Article #113 – Nexus – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Yuval Noah Harari, Albin Michel, Paris, 2024

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Article # 113

PARTIE 1 DE 2

J’AI LU POUR VOUS

Nexus

Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA

Yuval Noah Harari

Traduit de l’anglais par David Fauquemberg

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Éditions Albin Michel, Paris

1er octobre 2024

243.00 mm x 170.00 mm

576 pages

EAN : 9782226494887

ISBN : 978-2-226-49488-7

Édition en anglais parue sous le titre : Nexus – A brief history of information networks from the stone age to AI chez Random House, an imprint and division of Penguin Random House LLC, New York © Yuval Noah Harari, 2024 Tous droits réservés

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TEXTE DE LA QUATRIÈME DE COUVERTURE

NEXUS

Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA

Les histoires nous ont réunis.

Les livres ont diffusé nos idées et nos mythologies.

Internet nous a promis le savoir infini.

Les algorithmes ont découvert nos secrets – et nous ont divisés.

Quel monde nous promet l’IA ?

Depuis cent mille ans, nous, les Sapiens, avons acquis un gigantesque pouvoir. Mais malgré nos découvertes, inventions et conquêtes, nous sommes aujourd’hui confrontés à une crise existentielle inédite. Le monde est au bord de l’effondrement écologique. Les tensions politiques se multiplient. La désinformation abonde. Et nous entrons de plain-pied dans l’ère de l’IA, un réseau d’information qui sera bientôt capable de nous dominer.

Avec ce nouvel ouvrage, Yuval Noah Harari, l’auteur du best-seller mondial Sapiens, revisite l’histoire de l’humanité pour comprendre comment les réseaux d’information ont fait et défait notre monde. Il aborde les choix cruciaux auxquels nous sommes – et serons – confrontés, au moment où l’IA révolutionne la médecine, la guerre, les démocraties, et menace notre existence même.

Nexus est un livre capital pour comprendre comment, en faisant des choix éclairés, il nous est encore possible d’empêcher le pire.

Traduit de l’anglais par David Fauquemberg

Source : Éditions Albin Michel.




SOMMAIRE

Prologue

La vision naïve de l’information

Google vs Goethe

L’information faite arme

Ce chemin à parcourir

Première partie

RÉSEAUX HUMAINS

  1. Qu’est-ce que l’information

Qu’est-ce que la vérité ?

Ce que fait l’information

L’information dans l’histoire de l’humanité

  1. Histoires : connexions illimitées

Entités intersubjectives

Le pouvoir des histoires

Le noble mensonge

L’éternel dilemme

  1. Documents : la morsure des tigres de papier

Prêt à tuer

Bureaucratie

Bureaucratie et recherche de la vérité

L’État profond

Les drames biologiques

Tuer tous les gens de loi

Le document miracle

  1. Erreurs : le fantasme de l’infaillibilité

Les limites de l’autocorrection

Enlever les humains de la boucle

L’infaillible technologie

L’élaboration de la Bible hébraïque

L’institution contre-attaque

La Bible de la discorde

La chambre d’écho

Imprimerie, science et sorcières

L’inquisition espagnole à la rescousse

La découverte de l’ignorance

Les mécanismes d’autocorrection

Le DSM et la Bible

Publier ou périr

  1. Décisions : une brève histoire de la démocratie et du totalitarisme

La dictature de la majorité

Le peuple vs la vérité

L’assaut populiste

Mesurer la force des démocraties

Les démocraties de l’âge de pierre

César président !

Les médias de masse rendent la démocratie de masse possible

Le XXè siècle : démocratie de masse, mais aussi totalitarisme de masse

Brève histoire du totalitarisme

Sparte et l’empire Qin

La trinité totalitaire

Contrôle total

Les koulaks

Les Soviétiques une grande famille heureuse

Le Parti et l’Église

Comment l’information circule

Nul n’est parfait

Le pendule technologique

Deuxième partie

LE RÉSEAU INORGANIQUE

  1. Les nouveaux membres : en quoi les ordinateurs sont différents des presses à imprimer

Des maillons de la chaîne

Pirater le système d’exploitation de la civilisation humaine

Quelles sont les implications ?

Assumer nos responsabilités

Droite et gauche

Pas de déterminisme

  1. Implacable : le réseau est toujours actif

Des agents qui jamais ne dorment

Surveillés de l’intérieur

La fin de la vie privée

Différents types de surveillance

Le système de crédit social

Toujours actif

  1. Faillible : le réseau a souvent tort

La dictature du like

Rejeter la faute sur les humains

Le problème de l’alignement

Le Napoléon des trombones

La filière corse

Le nazi kantien

Calculer la souffrance

Mythologie informatique

Les nouvelles sorcières

Biais informatiques

Les nouveaux dieux ?

Troisième partie

POLITIQUE INFORMATIQUE

  1. Démocratie : une conversation impossible ?

La voie démocratique

La démocratie au défi du changement

Le suicide des conservateurs

Impénétrable

Le droit à une explication

Chute libre

Anarchie numérique

Bannir les bots

L’avenir de la démocratie

  1. Totalitarisme : le pouvoir aux algorithmes ?

La prison des bots

Prise de pouvoir algorithmique

Le dilemme du dictateur

  1. Le rideau de silicium : empire mondial ou division mondiale?

L’essor des empires numériques

Colonialisme des données

De la toile au cocon

Une scission planétaire du corps et de l’esprit

De la guerre du code à la guerre chaude

Le lien mondial

Le choix humain

Épilogue

Extinction des plus intelligents

Notes

Remerciements


EXTRAIT DU PROLOGUE

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Source : Éditions Albin Michel.

Nous avons baptisé notre espèce Homo sapiens – l’homme sage. Mais on est en droit de se demander dans quelle mesure nous avons fait honneur à ce nom.

Au cours des cent mille dernières années, nous autres, Sapiens, avons certes accumulé un pouvoir immense. La simple liste de nos découvertes, inventions et conquêtes noircirait des volumes entiers. Mais pouvoir n’est pas sagesse, et après cent mille ans de découvertes, d’inventions et de conquêtes, l’humanité s’est elle-même précipitée dans une crise existentielle. Nous sommes au bord de l’effondrement écologique, conséquence du mauvais usage que nous faisons de notre pouvoir. Nous sommes par ailleurs occupés à créer de nouvelles technologies, comme l’intelligence artificielle (IA), potentiellement capables d’échapper à notre contrôle et de nous réduire en esclavage ou de nous annihiler. Pourtant, à l’heure où notre espèce devrait s’unir pour affronter ces défis existentiels, les tensions internationales ne cessent de croître, la coopération à l’échelle mondiale se fait de plus en plus difficile, certains pays constituent des stocks d’armes apocalyptiques et une nouvelle guerre mondiale ne paraît pas impossible.

Si nous sommes si sages, nous autres Sapiens, pourquoi faisons-nous preuve d’une telle tendance à l’autodestruction ?

Plus fondamentalement, les quantités d’informations que nous avons amassées sur absolument tout, des molécules d’ADN aux galaxies les plus lointaines, ne semblent pas nous avoir apporté de réponse aux grandes questions existentielles : Qui sommes-nous ? À quoi devons-nous aspirer ? Qu’est-ce qu’une vie bonne, et comment devrions-nous la vivre ? Malgré la masse démesurée d’informations dont nous disposons, nous sommes tout aussi enclins que nos lointains ancêtres aux illusions et aux fantasmes. Le nazisme et le stalinisme ne sont que deux exemples récents, parmi tant d’autres, de la folie collective qui s’empare parfois des sociétés, même les plus modernes. Nul ne conteste le fait que les humains d’aujourd’hui possèdent bien plus d’informations et de pouvoir que ceux de l’âge de pierre – mais notre compréhension de nous-mêmes et de notre rôle dans l’univers a-t-elle réellement progressé ? Rien n’est moins sûr.

Pourquoi sommes-nous si forts pour emmagasiner toujours plus d’informations et de pouvoir, mais beaucoup moins pour acquérir de la sagesse ? Au fil des âges, bien des traditions ont considéré qu’un défaut dans notre nature nous poussait à vouloir posséder des pouvoirs que nous étions incapables de maîtriser. Le mythe grec de Phaéton raconte ainsi l’histoire d’un jeune homme découvrant qu’il est le fils d’Hélios, le dieu Soleil. Désireux de prouver son origine divine, Phaéton réclame le privilège de conduire le char du soleil. Hélios le met en garde sur le fait qu’aucun humain ne saurait contrôler les chevaux célestes qui tirent le char solaire. Mais Phaéton insiste tant que le dieu Soleil finit par céder. Après s’être fièrement élevé dans le ciel, Phaéton perd bel et bien le contrôle du char. Le soleil dévie de sa course, brûlant toute végétation, tuant d’innombrables créatures et menaçant d’embraser la Terre entière. Zeus intervient alors et foudroie Phaéton. Notre humain vaniteux, lui-même en proie aux flammes, tombe du ciel telle une étoile filante. Reprenant le contrôle du ciel, les dieux sauvent le monde.

Deux mille ans plus tard, alors que la révolution industrielle faisait ses premiers pas et que les machines commençaient à remplacer les humains dans de nombreuses tâches, Johann Wolfgang von Goethe publia un conte moral du même ordre, intitulé « L’apprenti sorcier ». Ce poème (que Walt Disney rendra plus tard célèbre sous la forme d’un court-métrage d’animation dans lequel Mickey Mouse interprète le rôle-titre) évoque un vieux sorcier qui, devant s’absenter, demande à son jeune apprenti de veiller sur son atelier et lui confie quelques corvées – aller chercher, entre autres, de l’eau à la rivière. L’apprenti décide de se faciliter la vie : empruntant au sorcier l’un de ses sortilèges, il enchante un balai afin qu’il aille puiser l’eau à sa place. Mais l’apprenti ne sait pas comment arrêter le balai, qui ne cesse plus de rapporter des seaux, menaçant d’inonder l’atelier. Pris de panique, l’apprenti tranche alors le balai d’un coup de hache, avec pour seul résultat que chacune des moitiés s’anime sous ses yeux : ce sont à présent non plus un, mais deux balais enchantés qui déversent leur eau dans l’atelier ! Quand le vieux sorcier revient, l’apprenti l’implore de l’aider : « Les esprits que j’ai invoqués, je ne peux plus m’en débarrasser. » Le sorcier brise aussi- tôt le sortilège et met fin au déluge. La leçon adressée à l’apprenti – et à l’humanité en général – est claire : ne jamais invoquer des pouvoirs qu’on ne peut maîtriser.

Que nous disent les fables de l’apprenti et de Phaéton en ce début de XXIe siècle ? Nous autres, les humains, sommes manifestement restés sourds à leurs avertissements. Nous avons d’ores et déjà déséquilibré le climat terrestre et invoqué des milliards de balais enchantés, de drones, de chatbots et autres esprits algorithmiques qui pourraient échapper à notre contrôle et provoquer un déferlement de conséquences involontaires.

Mais alors, que devons-nous faire ? Ces fables n’offrent aucune solution, si ce n’est attendre qu’un dieu ou un sorcier vole à notre secours. Ce qui constitue, bien sûr, un message extrêmement dangereux : il encourage les gens à se décharger de toute responsabilité pour s’en remettre aux dieux ou aux sorciers. Pire encore, ce message méconnaît le fait que dieux et sorciers sont eux-mêmes des inventions humaines – au même titre que les chars, les balais et les algorithmes. La tendance à créer des choses puissantes aux conséquences imprévisibles n’est pas née avec l’invention de la machine à vapeur ou de l’IA, mais avec celle de la religion. Prophètes et théologiens n’ont cessé d’invoquer des esprits puissants censés apporter l’amour et la joie, mais qui, parfois, ont ensanglanté le monde.

Si le mythe de Phaéton et le poème de Goethe échouent à nous fournir des conseils utiles, c’est parce qu’ils se méprennent sur la manière dont les hommes acquièrent leur pouvoir. Dans ces deux récits, un seul être humain se retrouve investi d’un pouvoir immense, mais il est alors corrompu par l’avidité et son orgueil démesuré. Dès lors, une conclusion s’impose : c’est l’imperfection de notre psychologie individuelle qui nous pousse à abuser de notre pouvoir. Ce que ne saisit pas cette analyse grossière, c’est que le pouvoir des hommes ne résulte jamais d’une initiative individuelle : il découle toujours d’une coopération entre un grand nombre d’êtres humains.

Par conséquent, ce n’est pas notre psychologie individuelle qui nous conduit à abuser de ce pouvoir. Après tout, les hommes ne sont pas seulement capables d’avidité, d’orgueil et de cruauté, mais aussi d’amour, de compassion, d’humilité et de joie. Certes, chez les pires représentants de notre espèce, avidité et cruauté règnent en maîtres et poussent ces acteurs malintentionnés à abuser de leur pouvoir. Mais pourquoi les sociétés humaines décideraient-elles de confier le pou- voir à leurs pires représentants ? En 1933, par exemple, la plupart des Allemands n’étaient pas des psychopathes. Pourquoi, alors, ont-ils voté pour Hitler ?

Notre tendance à invoquer des pouvoirs que nous ne maîtrisons pas ne naît pas de notre psychologie individuelle mais de la capacité unique de notre espèce à coopérer à grande échelle. L’argument central de ce livre, c’est que l’humanité acquiert énormément de pouvoir en construisant d’immenses réseaux de coopération, mais que la manière dont ces derniers sont conçus les prédispose à un usage déraisonnable de ce pouvoir. Notre problème est donc un problème de réseau.

Pour être plus précis encore, il s’agit d’un problème d’information. L’information est la colle qui fait tenir ensemble les réseaux. Mais depuis des dizaines de milliers d’années, les Sapiens ont bâti et pérennisé des réseaux à grande échelle en inventant et en diffusant des fictions, des fantasmes et des illusions collectives – au sujet des dieux, de balais enchantés, au sujet de l’IA et de tout un tas d’autres choses. Si ce qui intéresse en général chaque individu humain, c’est de connaître la vérité sur lui-même et sur le monde, les réseaux à grande échelle s’appuient, pour relier leurs membres et instaurer l’ordre, sur des fictions et des fantasmes. C’est ce qui nous a conduits, notamment, au nazisme et au stalinisme : deux réseaux extraordinairement puissants, dont la cohésion reposait sur des idées extraordinairement fallacieuses. Pour citer la fameuse phrase de George Orwell : l’ignorance, c’est la force.

Le fait que les régimes nazi et stalinien aient été fondés sur de cruels fantasmes et des mensonges éhontés n’avait rien d’exceptionnel au regard de l’histoire, pas plus qu’il ne les prédestinait à s’effondrer. Nazisme et stalinisme font partie des réseaux les plus solides jamais créés par l’homme. À la fin de l’année 1941 et au début de la suivante, les puissances de l’Axe furent à deux doigts de remporter la Seconde Guerre mondiale. Staline sortit finalement vainqueur de ce conflit1 et, au cours des années 1950 et 1960, le dirigeant soviétique puis ses héritiers eurent également de raisonnables chances de gagner la guerre froide. Dans les années 1990, les démocraties libérales finirent par prendre le dessus, mais cette victoire semble aujourd’hui n’avoir été que temporaire. Au XXIe siècle, un nouveau régime totalitaire pourrait bien réussir là où Hitler et Staline ont échoué, et créer un réseau tout- puissant capable d’empêcher toute tentative de la part des générations futures de ne serait-ce qu’essayer de dénoncer ses mensonges et ses fictions. Nous ne devrions pas partir du principe que les réseaux dévoyés sont voués à l’échec. Si nous voulons les empêcher de triompher, il va falloir nous retrousser les manches.

La vision naïve de l’information

La force des réseaux dévoyés est difficile à mesurer, à cause d’un malentendu plus général au sujet de la manière dont opèrent les grands réseaux d’information – qu’ils soient ou non fondés sur des illusions. On peut résumer ce malentendu à ce que j’appellerai la « vision naïve de l’information ». Là où des fables comme le mythe de Phaéton et

« L’apprenti sorcier » offrent une vision pessimiste de la psychologie individuelle des hommes, la vision naïve de l’information voit d’un œil exagérément optimiste les réseaux humains à grande échelle.

Cette vision naïve soutient en effet qu’en collectant et en traitant bien plus d’informations que ne pourraient le faire des individus, les grands réseaux accèdent à une meilleure compréhension de la médecine, de la physique, de l’économie et de nombreux autres domaines, ce qui les rend non seulement puissants, mais sages. Ainsi, grâce aux informations récoltées sur des agents pathogènes, laboratoires pharmaceutiques et services de santé sont capables de déterminer les véritables causes de nombreuses maladies, ce qui leur permet de développer des médicaments plus efficaces et de déterminer leur usage de manière mieux avisée. Cette vision pose comme principe que, recueillie en quantité suffisante, l’information mène à la vérité, laquelle mène à son tour au pouvoir et à la sagesse. L’ignorance, en revanche, semble ne mener nulle part. Si des réseaux dévoyés ou trompeurs peuvent parfois surgir dans des moments de crise historique, ils sont à long terme condamnés à céder devant des rivaux plus clairvoyants et plus honnêtes. Un service de santé qui ne tient pas compte des informations sur les agents pathogènes, ou une multinationale pharmaceutique qui se livre à une entreprise de désinformation, finiront toujours par être terrassés par des concurrents qui font un usage plus raisonnable des informations. La vision naïve implique donc que les réseaux dévoyés sont forcément des aberrations et qu’on peut généralement faire confiance aux grands réseaux pour exercer le pouvoir avec discernement.

Sans titre

Bien sûr, la vision naïve reconnaît que le chemin qui mène de l’information à la vérité est semé d’embûches. Nous pouvons commettre des erreurs de bonne foi en récoltant et en traitant les informations. Des acteurs malintentionnés mus par l’avidité ou la haine peuvent dis- simuler des faits cruciaux ou tenter de nous tromper. Avec pour conséquence que l’information mène parfois à l’erreur plutôt qu’à la vérité. Des informations incomplètes, par exemple, des analyses erronées ou des campagnes de désinformation peuvent conduire les spécialistes eux-mêmes à mal identifier la cause véritable de telle ou telle maladie.

Néanmoins, la vision naïve postule que l’antidote à la plupart des problèmes rencontrés dans la collecte et le traitement des informations consiste à en collecter et à en traiter toujours plus. Bien qu’on ne soit jamais à l’abri d’une erreur, dans la plupart des cas, plus il y a d’informations, plus on se rapproche de l’exactitude. Un seul médecin cherchant à identifier la cause d’une épidémie en examinant un seul patient a moins de chances d’y parvenir que des milliers de médecins récoltant les données de millions de patients. Et si les médecins complotent entre eux pour dissimuler la vérité, le fait de rendre les informations médicales plus accessibles au grand public et aux journalistes d’investigation permettra tôt ou tard de révéler la fraude. Dans cette vision, plus le réseau d’information est grand, plus il tend nécessaire- ment vers la vérité.

Naturellement, le simple fait d’analyser avec justesse des informations et de mettre au jour d’importantes vérités ne garantit en rien que nous utiliserons avec sagesse les capacités qui en résultent. On entend généralement par sagesse l’aptitude à « prendre de bonnes décisions », mais le sens de « bonnes » dépend ici de jugements de valeur qui diffèrent d’une personne, d’une culture et d’une idéologie à l’autre. Des scientifiques qui découvrent un nouvel agent pathogène pourront développer un vaccin pour protéger les populations. Mais si ces scientifiques – ou leurs supérieurs politiques – adhèrent à une idéologie raciste soutenant que certaines races sont inférieures et qu’il faut les exterminer, ces nouvelles connaissances médicales pourront aussi servir à créer une arme biologique capable de tuer des millions de personnes.

Là encore, selon la vision naïve de l’information, un surcroît d’informations offre au moins un remède partiel : à y regarder de plus près, postule cette vision, les désaccords au sujet des valeurs se révèlent être le fruit soit d’un manque d’informations, soit d’une désinformation délibérée. Les racistes seraient donc des personnes mal informées, qui ignorent simplement les faits biologiques et historiques. Des théories du complot bidon leur ont lavé le cerveau, et ils croient que la « race » est une catégorie biologique valable. Par conséquent, le remède au racisme consiste à fournir aux gens davantage de faits historiques et biologiques. Cela prendra sans doute un certain temps, mais dans un libre marché de l’information, tôt ou tard, la vérité s’imposera.

La vision naïve est bien sûr plus nuancée et réfléchie qu’on ne saurait l’expliquer en quelques paragraphes, mais son postulat de départ est que l’information est une chose fondamentalement bonne, et que plus nous en possédons, mieux c’est. Avec suffisamment d’informations et de temps, nous découvrirons forcément la vérité sur tout un tas de sujets, allant des infections virales aux préjugés racistes, et développerons par conséquent non seulement notre pouvoir mais aussi la sagesse nécessaire pour en faire bon usage.

Cette vision naïve, qui justifie la quête de technologies de l’information toujours plus puissantes, constitue depuis le début l’idéologie semi-officielle de l’ère informatique et d’Internet. En juin 1989, quelques mois avant la chute du mur de Berlin et du rideau de fer, Ronald Reagan déclare ainsi que « le Goliath du contrôle totalitaire ne tardera pas à être abattu par le David de la puce électronique », et que « le plus grand de tous les Big Brother est de plus en plus impuissant face aux technologies de la communication. […] L’information est l’oxygène des temps modernes. […] Elle s’infiltre dans les murs cou- ronnés de fils barbelés. Elle flotte par-delà les frontières électrifiées et minées. Des brises de rayons électroniques soufflent à travers le rideau de fer comme si c’était de la dentelle2. » En novembre 2009, Barack Obama prononce un discours assez similaire lors d’une visite à Shanghai, déclarant à ses hôtes chinois : « Je crois beaucoup en la technologie et je crois beaucoup en l’ouverture en ce qui concerne les flux d’information. Je crois que plus l’information circule librement, plus la société devient forte3. »

Entrepreneurs et PDG ont souvent exprimé une vision tout aussi optimiste des technologies de l’information. En 1858, déjà, dans The New ffnglander un éditorial consacré à l’invention du télégraphe pro- clamait : « Il est impossible que les préjugés et les hostilités d’antan continuent d’exister, maintenant qu’un tel instrument a été créé afin de permettre l’échange d’idées entre toutes les nations de la Terre4. » Près de deux siècles et deux guerres mondiales plus tard, Mark Zuckerberg décrit ainsi l’objectif de Facebook : « Aider les gens à partager davantage afin de rendre le monde plus ouvert et favoriser la compréhension entre les hommes5. »

Dans son ouvrage The Singularity is Nearer, publié en 2024, l’éminent futurologue et entrepreneur Ray Kurzweil, retraçant l’histoire des technologies de l’information, parvient à cette conclusion : « La réalité, c’est que pratiquement tous les aspects de la vie s’améliorent peu à peu grâce aux progrès exponentiels de la technologie. » Passant en revue la grande histoire de l’humanité, il s’appuie sur des exemples comme l’invention de l’imprimerie pour démontrer que, par leur nature même, les technologies de l’information tendent à engendrer un « cercle vertueux permettant de faire progresser quasiment tous les aspects du bien-être humain, notamment l’alphabétisation, l’éducation, la santé, la démocratisation et la réduction de la violence6 ».

C’est sans doute dans la déclaration de mission de Google que cette vision naïve de l’information est le plus succinctement condensée : « organiser les informations du monde et les rendre universellement accessibles et utiles ». La réponse de Google à la mise en garde de Goethe est que si un seul apprenti chapardant le livre de sortilèges secret de son maître a toutes les chances de provoquer une catastrophe, dès lors qu’on offre à un grand nombre d’apprentis un accès libre à toute l’information du monde, non seulement ils créeront des balais enchantés utiles, mais ils apprendront à s’en servir avec discernement.

Google vs Goethe

Force est de reconnaître que, dans bien des cas, le fait de disposer de plus d’informations a bel et bien permis aux hommes de mieux com- prendre le monde et de faire un usage mieux avisé de leur pouvoir. Prenez, par exemple, la baisse spectaculaire de la mortalité infantile. Johann Wolfgang von Goethe était l’aîné d’une fratrie de sept, mais seuls sa sœur Cornelia et lui fêtèrent leur septième anniversaire. La maladie emporta leur frère Hermann Jacob à l’âge de six ans, leur sœur Catharina Elisabeth à quatre ans, leur sœur Johanna Maria à deux ans et leur frère Georg Adolf à l’âge de huit mois ; un cinquième enfant, mort-né, n’eut même pas le temps d’être baptisé. Cornelia succomba ensuite à une maladie à l’âge de vingt-six ans, faisant de Johann Wolfgang von Goethe l’unique survivant de la famille7.

Johann Wolfgang von Goethe eut lui-même cinq enfants, qui, à l’exception du fils aîné, August, moururent tous dans les deux semaines qui suivirent leur naissance. Selon toute probabilité, la cause en était une incompatibilité entre le groupe sanguin de l’épouse de Goethe, Christiane, et celui de son premier enfant, après la naissance duquel elle se mit à produire des anticorps, phénomène aux conséquences fâcheuses pour les grossesses suivantes. Cette pathologie, connue sous le nom de…

Source : Éditions Albin Michel.


Du même auteur

Yuval Noah Harari

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sapiens-tome-2

sapiens-tome-3

Sapiens : une brève histoire de l’humanité
Albin Michel, 2015

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Homo deus : une brève histoire du futur
Albin Michel, 2017

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21 leçons pour le xxie siècle
Albin Michel, 2018

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Nous les indomptables
Illustrateur : Ricard Zaplana Ruiz
Albin Michel, 2022


Au sujet de l’auteur

Yuval Noah Harari

Yuval Noah Harari at the 2024 Frankfurt Book Fair 2024 - 16 October 2024 - Image: Martin Kraft (photo.martinkraft.com) License: CC BY-SA 4.0 via Wikimedia Commons.
Yuval Noah Harari at the 2024 Frankfurt Book Fair 2024 – 16 October 2024 – Image: Martin Kraft (photo.martinkraft.com) License: CC BY-SA 4.0 via Wikimedia Commons.

