur Terre et dans tout l’Univers conduirait à une surchauffe mortelle de notre corps. Il en va de même avec une pleine conscience de soi et de son corps.

Article # 38 – Verbalisation à outrance : «Je ne suis pas la poubelle de tes pensées instantanées.»

Le Dr Jean-Christophe Seznec, psychiatre français, a été interrogé par la journaliste Pascale Senk du quotidien Le Figaro au sujet de son livre Savoir se taire, savoir parler, coécrit avec Laurent Carouana et paru en 2017. Le titre de l’article a retenu mon attention : Psychologie: «il faut sortir de l’hystérie de la parole».

Article # 39 – Comment dialoguer de manière constructive ? par Julien Lecomte, Philosophie, médias et société

Reproduction de l’article « Comment dialoguer de manière constructive ? », un texte de Julien Lecomte publié sur son site web PHILOSOPHIE, MÉDIAS ET SOCIÉTÉ. https://www.philomedia.be/. Echanger sur des sujets de fond est une de mes passions. Cela fait plusieurs années que je m’interroge sur les moyens de faire progresser la connaissance, d’apprendre de nouvelles choses. Dans cet article, je reviens sur le cheminement qui m’anime depuis tout ce temps, pour ensuite donner des pistes sur les manières de le mettre en pratique concrètement.

Article # 40 – Le récit d’initiation en spirale

Dans le récit initiatique, il s’agit de partir du point A pour aller au point B afin que le lecteur ou l’auditeur chemine dans sa pensée vers une révélation permettant une meilleure compréhension de lui-même et/ou du monde. La référence à la spirale indique une progression dans le récit où l’on revient sur le même sujet en l’élargissant de plus en plus de façon à guider la pensée vers une nouvelle prise de conscience. Souvent, l’auteur commence son récit en abordant un sujet d’intérêt personnel (point A) pour évoluer vers son vis-à-vis universel (point B). L’auteur peut aussi se référer à un personnage dont il fait évoluer la pensée.

Article # 41 – La philothérapie – Un état des lieux par Serge-André Guay, Observatoire québécois de la philothérapie

Cet article présente un état des lieux de la philothérapie (consultation philosophique) en Europe et en Amérique du Nord. Après un bref historique, l’auteur se penche sur les pratiques et les débats en cours. Il analyse les différentes publications, conférences et offres de services des philosophes consultants.

Article # 42 – L’erreur de Descartes, Antonio Damasio, Odile Jacob, 1995

J’ai découvert le livre « L’erreur de Descartes » du neuropsychologue Antonio R. Damasio à la lecture d’un autre livre : L’intelligence émotionnelle de Daniel Goleman. L’édition originale de ce livre est parue en 1995 en anglais et j’ai lu la traduction française à l’été 1998 parue un an auparavant chez Robert Laffont. Diplômé de l’université Harvard et docteur en psychologie clinique et développement personnel, puis journaliste au New York Times, où il suit particulièrement les sciences du comportement, Daniel Goleman nous informe dans son livre « L’intelligence émotionnel » au sujet de la découverte spectaculaire pour ne pas dire révolutionnaire de Antonio R. Damasio à l’effet que la raison a toujours besoin d’un coup des émotions pour prendre des décisions. Jusque-là, il était coutume de soutenir que les émotions perturbaient la raison, d’où l’idée de les contrôler.

Article # 43 – Éloge de la pratique philosophique, Sophie Geoffrion, Éditions Uppr, 2018

Ma lecture du livre ÉLOGE DE LA PRATIQUE PHILOSOPHIQUE de la philosophe praticienne SOPHIE GEOFFRION fut agréable et fort utile. Enfin, un ouvrage court ou concis (le texte occupe 65 des 96 pages du livre), très bien écrit, qui va droit au but. La clarté des explications nous implique dans la compréhension de la pratique philosophique. Bref, voilà un éloge bien réussi. Merci madame Geoffrion de me l’avoir fait parvenir.

Article # 44 – Consultation philosophique : s’attarder à l’opinion ou au système de pensée ?

Dans cet article, je m’interroge à savoir la consultation philosophique doit s’attarder à l’opinion ou au système pensée du client. OPINION – Le philosophe praticien cible l’opinion de son client en vue de démontrer l’ignorance sur laquelle elle repose et, par conséquent, l’absence de valeur de vérité qu’elle recèle. Cette pratique repose sur le « questionnement philosophique ».