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Présentation de l’auteur sur le site web officiel de l’auteur

Le Professeur Yuval Noah Harari est historien, philosophe, et auteur des bestsellers Sapiens, une brève histoire de l’humanité, Homo Deus, une brève histoire de l’avenir, 21 leçons pour le XXIe siècle, de la série d’essais dessinés Sapiens, de Nous, les indomptables, et de Nexus, une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA. Ses livres se sont vendus à plus de 45 millions d’exemplaires et ont été traduits dans 65 langues, et il est considéré comme l’un des plus grands penseurs contemporains.

Né en 1976 à Haïfa, en Israël, il obtient son doctorat à l’Université d’Oxford en 2002 et est actuellement chercheur émérite au Centre pour l’étude des risques existentiels de l’université de Cambridge. En 2019, à la suite du succès de ses livres, Yuval Noah Harari et Itzik Yahav ont co-fondé Sapienship : une entreprise à but social avec des projets dans les domaines de l’éducation et de la fiction. Le principal objectif de Sapienship est de focaliser le débat public sur les défis cruciaux auxquels le monde est aujourd’hui confronté.

En 2018 puis en 2020, Yuval Noah Harari a prononcé le discours inaugural sur le futur de l’humanité lors des deux réunions annuelles du Forum économique mondial à Davos. Il rencontre régulièrement des chefs d’État pour aborder différents problèmes internationaux, et il a participé à des débats publics avec le Chancelier autrichien Sébastian Kurz, le Premier ministre des Pays Bas Mark Rutter et le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis. Il a également rencontré le Président Emmanuel Macron, la Chancelière allemande Angela Merkel, le Président argentin Mauricio Macri, le Président allemand Franck-Walter Steinmeier, et le maire de Shangaï Ying Yong. En 2018, Yuval Noah Harari a présenté la première conférence TED donnée par un avatar numérique, et en 2019, il a participé à un débat filmé organisé entre lui et le PDG de Facebook, Mark Zuckerberg, sur la technologie et l’avenir de notre société. En 2021, il a fait l’objet d’un reportage dans l’émission « 60 Minutes » (CBS).

Yuval Noah Harari s’est d’abord spécialisé dans l’histoire internationale, l’histoire médiévale et l’histoire militaire. Ses recherches actuelles portent sur des questions de macro-histoire : Quelle relation existe-t-il entre l’histoire et la biologie ? Qu’est-ce qui distingue Homo Sapiens des autres animaux ? L’histoire est-elle juste ? L’histoire a-t-elle un but ? Les gens sont-ils plus heureux aujourd’hui qu’auparavant ? Quelles questions éthiques la science et la technologie posent-elles au XXIe siècle ?

Publié en 2014, Sapiens, une brève histoire de l’humanité est devenu un succès mondial, avec 25 millions d’exemplaires vendus. Aux États-Unis, il est resté dans le palmarès des meilleures ventes du New York Times pendant plus de la moitié du temps les 6 premières années après sa parution. Au Royaume-Uni, il est resté dans le top 3 du palmarès du Sunday Times pendant plus de 96 semaines consécutives. Sapiens a été recommandé par Barack Obama, Bill Gates, Natalie Portman, Janelle Monáe, Chris Evans et beaucoup d’autres. Pour le Guardian, Sapiens a révolutionné le marché de la non-fiction et contribué à populariser les « livres intelligents ». En 2024, Sapiens a figuré dans la rubrique du New York Times « Readers Pick Their 100 Best Books of the 21st Century » (Les lecteurs choisissent leurs 100 meilleurs livres du 21e siècle) et est arrivé en 10e position sur la liste du Sunday Times des « 100 livres les plus vendus au cours des 50 dernières années » (où Homo Deus est également apparu en 44e position).

En 2016, le Professeur Harari revient avec Homo Deus, une brève histoire de l’avenir, un livre acclamé par la critique qui examine les grands défis auxquels l’humanité sera confrontée au XXIe siècle. Homo Deus met en garde contre la menace que représentent de nouveaux pouvoirs technologiques sans précédents, qui pourraient permettre à certains Homo sapiens d’augmenter artificiellement leur corps et leur esprit, tandis que d’autres membres de la société seraient laissés pour compte.

En 2018, Yuval Noah Harari publie 21 leçons pour le XXIe siècle. Après avoir exploré le passé puis le futur, il se concentre sur les questions cruciales du présent et prend le pouls du climat mondial. Que se passe-t-il réellement maintenant ? Quels sont les plus grands défis et choix de notre temps ? A quoi devrions-nous prêter attention ?

En 2020, Yuval Noah Harari (en tant que créateur et co-scénariste) fait équipe avec les artistes de bande-dessinée David Vandermeulen (co-scénariste) et Daniel Casanave (dessinateur). Ensemble, ils créent le premier volume de Sapiens, une adaptation du Sapiens originel en une série de romans graphiques débordant d’intelligence, d’humour et de couleurs. Ce livre illustré met en scène Yuval Noah Harari dans le rôle du guide, qui emmène le lecteur à travers toute l’histoire de l’espèce humaine, accompagné d’un éventail de personnages fictifs, à travers le temps, l’espace et les références culturelles populaires. La série sera publiée en quatre tomes, dont les trois premiers sont déjà disponibles.

À l’automne 2022, Harari s’est aventuré pour la première fois dans l’univers des livres pour enfants, avec la série pour adolescents Nous, les indomptables. Il y raconte l’incroyable histoire des humains – notre espèce conquérante et insatiable – d’une manière accessible aux enfants. La série sera publiée en quatre volumes immersifs, avec des illustrations en couleurs de Ricard Zaplana Ruiz, à commencer par Nous, les indomptables : Comment les humains ont conquis le monde. Ce livre est rapidement devenu un best-seller cité parmi les meilleurs livres pour enfants de 2022 du New York Times, et a été chaleureusement recommandé par Jeff Kinney, Kristen Bell et Kirkus Review. La série continue avec le tome 2 : Pourquoi le monde est-il injuste ? sorti fin 2023.

Fin 2024, Yuval Noah Harari a publié un nouvel essai majeur sur l’évolution de l’humanité dans l’ère de l’information – Nexus : une brève histoire des réseaux d’information, de l’âge de pierre à l’IA. Nous donnant des clés essentielles pour comprendre les promesses et les menaces de la révolution actuelle de l’IA, Nexus retrace l’histoire des réseaux d’information, de l’âge de pierre à la résurgence des populismes actuels, en passant par la Bible, les chasses aux sorcières du début de l’époque moderne, le stalinisme et le nazisme. Cet essai interroge la relation complexe entre l’information et la vérité, les systèmes bureaucratiques et la mythologie, la sagesse et la puissance, et questionne les choix urgents auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui, alors que l’intelligence artificielle menace notre existence même. Nexus a connu un succès immédiat, en 2 e position sur la liste des bestsellers du New York Times, du Times et d’Audible dans la semaine qui a suivi sa parution. Numéro 1 de la liste des audiolivres du New York Times pour le mois de septembre 2024, Nexus a été recommandé notamment par Mustafa Suleyman, Stephen Fry et Kristalina Georgieva.

Le Professeur Yuval Noah Harari a reçu de nombreuses récompenses. En 2020, il a reçu un doctorat honoraire de l’Université Libre de Bruxelles et le prix CITIC de l’auteur en Chine pour Sapiens – t.1 : La Naissance de l’humanité. En 2019, 21 leçons pour le XXIe siècle a été désigné comme « Livre scientifique de l’année » par le magazine allemand Bild der Wissenschaft, et Sapiens a reçu le Prix du livre académique de l’année lors des Academic Book Trade Awards au Royaume-Uni. En 2017, Homo Deus a reçu le prix allemand « Handelblatt » du livre économique « le plus réfléchi et influent » de l’année et, en 2015 Sapiens a reçu le Wenjin Book Award en Chine. Yuval Noah Harari a remporté le prix Polonsky pour la créativité et l’originalité à deux reprises, en 2009 puis en 2012. En 2011, il s’est également vu décerner le Society for Military History’s Moncado Award, pour ses articles exceptionnels sur l’histoire militaire.

Le Professeur Harari donne régulièrement des conférences à travers le monde sur les sujets abordés dans ses livres et ses articles, et écrit pour des journaux tels que The Guardian, The Financial Times, The New York Times, TIME, The Washington Post et The Economist. En 2020, il a écrit et a été interviewé à de très nombreuses reprises sur les principales chaînes d’informations, dont CNN et la BBC, à propos de la crise mondiale du coronavirus, et des conséquences de la pandémie. En 2022, il a publiquement commenté l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Son article sur le sujet est devenu celui de la rubrique « Opinion » du Guardian le plus lu de tous les temps. Depuis 2023, Harari a pris position et écrit de nombreux articles sur la guerre à Gaza.

Source : Site web officiel de Yuval Noah Harari.

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wikipedia-1pceYuval Noah Harari, en hébreu : יובל נח הררי, né le 24 février 1976 à Kiryat-Ata en Israël, est un historien et professeur d’histoire à l’université hébraïque de Jérusalem, il est l’auteur du best-seller international Sapiens : Une brève histoire de l’humanité et de sa suite Homo Deus : Une brève histoire de l’avenir puis 21 leçons pour le XXIe siècle.

Yuval Harari est né à Kiryat-Ata en Israël de parents juifs libanais séfarades(1) et juifs ashkénazes roumains, ayant émigré d’Europe de l’Est(2). Il se spécialise en histoire médiévale et militaire et obtient son doctorat au Jesus College de l’université d’Oxford en 2002. Il devient enseignant de World History à l’université hébraïque de Jérusalem en 2005.

Harari pratique la méditation vipassana depuis 2003(3), telle qu’enseignée par S. N. Goenka et ses assistants-enseignants, dans la tradition de Sayagyi U Ba Khin (en). Son livre Homo Deus est d’ailleurs dédié à son maître S. N. Goenka(4). Il médite deux heures par jour et fait souvent de longues retraites d´une dizaine de jours à plusieurs mois(5).

En écrivant Sapiens : Une brève histoire de l’humanité, Yuval Harari s’est documenté en zootechnie, sur le traitement des animaux dans l’industrie de la viande, des produits laitiers et des œufs jusqu’à en être horrifié, ce qui l’a amené à devenir végan3,6. Le sort des animaux, en particulier des animaux d’élevage, est traité à plusieurs reprises dans ses ouvrages.

Il est homosexuel, ce qui lui permet selon lui « de remettre en question les idées reçues »5, et vit avec son mari7 et manager Itzik Yahav8 dans le moshav (communauté agricole coopérative) Mesilat Zion près de Jérusalem.

Ses conférences en hébreu sur l’histoire du monde ont été visionnées par des dizaines de milliers d’internautes en Israël. Yuval Harari a proposé également en 2014 une série de cours en ligne gratuits en anglais (MOOC) intitulée « A Brief History of Humankind »9. Plus de 100 000 personnes y étaient inscrites. Harari a pu se faire connaître dans le monde entier par le biais de ses Ted talks10.

Source et lire la suite : Yuval Noah Harari, Wikipédia.


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Revue de presse

Émission sur ARTE-TV – UN LIVRE POUR MA VIE (VIÉDO EN LIGNE)

Yuval Noah Harari, la rock star des historiens qui défrise les scientifiques – Il revendique 45 millions de lecteurs à travers le monde avec « Sapiens » ou « Homo Deus ». Celui qui s’est vu affubler du titre de « premier intellectuel global du XXIe siècle » continue de creuser son sillon avec un nouveau livre, « Nexus », publié jeudi. Article rédigé par Pierre Godon, France Télévision.

Elon Musk devrait lire ce livre (au plus vite), Alexandre Sirois, La Presse.

L’avantage comparatif de l’espèce humaine, BRUCE EDWARDS, Fonds monétaire internationale, Décembre 2024

“Nexus”, de Yuval Noah Harari : l’information, c’est de la dynamite ! – Une recension de Apolline Guillot, PHILOSOPHIE MAGAZINE, publié le 24 septembre 2024

D’où vient le succès fulgurant de Yuval Noah Harari, l’historien aux 20 millions de livres vendus ? Ouest-France, Patrice BOLLON pour Lire Magazine. Publié le 21/10/2024 à 11h00

Yuval Noah Harari : « Nous avons tellement de pouvoir, de savoir, et nous sommes sur le point de nous détruire » Radio France – France Inter, Publié le samedi 28 septembre 2024

« Nexus » de Yuval Noah Harari : la démocratie mise au défi par l’IA, Critique, LA CROIX, Marie Boëton, le 03/10/2024

Pour Yuval Noah Harari, les IA pourraient signer « la fin de l’histoire humaine », Pablo Maillé, 3 mai 2023, Usbek & Rica


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PARTIE 2 DE 2

Mon rapport de lecture du livre

Nexus

Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA

Yuval Noah Harari

Albin Michel, Paris, 2024

Le livre Nexus – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA signé par Yuval Noah Harari donne à penser que les civilisations se transforment avec la capacité de l’homme à produire, recueillir, centraliser et contrôler ou à diffuser l’information au fil des grandes innovations, de la tablette d’argile à l’intelligence artificielle (IA) en passant par l’imprimerie, le télégraphe, l’imprimerie, la presse écrite, la radio, la télévision, l’ordinateur et l’internet.

Difficile pour la presse de passer sous silence un auteur avec plus de 45 millions d’exemplaires vendus de ses livres témoigne les trois exemples ci-dessous.


philosophie-magazine-001“Nexus”, de Yuval Noah Harari : l’information, c’est de la dynamite !

Après avoir narré l’histoire de notre espèce, Harari propose, dans son nouvel opus, de la relire à la lumière de ses réseaux d’information. Moins sexy, à première vue. Pourtant, l’historien parvient à dramatiser les livres de comptes mésopotamiens et les querelles d’interprétation de l’Ancien Testament comme s’il s’agissait de la dernière saison de Game of Thrones. Un constat de départ : alors que nous sommes doués pour emmagasiner de l’information, cela ne nous a pas rendus plus sages au fil des millénaires. Pour lui, c’est un problème de réseau et de pouvoir : « L’humanité acquiert énormément de pouvoir en construisant d’immenses réseaux [d’information] mais la manière dont ces derniers sont conçus les prédispose à un usage déraisonnable de ce pouvoir. » Là où la vision « naïve » de l’information voit en elle la solution à tous les maux – il faudrait seulement la « factchecker », la rendre transparente, la faire circuler, la corriger –, Harari soutient qu’elle est, par nature, ambiguë. N’en déplaisent aux gourous de la Silicon Valley, collecter et partager plus d’information ne nous fait pas tendre vers la vérité et la justice. Il n’y a qu’à se souvenir du rôle joué par la diffusion de la Bible dans les guerres civiles européennes. L’information n’est pas ce tissu de signes bien sages : c’est à la fois la colle qui fait tenir les civilisations et la dynamite qui les fait imploser – elle donne forme au réel.

Source : GUILLOT, Apolline, “Nexus”, de Yuval Noah Harari : l’information, c’est de la dynamite ! Philosophie magazine, 24 septembre 2024.

L'Express_Logo.svgYuval Noah Harari : « Nos connaissances sont mises au service de mythologies parfois délirantes »

Idées. IA, religions, Israël… L’historien, auteur de « Nexus » et « Sapiens », montre comment les révolutions de l’information ont transformé nos sociétés, de la Bible jusqu’à l’actuel conflit au Proche-Orient. Vertigineux !

Des médias français ont un peu rapidement présenté Nexus (Albin Michel) comme un livre sur l’intelligence artificielle. C’est comme réduire le Nouveau Testament au Livre de l’Apocalypse. Car dans cette fresque vertigineuse, dix ans après Sapiens, Yuval Noah Harari revient une nouvelle fois sur l’histoire de l’humanité, mais à travers les réseaux d’information. Des mythes anciens jusqu’à l’IA en passant par la Bible, l’imprimerie et les médias de masse, l’historien israélien, professeur à l’université hébraïque de Jérusalem, montre comment chaque révolution technologique a entraîné de profonds bouleversements politiques, économiques et sociaux, pour le meilleur comme le pire.

Considéré comme l’un des intellectuels les plus influents de la planète, l’homme aux 45 millions d’ouvrages vendus livre à L’Express ses analyses percutantes sur la technologie, les religions, les mythes nationaux et le monde de demain. (…)

Source : MAHLER, Thomas, Yuval Noah Harari : « Nos connaissances sont mises au service de mythologies parfois délirantes », L’Express, 13 octobre 2024.

Le_monde_logo.svgYuval Noah Harari, prophète contesté de la « big history », des origines de l’homme à l’intelligence artificielle

L’historien israélien, auteur à succès de « Sapiens » et de « Nexus », brosse de grands récits allant des origines du cosmos au développement à venir de l’espèce humaine. Un sens de la généralisation que lui reprochent ses détracteurs.

Costume sombre et chaussettes fantaisie dépareillées, silhouette d’ascète, Yuval Noah Harari apparaît sur la scène de la Cité des sciences et de l’industrie sous les applaudissements de 800 spectateurs. Le 7 novembre, l’auteur israélien de 48 ans est de passage à Paris pour présenter son dernier ouvrage, Nexus (Albin Michel, 576 pages, 24,90 euros), un récit historique promis aux têtes des ventes qui raconte la façon dont les révolutions de l’information ont transformé nos sociétés « de la Bible aux intelligences artificielles [IA] ».

Source : FAURE, Valentine, Yuval Noah Harari, prophète contesté de la « big history », des origines de l’homme à l’intelligence artificielle, Le Monde, 15 décembre 2024.


Je classe ce livre dans ma bibliothèque aux côtés de Pour comprendre les médias du sociologue canadien Marshall McLuhan, le Choc du futur , de l’écrivain, sociologue et futurologue américain Alvin Toffler et Entre le boom et l’écho de l’économiste et démographe canadien David K. Foot, des ouvrages de grande influence sur ma compréhension du monde à leur époque.

Je me range facilement du côté de l’auteur Yuval Noah Harari lorsqu’il explique que l’information n’est pas nécessairement et obligatoirement « vérité » ou conforme à la réalité. Une information, nous le savons tous aujourd’hui, n’est pas vraie par elle-même.

Première partie – Réseaux humains

Chapitre 1 – Qu’est ce que l’information

(…)

On le voit donc, l’information ne saurait être définie comme un ou plusieurs types spécifiques d’objets matériels. En fonction du contexte, tout objet — une étoile, un volet, un pigeon — peut devenir une information. Mais alors, quel contexte, au juste, définit de tels objets comme des « informations » ? À en croire la vision naïve de l’information, c’est dans le contexte d’une recherche de la vérité que les objets se définissent comme des informations. Un chose est une information dès lors qu’on l’utilise pour tenter de découvrir la vérité. Cette vision associe le concept d’information au concept de vérité, partant du principe que l’information a pour fonction essentielles de représenter la réalité. Il existe une réalité « extérieure », et l’information en est la représentation, de sorte que nous pouvons nous en servir pour en apprendre davantage sur la réalité. (…)

(…)

Qu’est-ce que la vérité ?

Tout au long de ce livre, la « vérité » est entendue comme ce qui représente fidèlement tel ou tel aspect de la réalité. La notion même de vérité repose sur l’idée qu’il n’existe qu’une seule réalité universelle. Tout ce qui a existé jusqu’ici ou qui existera jamais dans l’univers — depuis l’étoile Polaire jusqu’au pigeons du réseau NILI, en passant par les sites d’astrologie en ligne — fait partie de cette unique réalité. C’est ce qui permet à la quête de la vérité d’être un projet universel. Si différentes personnes, nations ou cultures peuvent se nourrir des croyances ou des sentiments divergents, elles ne sauraient posséder des vérités contradictoires, puisqu’elles partagent toutes une même réalité universelle. Quiconque rejette l’universalisme, rejette la vérité.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 1 – Qu’est ce que l’information ?, Édition Albin Michel, Paris, 2024, pp.40-42.

P.S.: Le lien dans cette citation est de nous.

En 1972, alors âgé de 15 ans, j’entrais dans le monde des médias à titre de chroniqueur pour notre hebdomadaire régional, La Tribune de Lévis. Sous le titre « Salut les poètes ! », j’informais et orientais les poètes de la région vers la Société des poètes canadiens-français dont j’étais le plus jeune des directeurs. La chronique eu aussi son pendant à la station de radio locale où je lisais des poèmes en ondes le dimanche soir. Ainsi, j’adhérais déjà à « ce que fait l’information » selon Yuval Noah Harari, c’est-à-dire réseauter.

Ce qu’illustre le cas de l’astrologie, c’est que erreurs, mensonges, fantasmes et fictions sont aussi des informations. Contrairement à ce qu’affirme la vision naïve de l’information, celle-ci n’a pas de lien essentiel avec la vérité, et son rôle dans l’histoire ne consiste pas à représenter une réalité préexistante. Ce que fait l’information, c’est plutôt créer des nouvelles réalités en connectant entre eux des éléments disparates — qu’il s’agisse de couples ou d’empires. Sa caractéristique essentielle, ce qui la définit, ce n’est pas tant la représentation que la connexion : l’information est ce qui relie différents points pour former un réseau. L’information ne nous informe pas nécessairement sur les choses – elle met plutôt les choses « en forme », c’est-à-dire qu’elle les agence. Les horoscopes disposent ainsi les amoureux en formations astrologiques, les bulletins de propagandes disposent les électeurs en formations politiques, et les chants de marche dispose les soldats en formations militaires.

Prenons ce cas paradigmatique qu’est la musique. La plupart des symphonies, des mélodies et des morceaux ne représentent rien — demander s’ils sont vrais ou faux n’aurait aucun sens. Au fil des siècles, les hommes ont créé beaucoup de mauvaise musique, mais pas de fausse musique. La musique a beau ne rien représenter, elle n’en est pas moins remarquablement efficace pour connecter un grand nombre de personnes, synchroniser leurs émotions et leurs mouvements. Elle sait nous faire danser en discothèque et batte des mains en cadence à l’église, faire chanter en chœur les supporters et défiler au pas les soldats.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 1 – Qu’est ce que l’information ?, Édition Albin Michel, Paris, 2024, pp.46-47.

Avec ma chronique, je cherchais à recruter d’aussi jeunes poètes que moi au sein de la Société des poètes canadiens-français. Je me représentais l’information comme « un vecteur de lien social ».

L’information dans l’histoire de l’humanité

Envisager l’information comme un nexus, un vecteur de lien social, permet de mieux comprendre plusieurs aspects de l’histoire humaine qui mettent à mal la vision naïve de l’information comme représentation. Cela explique le succès à travers le siècles non seulement de l’astrologie mais de choses bien plus importantes, comme la Bible. Si certains dénigrent l’astrologie en la présentant comme un aspect aussi mineur que pittoresque de l’histoire de l’humanité, nul ne peut nier le rôle central qu’y a joué la Bible. Si la principale fonction de l’information était de représenter fidèlement la réalité, il serait difficile d’expliquer comment la Bible a pu devenir l’un des textes les plus influents de l’histoire.

La Bible multiplie les erreurs flagrantes dans sa description des affaires humaines et des processus naturels. (…)

(…)

Pourtant, bien que la représentation qu’elle donne de la réalité des origines de l’humanité, de ses migrations et des épidémies qui la frappent laisse grandement à désirer, la Bible ne s’en est pas moins montrée très efficace pour connecter des milliards d’hommes et créer les religions juives et chrétienne. De la même manière que l’ADN enclenche des processus chimiques qui relient entre elles des milliards de cellules pour former des réseaux organiques, la Bible a enclenché des processus sociaux qui ont relié entre eux des milliards d’êtres humains pour former des réseaux religieux. (…)

Pour conclure, l’information représente tantôt la réalité, tantôt non. Mais toujours, elle connecte. C’est sa caractéristique fondamentale. Par conséquent, lorsqu’on étudie le rôle de l’information dans l’histoire, bien qu’il soit parfois pertinent de demander : Avec quelle exactitude représente-t-elle la réalité ? Est-elle vraie ou fausse, les questions les plus cruciales sont généralement les suivantes : « Dans quelle mesure connecte-t-elle les gens ? Quel nouveau réseau crée-t-elle ? »

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 1 – Qu’est ce que l’information ?, Édition Albin Michel, Paris, 2024, pp. 49-51.

P.S.: le soulignement remplace le mot en italique dans le texte original.

À la suite de ma chronique « Salut les poètes ! », j’ai convaincu le rédacteur en chef de La Tribune de Lévis qu’il nous fallait informer les parents de ce qui passe dans les écoles de leurs enfants, ces derniers ne leurs parlant peu ou pas du tout de leur vie d’étudiant. Un page entière de l’hebdomadaire régional ne fut accorder pour y tenir une toute nouvelle chronique, « La Semaine Étudiante ». Je passais des heures et des heures au téléphones avec des étudiants de différentes institutions scolaires des niveaux élémentaires, secondaires et collégial pour m’informer des activités de leur milieu de vie respectif. J’ai ainsi créée un réseau d’information ayant à sa source les étudiants comme émetteurs et les parents comme récepteurs, le journal étant lu avant tout pas les parents. C’était aussi un nouveau réseau entre les étudiants des différentes écoles et un autre entre les parents. Les étudiants devinrent des lecteurs de la chronique découvrant ainsi ce qui se passait dans les autres écoles de la région. Et ceux et celles qui faisaient la une de la chronique en soutenait la promotion auprès de leurs confrères et consœurs dans leurs écoles. La chronique répondait à une demande de mise en réseaux. Le succès de ma chronique dans le journal fut tel qu’elle donna naissance à une émission hebdomadaire en direct à la station de télévision locale que j’animais avec plaisir. Chacune des émissions était suivie d’une rencontre en personne des téléspectateurs avec l’animateur et ses invités dans un bar de la région. Et une fois par mois, tous les téléspectateurs étudiants se regroupaient par milliers lors d’une soirée dansante dans la plus grande école de la région, le CÉGEP Lévis-Lauzon.

Chers lecteurs, vous comprenez déjà beaucoup mieux mon intérêt pour les médias. Et si je donne une place au livre NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA dans cet Observatoire de la philothérapie, c’est pour questionner le rôle des technologies de l’information dans la diffusion de la philosophie, de l’Antiquité à nos jours, et la perception que nous avons des philosophies apparues au fil du temps.

En contemplant l’histoire de l’information de l’âge de pierre à l’âge du silicium, nous assistons donc à un accroissement constant de la connectivité. qui ne s’accompagne pas d’un progrès en termes de véracité ou de sagesse. Contrairement à ce que professe la vision naïve, nous autres Homo sapiens n’avons pas conquis le monde grâce à notre talent pour transformer les informations en une carte fidèle de la réalité.

Non, le secret de notre réussite, c'est avant tout notre faculté à utiliser les informations pour connecter un grand nombre d'individus. Malheureusement, cette capacité va souvent de pair avec une propension à croire aux mensonges, aux erreurs et aux fantasmes.

Non, le secret de notre réussite, c’est avant tout notre faculté à utiliser les informations pour connecter un grand nombre d’individus. Malheureusement, cette capacité va souvent de pair avec une propension à croire aux mensonges, aux erreurs et aux fantasmes. C’est pour cette raison que même des sociétés aussi avancées d’un point de vue technologique que l’Allemagne nazie ou l’Union soviétique ont pu nourrir des idées délirantes, sans forcément que ces illusions les affaiblissent. À vrai dire, les délires de masses des idéologies nazie et stalinienne, notamment concernant les questions de race et de classes sociales, les ont en fait aidées à faire marcher d’un même pas des dizaines de millions de personnes.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 1 – Qu’est ce que l’information ?, Édition Albin Michel, Paris, 2024, p. 52.

P.S.: le caractère gras et l’encadrement du texte sont de nous.


Encore et encore ce fameux verbe : « CROIRE ». Est-ce là un besoin fondamental de l’être humain ? Vivons-nous pour croire ? Faut-il croire dans la vérité ? La vérité est-elle conditionnelle à sa croyance ? Croire quelque chose est-ce en reconnaître la vérité ? Que je crois ou non dans la réalité universelle, cette dernière demeure la seule vraie réalité. Ce que je crois n’est pas nécessairement vrai. Alors pourquoi je fais de la vérité une croyance ? Je n’ai pas besoin de croire pour que ce soit vrai.


« Les histoires furent la première technologie de l’information décisive inventée par l’homme » écrit Yuval Noah Harari. Lorsque l’homme abandonne le nomadisme pour prendre racine et donner lieu à ce que nous appelons la révolution néolithique, les histoires circulent entre les habitants du village sans pour autant circuler d’un village à l’autre, à moins de contacts entre eux. Chaque village d’autosuffisant grâce à l’agriculture et à élevage, il n’y avait pas lieu de partir à la découverte des autres villages dont on ignorait souvent l’existence. Mais l’homme étant ce qu’il est, il a tout de même rencontrer sur son chemin d’autres villages avec lesquels il a partagé ses histoires et inaugurer le commerce. On connaît la suite. Des villages sont devenus des villes, puis des villes-états, incapable de s’autosuffire et ainsi pousser à la spécialisation de certains de ses habitants (artisans) en plus d’être dans l’obligation de commercer avec d’autres villes-états.

(…) Contrairement aux poèmes et au mythes nationaux, qui peuvent être stockés dans nos cerveaux, les systèmes de taxation et d’administration plus complexes des États ont nécessité, pour pouvoir fonctionner, une technologie de l’information unique, non organique. Cette technologie, c’est le document écrit.

Prêt à tuer

Le document écrit a été inventé plusieurs fois, à plusieurs endroits différents. Certains des ses plus anciens exemples remontent à la Mésopotamie antique. Une tablette d’argile cunéiforme datée du vingt-huitième jour du dixième mois de la quarante et unième année du règne du roi Shulgi d’Ur (v. 2053-2054 av. J.C.) tenait ainsi compte des livraisons mensuelles de moutons et des chèvres : 14 moutons avaient été livré le deuxième jour du mois, 7 moutons les troisième jours du mois, (…) Au total, nous apprend cette tablette d’argile, 896 animaux furent livrés ce mois-là. Il était essentiel pour l’administration royale de garder la trace de toutes ces livraisons, afin de contrôler l’obéissance du peuple et d’assurer le suivi des ressources disponibles. Si enregistrer tous ces éléments dans l’esprit d’un humain représentait un insurmontable défi, un scribe pouvait sans peine les inscrire sur une tablette d’argile.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 3 – Document : la morsure des tigres de papier, Édition Albin Michel, Paris, 2024, pp. 82-83.

P.S.: (…) = passage non cité dans cet article mais présent dans le texte original.

Évidemment, les documents écrits ne sont pas exempts de toute erreur uniquement parce qu’ils sont écrits. Yuval Noah Harari souligne d’ailleurs une erreur sur la tablette d’Ur. Cette dernière dénombrait 896 animaux alors que les chercheurs modernes en compte 898.

Mais qu’ils soient justes ou erronés, les documents écrits ont créé de nouvelles réalités. En enregistrant des listes de biens, d’impôts et de paiements, ils ont grandement facilité la mise en place de systèmes administratifs, des royaumes, d’organisations religieuses et de réseaux commerciaux. Ou, pour être plus précis, ces documents ont transformé la méthode utilisée pour créer des réalités intersubjectives. Dans les cultures orales, les réalités intersubjectives étaient créées en racontant une histoire que de nombreuses personnes répétaient avec leur bouche et mémorisaient dans leur cerveau. Par conséquent, les capacités de ce dernier imposait une limite aux genres de réalités intersubjectives que les humains pouvaient créer. Les hommes ne pouvaient pas fabriquer des réalités intersubjectives que leur cerveau était incapable de retenir.

Les documents écrits, eux, permettaient de dépasser cette limite. Ils ne représentaient pas une réalité empirique objective : la réalité, c’étaient les documents eux-mêmes. Comme nous le verrons aux chapitres suivants, les documents écrits constituaient donc des précédents et des modèles qui seraient ensuite utilisés par les ordinateurs, La faculté des ordinateurs à créer des réalités intersubjectives est une extension du pouvoir des tablettes d’argile et des feuilles de papier.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 3 – Document : la morsure des tigres de papier, Édition Albin Michel, Paris, 2024, p. 83.

Mais pourquoi le sous titre « Prêt à tuer » ?

Le pouvoir qu’on les documents de créer des réalités intersubjectives s’incarne magnifiquement dans l’ancien dialecte assyrien, qui traitait les documents comme des choses vivantes qu’on pouvait également faire mourir. Dans cette langue, les contrats de prêt étaient en effet « tués » (duãkum) dès le remboursement de la dette en question. Ce que l’on faisait en détruisant la tablette, en y ajoutant une marque ou en brisant le sceau. Le contrat de prêt ne représentait par la réalité : il était la réalité. Si quelqu’un remboursait l’emprunt mais omettait de «tuer le document», la dette demeurait exigible. À l’inverse, si l’on ne remboursait pas l’emprunt mais que le document «mourrait» d’une autre manière — disons, croqué par un chien —, le dette disparaissait. Cela vaut aussi pour l’argent : si votre chien mange un billet de cent dollars, ces cent dollars cessent d’exister.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 3 – Document : la morsure des tigres de papier, Édition Albin Michel, Paris, 2024, pp. 84-85.

Puis vient le sous-titre « Bureaucratie » avec cette anecdote en ouverture :

Chaque nouvelle technologie de l’information comporte des goulets d’étranglement inattendus. Elle résout d’anciens problèmes, mais en crée de nouveaux. Au début des années 1730 av. J.C., Marâmtani, prêtresse de la ville mésopotamienne de Sippar. écrit une lettre (sur une tablette d’argile) à un membre de sa famille, pour demander à celui-ci de lui faire parvenir les tablettes entreposées dans sa maison. Elle lui expliquait qu’on lui contestait ses droits sur un héritage, et qu’elle avait besoin de faire valoir ces documents devant un tribunal. Elle achevait son message par cet appel : «Surtout, ne me néglige pas !»

Nous ignorons ce qui s’est passé ensuite, mais imaginez un instant que ce proche ait fouillé partout sans pouvoir retrouver les tablettes manquantes… La quantité de documents produits ne cessant de croître au fil du temps, il s’est avéré de plus en plus difficile de la localiser. Cela représentait un défi particulièrement ardu pour les rois, les prêtres, les marchands, et tous ceux qui amassaient dans leurs archives des milliers de documents. Comment remettre la main sur le bon registre fiscal, le bon reçu de paiement ou le bon contrat commercial lorsque vous en avez besoin ? Les document écrits étaient bien meilleurs que les cerveaux humains pour mémoriser certains types d’information. Mais ils créaient un nouveau problème, particulièrement épineux : celui de leur récupération.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 3 – Document : la morsure des tigres de papier, Édition Albin Michel, Paris, 2024, pp. 85-86.

Ainsi naîtra la bureaucratie ! Si l’évolution de l’homme a équipé ce dernier pour se débrouiller dans un monde organique : « (…) si vous cherchez une pomme, il faut d’abord localiser un pommier, puis lever la tête. En vivant dans la forêt, les hommes apprennent cet ordre organique.»), il en va tout autrement avec les documents inorganiques, tels que les documents écrits.

Il en va tout autrement avec les archives. Les documents n’étant pas des organismes, il n’obéissent à aucune loi biologique et l’évolution ne les a pas organisés pour nous. Les déclarations fiscale ne poussent par sur une étagère à déclaration fiscales. Il faut les y déposer. Pour ce faire, quelqu’un doit d’abord avoir l’idée de catégoriser les informations par étagères, et déterminer quels documents doivent être déposés sur quelles étagères. Contrairement au cueilleurs, qui n’ont qu’à découvrir l’ordre préexistant de la forêt, les archivistes sont obligés de concevoir un nouvel ordre pour le monde. Cet ordre est ce qu’on appelle la bureaucratie.

La bureaucratie est la manière dont les hommes, dans les organisations de grande ampleur, ont résolu le problème de la récupération et, ce faisant, ont créé des réseaux d’information plus vastes et plus puissants.

Mais comme la mythologie, la bureaucratie a tendance a sacrifier la vérité au nom de l'ordre.

Mais comme la mythologie, la bureaucratie a tendance a sacrifier la vérité au nom de l’ordre. En inventant un nouvel ordre et en l’imposant au monde, la bureaucratie a déformé de manière tout à fait unique notre compréhension du monde. Une bonne partie des problèmes rencontrés par nos réseaux d’information du XXIè siècle — pensez aux algorithme biaisés qui cataloguent mal les gens, ou aux protocoles trop rigides qui ne tiennent par compte des besoins et sentiments humains — ne sont pas nouveaux, ni propres à l’ère informatique. Ces problèmes typiquement bureaucratiques existaient déjà bien avant que quiconque ait pu les imaginer les ordinateurs.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 3 – Document : la morsure des tigres de papier, Édition Albin Michel, Paris, 2024, p. 87.

P.S.: l’encadré est de nous.

Je retiens de cette citation :

  1. « catégoriser les informations »
  2. « concevoir un nouvel ordre pour le monde »
  3. « sacrifier la vérité au nom de l’ordre »
  4. « a déformé de manière tout à fait unique notre compréhension du monde »

Puisque le simple fait de créer des catégories pour classer les informations n’est pas un processus naturel, c’est-à-dire, relatif à une réalité préexistante dans le monde, cette catégorisation débouche sur un nouvel ordre intersubjectif pour le monde, et ce dernier priorisant l’ordre au détriment de la vérité (de la conformité avec la réalité), elle résulte en une déformation de notre compréhension du monde.

Bureaucratie et recherche de la vérité

Le terme bureaucratie signifie littéralement le « pouvoir du bureau ». Il fut inventé dans la France du XVIIIe siècle, où les fonctionnaires étaient généralement assis devant une table dotée de tiroirs – le fameux bureau. Le tiroir se trouve donc au cœur de l’ordre bureaucratique. La bureaucratie s’attache à résoudre le problème de la récupération des données en divisant le monde en une série de tiroirs, et en déterminant quel document va venir dans quel tiroir.

Le principe demeure le même, que le document soit placé au fond d’un tiroir, sur une étagère, dans un panier, un pot, un fichier informatique ou tout autre réceptacle : diviser pour régner. Diviser le monde en une série de contenants, et les séparer pour que les documents ne se mélangent pas. Cependant, ce principe a un prix : au lieu de se concentrer sur la compréhension du monde tel qu’il est, la bureaucratie s’acharne souvent à imposer au monde un nouvel ordre, artificiel. Les bureaucrates comment par inventer toute une variété de tiroirs, lesquels sont des réalités intersubjectives que ne correspondent pas nécessairement à de quelconques divisions objectives existant dans le monde. Les bureaucrates tentent alors de faire entrer de force le monde dans ces tiroirs, et si ça coince aux entournures, ils forcent un peu. Quiconque a eu l’occasion de remplir un formulaire administratif ne le sait que trop bien. Il arrive qu’aucune des options proposées par le document ne corresponde à notre situation particulière. On est alors contraint de s’adapter au formulaire, plutôt que l’inverse. Réduire le désordre de la réalité en un nombre limités de tiroirs fixes aide les bureaucrates à instaurer l’ordre, mais ce la se fait au détriment de la vérité. Obnubilés par leurs tiroirs — même lorsque la réalité est beaucoup plus complexe —, les bureaucrates finissent souvent par développer une compréhension déformée du monde.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 3 – Document : la morsure des tigres de papier, Édition Albin Michel, Paris, 2024, pp. 87-88.

Et les documents ne font pas que remonter à la bureaucratie, cette dernière conçoit, édite et diffuse des documents, ces derniers devant lui revenir. Et il n’est pas aisé de contrôler une bureaucratie, même pour les politiciens.

En 1985, Année internationale de la Jeunesse, en pleine crise économique, le taux de chômage chez les jeunes est très élevé et le gouvernement du Québec a déjà mis en place des programmes d’aides pour les jeunes ayant des projets en tête pour s’en sortir, notamment pour créer leurs propres emplois. Mais le Premier ministre du Québec, Renée Lévesque, est informé au sujet du blocage de l’attribution de ces aides aux jeunes par les bureaucrates. Il décide alors de passer outre la bureaucratie et de recruter lui-même une trentaine de jeunes à intégrer à la bureaucratie et dont la seule et unique fonction sera d’aider les jeunes qui demandent l’aide de l’État pour leurs projets.

Le tout se fait à la hâte, un vendredi soir, alors que le gouvernement du Québec est en pause pour la fin de semaine, je reçois un appel d’un ami fonctionnaire au ministère des communications qui tâte mon intérêt ce travail. « Je suis intéressé. » Il me répond : « Alors du dois de rendre dès demain à 15h.00 au bureau du Premier ministre à Montréal. » C’est à plus de 200 kilomètres de chez-moi et un véhicule du gouvernement est à ma disposition.

Le lendemain, samedi, je me présente au bureau du Premier ministre et je suis dirigé vers une salle de conférence avec tous les autres jeunes provenant de tous les coins du Québec. Le Premier ministre fait son entrée et prend place avec nous à l’énorme table ronde de la salle de conférence. Il nous explique son programme baptisé « Déclic Jeunesse ».

Nous, les jeunes, allons être déployés dans tous les bureaux régionaux de Communication Québec (centre de renseignements de l’ensemble du gouvernement au service de la population). Notre tâche, recevoir les jeunes qui souhaitent recevoir une aide financière de l’État pour leurs projets, les aider à compléter leurs formulaires de demandes dans l’optique avouée qu’ils soient approuvées pour l’obtention de l’aide. Autrement, faire sortir au plus vite  les subventions pour les jeunes !

Si le Premier ministre du Québec procède ainsi, plutôt que de confier la tâche à son ministre des communications, ce dernier la confiant à ses fonctionnaire, ce qui est la procédure normale, c’est parce que les fonctionnaires sont au centre du problème : ils ne collaborent pas avec les jeunes et les jeunes les boycottent. L’argent de l’aide de l’État pour les jeunes dort au fond d’un tiroir. Le Premier ministre court-circuite la hiérarchie et passe outre le protocole pour engager lui-même une escouade de jeunes pour venir en aide aux jeunes en mal de financement de leurs projets. Évidemment, la publicité dira toute autre chose :

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La bureaucratie est un pouvoir en soi, un pouvoir avec ses propres règles de gouvernance et travaille à son propre rythme. Elle se trouve entre les politiciens et la population.

Après quelques jours de travail au Centre Déclic-Jeunesse, je réalise que les fonctionnaires classent très rapidement les formulaire de demande de subvention des jeunes et je découvre comment ils procèdent. Il faut — disons — que la somme d’argent inscrite à la case F de la première colonne égale la somme d’argent inscrite à la case K de la deuxième colonne et ainsi de suite. C’est la vérification qu’effectue les fonctionnaires pour accepter ou non d’examiner un projet, peu importe s’il s’agit d’une simple erreur, peu importe la pertinence du projet, ses chances de réussite.

Je réunis toutes ces procédures dans un immense cahier et je prends l’initiative de le photocopier pour mes collègues des autres bureaux. Et imaginez ce qui se passe quand je demande au patron du bureau de Communication Québec (là où se trouve le Centre Déclic-Jeunesse) le budget pour envoyer ces cahiers par la poste. Il refuse. Je fais donc parvenir mon cahier au Premier ministre lui avec une note explicative. Je ne connais pas la suite de l’histoire puisque j’ai quitté mes fonctions.

 * * *

Yuval Noah Harari intitule le quatrième chapitre de son ouvrage, « Erreurs : le fantasme de l’infaillibilité », et y traite des mécanismes d’autocorrection nécessaires à tout réseau d’information.

Pour pouvoir fonctionner, les mécanisme d’autocorrection ont besoin de légitimité. Si les humains sont enclins à commettre des erreurs, comment imaginer raisonnablement que les mécanisme d’autocorrection en soient exempts ? Pour échapper à cette boucle apparemment sans fin, les humains ont souvent nourri le fantasme d’un mécanisme suprahumain, absolument infaillible, sur lequel ils pourraient s’appuyer pour identifier et corriger leurs propres erreurs. Aujourd’hui, c’est l’IA qui porte cet espoir comme en atteste ce que déclarait Elon Musk en avril 2023 : « Je vais lancer quelque chose que j’appelle Truth GPT, une IA qui recherche la vérité maximale et essaie de comprendre la nature de l’univers. » Nous verrons dans les prochains chapitres pourquoi il s’agit là d’un dangereux fantasme. Lequel a pu, par le passé, se manifester sous une autre forme : la religion.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 4 – Erreurs : le fantasme de l’infaillibilité, Édition Albin Michel, Paris, 2024, pp. 109-110.

Nous voilà aux portes de la création du livre saint tels que la Bible et le Coran, dit infaillible.

Le livre s’est imposé, au cours du premier millénaire avant notre ère, comme une importante technologie religieuse. Après des dizaines de milliers d’années où les dieux s’étaient adressés aux humains via des chamans, des prêtres, des prophètes, des oracles, entre autres messagers humains, des mouvements religieux tels que le judaïsme se sont mis à défendre l’idée que les dieux s’exprimaient à travers cette technologie nouvelle qu’était le livre. Selon eux, il existe un livre bien précis, dont les nombreux chapitres contiennent toutes les paroles divines à propos de tout, de la création de l’univers aux préceptes alimentaires. Surtout, nul prêtre ou prophète, nulle institution humaine ne pourra oublier ou modifier ces paroles divine, car il sera toujours possible de confronter ce qu’avancent les humains faillibles à ce qui est gravé dans l’infaillible livre.

Mais les religions du Livre avaient elles aussi leurs problèmes, dont le plus évident était celui-ci : qui décide ce qu’il faut inclure dans le livre saint ? Le premier exemplaire n’est pas tombé du ciel : il a fallu que des humains le compilent. (…)

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 4 – Erreurs : le fantasme de l’infaillibilité, Édition Albin Michel, Paris, 2024, pp. 113-114.

P.S.: (…) = passage non cité dans cet article mais présent dans le texte original.

Nous connaissons la suite, on discuta âprement des contenus à sélectionner pour constituer le livre saint et du livre saint infaillible nous sommes passé à l’institution infaillible (l’Église) dans son interprétation du livre saint, puis à la multiplication du livre saint à la suite de l’invention de l’imprimerie :

Deuxième enjeu, plus crucial encore : le fait de disposer de nombreux exemplaires du même livre empêchait toute altération du texte. Puisqu’il en existait des milliers de copies identiques en de nombreux endroits, il sera facile de dénoncer comme une imposture toute tentative de changer ne serait-ce qu’une malheureuse lettre de ce code sacré. En rendant disponible une multitude d’exemplaires de la Bible dans des lieux fort éloignés les uns des autres, les juifs remplaçaient donc le despotisme humain par une souveraineté divine. L’ordre social était désormais garanti par l’infaillible technologie du livre. C’est du moins ce qu’ils croyaient.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 4 – Erreurs : le fantasme de l’infaillibilité, Édition Albin Michel, Paris, 2024, p. 118.

Les livres saints ont ainsi constitué chacun leur réseau d’information, dont certain incluant plus d’un milliard de personnes, et ce, de partout à travers le monde, et chacun sous l’égide d’une Église… infaillible ! Il n’en fallait pas plus pour que des guerres entre les religions éclatent.

Le cinquième chapitre, sous le titre « Décisions : une brève histoire de la démocratie et du totalitarisme ».

Les réseaux d’information dictatoriaux sont centralisés à l’extrême. Ce qui signifie deux choses. Premièrement, le pouvoir central jouissant d’une autorité illimitée, l’information a tendance à affluer vers le centre névralgique, où sont prise les décisions les plus importantes. Dans l’Empire romains, tous les chemins menaient à Rome ; dans l’Allemagne nazie, les informations convergeaient vers Berlin ; et en Union soviétique, vers Moscou. Parfois, le gouvernement central tente de concentrer entre ses mains toute l’information, et d’imposer lui-même toutes les décisions, contrôlant ainsi complètement la vie des gens. Cette forme de dictature totalisante, pratiquée par des dirigeants comme Hitler ou Staline, est connu sous le nom de totalitarisme. Mais toutes les dictatures ne sont pas totalitaires. Nous le verrons, des difficultés techniques empêchent souvent les dictateurs de devenir totalitaires. L’empereur romain Néron, par exemple, ne disposait pas des moyens permettant de microgérer les vies des millions de paysans dans les lointains villages aux confins de l’empire. Une bonne partie des régimes dictatoriaux laissent donc une part d’autonomie considérable aux individus, aux entreprises et aux communautés. Cependant, les dictateurs se réservent toujours le pouvoir d’intervenir dans la vie des gens. Dans la Rome de Néron, la liberté n’était pas un idéal mais un corolaire de l’incapacité du gouvernement à exercer un contrôle totalitaire.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 5 – Décisions : une brève histoire de la démocratie et du totalitarisme, Édition Albin Michel, Paris, 2024, pp. 161-162.

Dans les années 1970-1980, nous sommes passés de « Le pouvoir est à celui qui détient l’information » à « Le pouvoir est à celui qui diffuse l’information ».

L'information est le pouvoir. Mais comme tout pouvoir, il y a ceux qui veulent le garder pour eux.

Aaron Swartz, Informaticien (1986 - 2013)

C’est pourquoi j’endosse personnellement et professionnellement la culture de gratuité sur internet. J’ai édité de nombreux livres dont les auteurs acceptaient d’en offrir gratuitement la version numérique. À notre libraire en ligne fut donc ajoutée une bibliothèque de livres numériques gratuits qui connaît encore beaucoup de succès depuis sa création il y a plus de vingt ans déjà.

J’ai appliqué la même politique de diffusion de l’information que je détenais lorsque je me suis lancé en recherche marketing (étude des motivations d’achat des consommateurs). J’adressais à mes clients potentiels un document de 24 pages bien tassé, aux allures d’un article de presse écrite, avec toute l’information nécessaire pour bien comprendre en détails mon offre de services. J’optais pour un document d’information plutôt qu’un document de publicité ou de propagande. Que le client potentiel donne suite ou non à sa lecture de mon document, il avait tout de même appris quelque chose d’important. Les conseillers en publicité et en marketing conseillaient à cet époque (années 1990) de se limiter à une brochure sous prétexte que les gens d’affaires et les dirigeants d’entreprise n’ont pas le temps de lire. Toujours selon ces conseillers, je devais m’attendre à une réponse de seulement 20% des clients potentiels à qui j’avais adressé mon document. Or, ce fut le contraire. Plus de 80% des clients potentiels ayant reçu mon document voulaient aller plus loin avec moi et ma partenaire en retenant nos services. Et puisque nous n’étions que deux dans notre entreprise, nous avons du réduire passablement les envois de ce document pour éviter d’être débordés par la demande. Le pouvoir est donc vraiment à celui qui détient l’information ET LA DIFFUSE !

La centralisation de l’information dans les régimes totalitaires sans aucune instance d’autocorrection indépendante du pouvoir entraîne souvent des erreurs décisionnelles fatales telles que les famines soviétiques de 1931-1933 et la Grande famine chinoise de 1959 à 1961.

Heureusement, il y aussi les démocraties.

En résumé, une dictature est un réseau d’information centralisé, dénué de mécanisme d’autocorrection puissants. Une démocratie, en revanche, est un réseau d’information décentralisé, qui possède de solides mécanismes d’autocorrection. Lorsqu’on observe un réseau d’information démocratique, on y trouve certes un centre névralgique. Le gouvernement est le pouvoir exécutif le plus puissant d’une démocratie, et les organismes publics collectent et stockent donc d’immenses quantités d’informations. Mais il existe de nombreux canaux d’information supplémentaires, qui connectent une multiplicité de nœuds indépendants. Organes législatifs, partis politiques, tribunaux, presses, entreprises, communautés locales, ONG et citoyens individuels communiquent entre eux librement et directement, de sorte que la majeure partie des informations ne transitent jamais par aucun organisme gouvernemental, et que nombre de décisions importantes se prennent ailleurs. Les individus décident eux-mêmes de leur lieu de vie, de l’endroit où ils travaillent et de la personne qu’ils épousent. Les entreprises font leurs propres choix concernant le lieu d’implantation d’une succursale, les sommes à investir dans tel ou tel projet, les montants a facturer pour les biens et les services qu’elles proposent. Les communautés décident par elles-mêmes d’organiser des œuvres de bienfaisance, des événements sportifs et des fêtes religieuses. L’autonomie n’est pas une simple conséquence de l’inefficacité du gouvernement : elle constitue l’idéal démocratique.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 5 – Décisions : une brève histoire de la démocratie et du totalitarisme, Édition Albin Michel, Paris, 2024, pp. 162-163.