Article # 45 – Sentir et savoir – Une nouvelle théorie de la conscience, Antonio Damasio, Éditions Odile Jacob

Dans son livre « Sentir et savoir », Antonio Damasio propose « Une nouvelle théorie de la conscience ». Il démontre que la conscience ne peut pas exister sans le corps. Il identifie dans le corps la capacité de sentir comme préalable à la conscience.

Article # 46 – Dépression et philosophie : Du mal du siècle au mal de ce siècle, Robert Redeker, Editions Pleins Feux, 2007

Un si petit livre, seulement 46 pages et en format réduit, mais tellement informatif. Une preuve de plus qu’il ne faut se fier aux apparences. Un livre signé ROBERT REDEKER, agrégé de philosophie originaire de la France, connaît fort bien le sujet en titre de son œuvre : DÉPRESSION ET PHILOSOPHIE.

Article # 47 – Savoir se taire, savoir parler, Dr Jean-Christophe Seznec et Laurent Carouana, InterÉditions, 2017

La plupart des intervenants en psychologie affirment des choses. Ils soutiennent «C’est comme ceci» ou «Vous êtes comme cela». Le lecteur a le choix de croire ou de ne pas croire ce que disent et écrivent les psychologues et psychiatres. Nous ne sommes pas invités à réfléchir, à remettre en cause les propos des professionnels de la psychologie, pour bâtir notre propre psychologie. Le lecteur peut se reconnaître ou pas dans ces affirmations, souvent catégoriques. Enfin, ces affirmations s’apparentent à des jugements. Le livre Savoir se taire, savoir dire de Jean-Christophe Seznec et Laurent Carouana ne fait pas exception.

Article # 48 – Penser sa vie – Une introduction à la philosophie, Fernando Savater, Éditions du Seuil, 2000

Chapitre 1 – La mort pour commencer – Contrairement au philosophe Fernando Savater dans PENSER SA VIE – UNE INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE, je ne définie pas la vie en relation avec la mort, avec son contraire. Je réfléchie et je parle souvent de la mort car il s’agit de l’un de mes sujets préféré depuis mon adolescence. Certaines personnes de mon entourage pensent et affirment que si je parle aussi souvent de la mort, c’est parce que j’ai peur de mourir. Or, je n’ai aucune peur de la mort, de ma mort, de celles de mes proches. Je m’inquiète plutôt des conséquences de la mort sur ceux et celles qui restent, y compris sur moi-même.

Article # 49 – Pourquoi avons-nous des couleurs de peau et des physiques si différents ?

À la lumière du documentaire LE SOLEIL ET DES HOMMES, notamment l’extrait vidéo ci-dessus, je ne crois plus au concept de race. Les différences physiques entre les hommes découlent de l’évolution naturelle et conséquente de nos lointains ancêtres sous l’influence du soleil et de la nature terrestre, et non pas du désir du soleil et de la nature de créer des races. On sait déjà que les races et le concept même de race furent inventés par l’homme en se basant sur nos différences physiques. J’abandonne donc la définition de « race » selon des critères morphologiques…

Article # 50 – Extrait du mémoire de maîtrise «Formation de l’esprit critique et société de consommation» par Stéphanie Déziel

Dans le cadre de notre dossier « Consulter un philosophe », la publication d’un extrait du mémoire de maîtrise « Formation de l’esprit critique et société de consommation » de Stéphanie Déziel s’impose en raison de sa pertinence. Ce mémoire nous aide à comprendre l’importance de l’esprit critique appliqué à la société de consommation dans laquelle évoluent, non seule les jeunes, mais l’ensemble de la population.

Article # 51 – « En fait, c’est dans son incertitude même que réside largement la valeur de la philosophie. » Bertrand Russell

Je reproduis ci-dessous une citation bien connue sur le web au sujet de « la valeur de la philosophie » tirée du livre « Problèmes de philosophie » signé par Bertrand Russell en 1912. Mathématicien, logicien, philosophe, épistémologue, homme politique et moraliste britannique, Bertrand Russell soutient que la valeur de la philosophie réside dans son incertitude. À la suite de cette citation, vous trouverez le texte de Caroline Vincent, professeur de philosophie et auteure du site web « Apprendre la philosophie » et celui de Gabriel Gay-Para tiré se son site web ggpphilo. Des informations tirées de l’Encyclopédie Wikipédia au sujet de Bertrand Russell et du livre « Problèmes de philosophie » et mon commentaire complètent cet article.

Article # 52 – Socrate et la formation de l’esprit critique par Stéphanie Déziel

Passez donc sans vous arrêter, amis, au milieu des Marchands de Sommeil; et, s’ils vous arrêtent, répondez-leur que vous ne cherchez ni un système ni un lit. Ne vous lassez pas d’examiner et de comprendre. (…) Lisez, écoutez, discutez, jugez; ne craignez pas d’ébranler des systèmes; marchez sur des ruines, restez enfants. (…) Socrate vous a paru un mauvais maître. Mais vous êtes revenus à lui; vous avez compris, en l’écoutant, que la pensée ne se mesure pas à l’aune, et que les conclusions ne sont pas l’important; restez éveillés, tel est le but. Les Marchands de Sommeil de ce temps-là tuèrent Socrate, mais Socrate n’est point mort; partout où des hommes libres discutent, Socrate vient s’asseoir, en souriant, le doigt sur la bouche. Socrate n’est point mort; Socrate n’est point vieux. (…) – Alain, (Emile Charrier), Vigiles de l’esprit.

Article # 53 – J’ai un problème avec la vérité

Tout au long de ma vie, j’ai vu la vérité malmenée, tassée d’un bord puis de l’autre, devenir une propriété personnelle (ma vérité — ta vérité — à chacun sa vérité), tantôt objet de monopôle, tantôt reconnue, tantôt niée et reniée… Ah ! La vérité. Quel chaos ! Je me demande depuis longtemps pourquoi la vérité, si elle existe, ne triomphe pas à tout coup, pourquoi elle ne s’impose à tous d’elle-même. Contestée de toutes parts, la vérité, si elle existe, n’a d’intérêt que pour l’opinion qu’on en a et les débats qui s’ensuivent. On va jusqu’à donner à la vérité une mauvaise réputation eu égard à son influence néfaste sur la société et les civilisations. Et que dire de toutes ces croyances qui se prennent pour la vérité ? Et c’est sans compter l’observation récente à l’effet que nous venons d’entrer dans une « ère de post-vérité ».

Article # 54 – Petit manuel philosophique à l’intention des grands émotifs, Iaria Gaspard, Presses Universitaires de France, 2022

J’accorde à ce livre trois étoiles sur cinq. Le titre « Petit manuel philosophique à l’intention des grands émotifs » a attiré mon attention. Et ce passage du texte en quatrième de couverture m’a séduit : «En proposant une voyage philosophique à travers l’histoire des émotions, Iaria Gaspari bouscule les préjugés sur notre vie émotionnelle et nous invite à ne plus percevoir nos d’états d’âme comme des contrainte ». J’ai décidé de commander et de lire ce livre. Les premières pages m’ont déçu. Et les suivantes aussi. Rendu à la moitié du livre, je me suis rendu à l’évidence qu’il s’agissait d’un témoignage de l’auteure, un témoignage très personnelle de ses propres difficultés avec ses émotions. Je ne m’y attendais pas, d’où ma déception. Je rien contre de tels témoignages personnels qu’ils mettent en cause la philosophie, la psychologie, la religion ou d’autres disciplines. Cependant, je préfère et de loin lorsque l’auteur demeure dans une position d’observateur alors que son analyse se veut la plus objective possible.

Article # 55 – Savoir, connaissance, opinion, croyance

Tout repose sur le Savoir. L’expérience personnelle et/ou professionnelle qu’on fait du Savoir, après en avoir pris conscience, se retrouve à la base des Connaissances que nous possédons. Les Opinions expriment des Jugements des connaissances et inspirent souvent les Croyances.

Article # 56 – Philosophie, science, savoir, connaissance

La philosophie, mère de toutes les sciences, recherche la sagesse et se définie comme l’Amour de la Sagesse. La sagesse peut être atteinte par la pensée critique et s’adopte comme Mode de vie. • La philosophie soutient la Science et contribue à la naissance et au développement de la méthode scientifique, notamment avec l’épistémologie.

Article # 57 – La philosophie encore et toujours prisonnière de son passé ?

La philothérapie, principale pratique de la philosophie de nos jours, met sans cesse de l’avant les philosophes de l’Antiquité et de l’époque Moderne. S’il faut reconnaître l’apport exceptionnel de ces philosophes, j’ai parfois l’impression que la philothérapie est prisonnière du passé de la philosophie, à l’instar de la philosophie elle-même.

Article # 58 – Le Québec, un désert philosophique

Au Québec, la seule province canadienne à majorité francophone, il n’y a pas de tradition philosophique populaire. La philosophie demeure dans sa tour universitaire. Très rares sont les interventions des philosophes québécois dans l’espace public, y compris dans les médias, contrairement, par exemple, à la France. Et plus rares encore sont les bouquins québécois de philosophie en tête des ventes chez nos libraires. Seuls des livres de philosophes étrangers connaissent un certain succès. Bref, l’espace public québécois n’offre pas une terre fertile à la Philosophie.