« L’autonomie », oui mais conditionnée, formatées et souvent inconsciente de l’être. Aucun régime n’est parfait, loin de là, mais il y en a de meilleurs.

La dictature de la majorité

La définition de la démocratie comme un réseau d’information décentralisé doté de solides mécanisme d’autocorrection contraste fortement avec l’idée fausse, quoique très répandue, qui assimile la démocratie aux seules élections. Celles-ci sont un élément essentiel de la boîte à outils démocratique, mais elles ne sont pas la démocratie. En l’absence de mécanismes d’autocorrection supplémentaires, les élections peuvent facilement être truquées. Et même lorsqu’elles sont totalement libres et équitables, cela ne suffit pas non plus à garantir la démocratie. Car la démocratie n’est pas une dictature de la majorité.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 5 – Décisions : une brève histoire de la démocratie et du totalitarisme, Édition Albin Michel, Paris, 2024, p. 165.

Les droits de l’Homme et les droits civiques protègent tout un chacun, minoritaire et majoritaire, et limitent le pouvoir du gouvernement. La liberté et l’égalité pour tous sont essentielles à toute démocratie.

Il est important de noter que droits de l’homme et droits civiques n’ont pas pour seul effet de de limiter le pouvoir du gouvernement central : ils lui imposent en outre de nombreuses obligations positives. Il ne suffit pas qu’un gouvernement démocratique s’abstienne d’enfreindre les droits de l’homme et du citoyen — il doit prendre des mesures pour les sauvegarder. Ainsi, le droit à la vie impose au gouvernement démocratique de protéger ses citoyens contre les violences criminelles. Si un gouvernement ne tue personne, mais ne fait par ailleurs aucun effort pour protéger ses citoyens du meurtre, nous n’avons plus affaire à une démocratie mais à l’anarchie.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 5 – Décisions : une brève histoire de la démocratie et du totalitarisme, Édition Albin Michel, Paris, 2024, p. 168.

Une seule question me vient à l’esprit : est-ce que le gouvernement des États-Unis d’Amérique en fait suffisamment pour « protéger ses citoyens contre les violences criminelles » en refusant de réglementer davantage l’accès, le port et l’usage des armes à feu ?


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Les Décodeurs – Histoire des États-Unis

Pourquoi le droit de s’armer reste ancré dans la culture et la politique américaines

Par Adel Miliani, publié le 15 février 2024 à 14h32, modifié le 19 février 2024.

Adopté il y a plus de deux cent trente ans, le deuxième amendement de la Déclaration des droits américaine demeure fondamental pour la population, en dépit des fusillades à répétition.

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Cinq faits qui expliquent pourquoi la violence armée a été déclarée crise de santé publique aux États-Unis

La rédaction, Role, BBC News Mundo, 17 août 2024

La plupart des Américains ou des membres de leur famille ont été confrontés à des incidents de violence armée.

C’est l’un des faits contenus dans un rapport sans précédent présenté par le Surgeon General des États-Unis, Vivek Murthy, sur la base duquel il a déclaré que la violence par arme à feu constituait une crise de santé publique aux États-Unis.

Dans le texte, Murthy explique que l’objectif de cette déclaration est de réduire le nombre de victimes dans le pays qui occupe la première place mondiale dans les statistiques sur les décès par arme à feu.

Selon le rapport, depuis 2022, un total de 48 204 personnes sont mortes de blessures liées aux armes à feu, y compris les suicides, les homicides et les décès accidentels. Cela représente 8 000 décès de plus qu’en 2019 et près de 16 000 de plus qu’en 2010.

 * * *

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Télécharger ce rapport « Firearm Violence in America ».


Lorsque le candidat à la présidentielle américaine annonce qu’il veut réglementer davantage l’achat, le port et l’usage des armes à feu, il perd des votes. Si le candidat adverse à l’élection présidentielle américaine annonce qu’il protègera le deuxième amendement de la constitution du pays ( Traduction : « Une milice bien organisée étant nécessaire à la sécurité d’un État libre, le droit qu’a le peuple de détenir et de porter des armes ne sera pas transgressé. » Original : « A well regulated militia being necessary to the security of a free State, the right of the People to keep and bear arms shall not be infringed. », il gagne des votes. À mon avis, c’est de l’anarchie.

Il est particulièrement important de se rappeler que les élections ne sont pas une méthode pour découvrir la vérité, mais bien plutôt une méthode pour maintenir l’ordre en opérant un arbitrage entre les désirs contradictoires des uns et des autres. Les élections établissent non pas ce qu’est la vérité, mais ce que désire la majorité des gens. Or, les gens désirent souvent que la vérité soit autre chose que ce qu’elle est. Les réseaux démocratiques se dotent donc de mécanismes d’autocorrection pour protéger la vérité, y compris contre la volonté de la majorité.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Première partie – Réseaux humains, chapitre 5 – Décisions : une brève histoire de la démocratie et du totalitarisme,  Édition Albin Michel, Paris, 2024, p. 169.

Des « mécanismes d’autocorrection pour protéger la vérité, y compris contre la volonté de la majorité », dites-vous ? Ce n’est pas le cas aux États-Unis d’Amérique dans le dossier des armes à feu. Et que dire lorsque le président de ce pays ridiculise les mécanismes d’autocorrection que sont les médias ?

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Article # 22 – La faiblesse du vrai, Myriam Revault d’Allones, Seuil

L’irruption de la notion de « post-vérité », désignée comme mot de l’année 2016 par le dictionnaire d’Oxford, a suscité beaucoup de commentaires journalistiques, notamment sur le phénomène des fake news, mais peu de réflexions de fond. Or, cette notion ne concerne pas seulement les liens entre politique et vérité, elle brouille la distinction essentielle du vrai et du faux, portant atteinte à notre capacité à vivre ensemble dans un monde commun.

En questionnant les rapports conflictuels entre politique et vérité, Myriam Revault d’Allonnes déconstruit nombre d’approximations et de confusions. Elle montre que le problème majeur de la politique n’est pas celui de sa conformité à la vérité mais qu’il est lié à la constitution de l’opinion publique et à l’exercice du jugement. L’exploration du « régime de vérité » de la politique éclaire ce qui distingue fondamentalement les systèmes démocratiques, exposés en permanence à la dissolution des repères de la certitude, à la tentation du relativisme et à la transformation des « vérités de fait » en opinions, des systèmes totalitaires, où la toute-puissance de l’idéologie fabrique un monde entièrement fictif.

Loin d’enrichir le monde, la « post-vérité » appauvrit l’imaginaire social et met en cause les jugements et les expériences sensibles que nous pouvons partager. Il est urgent de prendre conscience de la nature et de la portée du phénomène si nous voulons en conjurer les effets éthiques et politiques.

Myriam Revault d’Allonnes est professeur à l’École pratique des hautes études. Elle a publié de nombreux essais au Seuil, et notamment La Crise sans fin. Essai sur l’expérience moderne du temps (2012).

Source : Éditions du Seuil.


(...) les démocratie ne meurent pas uniquement quand les gens ne sont pas libres de parler, mais aussi quand les gens ne veulent pas ou ne peuvent pas écouter.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS - Une brève histoire des réseaux d'information de l'âge de pierre à l'IA, Première partie - Réseaux humains, chapitre 5 - Décisions : une brève histoire de la démocratie et du totalitarisme,  Édition Albin Michel, Paris, 2024, p. 180.

Écouter pour parler, pour déformer ce qu’on a écouter. Souvent, le problème n’est pas que les gens ne veulent pas écouter et réfléchir à ce qu’ils ont écouté, non, le problème c’est que les gens ont une écoute très active, c’est-à-dire qu’ils déforment instantanément ce qu’ils entendent en opinion. Le relais de la réflexion ne fonctionne pas. L’écoute active, jadis une force dans la communication, n’est plus qu’une chaîne de réactions subjectives même face à une information objective ou, si vous préférez face à la réalité.


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Pourquoi est-ce important de savoir bien communiquer?

Pour bien communiquer, il ne suffit pas de parler. Cela nécessite aussi une écoute active, de l’authenticité et de l’empathie. Dans le cadre de la communication, l’écoute active est une façon structurée d’écouter son interlocuteur et de lui répondre. Lorsque vous écoutez de façon active, votre attention se porte sur l’autre personne pour vous permettre de comprendre, d’interpréter et d’évaluer ce qu’elle vous dit.

L’essentiel est de communiquer sans porter de jugement. En milieu de travail, vous pouvez collaborer avec les gens pour établir des objectifs de rendement individuels réalistes, établir un calendrier de rétroaction et mesurer les progrès vers l’atteinte de ces objectifs. Ces techniques faciliteront l’établissement d’une relation de travail plus efficace et plus positive.

Source : Santé mentale, Centre canadien hygiène et de sécurité au travail, Gouvernement du Canada.


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Article # 38 – Verbalisation à outrance : «Je ne suis pas la poubelle de tes pensées instantanées.»

Tweets, sms, emails, posts, etc. se multiplient et rebondissent, circulant à une telle vitesse qu’ils deviennent irrattrapables — les agressifs et les toxiques aussi vite relayés que les sympathiques. La facilité et la rapidité avec lesquelles nous pouvons nous exprimer tout autant que l’idée que nous existons que si nous communiquons nous ont fait oublier les vertus du silence. Happés par ce tourbillon compulsif et communicationnel, nous devons réapprendre à nous taire pour redevenir conscients de ce que nous ressentons avant de le dire, pour redonner du poids et de la bienveillance à notre communication , pour ne pas regretter d’avoir parlé . Savoir se taire est la force cachée de la personne qui agit en pleine conscience et sait s’exprimer à bon escient et avec les mots justes .

Source : www.hachette.fr.

 * * *

Le Dr Jean-Christophe Seznec, psychiatre français, a été interrogé par la journaliste Pascale Senk du quotidien Le Figaro au sujet de son livre Savoir se taire, savoir parler, coécrit avec Laurent Carouana et paru en 2017. Le titre de l’article a retenu mon attention : Psychologie: «il faut sortir de l’hystérie de la parole».

L’expression « hystérie de la parole » me plaît car elle reflète fort bien les gens qui parlent beaucoup trop et sans arrêt, qui verbalisent à outrance, souvent en sautant du coq à l’âne ou en se perdant dans moult détails. J’ai déjà interrompu une telle personne en lui disant : « Je ne suis pas la poubelle de tes pensées instantanées ».


La deuxième partie de NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA s’intitule « Le réseau inorganique », c’est-à-dire le réseau d’information dont les membres sont inorganiques, soient les ordinateurs, contrairement aux êtres organiques que nous sommes et qui assuraient jusque-là les échanges.

Nous analyserons les relations précises entre les termes « ordinateurs », « algorithme » et « IA » dans la dernière partie du présent chapitre une que nous aurons acquis une meilleure compréhension de l’histoire des ordinateurs. Pour le moment, nous nous contenterons de préciser qu’en substance, un ordinateur est une machine potentiellement capable d’accomplir deux choses remarquables : prendre d’elle-même des décisions, et créer d’elle-même de nouvelles idées. (…)

L’avènement de machines intelligentes capables de prendre des décisions et de créer de nouvelles idées signifie que, pour la première fois dans l’histoire, le pouvoir s’éloigne de l’homme et glisse vers une autre entité. (…)

(…) En termes d’intelligence, ils (ordinateurs) dépassent de loin non seulement les bombes atomiques, mais toutes les technologies de l’information antérieures, comme les tablettes d’argile, les presses à imprimer et les postes de radio. (…) Là où presses à imprimer et postes de radio n’étaient que des outils passifs dans la main de l’homme, les ordinateur sont en passe de devenir des agents actifs échappant à notre contrôle et à notre compréhension, et sont à même de prendre des initiatives pour façonner la société, la culture et l’histoire.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Deuxième partie – Le réseau inorganique, chapitre 6 – Les nouveaux membres: en quoi les ordinateurs sont différents des presses à imprimer, Édition Albin Michel, Paris, 2024, pp. 241-243.

Bref, les technologies étaient alors des outils maniés par les agents organiques (humains) alors que les ordinateurs sont des agents inorganiques capables de prendre des décisions et de créer de nouvelles idées par eux-mêmes. Cette nouvelle entité inorganique suscite la peur au fur et à mesure qu’elle monte en puissance décisionnelle et créatrice par auto-apprentissage (IA). La science fiction a souvent mise en scène cette peur notamment dans le célèbre film 2001 : l’odyssée de l’espace en avril 1968.

La peur d’ordinateurs puissants n’a commencé à hanter l’humanité qu’au début de l’ère informatique, au mitant du XXe siècle. Mais depuis toujours, les humains sont hantés par une peur beaucoup plus profonde : nous avons toujours eu conscience du pouvoir qu’avaient les histoires et les images de manipuler nos esprits et de créer des illusions. Par conséquent, depuis la nuit des temps, les humains ont toujours craint d’être enfermés dans un monde d’illusions. Dans la Grèce antique, déjà, Platon livrait sa fameuse allégorie de la caverne, dans laquelle un groupe d’individus passent toute leur vie enchaînés au fond d’une grotte, face à une paroi nu — un écran. Sur cet écran, ils voient défiler différentes ombres projetées. Les prisonniers prennent à tort ces illusions qui s’offrent à leur regard pour la réalité. Dans l’Inde antique, les sages bouddhistes et hindous affirmaient que tous les humains vivaient emprisonnées à l’intérieur de la Mãyã — le monde des illusions. Ce que nous prenons généralement pour la « réalité » n’est souvent qu’une simple fiction dans nos esprits. Les hommes sont parfois prêts à mener des guerres atroces, à tuer et à accepter le risque d’être eux-mêmes tués, à cause de leur croyance en telle ou telle illusion. Au début de XVIIe siècle, Renée Descartes craignait d’être maintenu enfermé dans un monde d’illusions par un « mauvais génie » qui créerait tout ce qu’il voyait et entendait. La révolution numérique nous confronte aujourd’hui à la caverne de Platon, à la Mãyã, au mauvais génie de Descartes.

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Deuxième partie – Le réseau inorganique, chapitre 6 – Les nouveaux membres: en quoi les ordinateurs sont différents des presses à imprimer, Édition Albin Michel, Paris, 2024, p. 263.

Yuval Noah Harari ne parle quasiment pas de la philosophie dans son livre NEXUS. La citation ci-dessus est l’un des seuls exemples, un peu élaboré. On n’a une idée du pourquoi au sous-titre « Le nazi kantien » au chapitre 8 intitulé « Faillible : les réseau a souvent tort ». Le texte de ce sous-titre est beaucoup trop simpliste pour associer « nazi » et « kantien ». Voici un très court passage de ce sous-titre qui, même hors contexte, place l’historien Yuval Noah Harari en porte-à-faux avec la philosophie.

La nazi kantien

Depuis des millénaires, les philosophes n’ont cessé de chercher une définition du but ultime qui ne repose pas sur l’alignement avec un but plus élevé encore. Tous ont été attirés par deux solutions potentielles, connues dans le jargon philosophique sous les noms de déontologisme et d’utilitarisme. Les déontologistes (du grec deon, qui signifie « devoir ») pensent qu’il existe des devoirs moraux universels qui s’appliquent à tout le monde. Ces règles morales ne reposent pas sur l’alignement avec un but plus élevé : elles sont intrinsèquement bonnes. Si de telles règles existent réellement, et que nous parvenons à trouver un moyen de les programmer dans des ordinateurs, alors nous pourrons faire en sorte que le réseau informatique soit une force au service du bien.

Mais que signifie « intrinsèquement bonnes, au juste ? On doit la plus célèbre tentative de définir une règle intrinsèquement bonne au philosophe Emmanuel Kant, un contemporain de Clausewitz et Napoléon. D’après Kant, toute règle que je souhaiterait rendre universelle est intrinsèquement bonne. En vertu de ce conception, une personne sur le point d’en assassiner une autre devrait s’arrêter et se soumettre au processus suivant : « Je vais assassiner un être humain. Aimerais-je établir une règle universelle stipulant qu’il n’y a pas de mal à tuer des êtres humains ? Si une telle règle universelle est mise en place, alors n’importe qui pourrait m’assassiner. Donc, il ne devrai pas exister de règle universelle autorisant le meurtre. D’où il s’ensuit que moi non plus, je ne devais pas tuer. » Pour le dire simplement, Kant reformule la règle d’or immémoriale : « Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le de même pour eux » (Mathieu 7:12).

Cela semble une idée simpliste évidente : chacun de nous devrait se comporter de la manière dont il voudrait que tous les autres se comportent. Mais les idées qui semblent bonne dans le royaume éthéré de la philosophie ont souvent du mal à se transposer sur les terres rugueuses de l’histoire. La question clé que tout historien poserait à Kant est la suivante : quand vous parlez de règles universelles, quelle définition donnez-vous à cet adjectif ? C’est ce qu’on fait, par exemple, Wirathu et les autres extrémistes anti-Rohingyas. En que que moine bouddhiste, Wirathu était certainement opposé à l’idée universelle d’assassiner des humains. Mais il n’estimait pas que cette règle universelle s’appliquait lorsqu’on tuait des Rohingyas, considérés comme des sous-hommes. (…)

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Deuxième partie – Le réseau inorganique, chapitre 8 – Faillible : le réseau a souvent tort, Édition Albin Michel, Paris, 2024, pp. 334-335.

À mes yeux, Yuval Noah Harari perd toute crédibilité face au rôle de la philosophie dans l’histoire en nommant la discipline comme un « royaume », et ce royaume comme étant « éthéré » et qu’il soutient que les idées philosophiques « ont souvent du mal à se transposer sur les terres rugueuses de l’histoire ». La philosophie ne se compare pas et de loin avec un royaume où un roi gouvernent ses sujets. Aucun philosophe ne s’est imposé ou s’impose de nos jours comme un roi ou chef d’un royaume. Et la philosophie est loin de s’élever au-dessus des choses terrestres puisqu’elle elle-même reconnue comme un mode de vie.

Aussi, une question a retenu mon attention tout au long de ma lecture de NEXUS : quel rôle les réseaux d’information ont joué dans la propagation de la philosophie et, par conséquent, son influence sur l’histoire humaine ? NEXUS ne répond pas à cette question même si la philosophie constitue en soi un « nexus », un réseau d’information dont l’influence pèse lourd sur l’histoire de l’humanité depuis plus de deux milles ans. Et rares sont les réseaux d’information ayant ainsi entrer dans le langage populaire.


Livre numérique gratuit (PDF)

tous-philosophes-charles-robinCharles Robin

Tous philosophes ?

L’inconscient philosophique

Saviez-vous qu’un enfant qui dit « Je n’ai pas fait exprès » manifestait en fait son adhésion à la morale déontologiste de Kant ?

Saviez-vous que le fait de dire « Je fais ce que je veux » traduisait un net penchant pour l’existentialisme de Sartre et son rejet du déterminisme ?

Saviez-vous enfin que quelqu’un qui vous disait « Je t’aime » était en réalité victime d’un stratagème de la nature ? Aimer, pour Schopenhauer, c’est d’abord vouloir… reproduire l’espèce !

Avant-propos

Honnie par les foules et combattue par les hommes de pouvoir, la philosophie est parfois obligée de trouver refuge dans les interstices du langage quotidien pour continuer à survivre. C’est de manière invisible (et imprévisible) qu’elle s’immisce dans nos paroles les plus triviales, au point, bien souvent, de nous laisser perplexes quant à la profondeur que certains esprits fantaisistes voudraient leur prêter.

Que notre lecteur soit prévenu : nous faisons partie de ces esprits-là !

Le langage est le véhicule de la philosophie, comme il est le véhicule de toute pensée qui cherche à s’exprimer. Sans langage, la pensée est pour ainsi dire réduite à l’isolement. Elle a besoin d’un canal de diffusion pour pouvoir se faire connaître et communiquer avec d’autres pensées. Le langage est ce canal.

C’est par les phrases que nous prononçons chaque jour que nous informons nos interlocuteurs sur notre personnalité philosophique : nos convictions, nos croyances, nos doutes, nos préjugés…

Lorsque nous formulons une opinion, aussi anodine puisse-t- elle nous sembler, c’est toute une conception philosophique que nous engageons avec elle. Y compris inconsciemment. Surtout inconsciemment.

La question du langage occupe une place centrale dans la psychanalyse, qui en fait l’un des supports de révélation privilégiés de

l’inconscient. S’il est vrai que nos mots peuvent parfois dépasser notre pensée, ils peuvent également la trahir en la faisant remonter à la surface de nos lèvres, contre son gré en quelque sorte. On citera ici un exemple bien connu, celui du lapsus (dit précisément révélateur pour cette raison) que les psychanalystes interprètent comme un symptôme de la pression exercée sur nos pensées par nos désirs refoulés dans l’inconscient.

C’est à dévoiler l’inconscient philosophique de nos petites phrases de tous les jours que ce livre souhaiterait contribuer.

Des petites phrases qui, à force d’être entendues et répétées autour de nous, finissent par ne plus susciter aucun questionnement de notre part. Des petites phrases que l’habitude a condamnées à

l’indifférence, alors qu’elles sont le miroir dans lequel se reflètent nos pensées les plus enracinées.

Lorsque nous prononçons une phrase aussi banale que « Je fais ce que je veux », sommes-nous vraiment sûrs d’en mesurer toutes les implications ? Avons-nous jamais réfléchi à ce que signifiait le fait de dire « Chacun sa vérité » quand notre intention était seulement de plaider pour le respect de la pluralité des opinions ? Comment expliquer l’appréhension qui accompagne si souvent les mots « Je t’aime » qui ne devraient théoriquement faire naître que bonheur et légèreté ? Tel est le type de réflexion auquel nous invitons notre lecteur.

Une réflexion sur ce que nos paroles révèlent sur notre époque et sur nous-mêmes, à l’heure où le sens des mots tend de plus en plus à se diluer dans la profusion des messages et le règne médiatique du slogan.

© 2024 – Le Précepteur

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Pour conclure ce rapport de lecture, je retiens la proposition de Yuval Noah Harari à savoir le création d’un droit à l’explication lorsque la décision prise implique un algorithme opaque. L’auteur se réfère à L’affaire Loomis mettant en cause la peine prononcée contre l’accusée Eric Loomis par la Cour de justice de l’État du Wisconsin aux États-Unis.


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L’affaire Loomis

Les fantômes de Descartes et de Grotius à l’assaut de la justice ? 1

Khaled DIKA – 20 avril 2020

Résumé : Nous présentons dans cet article l’affaire E. Loomis (State v. Loo- mis, 881 N.W.2d 749 (Wis. 2016)). Cette affaire a eu un grand retentissement à cause de l’utilisation dans l’instance d’un algorithme qui estime une probabilité de récidive et surtout à cause des conséquences dramatiques de cette utilisation. Nous parlons de l’algorithme secret de COMPAS et de son rôle au cœur de cette affaire. Nous présentons des analyses de plusieurs juristes qui ont conclu à une violation de droits fondamentaux dans l’affaire Loomis et nous apportons nos propres contributions à ce débat. Nous déconstruisons ensuite quelques dis- cours axés sur le caractère disruptif de l’usage des « nouvelles technologies » en montrant l’ancrage de ces discours dans des courants philosophiques du XVIIe siècle. Nous analysons l’éventualité d’un usage des algorithmes d’évaluation du risque de récidive dans une décision qui porte sur la libération conditionnelle, pour montrer le caractère non constitutionnel d’un tel usage hypothétique. Dans la conclusion nous plaidons l’importance des analyses relevant de la philosophie du droit pour mieux comprendre les enjeux de cette affaire et afin de ne pas restreindre les débats à des considérations techniques de « validité statistique » ou de performance d’un modèle.

Source et télécharger cet article : Khaled Dika. L’affaire Loomis. 2020. https://hal.science/hal-02566382v1

Voir aussi : Commentaire de la décision State v. Loomis de la Cour Suprême du Wisconsin : le droit à un procès équitable à l’épreuve de l’opacité algorithmique dans les systèmes de Justice américain et européen – Soumis le 26/02/2020 par Baptiste Malapert dans MBDE / Numérique, Les blogs pédagogiques, Université Paris Nanterre.

Voir aussi : Compas : un homme condamné à six ans de prison par un algorithme, lebigdate.fr.

Vois aussi : Delphine Jung, La justice prédictive : application inquiétante de l’IA ?, Droit-Inc – Le journal des avocats et juristes du Québec, 2018-05-28.

Voir aussi : Clarisse Valmalette. L’algorithme de dangerosité pénale aux États-Unis : vers une érosion des droits fondamentaux du procès. Annuaire internationale de justice constitutionnelle, 2020, XXXV. https://hal.science/hal-03169476v1.


c.nexus.1a(…) Au début des années 2020, les citoyens de nombreux pays se voient régulièrement infliger des peines d’emprisonnement fondées en partie sur une évaluation des risques par des algorithmes auxquels ni les juges ni les accusés ne comprennent rien. Et encore, ces peines de prison ne sont que la partie émergée de l’iceberg.

Le droit à une explication

Outre les peines d’emprisonnement, les algorithmes jouent un rôle sans cesse plus important dans de nombreuses décisions nous concernant, certaines insignifiantes, d’autres à même de changer le cours d’une vie : nous admettre à l’université, nous offrir un travail, nous accorder de l’aide sociale ou un prêt. Ils contribuent également à déterminer quels traitements médicaux nous recevons, le montant de nos primes d’assurance, les actualités qui nous parviennent et qui pourrait vouloir sortir avec nous.