Article # 59 – La naissance du savoir – Dans la tête des grands scientifiques, Nicolas Martin, Éditions Les Arènes, 2023.

J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq parce qu’il me permet d’en apprendre beaucoup plus sur la pensée scientifique telle que pratiquée par de grands scientifiques. L’auteur, Nicolas Martin, propose une œuvre originale en adressant les mêmes questions, à quelques variantes près, à 17 grands scientifiques.

Article # 60 – Pourquoi est-il impossible d’atteindre l’équilibre entre développement personnel et développement spirituel ou philosophique ?

Cet article répond à ce commentaire lu sur LinkedIn : « L’équilibre entre développement personnel et développement spirituel ou philosophique est indispensable. » Il m’apparaît impossible de viser « L’équilibre entre développement personnel et développement spirituel ou philosophique » et de prétendre que cet équilibre entre les trois disciplines soit « indispensable ». D’une part, le développement personnel est devenu un véritable fourre-tout où l’ivraie et le bon grain se mélangent sans distinction, chacun avançant sa recette à l’aveugle.

Article # 61 – Le commerce extrême de la philosophie avec les « philopreneurs »

En ne s’unissant pas au sein d’une association nationale professionnelle fixant des normes et des standards à l’instar des philosophes consultants ou praticiens en d’autres pays, ceux de la France nous laissent croire qu’ils n’accordent pas à leur disciple tout l’intérêt supérieur qu’elle mérite. Si chacun des philosophes consultants ou praticiens français continuent de s’affairer chacun dans son coin, ils verront leur discipline vite récupérée à mauvais escient par les philopreneurs et la masse des coachs.

Article # 62 – Soigner par la philosophie, En marche – Journal de la Mutualité chrétienne (Belgique)

“ Après les succès d’Épicure 500 vous permettant de faire dix repas par jour sans ballonnements, après Spinoza 200 notre inhibiteur de culpabilité, les laboratoires Laron, vous proposent Philonium 3000 Flash, un médicament révolutionnaire capable d’agir sur n’importe quelle souffrance physique ou mentale : une huile essentielle d’Heidegger pour une angoisse existentielle, une substance active de Kant pour une douleur morale…. Retrouvez sagesse et vitalité en un instant ”, s’amusaient les chroniqueurs radio de France Inter dans une parodie publicitaire diffusée à l’occasion d’une émission ayant pour thème : la philosophie peut-elle soigner le corps ?

Article # 63 – Contre le développement personnel. Thiery Jobard, Éditions Rue de l’échiquier, 2021

J’attribue quatre étoiles sur cinq à ce livre. Les lecteurs assidus de mes articles connaissent fort bien ma position plus que défavorable face au développement personnel. À l’instar de Thiery Jobard, je suis contre le développement personnel. Je qualifie le développement personnel d’arnaque extrêmement dangereuse pour ses adeptes et notre société.

Article # 64 – Apocalypse cognitive – La face obscure de notre cerveau, Gérald Bronner, Presses Universitaires de France (PUF), 2021

Le philothérapeute (philosophe consultant ou philosophe praticien) a l’obligation de très bien connaître le contexte dans lequel évolue son client. Le développement de l’esprit critique de ce client passe inévitablement par une prise de conscience de sa cognition en vue de comprendre comment il connaît. Si, dès le départ, le client n’a pas conscience de son mode de pensées, il lui sera difficile de participer activement au dialogue avec son philothérapeute. L’objectif primaire du philosophe consultant demeure de déceler et de corriger les biais cognitifs de son client avant même d’abord une question philosophique. Bref, si la »machine à pensée » du client est corrompu par des «virus cognitifs », une «réinitialisation » s’impose en début de séance de consultation.

Article # 65 – Développement (im)personnel – Le succès d’une imposture, Julia de Funès, Éditions de l’observatoire/Humensis, 2019

Dans son livre « Développement (im) personnel, Julia de Funès, docteure en philosophie, soutient que le développement personnel offre la même recette à tous et qu’à ce titre il ne peut donc pas se qualifier sa démarche de « personnel ». Selon ma compréhension, le développement personnel devrait mettre de l’avant un développement personnalisé, c’est-à-dire adapté à chaque individu intéressé pour se targuer d’être personnel.