En confiant une proportions dans cesse croissante des décisions aux ordinateurs, les sociétés mettent en péril la viabilité même des mécanismes d’autocorrection démocratique, mais aussi de la transparence et de l’obligation de rendre des comptes propres à la démocratie. Comment des fonctionnaires élus pourraient-ils réglementer des algorithmes impénétrables ? La consécration d’un nouveau droit de l’homme est par conséquent de plus en plus réclamée : le droit à une explication. (…)

NOAH HARARI, Yuval, NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA, Troisième partie – Politique informatique, chapitre 9 – Démocraties : une conversation impossible ?, Édition Albin Michel, Paris, 2024, pp. 392-393.

Propriétés d’entreprises privées, les algorithmes sont des secrets commerciaux dont elles me veulent pas révéler la méthodologie, même lorsqu’il s’agit de décisions prisent par des administrations publiques sur la base de ces algorithmes. Je pense que le droit à une explication doit être précédé d’un droit à la divulgation et à l’identification de l’algorithme impliqué dans la décision qui nous concerne.


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J’accorde 5 étoiles sur 5 à NEXUS – Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA par l’historien et philosophe Yuval Noah Harari paru aux Éditions Albin Michel en 2024. L’auteur nous livre une vision historique singulière fort intéressante des réseaux d’information dont le lecteur comprendra aisément leurs apports d’hier à aujourd’hui. Un livre essentiel pour statuer le rôle de l’information en réseaux au fil de l’histoire.


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Articles du dossier

Article # 1 : Introduction

Témoignage de ma recherche personnelle au sujet de la philothérapie (philosophie + thérapie) ou, si vous préférez, de la pratique de la philosophie en clinique. Il s’agit de consultation individuel ou de groupe offert par un philosophe praticien pour nous venir en aide. Elle se distingue de la « psychothérapie » (psychologie + thérapie) en ce qu’elle utilise des ressources et des procédés et poursuit de objectifs propres à la philosophie. On peut aussi parler de « philosophie appliquée ».

Article # 2 : Mise en garde contre le copinage entre la philosophie et la psychologie

La philothérapie gagne lentement mais sûrement en popularité grâce à des publications de plus en plus accessibles au grand public (voir l’Introduction de ce dossier).

L’un des titres tout en haut de la liste s’intitule « Platon, pas Prozac! » signé par Lou Marinoff paru en français en l’an 2000 aux Éditions Logiques. Ce livre m’a ouvert à la philothérapie.

L’auteur est professeur de philosophie au City College de New York, fondateur de l’Association américaine des praticiens de la philosophie (American Philosophical Practitioners Association) et auteurs de plusieurs livres.

Article # 3 : Philothérapie – Libérez-vous par la philosophie, Nathanaël Masselot, Les Éditions de l’Opportun

Présentation du livre Philothérapie – Libérez-vous par la philosophie suivie de mes commentaires de lecture.

Article # 4 : Sur le divan d’un philosophe – La consultation philosophie : une nouvelle démarche pour se connaître, changer de perspective, repenser sa vie. Jean-Eudes Arnoux, Éditions Favre

Présentation du livre Sur le divan d’un philosophe – La consultation philosophie : une nouvelle démarche pour se connaître, changer de perspective, repenser sa vie suivie de mes commentaires de lecture.

Article # 5 : Philosopher pour se retrouver – La pratique de la philo pour devenir libre et oser être vrai, Laurence Bouchet, Éditions Marabout

Cet article présente et relate ma lecture du livre « Philosopher pour se retrouver – La pratique de la philo pour devenir libre et oser être vrai », de Laurence Bouchet aux Éditions Marabout. Malheureusement ce livre n’est plus disponible à la vente tel que mentionné sur le site web de l’éditeur. Heureusement on peut encore le trouver et l’acheter dans différentes librairies en ligne.

Article # 6 : Une danse dangereuse avec le philothérapeute Patrick Sorrel

Cet article se penche sur l’offre du philothérapeute Patrick Sorrel.

Article # 7 : La consultation philosophique – L’art d’éclairer l’existence, Eugénie Vegleris

Le livre « La consultation philosophique – L’art d’éclairer l’existence » de Madame Eugénie Vegleris aux Éditions Eyrolles se classe en tête de ma liste des meilleurs essais que j’ai lu à ce jour au sujet de la « philothérapie ».

Article # 8 : Guérir la vie par la philosophie, Laurence Devillairs, Presses universitaires de France

À ce jour, tous les livres dont j’ai fait rapport de ma lecture dans ce dossier sont l’œuvre de philosophes consultants témoignant de leurs pratiques fondées sur le dialogue. Le livre « Guérir la vie par la philosophie » de Laurence Devillairs aux Presses universitaires de France (PUF) diffère des précédents parce que l’auteure offre à ses lecteurs une aide direct à la réflexion sur différents thèmes.

Article # 9 : Du bien-être au marché du malaise – La société du développement personnel – par Nicolas Marquis aux Presses universitaires de France

J’ai lu ce livre à reculons. J’ai appliqué les feins dès les premières pages. L’objectivité sociologique de l’auteur m’a déplu. Ce livre présente aux lecteurs des observations, que des observations. L’auteur n’en tire aucune conclusion.

Article # 10 : Happycratie : comment l’industrie du bonheur a pris le contrôle de nos vies, Eva Illouz et Edgar Cabanas, Premier Parallèle, 2018

J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq parce qu’il m’a révélé les coulisses de la quête du bonheur au cœur de notre société néo-libérale. Je savais que cette obsession du bonheur circulait au sein de la population, notamment par le biais des coach de vie et des agents de développement personnel, mais je n’aurais jamais imaginé qu’elle cachait une véritable industrie soutenue par une idéologie psychologisante. Jusque-là, je ne connaissais de cette industrie que le commerce des livres et la montée en puissance des coachs de vie dédiés à la recherche du bonheur.

Article # 11 : La consultation philosophique, Oscar Brenifier, Éditions Alcofribas, 2020

J’ai adoré ce livre. Il est dense, très dense. On ne peut pas le lire comme un roman. Me voici enfin devant un auteur qui dit tout, où, quand, comment il observe, comment il pense, comment il chemine, comment il voit, comment il entend, comment il anticipe, comment il tire ses conclusions… Bref, un auteur qui expose son propre système de pensée dans un essai plus que formateur pour le nôtre.

Article # 12 : Fin du chapitre : Oscar Brenifier, philosophe praticien

La lecture du livre «La consultation philosophique» signé par le philosophe praticien Oscar Brenifier (voir article #11 de notre dossier «Consulter un philosophe – Quand la philosophie nous aide») nous apprend qu’il adresse un document à ses clients potentiels. J’ai écrit à monsieur Brenifier pour lui demander s’il pouvait me faire parvenir ce document.

Article # 13 : La philo-thérapie, Éric Suárez, Éditions Eyrolles, 2007

Cet article présente et relate ma lecture du livre du «La philo-thérapie» de Éric Suárez, Docteur en philosophie de l’Université Laval (Québec), philosophe praticien (Lausanne), publié en 2007 aux Éditions Eyrolles. Ce livre traite de la consultation philosophique ou, si vous préférez, de la philo-thérapie, d’un point de vue pratique. En fait, il s’agit d’un guide pour le lecteur intéressé à acquérir sa propre approche du philosopher pour son bénéfice personnel. Éric Suárez rassemble dans son ouvrage vingt exemples de consultation philosophiques regroupés sous cinq grands thèmes : L’amour, L’image de soi, La famille, Le travail et le Deuil.

Article # 14 : Comment choisir son philosophe ? Guide de première urgence à l’usage des angoissés métaphysiques, Oreste Saint-Drôme avec le renfort de Frédéric Pagès, La Découverte, 2000

Ce livre se caractérise par l’humour de son auteur et se révèle ainsi très aisé à lire. D’ailleurs l’éditeur nous prédispose au caractère divertissant de ce livre en quatrième de couverture : «Étudier in extenso la pensée des grands théoriciens et en extraire un mode de réflexion agissant est une mission impossible pour l’honnête homme/femme. C’est pourquoi l’auteur de cet ouvrage aussi divertissant que sérieux propose des voies surprenantes au premier abord, mais qui se révèlent fort praticables à l’usage. L’une passe par la rencontre avec la vie et la personnalité du philosophe : la voie des affinités électives».

Article # 15 : La philosophie comme manière de vivre, Pierre Habot, Entretiens avec Jeanne Cartier et Arnold I Davidson, Le livre de poche – Biblio essais, Albin Michel, 2001

Référencé par un auteur à mon programme de lecture, le livre «La philosophie comme manière de vivre» m’a paru important à lire. Avec un titre aussi accrocheur, je me devais de pousser plus loin ma curiosité. Je ne connaissais pas l’auteur Pierre Hadot : «Pierre Hadot (né à Paris, le 21 février 1922, et mort à Orsay, le 24 avril 20101) est un philosophe, historien et philologue français, spécialiste de l’Antiquité, profond connaisseur de la période hellénistique et en particulier du néoplatonisme et de Plotin. Pierre Hadot est l’auteur d’une œuvre développée notamment autour de la notion d’exercice spirituel et de la philosophie comme manière de vivre.» (Source : Wikipédia)

Article # 16 : La philosophie, un art de vivre de vivre, Collectif sous la direction de Jean-François Buisson, Les Éditions Cabédita, 2021

Jeanne Hersch, éminente philosophe genevoise, constate une autre rupture encore, celle entre le langage et la réalité : « Par-delà l’expression verbale, il n’y a pas de réalité et, par conséquent, les problèmes ont cessé de se poser (…). Dans notre société occidentale, l’homme cultivé vit la plus grande partie de sa vie dans le langage. Le résultat est qu’il prend l’expression par le langage pour la vie même. » (L’étonnement philosophique, Jeanne Hersch, Éd. Gallimard.) / On comprend par là qu’aujourd’hui l’exercice du langage se suffit à lui-même et que, par conséquent, la philosophie se soit déconnectée des problèmes de la vie quotidienne.» Source : La philosophie, un art de vivre, Collectif sous la direction de Jean-François Buisson, Les Éditions Cabédita, 2021, Préface,  p. 9.

Article # 17 : Socrate à l’agora : que peut la parole philosophique ?, Collectif sous la direction de Mieke de Moor, Éditions Vrin, 2017

J’ai trouvé mon bonheur dès l’Avant-propos de ce livre : «Laura Candiotto, en insistant sur le rôle joué par les émotions dans le dialogue socratique ancien et sur l’horizon éthique de celui-ci, vise à justifier théoriquement un «dialogue socratique intégral», c’est-à-dire une pratique du dialogue socratique qui prend en compte des émotions pour la connaissance.» Enfin, ai-je pensé, il ne s’agit plus de réprimer les émotions au profit de la raison mais de les respecter dans la pratique du dialogue socratique. Wow ! Je suis réconforté à la suite de ma lecture et de mon expérience avec Oscar Brenifier dont j’ai témoigné dans les articles 11 et 12 de ce dossier.

Article # 18 : La philosophie, c’est la vie – Réponses aux grandes et aux petites questions de l’existence, Lou Marinoff, La table ronde, 2004

Lou Marinoff occupe le devant de la scène mondiale de la consultation philosophique depuis la parution de son livre PLATON, PAS PROJAC! en 1999 et devenu presque’intantément un succès de vente. Je l’ai lu dès sa publication avec beaucoup d’intérêt. Ce livre a marqué un tournant dans mon rapport à la philosophie. Aujourd’hui traduit en 27 langues, ce livre est devenu la bible du conseil philosophique partout sur la planète. Le livre dont nous parlons dans cet article, «  La philosophie, c’est la vie – Réponses aux grandes et aux petites questions de l’existence », est l’une des 13 traductions du titre original « The Big Questions – How Philosophy Can Change Your Life » paru en 2003.

Article # 19 : S’aider soi-même – Une psychothérapie par la raison, Lucien Auger, Les Éditions de l’Homme

J’ai acheté et lu « S’aider soi-même » de Lucien Auger parce qu’il fait appel à la raison : « Une psychothérapie par la raison ». Les lecteurs des articles de ce dossier savent que je priorise d’abord et avant tout la philothérapie en place et lieu de la psychothérapie. Mais cette affiliation à la raison dans un livre de psychothérapie m’a intrigué. D’emblée, je me suis dit que la psychologie tentait ici une récupération d’un sujet normalement associé à la philosophie. J’ai accepté le compromis sur la base du statut de l’auteur : « Philosophe, psychologue et professeur ». « Il est également titulaire de deux doctorats, l’un en philosophie et l’autre en psychologie » précise Wikipédia. Lucien Auger était un adepte de la psychothérapie émotivo-rationnelle créée par le Dr Albert Ellis, psychologue américain. Cette méthode trouve son origine chez les stoïciens dans l’antiquité.

Article # 20 (1/2) : Penser par soi-même – Initiation à la philosophie, Michel Tozzi, Chronique sociale

J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq et je peux même en rajouter une de plus, une sixième, pour souligner son importance et sa pertinence. Il faut le lire absolument ! Je le recommande à tous car il nous faut tous sortir de ce monde où l’opinion règne en roi et maître sur nos pensées.

Article # 20 (2/2) : Penser par soi-même – Initiation à la philosophie, Michel Tozzi, Chronique sociale

Dans la première partie de ce rapport de lecture du livre « Penser par soi-même – Initiation à la philosophie » de Michel Tozzi, je vous recommandais fortement la lecture de ce livre : « J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq et je peux même en rajouter une de plus, une sixième, pour souligner son importance et sa pertinence. Il faut le lire absolument ! Je le recommande à tous car il nous faut tous sortir de ce monde où l’opinion règne en roi et maître sur nos pensées.» Je suis dans l’obligation d’ajouter cette deuxième partie à mon rapport de lecture de ce livre en raison de ma relecture des chapitres 6 et suivants en raison de quelques affirmations de l’auteur en contradiction avec ma conception de la philosophie.

Article # 21 – Agir et penser comme Nietzsche, Nathanaël Masselot, Les Éditions de l’Opportun

J’accorde au livre Agir et penser comme Nietzsche de Nathanaël Masselot cinq étoiles sur cinq. Aussi facile à lire qu’à comprendre, ce livre offre aux lecteurs une excellente vulgarisation de la philosophie de Friedricha Wilhelm Nietzsche. On ne peut pas passer sous silence l’originalité et la créativité de l’auteur dans son invitation à parcourir son œuvre en traçant notre propre chemin suivant les thèmes qui nous interpellent.

Article # 22 – La faiblesse du vrai, Myriam Revault d’Allones, Seuil

Tout commence avec une entrevue de Myriam Revault d’Allonnes au sujet de son livre LA FAIBLESSE DU VRAI à l’antenne de la radio et Radio-Canada dans le cadre de l’émission Plus on de fous, plus on lit. Frappé par le titre du livre, j’oublierai le propos de l’auteur pour en faire la commande à mon libraire.

Article # 23 – Pour une philothérapie balisée

Le développement personnel fourmille de personnes de tout acabit qui se sont improvisées conseillers, coachs, thérapeutes, conférenciers, essayistes, formateurs… et auxquelles s’ajoutent des praticiens issus des fausses sciences, notamment, divinatoires et occultes, des médecines et des thérapies alternatives. Bref, le développement personnel attire toute sorte de monde tirant dans toutes les directions.

Article # 24 – Comment nous pensons, John Dewey, Les empêcheurs de penser en rond / Seuil

Je n’aime pas cette traduction française du livre How we think de John Dewey. « Traduit de l’anglais (États-Unis) par Ovide Decroly », Comment nous pensons parait aux Éditions Les empêcheurs de penser en rond / Seuil en 2004. – Le principal point d’appui de mon aversion pour traduction française repose sur le fait que le mot anglais « belief » est traduit par « opinion », une faute majeure impardonnable dans un livre de philosophie, et ce, dès les premiers paragraphes du premier chapitre « Qu’entend-on par penser ? »

Article # 25 – Une philothérapie libre axée sur nos besoins et nos croyances avec Patrick Sorrel

Hier j’ai assisté la conférence Devenir philothérapeute : une conférence de Patrick Sorrel. J’ai beaucoup aimé le conférencier et ses propos. J’ai déjà critiqué l’offre de ce philothérapeute. À la suite de conférence d’hier, j’ai changé d’idée puisque je comprends la référence de Patrick Sorrel au «système de croyance». Il affirme que le «système de croyance» est une autre expression pour le «système de penser». Ce faisant, toute pensée est aussi une croyance.

Article # 26 – Une pratique philosophique sans cœur

J’éprouve un malaise face à la pratique philosophique ayant pour objectif de faire prendre conscience aux gens de leur ignorance, soit le but poursuivi par Socrate. Conduire un dialogue avec une personne avec l’intention inavouée de lui faire prendre conscience qu’elle est ignorante des choses de la vie et de sa vie repose sur un présupposé (Ce qui est supposé et non exposé dans un énoncé, Le Robert), celui à l’effet que la personne ne sait rien sur le sens des choses avant même de dialoguer avec elle. On peut aussi parler d’un préjugé philosophique.

Article # 27 – Êtes-vous prisonnier de vos opinions ?

Si votre opinion est faite et que vous n’êtes pas capable d’en déroger, vous êtes prisonnier de votre opinion. Si votre opinion est faite et que vous êtes ouvert à son évolution ou prêt à l’abandonner pour une autre, vous êtes prisonnier de l’opinion. Si votre opinion compte davantage en valeur et en vérité que les faits, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si votre opinion est la seule manière d’exprimer vos connaissances, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si vous pensez que l’opinion est le seul résultat de votre faculté de penser, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si vous prenez vos opinion pour vraies, vous êtes prisonnier de vos opinions.

Article # 28 – La pratique philosophique – Une méthode contemporaine pour mettre la sagesse au service de votre bien-être, Jérôme Lecoq, Eyrolles, 2014

J’ai mis beaucoup de temps à me décider à lire « La pratique philosophique » de Jérôme Lecoq. L’auteur est un émule d’Oscar Brenifier, un autre praticien philosophe. J’ai vécu l’enfer lors de mes consultations philosophiques avec Oscar Brenifier. Ainsi toute association de près ou de loin avec Oscar Brenifier m’incite à la plus grande des prudences. Jérôme Lecoq souligne l’apport d’Oscar Brenifier dans les Remerciements en première page de son livre « La pratique philosophique ».

Article # 29 – Je sais parce que je connais

Quelle est la différence entre « savoir » et « connaissance » ? J’exprime cette différence dans l’expression « Je sais parce que je connais ». Ainsi, le savoir est fruit de la connaissance. Voici quatre explications en réponse à la question « Quelle est la différence entre savoir et connaissance ? ».

Article # 30 – Les styles interpersonnels selon Larry Wilson

J’ai décidé de publier les informations au sujet des styles interpersonnels selon Larry Wilson parce que je me soucie beaucoup de l’approche de la personne en consultation philosophique. Il m’apparaît important de déterminer, dès le début de la séance de philothérapie, le style interpersonnel de la personne. Il s’agit de respecter la personnalité de la personne plutôt que de la réprimer comme le font les praticiens socratiques dogmatiques. J’ai expérimenté la mise en œuvre de ces styles inter-personnels avec succès.

Article # 31 – La confiance en soi – Une philosophie, Charles Pépin, Allary Éditions, 2018

Le livre « La confiance en soi – Une philosophie » de Charles Pépin se lit avec une grande aisance. Le sujet, habituellement dévolue à la psychologie, nous propose une philosophie de la confiance. Sous entendu, la philosophie peut s’appliquer à tous les sujets concernant notre bien-être avec sa propre perspective.

Article # 32 – Les émotions en philothérapie

J’ai vécu une sévère répression de mes émotions lors deux consultations philosophiques personnelles animées par un philosophe praticien dogmatique de la méthode inventée par Socrate. J’ai témoigné de cette expérience dans deux de mes articles précédents dans ce dossier.

Article # 33 – Chanson « Le voyage » par Raôul Duguay, poète, chanteur, philosophe, peintre… bref, omnicréateur québécois

Vouloir savoir être au pouvoir de soi est l’ultime avoir / Le voyage / Il n’y a de repos que pour celui qui cherche / Il n’y a de repos que pour celui qui trouve / Tout est toujours à recommencer

Article # 34 – « Ah ! Là je comprends » ou quand la pensée se fait révélation

Que se passe-t-il dans notre système de pensée lorsque nous nous exclamons « Ah ! Là je comprends » ? Soit nous avons eu une pensée qui vient finalement nous permettre de comprendre quelque chose. Soit une personne vient de nous expliquer quelque chose d’une façon telle que nous la comprenons enfin. Dans le deux cas, il s’agit d’une révélation à la suite d’une explication.

Article # 35 – La lumière entre par les failles

Âgé de 15 ans, je réservais mes dimanches soirs à mes devoirs scolaires. Puis j’écoutais l’émission Par quatre chemins animée par Jacques Languirand diffusée à l’antenne de la radio de Radio-Canada de 20h00 à 22h00. L’un de ces dimanches, j’ai entendu monsieur Languirand dire à son micro : « La lumière entre par les failles».

Article # 36 – Les biais cognitifs et la philothérapie

Le succès d’une consultation philosophique (philothérapie) repose en partie sur la prise en compte des biais cognitifs, même si ces derniers relèvent avant tout de la psychologie (thérapie cognitive). Une application dogmatique du dialogue socratique passe outre les biais cognitifs, ce qui augmente les risques d’échec.

Article # 37 – L’impossible pleine conscience

Depuis mon adolescence, il y a plus de 50 ans, je pense qu’il est impossible à l’Homme d’avoir une conscience pleine et entière de soi et du monde parce qu’il ne la supporterait pas et mourrait sur le champ. Avoir une pleine conscience de tout ce qui se passe sur Terre et dans tout l’Univers conduirait à une surchauffe mortelle de notre corps. Il en va de même avec une pleine conscience de soi et de son corps.

Article # 38 – Verbalisation à outrance : «Je ne suis pas la poubelle de tes pensées instantanées.»

Le Dr Jean-Christophe Seznec, psychiatre français, a été interrogé par la journaliste Pascale Senk du quotidien Le Figaro au sujet de son livre Savoir se taire, savoir parler, coécrit avec Laurent Carouana et paru en 2017. Le titre de l’article a retenu mon attention : Psychologie: «il faut sortir de l’hystérie de la parole».

Article # 39 – Comment dialoguer de manière constructive ? par Julien Lecomte, Philosophie, médias et société

Reproduction de l’article « Comment dialoguer de manière constructive ? », un texte de Julien Lecomte publié sur son site web PHILOSOPHIE, MÉDIAS ET SOCIÉTÉ. https://www.philomedia.be/. Echanger sur des sujets de fond est une de mes passions. Cela fait plusieurs années que je m’interroge sur les moyens de faire progresser la connaissance, d’apprendre de nouvelles choses. Dans cet article, je reviens sur le cheminement qui m’anime depuis tout ce temps, pour ensuite donner des pistes sur les manières de le mettre en pratique concrètement.

Article # 40 – Le récit d’initiation en spirale

Dans le récit initiatique, il s’agit de partir du point A pour aller au point B afin que le lecteur ou l’auditeur chemine dans sa pensée vers une révélation permettant une meilleure compréhension de lui-même et/ou du monde. La référence à la spirale indique une progression dans le récit où l’on revient sur le même sujet en l’élargissant de plus en plus de façon à guider la pensée vers une nouvelle prise de conscience. Souvent, l’auteur commence son récit en abordant un sujet d’intérêt personnel (point A) pour évoluer vers son vis-à-vis universel (point B). L’auteur peut aussi se référer à un personnage dont il fait évoluer la pensée.

Article # 41 – La philothérapie – Un état des lieux par Serge-André Guay, Observatoire québécois de la philothérapie

Cet article présente un état des lieux de la philothérapie (consultation philosophique) en Europe et en Amérique du Nord. Après un bref historique, l’auteur se penche sur les pratiques et les débats en cours. Il analyse les différentes publications, conférences et offres de services des philosophes consultants.

Article # 42 – L’erreur de Descartes, Antonio Damasio, Odile Jacob, 1995

J’ai découvert le livre « L’erreur de Descartes » du neuropsychologue Antonio R. Damasio à la lecture d’un autre livre : L’intelligence émotionnelle de Daniel Goleman. L’édition originale de ce livre est parue en 1995 en anglais et j’ai lu la traduction française à l’été 1998 parue un an auparavant chez Robert Laffont. Diplômé de l’université Harvard et docteur en psychologie clinique et développement personnel, puis journaliste au New York Times, où il suit particulièrement les sciences du comportement, Daniel Goleman nous informe dans son livre « L’intelligence émotionnel » au sujet de la découverte spectaculaire pour ne pas dire révolutionnaire de Antonio R. Damasio à l’effet que la raison a toujours besoin d’un coup des émotions pour prendre des décisions. Jusque-là, il était coutume de soutenir que les émotions perturbaient la raison, d’où l’idée de les contrôler.

Article # 43 – Éloge de la pratique philosophique, Sophie Geoffrion, Éditions Uppr, 2018

Ma lecture du livre ÉLOGE DE LA PRATIQUE PHILOSOPHIQUE de la philosophe praticienne SOPHIE GEOFFRION fut agréable et fort utile. Enfin, un ouvrage court ou concis (le texte occupe 65 des 96 pages du livre), très bien écrit, qui va droit au but. La clarté des explications nous implique dans la compréhension de la pratique philosophique. Bref, voilà un éloge bien réussi. Merci madame Geoffrion de me l’avoir fait parvenir.

Article # 44 – Consultation philosophique : s’attarder à l’opinion ou au système de pensée ?

Dans cet article, je m’interroge à savoir la consultation philosophique doit s’attarder à l’opinion ou au système pensée du client. OPINION – Le philosophe praticien cible l’opinion de son client en vue de démontrer l’ignorance sur laquelle elle repose et, par conséquent, l’absence de valeur de vérité qu’elle recèle. Cette pratique repose sur le « questionnement philosophique ».