Article # 66 – Savoirs, opinions, croyances – Une réponse laïque et didactique aux contestations de la science en classe, Guillaume Lecointre, Édition Belin / Humensis, 2018

Mon intérêt pour la pensée scientifique remonte à plus de 25 ans. Alors âgé d’une quarantaine d’année, PDG d’une firme d’étude des motivations d’achat des consommateurs, je profite des enseignements et de l’étude du processus scientifique de différentes sources. Je me concentre vite sur l’épistémologie…

Article # 67 – À l’école du doute – Apprendre à penser juste en découvrant pourquoi l’on pense faux, Marc Romainville, Presses Universitaires de France / Humensis, 2023

Ce livre m’a déçu en raison de la faiblesse de sa structure indigne de son genre littéraire, l’essai. L’auteur offre aux lecteurs une foule d’information mais elle demeure difficile à suivre en l’absence de sous-titres appropriés et de numérotation utile pour le repérage des énumérations noyés dans un style plus littéraire qu’analytique.

Article # 68 – Ébauche d’un annuaire : philothérapeutes, philosophes consultants, philosophes praticiens

En l’absence d’une association d’accréditation des philothérapeutes, philosophes consultants ou praticiens en francophonie, il est difficile de les repérer. Il ne nous reste plus que de nombreuses recherches à effectuer sur le web pour dresser une liste, aussi préliminaire soit-elle. Les intervenants en philothérapie ne se présentent pas tous sous la même appellation : « philothérapeute », « philosophe consultant » ou « philosophe praticien » « conseiller philosophique » « philosophe en entreprise », « philosophe en management » et autres.

Article # 69 – Guérir l’impossible – Une philosophie pour transformer nos souffrances en forces, Christopher Laquieze, Guy Trédaniel Éditeur, 2023

J’ai lu le livre GUÉRIR L’IMPOSSIBLE en me rappelant à chaque page que son auteur, Christopher Laquieze, est à la fois philosophe et thérapeute spécialisé en analyse comportementale. Pourquoi ? Parce que ce livre nous offre à la fois un voyage psychologique et philosophique, ce à quoi je ne m’attendais pas au départ. Ce livre se présente comme « Une philosophie pour transformer nous souffrances en forces ». Or, cette philosophie se base davantage sur la psychologie que la philosophie. Bref, c’est le « thérapeute spécialisé en analyse comportementale » qui prend le dessus sur le « philosophe ».

Article # 70 – Agir et penser comme Platon – Sage, penseur, philosophe, juste, courageux …, Nathanaël Masselot, Les Éditions de l’Opportun

Nathaniel Masselot maîtrise fort bien son écriture visiblement axée sur son accessibilité et sa compréhension par tous. Loin de la vulgarisation simpliste, l’auteur nous parle comme nous parlons. Loin de l’écriture hermétique, l’auteur n’a pas la tête dans les nuages et isolé dans une tour surplombant la société; il marche auprès de nous. Avec ses références à l’actualité, il campe son lecteur dans la réalité quotidienne où il évolue.

Article # 71 – 7 règles pour une vie (presque) sans problème, Simon Delannoy, 2022

Ma lecture de ce livre m’a procuré beaucoup de plaisir et de bonheur. Je recherche dans mes lectures les auteurs et les œuvres permettant aux lecteurs d’évoluer de prise de conscience en prise de conscience de la première à la dernière page, de ne plus être le même à la fin de la lecture. Et c’est ce que les lecteurs vivront à la lecture de ce livre.

Article # 72 – Les philo-cognitifs – Ils n’aiment que penser et penser autrement…, Fanny Nusbaum, Olivier Revol, Dominic Sappey-Marinier, Odile Jacob, Paris, 2019

Je n’ai pas aimé ce livre parce que son titre, LES PHILO-COGNITIFS, se réfère à la philosophie sans pour autant faire un traitement philosophique de son sujet. Mon achat reposait entièrement sur le titre de ce livre et je m’attendais à un livre de philosophie. Mais il s’agit d’un livre de psychologie. Mon achat fut intuitif. J’avais pleinement confiance dans l’usage du mot « PHILO » en titre d’un ouvrage pour que ce dernier ne puisse traiter d’un autre sujet que philosophique. Mais ce n’est pas le cas.

Article # 73 – Qu’est-ce que la philosophie ? Michel Meyer, Le livre de poche, Librairie générale française, Paris, 1997

J’aime beaucoup les livres d’introduction et de présentation de la philosophie parce qu’ils ramènent toujours les lecteurs à l’essentiel, aux bases de la discipline. À la question « Qu’est-ce que la philosophie ? », Michel Meyer répond : « La philosophie est depuis toujours questionnement radical. C’est pourquoi il importe aujourd’hui de questionner le questionnement, même si on ne l’a jamais fait auparavant. » MEYER, Michel, Qu’est-ce que la philosophie ? – Les questions ultime de la pensée, Le livre de poche © Librairie Générale Française, Paris, 1997. p. 18.

Article # 74 – Présentations de la philosophie, André Comte-Sponville, Éditions Albin Michel, Le livre de poche, 2000

À l’instar de ma lecture précédente (Qu’est-ce que la philosophie ? de Michel Meyer), le livre PRÉSENTATIONS DE LA PHILOSOPHIE du philosophe ANDRÉ COMTE-SPONVILLE m’a plu parce qu’il met en avant les bases mêmes de la philosophie et, dans ce cas précis, appliquées à une douzaine de sujets…

Article # 75 – Les théories de la connaissance, Jean-Michel Besnier, Que sais-je?, Presses universitaires de France, 2021

J’ai dévoré le livre LES THÉORIES DE LA CONNAISSANCE par JEAN-MICHEL BESNIER avec un grand intérêt puisque la connaissance de la connaissance me captive. Amateur d’épistémologie, ce livre a satisfait une part de ma curiosité. Évidemment, je n’ai pas tout compris et une seule lecture suffit rarement à maîtriser le contenu d’un livre traitant de l’épistémologie, notamment, de son histoire enchevêtrée de différents courants de pensée, parfois complémentaires, par opposés. Jean-Michel Besnier dresse un portrait historique très intéressant de la quête philosophique pour comprendre la connaissance elle-même.

Article # 76 – Philosophie de la connaissance – Croyance, connaissance, justification, textes réunis par Julien Dutant et Pascal Engel, Libraire philosophique J. Vrin, 2005

Ce livre n’était pas pour moi en raison de l’érudition des auteurs au sujet de la philosophie de connaissance. En fait, contrairement à ce que je croyais, il ne s’agit d’un livre de vulgarisation, loin de là. J’ai décroché dès la seizième page de l’Introduction générale lorsque je me suis buté à la première équation logique. Je ne parviens pas à comprendre de telles équations logiques mais je comprends fort bien qu’elles soient essentielles pour un tel livre sur-spécialisé. Et mon problème de compréhension prend racine dans mon adolescence lors des études secondaires à l’occasion du tout premier cours d’algèbre. Littéraire avant tout, je n’ai pas compris pourquoi des « x » et « y » se retrouvaient dans des équations algébriques. Pour moi, toutes lettres de l’alphabet relevaient du littéraire. Même avec des cours privés, je ne comprenais toujours pas. Et alors que je devais choisir une option d’orientation scolaire, j’ai soutenu que je voulais une carrière fondée sur l’alphabet plutôt que sur les nombres. Ce fut un choix fondé sur l’usage des symboles utilisés dans le futur métier ou profession que j’allais exercer. Bref, j’ai choisi les sciences humaines plutôt que les sciences pures.

Article # 77 – Problèmes de philosophie, Bertrand Russell, Nouvelle traduction, Éditions Payot, 1989

Quelle agréable lecture ! J’ai beaucoup aimé ce livre. Les problèmes de philosophie soulevés par Bertrand Russell et les réponses qu’il propose et analyse étonnent. Le livre PROBLÈMES DE PHILOSOPHIE écrit par BERTRAND RUSSELL date de 1912 mais demeure d’une grande actualité, du moins, selon moi, simple amateur de philosophie. Facile à lire et à comprendre, ce livre est un «tourne-page» (page-turner).

Article # 78 – La dictature des ressentis – Sauver la liberté de penser, Eugénie Bastié, Éditions Plon, 2023

La compréhension de ce recueil de chroniques signées EUGÉNIE BASTIÉ dans le quotidien LE FIGARO exige une excellence connaissance de la vie intellectuelle, politique, culturelle, sociale, économique et de l’actualité française. Malheureusement, je ne dispose pas d’une telle connaissance à l’instar de la majorité de mes compatriotes canadiens et québécois. J’éprouve déjà de la difficulté à suivre l’ensemble de l’actualité de la vie politique, culturelle, sociale, et économique québécoise. Quant à la vie intellectuelle québécoise, elle demeure en vase clos et peu de médias en font le suivi. Dans ce contexte, le temps venu de prendre connaissance de la vie intellectuelle française, je ne profite des références utiles pour comprendre aisément. Ma lecture du livre LA DICTATURE DES RESSENTIS d’EUGÉNIE BASTIÉ m’a tout de même donné une bonne occasion de me plonger au cœur de cette vie intellectuelle française.