Article # 45 – Sentir et savoir – Une nouvelle théorie de la conscience, Antonio Damasio, Éditions Odile Jacob

Dans son livre « Sentir et savoir », Antonio Damasio propose « Une nouvelle théorie de la conscience ». Il démontre que la conscience ne peut pas exister sans le corps. Il identifie dans le corps la capacité de sentir comme préalable à la conscience.

Article # 46 – Dépression et philosophie : Du mal du siècle au mal de ce siècle, Robert Redeker, Editions Pleins Feux, 2007

Un si petit livre, seulement 46 pages et en format réduit, mais tellement informatif. Une preuve de plus qu’il ne faut se fier aux apparences. Un livre signé ROBERT REDEKER, agrégé de philosophie originaire de la France, connaît fort bien le sujet en titre de son œuvre : DÉPRESSION ET PHILOSOPHIE.

Article # 47 – Savoir se taire, savoir parler, Dr Jean-Christophe Seznec et Laurent Carouana, InterÉditions, 2017

La plupart des intervenants en psychologie affirment des choses. Ils soutiennent «C’est comme ceci» ou «Vous êtes comme cela». Le lecteur a le choix de croire ou de ne pas croire ce que disent et écrivent les psychologues et psychiatres. Nous ne sommes pas invités à réfléchir, à remettre en cause les propos des professionnels de la psychologie, pour bâtir notre propre psychologie. Le lecteur peut se reconnaître ou pas dans ces affirmations, souvent catégoriques. Enfin, ces affirmations s’apparentent à des jugements. Le livre Savoir se taire, savoir dire de Jean-Christophe Seznec et Laurent Carouana ne fait pas exception.

Article # 48 – Penser sa vie – Une introduction à la philosophie, Fernando Savater, Éditions du Seuil, 2000

Chapitre 1 – La mort pour commencer – Contrairement au philosophe Fernando Savater dans PENSER SA VIE – UNE INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE, je ne définie pas la vie en relation avec la mort, avec son contraire. Je réfléchie et je parle souvent de la mort car il s’agit de l’un de mes sujets préféré depuis mon adolescence. Certaines personnes de mon entourage pensent et affirment que si je parle aussi souvent de la mort, c’est parce que j’ai peur de mourir. Or, je n’ai aucune peur de la mort, de ma mort, de celles de mes proches. Je m’inquiète plutôt des conséquences de la mort sur ceux et celles qui restent, y compris sur moi-même.

Article # 49 – Pourquoi avons-nous des couleurs de peau et des physiques si différents ?

À la lumière du documentaire LE SOLEIL ET DES HOMMES, notamment l’extrait vidéo ci-dessus, je ne crois plus au concept de race. Les différences physiques entre les hommes découlent de l’évolution naturelle et conséquente de nos lointains ancêtres sous l’influence du soleil et de la nature terrestre, et non pas du désir du soleil et de la nature de créer des races. On sait déjà que les races et le concept même de race furent inventés par l’homme en se basant sur nos différences physiques. J’abandonne donc la définition de « race » selon des critères morphologiques…

Article # 50 – Extrait du mémoire de maîtrise «Formation de l’esprit critique et société de consommation» par Stéphanie Déziel

Dans le cadre de notre dossier « Consulter un philosophe », la publication d’un extrait du mémoire de maîtrise « Formation de l’esprit critique et société de consommation » de Stéphanie Déziel s’impose en raison de sa pertinence. Ce mémoire nous aide à comprendre l’importance de l’esprit critique appliqué à la société de consommation dans laquelle évoluent, non seule les jeunes, mais l’ensemble de la population.

Article # 51 – « En fait, c’est dans son incertitude même que réside largement la valeur de la philosophie. » Bertrand Russell

Je reproduis ci-dessous une citation bien connue sur le web au sujet de « la valeur de la philosophie » tirée du livre « Problèmes de philosophie » signé par Bertrand Russell en 1912. Mathématicien, logicien, philosophe, épistémologue, homme politique et moraliste britannique, Bertrand Russell soutient que la valeur de la philosophie réside dans son incertitude. À la suite de cette citation, vous trouverez le texte de Caroline Vincent, professeur de philosophie et auteure du site web « Apprendre la philosophie » et celui de Gabriel Gay-Para tiré se son site web ggpphilo. Des informations tirées de l’Encyclopédie Wikipédia au sujet de Bertrand Russell et du livre « Problèmes de philosophie » et mon commentaire complètent cet article.

Article # 52 – Socrate et la formation de l’esprit critique par Stéphanie Déziel

Passez donc sans vous arrêter, amis, au milieu des Marchands de Sommeil; et, s’ils vous arrêtent, répondez-leur que vous ne cherchez ni un système ni un lit. Ne vous lassez pas d’examiner et de comprendre. (…) Lisez, écoutez, discutez, jugez; ne craignez pas d’ébranler des systèmes; marchez sur des ruines, restez enfants. (…) Socrate vous a paru un mauvais maître. Mais vous êtes revenus à lui; vous avez compris, en l’écoutant, que la pensée ne se mesure pas à l’aune, et que les conclusions ne sont pas l’important; restez éveillés, tel est le but. Les Marchands de Sommeil de ce temps-là tuèrent Socrate, mais Socrate n’est point mort; partout où des hommes libres discutent, Socrate vient s’asseoir, en souriant, le doigt sur la bouche. Socrate n’est point mort; Socrate n’est point vieux. (…) – Alain, (Emile Charrier), Vigiles de l’esprit.

Article # 53 – J’ai un problème avec la vérité

Tout au long de ma vie, j’ai vu la vérité malmenée, tassée d’un bord puis de l’autre, devenir une propriété personnelle (ma vérité — ta vérité — à chacun sa vérité), tantôt objet de monopôle, tantôt reconnue, tantôt niée et reniée… Ah ! La vérité. Quel chaos ! Je me demande depuis longtemps pourquoi la vérité, si elle existe, ne triomphe pas à tout coup, pourquoi elle ne s’impose à tous d’elle-même. Contestée de toutes parts, la vérité, si elle existe, n’a d’intérêt que pour l’opinion qu’on en a et les débats qui s’ensuivent. On va jusqu’à donner à la vérité une mauvaise réputation eu égard à son influence néfaste sur la société et les civilisations. Et que dire de toutes ces croyances qui se prennent pour la vérité ? Et c’est sans compter l’observation récente à l’effet que nous venons d’entrer dans une « ère de post-vérité ».

Article # 54 – Petit manuel philosophique à l’intention des grands émotifs, Iaria Gaspard, Presses Universitaires de France, 2022

J’accorde à ce livre trois étoiles sur cinq. Le titre « Petit manuel philosophique à l’intention des grands émotifs » a attiré mon attention. Et ce passage du texte en quatrième de couverture m’a séduit : «En proposant une voyage philosophique à travers l’histoire des émotions, Iaria Gaspari bouscule les préjugés sur notre vie émotionnelle et nous invite à ne plus percevoir nos d’états d’âme comme des contrainte ». J’ai décidé de commander et de lire ce livre. Les premières pages m’ont déçu. Et les suivantes aussi. Rendu à la moitié du livre, je me suis rendu à l’évidence qu’il s’agissait d’un témoignage de l’auteure, un témoignage très personnelle de ses propres difficultés avec ses émotions. Je ne m’y attendais pas, d’où ma déception. Je rien contre de tels témoignages personnels qu’ils mettent en cause la philosophie, la psychologie, la religion ou d’autres disciplines. Cependant, je préfère et de loin lorsque l’auteur demeure dans une position d’observateur alors que son analyse se veut la plus objective possible.

Article # 55 – Savoir, connaissance, opinion, croyance

Tout repose sur le Savoir. L’expérience personnelle et/ou professionnelle qu’on fait du Savoir, après en avoir pris conscience, se retrouve à la base des Connaissances que nous possédons. Les Opinions expriment des Jugements des connaissances et inspirent souvent les Croyances.

Article # 56 – Philosophie, science, savoir, connaissance

La philosophie, mère de toutes les sciences, recherche la sagesse et se définie comme l’Amour de la Sagesse. La sagesse peut être atteinte par la pensée critique et s’adopte comme Mode de vie. • La philosophie soutient la Science et contribue à la naissance et au développement de la méthode scientifique, notamment avec l’épistémologie.

Article # 57 – La philosophie encore et toujours prisonnière de son passé ?

La philothérapie, principale pratique de la philosophie de nos jours, met sans cesse de l’avant les philosophes de l’Antiquité et de l’époque Moderne. S’il faut reconnaître l’apport exceptionnel de ces philosophes, j’ai parfois l’impression que la philothérapie est prisonnière du passé de la philosophie, à l’instar de la philosophie elle-même.

Article # 58 – Le Québec, un désert philosophique

Au Québec, la seule province canadienne à majorité francophone, il n’y a pas de tradition philosophique populaire. La philosophie demeure dans sa tour universitaire. Très rares sont les interventions des philosophes québécois dans l’espace public, y compris dans les médias, contrairement, par exemple, à la France. Et plus rares encore sont les bouquins québécois de philosophie en tête des ventes chez nos libraires. Seuls des livres de philosophes étrangers connaissent un certain succès. Bref, l’espace public québécois n’offre pas une terre fertile à la Philosophie.

Article # 59 – La naissance du savoir – Dans la tête des grands scientifiques, Nicolas Martin, Éditions Les Arènes, 2023.

J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq parce qu’il me permet d’en apprendre beaucoup plus sur la pensée scientifique telle que pratiquée par de grands scientifiques. L’auteur, Nicolas Martin, propose une œuvre originale en adressant les mêmes questions, à quelques variantes près, à 17 grands scientifiques.

Article # 60 – Pourquoi est-il impossible d’atteindre l’équilibre entre développement personnel et développement spirituel ou philosophique ?

Cet article répond à ce commentaire lu sur LinkedIn : « L’équilibre entre développement personnel et développement spirituel ou philosophique est indispensable. » Il m’apparaît impossible de viser « L’équilibre entre développement personnel et développement spirituel ou philosophique » et de prétendre que cet équilibre entre les trois disciplines soit « indispensable ». D’une part, le développement personnel est devenu un véritable fourre-tout où l’ivraie et le bon grain se mélangent sans distinction, chacun avançant sa recette à l’aveugle.

Article # 61 – Le commerce extrême de la philosophie avec les « philopreneurs »

En ne s’unissant pas au sein d’une association nationale professionnelle fixant des normes et des standards à l’instar des philosophes consultants ou praticiens en d’autres pays, ceux de la France nous laissent croire qu’ils n’accordent pas à leur disciple tout l’intérêt supérieur qu’elle mérite. Si chacun des philosophes consultants ou praticiens français continuent de s’affairer chacun dans son coin, ils verront leur discipline vite récupérée à mauvais escient par les philopreneurs et la masse des coachs.

Article # 62 – Soigner par la philosophie, En marche – Journal de la Mutualité chrétienne (Belgique)

“ Après les succès d’Épicure 500 vous permettant de faire dix repas par jour sans ballonnements, après Spinoza 200 notre inhibiteur de culpabilité, les laboratoires Laron, vous proposent Philonium 3000 Flash, un médicament révolutionnaire capable d’agir sur n’importe quelle souffrance physique ou mentale : une huile essentielle d’Heidegger pour une angoisse existentielle, une substance active de Kant pour une douleur morale…. Retrouvez sagesse et vitalité en un instant ”, s’amusaient les chroniqueurs radio de France Inter dans une parodie publicitaire diffusée à l’occasion d’une émission ayant pour thème : la philosophie peut-elle soigner le corps ?

Article # 63 – Contre le développement personnel. Thierry Jobard, Éditions Rue de l’échiquier, 2021

J’attribue quatre étoiles sur cinq à ce livre. Les lecteurs assidus de mes articles connaissent fort bien ma position plus que défavorable face au développement personnel. À l’instar de Thiery Jobard, je suis contre le développement personnel. Je qualifie le développement personnel d’arnaque extrêmement dangereuse pour ses adeptes et notre société.

Article # 64 – Apocalypse cognitive – La face obscure de notre cerveau, Gérald Bronner, Presses Universitaires de France (PUF), 2021

Le philothérapeute (philosophe consultant ou philosophe praticien) a l’obligation de très bien connaître le contexte dans lequel évolue son client. Le développement de l’esprit critique de ce client passe inévitablement par une prise de conscience de sa cognition en vue de comprendre comment il connaît. Si, dès le départ, le client n’a pas conscience de son mode de pensées, il lui sera difficile de participer activement au dialogue avec son philothérapeute. L’objectif primaire du philosophe consultant demeure de déceler et de corriger les biais cognitifs de son client avant même d’abord une question philosophique. Bref, si la »machine à pensée » du client est corrompu par des «virus cognitifs », une «réinitialisation » s’impose en début de séance de consultation.

Article # 65 – Développement (im)personnel – Le succès d’une imposture, Julia de Funès, Éditions de l’observatoire/Humensis, 2019

Dans son livre « Développement (im) personnel, Julia de Funès, docteure en philosophie, soutient que le développement personnel offre la même recette à tous et qu’à ce titre il ne peut donc pas se qualifier sa démarche de « personnel ». Selon ma compréhension, le développement personnel devrait mettre de l’avant un développement personnalisé, c’est-à-dire adapté à chaque individu intéressé pour se targuer d’être personnel.

Article # 66 – Savoirs, opinions, croyances – Une réponse laïque et didactique aux contestations de la science en classe, Guillaume Lecointre, Édition Belin / Humensis, 2018

Mon intérêt pour la pensée scientifique remonte à plus de 25 ans. Alors âgé d’une quarantaine d’année, PDG d’une firme d’étude des motivations d’achat des consommateurs, je profite des enseignements et de l’étude du processus scientifique de différentes sources. Je me concentre vite sur l’épistémologie…

Article # 67 – À l’école du doute – Apprendre à penser juste en découvrant pourquoi l’on pense faux, Marc Romainville, Presses Universitaires de France / Humensis, 2023

Ce livre m’a déçu en raison de la faiblesse de sa structure indigne de son genre littéraire, l’essai. L’auteur offre aux lecteurs une foule d’information mais elle demeure difficile à suivre en l’absence de sous-titres appropriés et de numérotation utile pour le repérage des énumérations noyés dans un style plus littéraire qu’analytique.

Article # 68 – Ébauche d’un annuaire : philothérapeutes, philosophes consultants, philosophes praticiens

En l’absence d’une association d’accréditation des philothérapeutes, philosophes consultants ou praticiens en francophonie, il est difficile de les repérer. Il ne nous reste plus que de nombreuses recherches à effectuer sur le web pour dresser une liste, aussi préliminaire soit-elle. Les intervenants en philothérapie ne se présentent pas tous sous la même appellation : « philothérapeute », « philosophe consultant » ou « philosophe praticien » « conseiller philosophique » « philosophe en entreprise », « philosophe en management » et autres.

Article # 69 – Guérir l’impossible – Une philosophie pour transformer nos souffrances en forces, Christopher Laquieze, Guy Trédaniel Éditeur, 2023

J’ai lu le livre GUÉRIR L’IMPOSSIBLE en me rappelant à chaque page que son auteur, Christopher Laquieze, est à la fois philosophe et thérapeute spécialisé en analyse comportementale. Pourquoi ? Parce que ce livre nous offre à la fois un voyage psychologique et philosophique, ce à quoi je ne m’attendais pas au départ. Ce livre se présente comme « Une philosophie pour transformer nous souffrances en forces ». Or, cette philosophie se base davantage sur la psychologie que la philosophie. Bref, c’est le « thérapeute spécialisé en analyse comportementale » qui prend le dessus sur le « philosophe ».

Article # 70 – Agir et penser comme Platon – Sage, penseur, philosophe, juste, courageux …, Nathanaël Masselot, Les Éditions de l’Opportun

Nathaniel Masselot maîtrise fort bien son écriture visiblement axée sur son accessibilité et sa compréhension par tous. Loin de la vulgarisation simpliste, l’auteur nous parle comme nous parlons. Loin de l’écriture hermétique, l’auteur n’a pas la tête dans les nuages et isolé dans une tour surplombant la société; il marche auprès de nous. Avec ses références à l’actualité, il campe son lecteur dans la réalité quotidienne où il évolue.

Article # 71 – 7 règles pour une vie (presque) sans problème, Simon Delannoy, 2022

Ma lecture de ce livre m’a procuré beaucoup de plaisir et de bonheur. Je recherche dans mes lectures les auteurs et les œuvres permettant aux lecteurs d’évoluer de prise de conscience en prise de conscience de la première à la dernière page, de ne plus être le même à la fin de la lecture. Et c’est ce que les lecteurs vivront à la lecture de ce livre.

Article # 72 – Les philo-cognitifs – Ils n’aiment que penser et penser autrement…, Fanny Nusbaum, Olivier Revol, Dominic Sappey-Marinier, Odile Jacob, Paris, 2019

Je n’ai pas aimé ce livre parce que son titre, LES PHILO-COGNITIFS, se réfère à la philosophie sans pour autant faire un traitement philosophique de son sujet. Mon achat reposait entièrement sur le titre de ce livre et je m’attendais à un livre de philosophie. Mais il s’agit d’un livre de psychologie. Mon achat fut intuitif. J’avais pleinement confiance dans l’usage du mot « PHILO » en titre d’un ouvrage pour que ce dernier ne puisse traiter d’un autre sujet que philosophique. Mais ce n’est pas le cas.

Article # 73 – Qu’est-ce que la philosophie ? Michel Meyer, Le livre de poche, Librairie générale française, Paris, 1997

J’aime beaucoup les livres d’introduction et de présentation de la philosophie parce qu’ils ramènent toujours les lecteurs à l’essentiel, aux bases de la discipline. À la question « Qu’est-ce que la philosophie ? », Michel Meyer répond : « La philosophie est depuis toujours questionnement radical. C’est pourquoi il importe aujourd’hui de questionner le questionnement, même si on ne l’a jamais fait auparavant. » MEYER, Michel, Qu’est-ce que la philosophie ? – Les questions ultime de la pensée, Le livre de poche © Librairie Générale Française, Paris, 1997. p. 18.

Article # 74 – Présentations de la philosophie, André Comte-Sponville, Éditions Albin Michel, Le livre de poche, 2000

À l’instar de ma lecture précédente (Qu’est-ce que la philosophie ? de Michel Meyer), le livre PRÉSENTATIONS DE LA PHILOSOPHIE du philosophe ANDRÉ COMTE-SPONVILLE m’a plu parce qu’il met en avant les bases mêmes de la philosophie et, dans ce cas précis, appliquées à une douzaine de sujets…

Article # 75 – Les théories de la connaissance, Jean-Michel Besnier, Que sais-je?, Presses universitaires de France, 2021

J’ai dévoré le livre LES THÉORIES DE LA CONNAISSANCE par JEAN-MICHEL BESNIER avec un grand intérêt puisque la connaissance de la connaissance me captive. Amateur d’épistémologie, ce livre a satisfait une part de ma curiosité. Évidemment, je n’ai pas tout compris et une seule lecture suffit rarement à maîtriser le contenu d’un livre traitant de l’épistémologie, notamment, de son histoire enchevêtrée de différents courants de pensée, parfois complémentaires, par opposés. Jean-Michel Besnier dresse un portrait historique très intéressant de la quête philosophique pour comprendre la connaissance elle-même.

Article # 76 – Philosophie de la connaissance – Croyance, connaissance, justification, textes réunis par Julien Dutant et Pascal Engel, Libraire philosophique J. Vrin, 2005

Ce livre n’était pas pour moi en raison de l’érudition des auteurs au sujet de la philosophie de connaissance. En fait, contrairement à ce que je croyais, il ne s’agit d’un livre de vulgarisation, loin de là. J’ai décroché dès la seizième page de l’Introduction générale lorsque je me suis buté à la première équation logique. Je ne parviens pas à comprendre de telles équations logiques mais je comprends fort bien qu’elles soient essentielles pour un tel livre sur-spécialisé. Et mon problème de compréhension prend racine dans mon adolescence lors des études secondaires à l’occasion du tout premier cours d’algèbre. Littéraire avant tout, je n’ai pas compris pourquoi des « x » et « y » se retrouvaient dans des équations algébriques. Pour moi, toutes lettres de l’alphabet relevaient du littéraire. Même avec des cours privés, je ne comprenais toujours pas. Et alors que je devais choisir une option d’orientation scolaire, j’ai soutenu que je voulais une carrière fondée sur l’alphabet plutôt que sur les nombres. Ce fut un choix fondé sur l’usage des symboles utilisés dans le futur métier ou profession que j’allais exercer. Bref, j’ai choisi les sciences humaines plutôt que les sciences pures.

Article # 77 – Problèmes de philosophie, Bertrand Russell, Nouvelle traduction, Éditions Payot, 1989

Quelle agréable lecture ! J’ai beaucoup aimé ce livre. Les problèmes de philosophie soulevés par Bertrand Russell et les réponses qu’il propose et analyse étonnent. Le livre PROBLÈMES DE PHILOSOPHIE écrit par BERTRAND RUSSELL date de 1912 mais demeure d’une grande actualité, du moins, selon moi, simple amateur de philosophie. Facile à lire et à comprendre, ce livre est un «tourne-page» (page-turner).

Article # 78 – La dictature des ressentis – Sauver la liberté de penser, Eugénie Bastié, Éditions Plon, 2023

La compréhension de ce recueil de chroniques signées EUGÉNIE BASTIÉ dans le quotidien LE FIGARO exige une excellence connaissance de la vie intellectuelle, politique, culturelle, sociale, économique et de l’actualité française. Malheureusement, je ne dispose pas d’une telle connaissance à l’instar de la majorité de mes compatriotes canadiens et québécois. J’éprouve déjà de la difficulté à suivre l’ensemble de l’actualité de la vie politique, culturelle, sociale, et économique québécoise. Quant à la vie intellectuelle québécoise, elle demeure en vase clos et peu de médias en font le suivi. Dans ce contexte, le temps venu de prendre connaissance de la vie intellectuelle française, je ne profite des références utiles pour comprendre aisément. Ma lecture du livre LA DICTATURE DES RESSENTIS d’EUGÉNIE BASTIÉ m’a tout de même donné une bonne occasion de me plonger au cœur de cette vie intellectuelle française.

Article # 79 – À la découverte de la sagesse stoïcienne: L’histoire improbable du stoïcisme suivie du Manuel de la vie bonne, Dr Chuck Chakrapani, Éditions Stoa Gallica, 2023

À titre d’éditeur, je n’ai pas aimé ce livre qui n’en est pas un car il n’en possède aucune des caractéristiques professionnelles de conceptions et de mise en page. Il s’agit de la reproduction d’un texte par Amazon. Si la première de couverture donne l’impression d’un livre standard, ce n’est pas le cas des pages intérieures du… document. La mise en page ne répond pas aux standards de l’édition française, notamment, en ne respectant pas les normes typographiques.

Article # 80 – Le changement personnel – Histoire Mythes Réalités, sous la direction de Nicolas Marquis, Sciences Humaines Éditions, 2015

J’ai lu avec un grand intérêt le livre LE CHANGEMENT PERSONNEL sous la direction de NICOLAS MARQUIS. «Cet ouvrage a été conçu à partir d’articles tirés du magazine Sciences Humaines, revus et actualisés pour la présente édition ainsi que de contributions inédites. Les encadrés non signés sont de la rédaction.» J’en recommande vivement la lecture pour son éruditions sous les aspects du changement personnel exposé par différents spécialistes et experts tout aussi captivant les uns les autres.

Article # 81 – L’empire des coachs – Une nouvelle forme de contrôle social, Roland Gori et Pierre Le Coz, Éditions Albin Michel, 2006

À la lecture de ce livre fort intéressent, j’ai compris pourquoi j’ai depuis toujours une dent contre le développement personnel et professionnel, connu sous le nom « coaching ». Les intervenants de cette industrie ont réponse à tout, à toutes critiques. Ils évoluent dans un système de pensée circulaire sans cesse en renouvellement créatif voire poétique, système qui, malheureusement, tourne sur lui-même. Et ce type de système est observable dans plusieurs disciplines des sciences humaines au sein de notre société où la foi en de multiples opinions et croyances s’exprime avec une conviction à se donner raison. Les coachs prennent pour vrai ce qu’ils pensent parce qu’ils le pensent. Ils sont dans la caverne de Platon et ils nous invitent à les rejoindre.

Article # 82 – À quoi sert la philosophie ?, Marc Sautet, Éditions Pleins Feux, 1997

Ce petit livre d’une soixantaine de pages nous offre la retranscription de la conférence « À QUOI SERT LA PHILOSOPHIE ? » animée par Marc Sautet, philosophe ayant ouvert le premier cabinet de consultation philosophique en France et également fondateur des Cafés Philo en France.

Article # 83 – Raviver de l’esprit en ce monde – Diagnostic du contemporain, François Jullien, Éditions de l’Observatoire, 2023

L’essai RAVIVER DE L’ESPRIT EN CE MONDE – UN DIAGNOSTIC CONTEMPORAIN par FRANÇOIS JULLIEN chez les Éditions de l’Observatoire, parue en 2023, offre aux lecteurs une prise de recul philosophique révélatrice de notre monde. Un tel recul est rare et fort instructif.

Article # 84 – La philosophie appelle à une révélation suivie d’une conversion

La philosophie a pour but l’adoption d’un mode de vie sain. On parle donc de la philosophie comme un mode de vie ou une manière de vivre. La philosophie ne se possède pas, elle se vit. La philosophie souhaite engendrer un changement de comportement, d’un mode de vie à celui qu’elle propose. Il s’agit ni plus ni moins d’enclencher et de soutenir une conversion à la philosophie.