Article # 79 – À la découverte de la sagesse stoïcienne: L’histoire improbable du stoïcisme suivie du Manuel de la vie bonne, Dr Chuck Chakrapani, Éditions Stoa Gallica, 2023

À titre d’éditeur, je n’ai pas aimé ce livre qui n’en est pas un car il n’en possède aucune des caractéristiques professionnelles de conceptions et de mise en page. Il s’agit de la reproduction d’un texte par Amazon. Si la première de couverture donne l’impression d’un livre standard, ce n’est pas le cas des pages intérieures du… document. La mise en page ne répond pas aux standards de l’édition française, notamment, en ne respectant pas les normes typographiques.

Article # 80 – Le changement personnel – Histoire Mythes Réalités, sous la direction de Nicolas Marquis, Sciences Humaines Éditions, 2015

J’ai lu avec un grand intérêt le livre LE CHANGEMENT PERSONNEL sous la direction de NICOLAS MARQUIS. «Cet ouvrage a été conçu à partir d’articles tirés du magazine Sciences Humaines, revus et actualisés pour la présente édition ainsi que de contributions inédites. Les encadrés non signés sont de la rédaction.» J’en recommande vivement la lecture pour son éruditions sous les aspects du changement personnel exposé par différents spécialistes et experts tout aussi captivant les uns les autres.

Article # 81 – L’empire des coachs – Une nouvelle forme de contrôle social, Roland Gori et Pierre Le Coz, Éditions Albin Michel, 2006

À la lecture de ce livre fort intéressent, j’ai compris pourquoi j’ai depuis toujours une dent contre le développement personnel et professionnel, connu sous le nom « coaching ». Les intervenants de cette industrie ont réponse à tout, à toutes critiques. Ils évoluent dans un système de pensée circulaire sans cesse en renouvellement créatif voire poétique, système qui, malheureusement, tourne sur lui-même. Et ce type de système est observable dans plusieurs disciplines des sciences humaines au sein de notre société où la foi en de multiples opinions et croyances s’exprime avec une conviction à se donner raison. Les coachs prennent pour vrai ce qu’ils pensent parce qu’ils le pensent. Ils sont dans la caverne de Platon et ils nous invitent à les rejoindre.

Article # 82 – À quoi sert la philosophie ?, Marc Sautet, Éditions Pleins Feux, 1997

Ce petit livre d’une soixantaine de pages nous offre la retranscription de la conférence « À QUOI SERT LA PHILOSOPHIE ? » animée par Marc Sautet, philosophe ayant ouvert le premier cabinet de consultation philosophique en France et également fondateur des Cafés Philo en France.

Article # 83 – Raviver de l’esprit en ce monde – Diagnostic du contemporain, François Jullien, Éditions de l’Observatoire, 2023

L’essai RAVIVER DE L’ESPRIT EN CE MONDE – UN DIAGNOSTIC CONTEMPORAIN par FRANÇOIS JULLIEN chez les Éditions de l’Observatoire, parue en 2023, offre aux lecteurs une prise de recul philosophique révélatrice de notre monde. Un tel recul est rare et fort instructif.

Article # 84 – La philosophie appelle à une révélation suivie d’une conversion

La philosophie a pour but l’adoption d’un mode de vie sain. On parle donc de la philosophie comme un mode de vie ou une manière de vivre. La philosophie ne se possède pas, elle se vit. La philosophie souhaite engendrer un changement de comportement, d’un mode de vie à celui qu’elle propose. Il s’agit ni plus ni moins d’enclencher et de soutenir une conversion à la philosophie.

Article # 85 – La philosophie comme mode de vie, Daniel Desroches, Deuxième édition revue et corrigée, Coll. À propos, Les Presses de l’Université Laval, Québec, 2019

La lecture de cet essai fut très agréable, instructive et formatrice pour l’amateur de philosophie que je suis. Elle s’inscrit fort bien à la suite de ma lecture de « La philosophie comme manière de vivre » de Pierre Habot (Entretiens avec Jeanne Cartier et Arnold I Davidson, Le livre de poche – Biblio essais, Albin Michel, 2001).

Article # 86 – Les consolations de la philosophie, Alain De Botton, Mercure de France, 2001, Pocket

La lecture du livre Les consolations de la philosophie, une édition en livre de poche abondamment illustrée, fut très agréable et instructive. L’auteur Alain de Botton, journaliste, philosophe et écrivain suisse, nous adresse son propos dans une langue et un vocabulaire à la portée de tous.

Article # 87 – La philothérapie – Philosophie pratique à l’international

L’Observatoire de la philothérapie a consacré ses deux premières années d’activités à la France, puis à la francophonie. Aujourd’hui, l’Observatoire de la philothérapie s’ouvre à d’autres nations et à la scène internationale.

Article # 88 – L’approche intellectuelle en philothérapie et en philosophie pratique

Certaines personnes croient le conseiller philosophique intervient auprès de son client en tenant un « discours purement intellectuel ». C’est le cas de Dorothy Cantor, ancienne présidente de l’American Psychological Association, dont les propos furent rapportés dans The Philosophers’ Magazine en se référant à un autre article parue dans The New York Times.

Article # 89 – En thérapie avec… Épicure – Combattre votre anxiété – 40 antidotes du philosophe antique, Nathanaël Masselot, Les Éditions de l’Opportun, Paris, 2024

Nathaniel Masselot maîtrise fort bien son écriture visiblement axée sur son accessibilité et sa compréhension par tous. Loin de la vulgarisation simpliste, l’auteur nous parle comme nous parlons. Loin de l’écriture hermétique, l’auteur n’a pas la tête dans les nuages et isolé dans une tour surplombant la société; il marche auprès de nous. Avec ses références à l’actualité, il campe son lecteur dans la réalité quotidienne où il évolue.

Article # 90 – Êtes-vous sûr d’avoir raison ?, Gilles Vervisch, Flammarion, 2022

De lecture agréable et truffé d’humour, le livre ÊTES-VOUS SÛR D’AVOIR RAISON ? de GILLES VERVISCH, agrégé de philosophie, pose la question la plus embêtante à tous ceux qui passent leur vie à se donner raison.

Article # 91 – L’approche interrogative et l’approche conversationnelle dans la pratique philosophique

Dans un article intitulé « Se retirer du jeu » et publié sur son site web Dialogon, le philosophe praticien Jérôme Lecoq, témoigne des « résistances simultanées » qu’il rencontre lors de ses ateliers, « surtout dans les équipes en entreprise » : « L’animation d’un atelier de “pratique philosophique” implique que chacun puisse se « retirer de soi-même », i.e. abandonner toute volonté d’avoir raison, d’en imposer aux autres, de convaincre ou persuader autrui, ou même de se “faire valider” par les autres. Vous avez une valeur a priori donc il n’est pas nécessaire de l’obtenir d’autrui. » (LECOQ, Jérôme, Se retirer du jeu, Dialogon, mai 2024.)

Article # 92 – Introduction à la philosophie, Karl Jaspers, Plon, coll. 10-18, 2001

« Jaspers incarne, en Allemagne, l’existentialisme chrétien » peut-on lire en quatrième de couverture de son livre INTRODUCTION À PHILOSOPHIE. Je ne crois plus en Dieu depuis vingt ans. Baptisé et élevé par défaut au sein d’une famille catholique qui finira pas abandonner la religion, marié protestant, aujourd’hui J’adhère à l’affirmation d’un ami philosophe à l’effet que « Toutes les divinités sont des inventions humaines ». Dieu est une idée, un concept, rien de plus, rien de moins. / Dans ce contexte, ma lecture de l’œuvre INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE de KARL JASPERS fut quelque peu contraignante à titre d’incroyant. Je me suis donc concentré sur les propos de JASPERS au sujet de la philosophie elle-même.

Article # 93 – Le rôle social des idées – Esquisse d’une philosophie de l’histoire contemporaine, Max Lamberty, Éditions de la Cité Chrétienne, 1936

« La philosophie a gouverné toute la vie de notre époque dans ses traits les plus typiques et les plus importants » (LAMBERTY, Max, Le rôle social des idées, Chapitre premier – La souveraineté des idées ou La généalogie de notre temps, Les Éditions de la Cité Chrétienne (Bruxelles) / P. Lethielleux (Paris), 1936, p. 41) – la démonstration du rôle social des idées par Max Lamberty doit impérativement se poursuivre de nos jours en raison des défis qui se posent à nous, maintenant et demain, et ce, dans tous les domaines. – Et puisque les idées philosophiques mènent encore et toujours le monde, nous nous devons d’interroger le rôle social des idées en philosophie pratique. Quelle idée du vrai proposent les nouvelles pratiques philosophiques ? Les praticiens ont-ils conscience du rôle social des idées qu’ils véhiculent dans les consultations et les ateliers philosophiques ?

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