Article # 85 – La philosophie comme mode de vie, Daniel Desroches, Deuxième édition revue et corrigée, Coll. À propos, Les Presses de l’Université Laval, Québec, 2019

La lecture de cet essai fut très agréable, instructive et formatrice pour l’amateur de philosophie que je suis. Elle s’inscrit fort bien à la suite de ma lecture de « La philosophie comme manière de vivre » de Pierre Habot (Entretiens avec Jeanne Cartier et Arnold I Davidson, Le livre de poche – Biblio essais, Albin Michel, 2001).

Article # 86 – Les consolations de la philosophie, Alain De Botton, Mercure de France, 2001, Pocket

La lecture du livre Les consolations de la philosophie, une édition en livre de poche abondamment illustrée, fut très agréable et instructive. L’auteur Alain de Botton, journaliste, philosophe et écrivain suisse, nous adresse son propos dans une langue et un vocabulaire à la portée de tous.

Article # 87 – La philothérapie – Philosophie pratique à l’international

L’Observatoire de la philothérapie a consacré ses deux premières années d’activités à la France, puis à la francophonie. Aujourd’hui, l’Observatoire de la philothérapie s’ouvre à d’autres nations et à la scène internationale.

Article # 88 – L’approche intellectuelle en philothérapie et en philosophie pratique

Certaines personnes croient le conseiller philosophique intervient auprès de son client en tenant un « discours purement intellectuel ». C’est le cas de Dorothy Cantor, ancienne présidente de l’American Psychological Association, dont les propos furent rapportés dans The Philosophers’ Magazine en se référant à un autre article parue dans The New York Times.

Article # 89 – En thérapie avec… Épicure – Combattre votre anxiété – 40 antidotes du philosophe antique, Nathanaël Masselot, Les Éditions de l’Opportun, Paris, 2024

Nathaniel Masselot maîtrise fort bien son écriture visiblement axée sur son accessibilité et sa compréhension par tous. Loin de la vulgarisation simpliste, l’auteur nous parle comme nous parlons. Loin de l’écriture hermétique, l’auteur n’a pas la tête dans les nuages et isolé dans une tour surplombant la société; il marche auprès de nous. Avec ses références à l’actualité, il campe son lecteur dans la réalité quotidienne où il évolue.

Article # 90 – Êtes-vous sûr d’avoir raison ?, Gilles Vervisch, Flammarion, 2022

De lecture agréable et truffé d’humour, le livre ÊTES-VOUS SÛR D’AVOIR RAISON ? de GILLES VERVISCH, agrégé de philosophie, pose la question la plus embêtante à tous ceux qui passent leur vie à se donner raison.

Article # 91 – L’approche interrogative et l’approche conversationnelle dans la pratique philosophique

Dans un article intitulé « Se retirer du jeu » et publié sur son site web Dialogon, le philosophe praticien Jérôme Lecoq, témoigne des « résistances simultanées » qu’il rencontre lors de ses ateliers, « surtout dans les équipes en entreprise » : « L’animation d’un atelier de “pratique philosophique” implique que chacun puisse se « retirer de soi-même », i.e. abandonner toute volonté d’avoir raison, d’en imposer aux autres, de convaincre ou persuader autrui, ou même de se “faire valider” par les autres. Vous avez une valeur a priori donc il n’est pas nécessaire de l’obtenir d’autrui. » (LECOQ, Jérôme, Se retirer du jeu, Dialogon, mai 2024.)

Article # 92 – Introduction à la philosophie, Karl Jaspers, Plon, coll. 10-18, 2001

« Jaspers incarne, en Allemagne, l’existentialisme chrétien » peut-on lire en quatrième de couverture de son livre INTRODUCTION À PHILOSOPHIE. Je ne crois plus en Dieu depuis vingt ans. Baptisé et élevé par défaut au sein d’une famille catholique qui finira pas abandonner la religion, marié protestant, aujourd’hui J’adhère à l’affirmation d’un ami philosophe à l’effet que « Toutes les divinités sont des inventions humaines ». Dieu est une idée, un concept, rien de plus, rien de moins. / Dans ce contexte, ma lecture de l’œuvre INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE de KARL JASPERS fut quelque peu contraignante à titre d’incroyant. Je me suis donc concentré sur les propos de JASPERS au sujet de la philosophie elle-même.

Article # 93 – Le rôle social des idées – Esquisse d’une philosophie de l’histoire contemporaine, Max Lamberty, Éditions de la Cité Chrétienne, 1936

« La philosophie a gouverné toute la vie de notre époque dans ses traits les plus typiques et les plus importants » (LAMBERTY, Max, Le rôle social des idées, Chapitre premier – La souveraineté des idées ou La généalogie de notre temps, Les Éditions de la Cité Chrétienne (Bruxelles) / P. Lethielleux (Paris), 1936, p. 41) – la démonstration du rôle social des idées par Max Lamberty doit impérativement se poursuivre de nos jours en raison des défis qui se posent à nous, maintenant et demain, et ce, dans tous les domaines. – Et puisque les idées philosophiques mènent encore et toujours le monde, nous nous devons d’interroger le rôle social des idées en philosophie pratique. Quelle idée du vrai proposent les nouvelles pratiques philosophiques ? Les praticiens ont-ils conscience du rôle social des idées qu’ils véhiculent dans les consultations et les ateliers philosophiques ?

Article # 94 – L’étonnement philosophique – Une histoire de la philosophie, Jeanne Hersch, Gallimard, coll. Folio Essai, 1993

J’aime beaucoup ce livre. Les nombreuses mises en contexte historique en lien avec celui dans lequel nous sommes aujourd’hui permettent de mieux comprendre cette histoire de la philosophie et d’éviter les mésinterprétations. L’auteure Jeanne Hersch nous fait découvrir les différentes étonnements philosophiques de plusieurs grands philosophes à l’origine de leurs quêtes d’une meilleure compréhension de l’Être et du monde.

Article # 95 – Qu’est-ce que la Deep Philosophy ? – Philosopher depuis notre profondeur intérieure, Ran Lahav, Loyev Books, 2023

Mon intérêt pour ce livre s’est dégradé au fil de ma lecture en raison de sa faible qualité littéraire, des nombreuses répétitions et de l’aveu de l’auteur à rendre compte de son sujet, la Deep Philosophy. / Dans le texte d’introduction de la PARTIE A – Première rencontre avec la Deep Philosophy, l’auteur Ran Lahav amorce son texte avec ce constat : « Il n’est pas facile de donner un compte rendu systématique de la Deep Philosophy ». Dans le paragraphe suivant, il écrit : « Néanmoins, un tel exposé, même s’il est quelque peu forcé, pourrait contribuer à éclairer la nature de la Deep Philosophy, pour autant qu’il soit compris comme une esquisse approximative ». Je suis à la première page du livre et j’apprends que l’auteur m’offre un exposé quelque peu forcé et que je dois considérer son œuvre comme une esquisse approximative. Ces précisions ont réduit passablement mon enthousiasme. À partir de là, ma lecture fut un devoir, une obligation, avec le minimum de motivation.

Article # 96 – Se réaliser – Petite philosophie de l’épanouissement personnel, Michel Lacroix, (Marabout), Éditions Robert Laffont, 2009

J’ai beaucoup aimé ce livre de Michel Lacroix, Se réaliser — Petite philosophie de l’épanouissement personnel. Il m’importe de vous préciser que j’ai lu l’édition originale de 2009 aux Éditions Robert Laffont car d’autres éditions sont parues, du moins si je me rapporte aux différentes premières et quatrièmes de couverture affichées sur le web. Ce livre ne doit pas être confondu avec un ouvrage plus récent de Michel Lacroix : Philosophie de la réalisation personnelle – Se construire dans la liberté parue en 2013 et qui sera l’objet d’une rapport de lecture dans ce dossier.

Article # 97 – Une histoire de la raison par François Châtelet – Entretiens avec Émile Noël, Édition du Seuil, 1992

Personnellement, je me suis limité à lecture du livre car je préfère et de loin l’écrit à l’audio. J’aime le titre donné à ce livre, « Une histoire de la raison », plutôt que « L’histoire de la raison », parce qu’il laisse transparaître une certaine humilité dans l’interprétation.

Article # 98 – La raison, Bertrand Saint-Sernin, Presses universitaires de France, coll. Que sais-je, Paris, 2003

Les ouvrages de la collection Que sais-je ? des PUF (Presses universitaires de France) permettent aux lecteurs de s’aventurer dans les moult détails d’un sujet, ce qui rend difficile d’en faire un rapport de lecture, à moins de se limiter à ceux qui attirent et retient davantage notre attention, souvent en raison de leur formulation. Et c’est d’entrée de jeu le cas dans le tout premier paragraphe de l’Introduction. L’auteur écrit, parlant de la raison (le soulignement est de moi) : « (…) elle est une instance intérieure à l’être humain, dont il n’est pas assuré qu’elle puisse bien fonctionner en situation de risque ou dans un état trouble ».

Article # 99 – Philosophie de la réalisation personnelle – Se construire dans la liberté, Michel Lacroix, Éditions Robert Laffont, 2013

Dans son livre « Philosophie de la réalisation personnelle – Se construire dans la liberté », le philosophe Michel Lacroix s’engage clairement en faveur du développement personnel. Il le présente comme l’héritier des efforts déployés par la philosophie dans le domaine de la réalisation de soi au cours siècles passés. À mon avis et si c’est effectivement le cas, le mouvement du développement personnel a vite fait de dilapider cet héritage de la philosophie en le déchiquetant en petits slogans vide de sens.

Article # 100 – Vivre dans un monde où tout un chacun se donne raison, en réponse à l’article « L’art de couper les cheveux en quatre » d’Alexandre Lacroix publié dans Philosophie magazine, juin 2024

Dans le dossier de son édition de juin 2024, Philosophie magazine tente de répondre à cette question en titre : « Comment savoir quand on a raison ? » Il n’en fallait pas plus pour me motiver à l’achat d’un exemplaire chez mon marchand de journaux.

Article # 101 – Loin de moi – Étude sur l’identité, Clément Rosset, Les Éditions de Minuit, 1999

Le texte en quatrième de couverture de LOIN DE SOI de CLÉMENT ROSSET confronte tous les lecteurs ayant en tête la célèbre maxime grecque gravés sur le fronton du temple de Delphes et interprété par Socrate : « Connais-toi toi-même » : « La connaissance de soi est à la fois inutile et inappétissante. Qui souvent s’examine n’avance guère dans la connaissance de lui-même. Et moins on se connaît, mieux on se porte. » ROSSET, Clément, Loin de moi – Étude sur l’identité, Les Éditions de Minuit, 1999, quatrième de couverture.

Article # 102 – Penser par soi-même, Sous la direction de Maud Navarre, Sciences Humaines Éditions, 2024

Avec ses dix-sept articles de différents auteurs, le recueil PENSER PAR SOI-MÊME , sous la direction de MAUD NAVARRE, docteure en sociologie et journaliste scientifique, chez SCIENCES HUMAINES ÉDITIONS paru en 2024, complète et bonifie généreusement le dossier du même nom de l’édition de mars 2020 du magazine Sciences Humaines.

Article # 103 – Éloge du point d’interrogation – Tous philosophes ? Patrick Moulin, Les Éditions du Net, 2022

Je n’ai pas aimé ce livre en raison de mon aversion face au style d’écriture de l’auteur. J’ai abandonné ma lecture au trois quarts du livre. Je n’en pouvais plus des trop nombreuses fioritures littéraires. Elles donnent au livre les allures d’un sous-bois amazonien aussi dense que sauvage où il est à charge du lecteur de se frayer un chemin, machette à la main. Ce livre a attiré mon attention, l’a retenue et l’auteur pouvait alors profiter de l’occasion pour communiquer avec moi. Mais les ornements littéraires agissent comme de la friture sur la ligne de cette communication. J’ai finalement raccroché.

Article # 104 – Grandeur et misère de la modernité, Charles Taylor, Coll. L’essentiel, Éditions Bellarmin (Éditions Fides), 1992

Notre place dans le monde s’inscrit dans notre identité. Construire sa propre philosophie de vie bonne exige non seulement de se connaître soi-même mais aussi de connaître le monde dans lequel nous existons. C’est l’« Être-au-monde » selon de Martin Heidegger. Bref, voilà donc pourquoi cet Observatoire de la philothérapie – Quand la philosophie nous aide dépasse son sujet avec le livre GRANDEUR ET MISÈRE DE LA MODERNITÉ du philosophe CHARLES TAYLOR paru en 1992, il y a plus de trente ans.

Article # 105 – La philosophie antique comme exercice spirituel ? Un paradigme en question, Sylvain Roux, Les Belles Lettres, 2024

J’aime beaucoup ce livre. Tout philosophe se doit de le lire. Voici une enquête essentielle, à la fois très bien documentée, fine et facile à suivre. Elle questionne la conclusion du philosophe Pierre Hadot à l’effet que la philosophie est une manière de vivre. Sous le titre « La philosophie comme exercice spirituel ? – Un paradigme en question », le professeur de philosophie ancienne à l’université de Poitiers, Sylvain Roux, déterre les racines de la philosophie pour en montrer leur enchevêtrement

Article #106 – Crise de soi – Construire son identité à l’ère des réseaux sociaux et du développement personnel, Thierry Jobard, coll. Amorce, Éditions 10/18, 2024

L’essayiste Thierry Jobard nous propose trois ouvres : 1. CONTRE LE DÉVELOPPEMENT PERSONNEL (voir mon rapport de lecture); 2. JE CROIS DONC JE SUIS : LE GRAND BAZAR DES CROYANCES CONTEMPORAINE; 3. CRISE DE SOI – CONSTRUIRE SON IDENTITÉ À L’ÈRE DES RÉSEAUX SOCIAUX ET DU DÉVELOPPEMENT PERSONNEL. — Avec ce troisième essai, Thierry Jobard approfondit encore davantage son sujet démontrant ainsi une maîtrise de plus en plus grande des aléas de l’identité, cette fois-ci, sous l’influence des réseaux sociaux et du développement personnel.

Article #107 – Le parler de soi, Vincent Descombes, Collections Folio. Essais, Éditions Gallimard, 2014

Si vous avez aimez cet extrait, vous aimerez ce livre car il est représentatif de l’ensemble de l’œuvre. Personnellement, je cherchais des indices pour répondre à la question « Qui suis-je ? » et ce livre n’en offre pas. En revanche, j’aime bien quand un auteur remonte à la source de son sujet et le retrace dans le contexte historique. Vincent Descombes excelle en ce sens dans PARLER DE SOI. C’est pourquoi je me suis rendu jusqu’à la page 248 des 366 pages de son texte (Appendices exclues) avant d’abandonner ma lecture. J’aime bien m’informer de l’histoire d’une idée comme le fait si bien Vincent Descombes mais la vue sous microscope du fil historique de chaque détail a fini par me lasser. J’ai tenu bon dans l’espoir de me faire une vision d’ensemble de l’évolution du concept mais je ne suis pas parvenu à prendre le recul utile face à une telle multitude de détails.

Article #108 – La philosophie fait-elle votre bonheur ? Dossier, Revue Les Libraires, no 145, 2024

Peut-être vous dites-vous : « La philosophie, pas pour moi, non merci! » Pourtant, à partir du moment où une question germe dans votre tête et que vos neurones s’activent à faire des liens, à envisager des hypothèses, à analyser les pour et les contre, à réfuter certaines pistes, à emprunter d’autres foulées, à mettre en parallèle ou en confrontation des idées, vous êtes en train de philosopher.

Article #109 – Quatre moyens d’en finir avec la pointeuse, Clara Degiovanni, Dossier / “Comment trouver le bon rythme ?”, Philosophie magazine, no 183, octobre 2024

CITATION « 4. Raconter sa journée / 18 heures. Vous rejoignez un ami pour prendre un verre après le travail. Vous lui racontez votre journée, qui était finalement très réussie. Intéressé et sincèrement content pour vous, il vous invite à évoquer les perspectives qui s’offrent à vous dans votre entreprise actuelle. »

Article #110 – Pascal Chabot-Hélène L’Heuillet : silence, ça pulse !, propos recueillis par Cédric Enjalbert, Dossier / “Comment trouver le bon rythme ?”, Philosophie magazine, no 183, octobre 2024

Philosophe, spécialiste du burn-out, Pascal Chabot vient de publier une enquête cherchant Un sens à la vie et montrant qu’il est toujours ouvert et dynamique. Hélène L’Heuillet, philosophe et psychanalyste, fait non seulement reparaître son Éloge du retard mais elle signe également un ouvrage sur Le Vide qui est en nous. Ensemble, ils montrent comment rythme de vie et sens de la vie se répondent !

Article #111 – Émile Durkheim : l’individu, ferment de la société, par Athénaïs Gagey, Philosophie magazine, no 183, octobre 2024

Fondateur de la sociologie moderne, Émile Durkheim pense l’individu comme la partie d’un tout. Alors que les fractures sociales sont légion dans notre société, sa lecture est une proposition pour tenter de (re)faire société.

Article #112 – Histoire de la pensée philosophique – De l’homme grec à l’homme post-moderne, Jean-Marie Nicolle, Bréal, 2015

Le livre « Histoire de la pensée philosophique – De l’homme grec à l’homme post-moderne » par Jean-Marie Nicolle se classe parmi les meilleurs, sinon comme le meilleur, que j’ai pu lire. Jean-Marie Nicolle fait preuve d’une maîtrise quasi absolue de son sujet et en témoigne par des explications simples dans une écriture compréhensible par tous accompagnée de graphiques fort utiles. Ce livre rempli toutes ses promesses.

D’AUTRES ARTICLES SONT À VENIR

Article # 94 – L’étonnement philosophique – Une histoire de la philosophie, Jeanne Hersch, Gallimard, coll. Folio Essai, 1993

Article # 94

J’AI LU POUR VOUS

L’étonnement philosophique

Une histoire de la philosophie

Jeanne Hersch

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L’étonnement philosophique

Une histoire de la philosophie

Jeanne Hersch

Gallimard, Collection Folio Essais (n° 216)

Première édition française

Date de parution : 25 juin 1993

Réimpression : juin 2023

Langue  : ‎Français

Poche ‏ :‎ 464 pages

ISBN-10 ‏ : ‎2070327841

ISBN-13 ‏ : ‎978-2-07-032784-3

Poids de l’article ‏ : ‎242 g

Dimensions ‏ : ‎11 x 1.9 x 18 cm


Publié pour la première fois en 1981 :

(Das philosophische Staunen (l’Etonnement philosophique), Zürich, Benziger; Munich, Piper, 1981, 354 p.)


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J’accorde 5 étoiles sur cinq au livre L’étonnement philosophique :
Une histoire de la philosophie de Jeanne Hersch paru chez Gallimard, Collection Folio Essais (n° 216) en 1993.

J’en recommande la lecture.

Lire mon rapport de lecture à la suite la présentation du livre et de son auteur


Texte en quatrième de couverture

L’originalité de cet ouvrage, très vite devenu une référence, est de réorganiser le développement de la philosophie en Occident à partir, non plus de ses principales thèses, mais de sa nature même, de son objet premier : l’étonnement.

L’étonnement est cette capacité qu’il y a à s’interroger sur une évidence aveuglante. La première des évidences est qu’il y a de l’être, qu’il existe matière et monde. De cette question apparemment toute simple est née voilà des siècles en Grèce un type de réflexion qui depuis lors n’a cessé de relancer la pensée : la philosophie.

L’histoire de cet étonnement, toujours repris, sans cesse à vif, continûment reformulé, Jeanne Hersch nous la raconte à partir de quelques philosophes occidentaux : les présocratiques, Socrate, Platon, Aristote, les épicuriens, les stoïciens, saint Augustin, Thomas d’Aquin, Descartes, Spinoza, Leibniz, Locke, Kant, Hegel, Comte, Marx, Freud, Bergson, Kierkegaard, Nietzsche, Husserl, Heidegger, Jaspers. Aussi cette histoire de la philosophie nous dit-elle, en réalité, comment la philosophie fut en tout temps, actuelle.


Jeanne Hersch (juillet 1910 – juin 2000 à Genève) fut pendant vingt ans professeur de philosophie à l’université de Genève. Elle dirigea la division de philosophie à l’Unesco et publia, entres autres ouvrages, L’illusion philosophique, L’être et la forme, Idéologie et réalité, Le droit d’être un homme, Éclairer l’obscur. Elle a traduit Philosophie de Karl Jaspers.


TABLE DES MATIÈRES

Avertissement

L’École de Milet : Thalès (environ 600 av. J.-C.)

Ecole ionienne et Ecole éléate : Héraclite (env. – 550-480 av. J.-C.) et Parménide (env. 500 av. J.-C.)

Zénon (env. 490 – 430 av. J.-C.)

Socrate (470-430 av. J.-C.)

Platon (427-347 av. J.-C.)

Aristote (384 -322 av. J.-C.)

Les Épicuriens (IVème et IIIème siècles av. J.-C.)

Les Stoïciens (IIIème siècle av. J.-C.)

Saint Augustin (354 – 430 ap. J.-C.)

La philosophie médiévale

Thomas d’Aquin (1225 – 1274)

La Renaissance (XVème et XVIème siècles)

René Descartes (1576-1650)

Spinoza (1632-1650)

Leibniz (1646-1716)

L’empirisme anglais

John Locke (1632-1704)

George Berkeley (1685-1753)

David Hume (1711-1776)

Emmanuel Kant (1724-1804)

De Kant à l’idéalisme allemand

Georg Wilhelm Friedrich Hegel (1770-1831)

Auguste Comte (1789-1857)

Karl Marx (1818-1883)

Sigmund Freud (1873-1939)

Henri Bergson (1859-1941)

Sören Kierkegaard (1813-1900)

Friedrich Nietzsche

Après Kierkegaard et Nietzsche

Edmund Husserl (1859-1938)

Martin Heidegger (1889-1976)

Karl Jaspers (1883-1969)

La philosophie aujourd’hui


EXTRAIT

AVERTISSEMENT

Le présent ouvrage n’est pas une histoire traditionnelle de la philosophie. Je vais seulement tenter de montrer, à propos de quelques exemples choisis dans plus de deux mille ans de pensée occidentale, comment et à propos de quoi certains hommes ont été saisis d’étonnement, de cet étonnement dont la philosophie est née.

Quelle a été la nature, quelle a été l’occasion de cet étonnement ? Comment s’est-il exprimé ?

Il ne m’est pas possible ici de le suivre à la trace de façon continue, d’établir un exposé relativement complet. Je ferai délibérément un choix pour m’attacher à quelques points de repère, quelques tournants de la pensée, quelques moments privilégiés où un regard plus neuf ou plus naïf a fait surgir les quelques questions essentielles qui, désormais, ne cessent de se poser pour peu qu’on renonce à les dissimuler par le bavardage ou la banalité.

Savoir s’étonner, c’est le propre de l’homme. Il s’agit ici de susciter à nouveau cet étonnement. Le lecteur, je l’espère, retrouvera sa capacité d’étonnement dans l’étonnement d’autrui. Il saura le reconnaître. Il dira : « Oui, c’est bien ça. Comment se fait-il que je ne me sois pas encore étonné à ce sujet ? »

Tel est chez l’homme le processus créateur, capable d’amener le lecteur à philosopher lui-même.

J’espère aussi, chemin faisant, lui transmettre un minimum de moyens qui lui permettront d’exprimer son étonnement, ou du moins de lire les textes de ceux qui se sont « étonnés » avant lui.

Mais l’homme du XXe siècle peut-il encore « s’étonner » ou même s’émerveiller ? Nous vivons à l’âge de la science. Nous croyons presque tout savoir, ou du moins pouvoir tout savoir. Et pourtant, il y a toujours et il y aura toujours des êtres humains pour s’étonner. L’étonnement est essentiel à la condition d’homme. Il ne suffit pas d’être le contemporain de grands hommes de science pour échapper déjà à l’ignorance. Et parmi les physiciens eux-mêmes, il y en a qui continuent à s’étonner — non les « demis » ou les « quarts » de

physiciens, mais les plus grands. Leurs œuvres sont pleines d’un étonnement métaphysique et philosophique, semblable à celui des enfants. «… Comme des enfants…», dit la Bible, c’est ce que nous devons devenir pour comprendre de quoi il s’agit. Il nous faut dépouiller l’arrogance adulte, qui considère tout le passé avec condescendance, du haut de la magnificence de la science moderne.

Nous traiterons d’abord de l’étonnement des hommes qui vécurent au début de la période antique grecque, et qui « s’étonnèrent » autour du VIe siècle avant J.-C., en Grande-Grèce, en Asie Mineure, en Sicile. Nous ne nous hâterons pas de juger : « Quelles sottes questions ils ont posées, et quelles sottes réponses ils ont trouvées ! Tout cela n’a plus aucun intérêt pour nous aujourd’hui. »

Nous ne parlerons pas de la philosophie en général, mais nous nous attacherons à tel ou tel philosophe pour apprendre à connaître sa manière de s’étonner et surmonter ainsi l’étrangeté supposée de la philosophie. Chacun d’entre nous possède en vérité une certaine expérience philosophique qui lui est propre : chaque fois que nous nous trouvons devant une véritable décision à prendre, nous nous interrogeons nous-mêmes, sans le savoir, philosophiquement. Les enfants, autour de leur cinquième année, posent des questions philosophiques ; les jeunes de quinze ou seize ans aussi.

Nous nous garderons donc de toute condescendance face aux penseurs du passé, fût-ce les plus anciens. En vérité leur étonnement philosophique radical, qui en leur temps était tout neuf, témoigne de la force créatrice et de la capacité d’invention de l’homme. C’est ce qui leur a permis de poser leurs étranges questions. Ils étaient de très grands esprits. Ne l’oublions pas. Dès le début, nous avons affaire à des philosophes capables d’étonnement, capables de dépasser ce qui, dans la vie quotidienne, va sans dire pour poser des questions fondamentales.


REVUE DE PRESSE

Jeanne Hersch, L’étonnement philosophique par Robin Guilloux, Université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne, Graduate Student, professeur de Lettres et de Philosophie à la retraite de l’Education nationale.


AU SUJET DE L’AUTEUR

Jeanne Hersch

(1910-2000)
"Licence: CC BY-SA 4.0. You must give appropriate credit (Library Am Guisanplatz, Collection Rutishauser), provide a link to the license, and indicate if changes were made." Quote from [2]
« Licence: CC BY-SA 4.0. You must give appropriate credit (Library Am Guisanplatz, Collection Rutishauser), provide a link to the license, and indicate if changes were made. » Quote from [2]

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Jeanne Hersch (née le 13 juillet 1910 à Genève et morte le 5 juin 2000 dans la même ville) est une philosophe suisse, reconnue internationalement, dont l’œuvre a pour centre la notion de liberté et les concepts qui s’y rattachent. Elle a été professeure de philosophie à l’université de Genève, directrice de la division philosophique de l’UNESCO, et représentante de la Suisse au conseil exécutif de cette même organisation. Wikipédia

Œuvres

Jeanne Hersch est l’autrice d’une quinzaine d’ouvrages. Malgré sa retraite en 1977, elle a continué à écrire ; c’est même de cette période que datent certains de ces ouvrages les plus importants, notamment Éclairer l’Obscur. Ce titre résume sa démarche telle qu’elle l’a expliquée à la fin du long entretien accordé à la Télévision romande en 1972 : la clarté de la parole est le meilleur moyen de révéler la profondeur et la complexité d’un concept, comme une torche qui éclaire le fond d’un puits, dit-elle (En Direct avec, 21 février 1972, entretien avec Gaston Nicole et Roland Bahy, archives RTS). En 1993 paraît L’Étonnement philosophique, dans lequel elle refait l’histoire de la philosophie à partir de l’étonnement, compris comme capacité fondamentale d’interroger et de mettre en doute les évidences.

1936 : L’Illusion philosophique, Plon, 1964 [1936].
1940 : Temps alternés, Metropolis, 1990, (ISBN 2-88340-009-1).
1946 : L’être et la forme, La Baconnière, 1946.
1956 : Idéologies et réalité. Essai d’orientation politique, Plon, 1956
1956 : Traduction du polonais en français de Sur les bords de l’Issa, de Czesław Miłosz
1968 : Le droit d’être un homme, UNESCO, Payot, 1956.
1978 : Karl Jaspers, Éd. L’Âge d’Homme, poche, 2007 [1978], (ISBN 2-8251-1727-7)
1981 : L’étonnement philosophique (De l’école Milet à Karl Jaspers, Poche, Gallimard, 1999 [1981], (ISBN 2-07-032784-1))
1981 : L’ennemi c’est le nihilisme, Genève, Georg, 1981.
1985 : Textes, Fribourg, Le feu de nuict (sic), 1985
1986 : Éclairer l’obscur, Lausanne, l’Âge d’Homme, 1986
1986 : Traduction en français de Philosophie, de Karl Jaspers
1986 : Temps et musique, Fribourg, Le feu de nuict ( [sic]), 1986
1991 : La Suisse, État de droit : le retrait d’Elisabeth Kopp, (J. Hersch, Dir.) Lausanne, L’Âge d’Homme, 1991 (ISBN 2-8251-0186-9).
2008 : L’exigence absolue de la liberté : textes sur les droits humains (1973-1995), MētisPresses, coll. « Voltiges », 2008 (ISBN 2-940406-06-5).

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Jeanne Hersch, l’exigence de la liberté

TOLERANCE ENTRE LIBERTE ET VERITE – Jeanne Hersch, Philosophica 65 (2000, 1) pp. 71-78 (PDF)

Le point de vue philosophique de Jeanne Hersch sur les droits de l’homme par Giacomoa Costa (PDF)

Hommage à Jeanne Hersch par François-Xavier PUTALLAZ*, Sion (PDF)

Le droit d’être un homme – Recueil de textes – Préparé par Jeanne Hersch (PDF)

LE POIDS DU POUVOIR ET LA LIBERTE par Jeanne Hersch – Philosophica 52 (1993, 2) pp. 45-48 (PDF)




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Mon rapport de lecture

L’étonnement philosophique

Une histoire de la philosophie

Jeanne Hersch

Gallimard, Collection Folio Essai, 1993

J’aime beaucoup ce livre. Les nombreuses mises en contexte historique en lien avec celui dans lequel nous sommes aujourd’hui permettent de mieux comprendre cette histoire de la philosophie et d’éviter les mésinterprétations. L’auteure Jeanne Hersch nous fait découvrir les différentes étonnements philosophiques de plusieurs grands philosophes à l’origine de leurs quêtes d’une meilleure compréhension de l’Être et du monde.

À la lecture de ce livre, j’ai situe beaucoup mieux la philosophie dans le monde des idées, des idées qui innovent, des idées qui se complètent, des idées qui se contredisent, des idées qui questionnent, des idées qui critiquent d’autres idées… Dans ce contexte, les hypothèses développées par les philosophes au cours des siècles demeurent subjectives, sous l’influence de la subjectivité des philosophes. Par conséquent, chacun de nous peut exercer sa liberté d’adhésion aux différentes hypothèses. Je comprends mieux le profit de notre liberté dans ma propre compréhension des différentes philosophies, des différents mouvements philosophiques, et de ma propre subjectivité. Ce qui retient mon attention me livre de sérieux indices sur ma subjectivité.

Cette liberté fut mon étonnement philosophique au cours de cette lecture. Je n’ai plus à m’imposer une adhésion obligatoire parce que je comprends l’objectivité de l’hypothèse avancée par l’un et l’autre des philosophes. Je m’illusionnais. Jeanne Hersch m’a libéré et je suis désormais fort aise de comprendre ou non la logique de chaque philosophe pour m’attarder librement aux idées suggérées par les philosophes.

C’est sans doute le recul exercé par Jeanne Hersch qui me donne cette nouvelle liberté. Elle ne propose pas l’histoire de la philosophie mais bel et bien «Une histoire de la philosophie». On relève dans ce sous titre de son ouvrage une certaine distance face à sa propre compréhension de l’histoire de philosophie. D’ailleurs, Jeanne Hersch ne se gêne pas pour commenter personnellement ici et là certaines idées historiques de la philosophie.


L’École de Milet : Thalès (environ 600 av. J.-C.)

Dans ces temps anciens, la profession de « philosophe » n’existait pas. Les philosophes étaient en même temps des savants, des mathématicien, des géomètres, des astronomes. Ils s’intéressaient aux éclipses du soleil et de la lune, aux nombres et aux calculs, aux figures de la géométrie et à leurs propriétés. Ainsi l’école philosophique la plus ancienne, la célèbre École de Milet, en Asie Mineure, a été fondée par Thalès, l’inventeur du théorème faisant du cercle le lieu géométrique des angles droits construits sur un segment de droite.

Il s’agit donc de puissants esprits, qui étaient, par rapport au savoir de leur temps, des esprits universels. Ce qui suscita avant tout leur étonnement, ce fut le changement. Nous visons dans un monde où tout ne cesse de changer. (…)

La première question se pose à peu près ainsi : « Qu’y a-t-il donc qui persiste à travers tout le changement ? » La première réponse philosophique donnée à cette question fut la suivante : c’est la substance qui persiste dans tout ce qui change et ne cesse de passer. Il doit bien y avoir quelque chose qui se maintient dans l’être ; sinon, il n’y aurait depuis longtemps plus rien.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, l’École de Milet, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 11-12.

Ecole ionienne et Ecole éléate : Héraclite (env. – 550-480 av. J.-C.) et Parménide (env. 500 av. J.-C.)

En ces temps anciens, on s’est encore posé d’autres problèmes, par exemple celui du temps qui passe. On ne le pose pas encore directement, mais en liaisons avec les cycles de l’univers — une idée d’origine orientale, que d’anciens philosophes lièrent à celle de l’éternel retour. Ils supposèrent un vaste cycle universel, englobant la totalité des changements, et comme ils admettaient rien ne se perd, ils admirent un perpétuel recommencement, un « éternel retour ».

Nous allons maintenant considérer deux écoles, contemporaines et contrastées, l’École ionienne, dont le grand philosophe fut Héraclite, et l’École éléate, dont le grand philosophe fut Parménide.

(…)

Héraclite reprend la question posée à Milet : Qu’est-ce qui persiste à travers le changement ? Sa réponse : le changement lui-même.

Le changement, c’est l’être des choses. (…)

(…)

Retenons donc ceci : Héraclite met l’accent sur le multiple, sur les contraires, sur le changement, sur le combat, sur l’écoulement. La seule substance, c’est pour lui le changement lui-même. Mais il y a un principe régulateur, le logos.

Parménide était contemporain  d’Héraclite et son grand adversaire. Il fonda l’École éléate.

La pensée d’Héraclite se développe à partir du monde qu’il a sous les yeux, du changement, des données sensibles, de l’univers naturel. La pensée de Parménide se fonde sur les exigences de la logique. Il affirme avec une puissance exceptionnelle les principe d’identité et il l’installe dans l’être même. Ainsi les impossibilités logiques so9nt du même coup des impossibilité ontologiques (au niveau de l’être). Il dit : Je peux dire « L’être est », mais je ne peux pas dire « les non-être est ». Pourquoi ? Parce que ce serait une contradiction, ce serait me contredire.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Héraclite et Parménide, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 14-18.

Zénon (env. 490 – 430 av. J.-C.)

Zénon d’Élée fut un disciple de Parménide. Il inventa des sophismes et des paradoxes. En grec, sophos signifie « sage » ; les sophismes sont des raisonnements qui ont l’air vrais et qui sont pourtant manifestement faux. Il y a eu recours pour venir en aide à son maître.

Quand Parménide disait : seul l’être existe, il n’y a pas de non-être, le devenir et l’éphémère n’appartiennent qu’au domaine de l’opinion, non de la vérité. ses paroles heurtaient par trop l’expérience quotidienne des hommes. Zénon, pour combattre cette évidence empirique trop puissante, entreprend de montrer que si le mouvement et le changement règnent en effet sur notre expérience de la réalité, nous sommes pourtant incapables de les penser.. Toute une série de sophisme lui serviront à la prouver. En voir un exemple, particulièrement simple et beau : un archer tend son arc et fait partir une flèche. Cette flèche trace une trajectoire dans l’espace. Zénon, fait observer ceci : vous voyez cette flèche. À un certain instant, elle se trouve en un lieu A de sa trajectoire. Un peu plus tard, elle occupe le lieu B. Entre les deux, elle a occupé un lieu A, et entre le lieu A et le lieu A, elle a occupé un lieu A ». A tout instant, la flèche a occupé un lieu déterminé.

(…)

Zénon touche ainsi, avec une simplicité qui émerveille, la problématique du mouvement en son centre.

(…)

Zénon d’Élée nous montre que, tout bien considéré. nous ne pensons pas le mouvement. Certes, nous voyons voler la flèche, mais nous ne pouvons pas penser son mouvement parce que notre esprit est fait pour l’immuable, l’identique, l’éternel. Et pourtant, nous voici vivant et peinant dans ce monde où tout est éphémère et changeant.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Zénon, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 23-24.

Socrate (470-430 av. J.-C.)

Socrate était d’origine modeste. On a souvent fait de lui un portrait contrasté avec celui de son disciple, Platon. Platon, aristocrate, beau comme un dieu, Socrate, lourd et laid. Il n’était pas un grand orateur, selon le goût antique. Seul de toute la tradition philosophique européenne, il n’a pas écrit une ligne. Et pourtant, c’est ce philosophe qui a exercé la plus forte influence au cours des siècles.

Pourquoi n’a-t-il rien écrit ? On peut supposer que ce fut parce qu’il ne croyait pas à une vérité séparable de celui qui l’énonce et de l’instant où elle est énoncée.

Pour lui, les « vérité » ne sont pas comme des choses, elles sont philosophiques. Qu’est-ce donc un vérité philosophique ?

Une vérité philosophique n’est pas simplement un énoncé se rapportant de façon adéquate à un état de fait objectif, indépendamment de celui qui parle ou qui écrit. C’est un énoncé par lequel un être humain responsable, libre, assume une vérité, la fait sienne, la fait « vérité » par la manière dont il s’engage envers elle. C’est dire que pour Socrate, une vérité dite théorique est toujours en même temps une vérité pratique, qui dépend de celui qui la saisit — de l’action qu’elle exerce sur lui, de ce qu’elle fait de lui. On l’appellerait aujourd’hui vérité existentielle.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Socrate, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 27.


La question principale posée par Socrate fut : comment faut-il vivre pour vivre selon le bien ? Nous le voyons : sa préoccupation centrale est bien différente de celle des penseurs précédents. Il est le premier à s’être étonné de cette obligation qu’a l’être humain de diriger sa vie, d’orienter ses actes vers le bien, selon des voies qu’il lui faut trouver lui-même.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Socrate, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 29.


Selon Socrate, donc, nous ne faisons le mal que par ignorance. Par conséquent, si nous voulons connaître le vrai et développer en nous notre exigence du vrai, il nous faut co9mmencer par travailler sur nous-mêmes. D’où la célèbre maxime de Socrate : « Connais-toi toi-même ». Connais-toi toi-même, la formule n’a rien à voir avec des interprétations psychanalytiques, avec l’introspection, avec la contemplation intérieure.

Nous connaître nous-même, cela signifie : découvrir en nous la racine la plus profonde de notre sens pour le vrai, mais aussi les faiblesses et les manques de cette racine ; découvrir également notre non-savoir ; nos tendances à l’illusion ; notre penchant à nous tromper nous-mêmes. Tout cela est contenu dans le « Connais-toi toi-même ».

Il ne s’agit pas d’un simple regard dans le miroir de la réflexion, d’une façon de se voir et de se décrire. Il s’agit d’une action. Ici encore, au cœur de l’influence socratique s’unissent théorie et pratique.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Socrate, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 31-32.

Platon (427-347 av. J.-C.)

Les Idées

Toute prétention à une connaissance, toute possession d’un savoir doit être en quelque sorte traversée et dépassée afin que soit aiguisé par là le sens que nous avons du vrai, du bien. Telle est l’intention centrale de la pensée platonicienne. Au coeur de cet enseignement, nous trouvons la théorie des idées. Platon est le philosophe des Idées.

On peut dire que Platon a repris l’ancien problème posé par l’école de Milet : qu’est-ce qui persiste à travers le devenir éphémère ? Tout passe, tout ce que nous percevons à travers nos sens finit par dépérir et disparaître. Qu’y a-t-il donc de permanent ? Réponse de Platon : ce sont les Idées. Que sont-elles, ces Idées ? Elles sont la vraie vérité, celle dont dérive l’être des choses dans le monde.

Les Idées ne sont pas « réelles » dans le même sens que les choses. Elles sont, en un, être et valeur. Elles sont source de l’être des choses, et, en même temps, source du bien. L’être est en même temps valeur. L’être est valeur. Être, c’est valoir.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Platon, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 37-38.


Au niveau des choses sensibles, nous ne pouvons, selon Platon, avoir que des opinions, plus ou moins probables, puisque le réalité empirique elle-même appartient au domaine de l’approximation. La connaissance vraie n’existe qu’au niveau des Idées. L’homme se tient dans l’entre-deux, entre le monde sensible et les Idées. Il ne peut pas renoncer aux idées car – qu’il veuille ou non – elles lui sont essentielles; il ne peut pas davantage négliger les choses sensibles car – qu’il le veuille ou non – c’est à travers elles qu’il doit cherche à se ressouvenir.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Platon, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 41.

Aristote (384 -322 av. J.-C.)

Le système d’Aristote représente un sommet, mais un sommet d’une sorte différente de l’œuvre de Platon. Celle-ci domine la pensée philosophique par son intensité et sa profondeur. La réflexion qu’elle exige fait mûrir l’esprit dans toutes les directions.

Chez Aristote, nous trouvons l’une des trois grandes synthèses réalisées par la pensée philosophique au cours de son histoire. Dans l’Antiquité, au Moyen-Âge, à l’époque moderne, il y eut chaque fois un philosophe pour tenter d’unifier en un système tout le savoir de son temps : Aristote, Thomas d’Aquin, Hegel. Leurs œuvres constituent les trois plus grands système de la pensée européenne.

Systèmes

Il ne faudrait pas s’y tromper : aucun des ces synthèses ne représente un simple somme de savoir, ni même une simple mise en ordre du savoir à l’intérieur du système, qui serait comme une armoire bien rangée. Un système, c’est autre chose, c’est un concept, en philosophie, assez difficile à cerner.

Certains philosophes ont horreur de tout système, nécessairement mensonger par nature à leur yeux : l’image qu’ils donnent d’un savoir unitaire se refermant sur lui-même est contraire dans son essence à une pensée vraiment philosophique. (…)

D’autres penseurs, à l’inverse, comme par exemple Aristote, refusent, au nom de l’exigence philosophique elle-même, de s’en tenir à des problèmes partiels ou ponctuels, et leur réflexion a besoin de s’achever dans un tout. Ils considèrent que toute démarche philosophique a pour tâche de donner forme à une totalité.

Aujourd’hui, on abuse souvent du concept de totalité, mais bien employé il remplit en philosophie une fonction légitime et nécessaire. L’esprit philosophique naît de l’unité d’une personne. Il témoigne de l’unité d’un processus de pensée. La signe extérieur de l’unité d’un sujet spirituel, c’est justement la forme unitaire qu’il donne à ce que sa pensée produit. Cette unité qu’il nous présente, c’est justement son système. Un système, c’est l’invention, la création d’une forme. Pour un penseur systématique, tout le savoir de son temps, qu’il organise en un système, est comme le matériau dont se sert un artiste. Il donne forme par le système, qui est du même coup son interprétation du matériau. Mais il y a plus : la forme systématique imprègne de son sens, en profondeur, toute la matière qu’elle contient.

Rien de plus révélateur que d’approfondir la nature de l’élément systématique des grandes œuvres qui constituent des systèmes. C’est là qu’on peut découvrir, plus encore que dans les énoncés particuliers, la figure essentielle, le « geste » fondamental qui, du point de vue philosophique, caractérise chacune d’elles.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Aristote, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 51-53.


La philosophie, exige Aristote, doit s’interroger sur l’être en tant qu’être.

Nous saisissons ici l’extrême tension de cette pensée entre son intérêt passionné pour réalités concrètes singulières et son exigence philosophique : il faut connaître la cause première, l’être en tant qu’être.

L’être en tant qu’être, nous nous sommes déjà interrogés à son sujet, et au sujet de son rapport avec les réalités éphémères du monde sensible : c’était chez Parménide. La doctrine de l’être, c’est l’ontologie. Poser la question « qu’est-ce que l’être ? », c’est poser une question ontologique.

Aristote appelle l’être en soi, ou l’être en tant qu’être, substance. L’École de Milet se servait de cette notion, Parménide également. Mais Aristote pose la question avec une netteté nouvelle. La substance, l’être en tant qu’être, qui fait que quelque chose est, sera considérée en elle-même. La philosophie devient tentative de connaissance de la substance, donc essentiellement ontologie.

La science a pour objet d’étude ce qui est en mouvement, ce qui passe, ce qui est perceptible par les sens. La philosophie en revanche, en tant qu’ontologie, en tant que métaphysique – ici on peut à peu près employer ces deux mots l’un pour l’autre – vise l’être, qui est immuable. Non pas immuable au sens où il exclurait tout devenir et tout dépérissement, mais au sens où il reste l’être à travers tous les changements. Ceux-ci n’atteignent pas l’être. L’être « porte » les changements, il fait que les choses qui changent sont, mais il est lui-même immuable en tant qu’il est l’être, et rien d’autre.

Il me faut prévenir un malentendu possible. La cause première dans parle Aristote ne doit pas être comprise comme « commencement » du monde. Il ne s’agit pas de cela. Il s’agit de la cause première fondamentale, qui porte dans l’être tout le reste.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Aristote, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 56-57.


Revenons au concept de cause, si central dans la pensée d’Aristote. Au sens moderne, le terme « cause » s’applique dans une série cohérente dont chaque terme est un effet du terme précédent et cause du terme suivant. Chez Aristote, le sens du mot est différent. Ce qu’il appelle cause de quelque chose, c’est en somme une des conditions de réalité de cette chose. Toutes les conditions de la réalité d’une chose s’appellent des causes.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Aristote, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 59.

Les Épicuriens (IVème et IIIème siècles av. J.-C.)

Épicure vécut à la fin du IVème et IIIème siècle. Le poète Lucrèce, qui vécut à Rome au 1er siècle avant J.-C., a développé dans doctrine dans un long et célèbre poème intitulé De rerum natura (De la nature).

La doctrine épicurienne se divise en trois parties.

La première, c’est la canonique ou logique, qui contient l’ensemble des normes et des règles nécessaires à la recherche de la vérité. La seconde, c’est la physique, c’est-à-dire la théorie de la nature, où les normes et les règles de la première partie sont mises en œuvre. La troisième, la plus importante et la raison d’être des deux autres, c’est la morale, qui détermine les buts à poursuivre dans la vie et qui nous donne les moyens de les atteindre.

Selon les épicuriens, le but de la philosophie – de la morale éclairée par la canonique et la physique -, c’est d’aider les hommes à trouver le bonheur. Mais ce qu’ils appelait bonheur, c’était avant tout la sérénité de l’âme. Il s’agit de réaliser un état intérieur de paix, de calme, que les épicuriens appelaient ataraxie. Cette ataraxie, c’était le contraire d’une indifférence, ou d’un laisser-aller. Elle avait pour fondement une radicale indépendance intérieure à l’égard de toute menace qui pourrait survenir, comme aussi à l’égard de toutes les sources de plaisir. Le point central, c’est le refus de s’asservir à quelque chose que ce soit. Devenir dépendant à l’égard d’un plaisir – pas seulement d’une drogue -, c’est devenir vulnérable au-dehors, c’est exposer sa paix intérieure, et donc son bonheur à une menace de privation ; car tout ce qui est extérieur, et à quoi nous sommes tentés de nous soumettre, peut nous être pris.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Les épicuriens, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 73-74.


Le sage est heureux et sûr de son bonheur, car il ne craint aucune perte. Il ne redoute ni la fin du monde, ni la mort, ni les dieux.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Les épicuriens, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 79.

Les Stoïciens (IIIème siècle av. J.-C.)

La structure de la doctrine stoïcienne est semblable à celle de la doctrine épicurienne. Elle aussi comporte trois parties, dont la troisième est la plus importante. Elle a le même but : enseigner comment il convient de vivre. Tout ce qui, en elle, n’est pas d’ordre moral sert en vérité à préparer la morale, C’est la morale (l’éthique) qui est ici l’essentiel, Ici encore on trouve une logique (ou théorie de la connaissance), un physique (ou théorie de la nature), dont on finit par tirer des conclusions quant à un juste comportement des hommes.

La logique stoïcienne est complexe. Nous n’en retiendrons ici qu’un seul élément : ce qu’elle appela l’aperception compréhensive. Ce terme désigne une impression claire, évidente, produite dans l’âme par les choses. Par sa clarté, cette impression emporte le consentement de l’âme, ce qui fonde la savoir et la science. On peut dire que l’aperception compréhensive est une forme particulière de l’«expérience de l’évidence» dont nous sommes capables. Faire l’expérience de l’évidence, c’est saisir par la pensée une représentation synthétique dont les éléments constitutifs imposent la cohérence au point qu’ils forment un tout. Quand nous disons : je saisis, je comprends,, nous déclarons qu’une évidence s’est imposé à notre esprit. Nous avons « vu » une certaines évidence briller entre les éléments divers, avec un éclat qui exclut toute espèce de doute. L’aperception compréhensive, par la clarté avec la quelle son unité synthétique est perçue, s’impose ainsi à l’esprit avec la force de l’évidence.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Les stoïciens, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 80-81.


Il n’y a plus guère aujourd’hui, autour de nous, d’épicuriens ou de stoïciens. Et pourtant il se pourrait que chacun d’entre nous ait encore en lui quelque chose de l’un et de l’autre.

Nous ne pouvons plus être des épicuriens : notre civilisation est trop active, son tissu trop serré, comportant pour chacun trop de chances et de menaces, pour que nous nous contentions de gérer notre compte personnel de plaisir et de douleur. D’autre part, des siècles d’histoire cruelle et douloureux approfondissements nous ont rendus trop vulnérables – et aussi trop conscient de notre vulnérabilité – pour que l’héroïsme impassible des stoïciens nous soit encore accessible.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Les stoïciens, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 86.

Saint Augustin (354 – 430 ap. J.-C.)

(…) Augustin trouve la célèbre formule : credo, ut intelligam. Non pas : je crois, bien que je comprenne, ou bien : je crois mais je veux comprendre, mais à l«,inverse : je crois pour comprendre. Nous saisissons ici ce qui caractérise essentiellement l’attitude du croyant à l’égard de la raison.

Il nous faut aller à la racine. Quiconque se contente de rejeter une telle manière de penser en tant que « dépassée » ou en tant que « démarche philosophique impure » s’interdit toute possibilité de véritable compréhension philosophique. Cette manière de penser ne livre son sens qu’à celui qui consent à la reproduire existentiellement. Au fond, elle n’a de sens que pour le croyant. Le non-croyant qui désire malgré tout saisir ce sens doit par conséquent, dans toute la mesure du possible, imiter intérieurement l’attitude du croyant, faute de quoi il ne lui reste qu’à la mettre de côté – ce qui n’est pas, à vrai dire, une solution philosophique.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Saint Augustin, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 92.


Une courte parenthèse : la remarque que nous venons de faire ne concerne pas le seul problème du temps, elle met en lumière, par cet exemple, un trait essentiel de la pensée philosophique en général. La pensée philosophique ne peut se déployer que lorsque celui qui pense use de sa liberté. Penser philosophiquement, c’est penser avec sa liberté. La liberté n’est pas seulement un « organe » de décision, elle est aussi un « organe » de la pensée. En philosophie, elle fait partie de notre « appareil » de connaissance et de compréhension. C’est pourquoi, quand nous posons un problème philosophique, nous ne pouvons pas en isoler et en objectiver les termes et faire abstraction de nous-mêmes.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Saint Augustin, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 99-100.

La philosophie médiévale – Thomas d’Aquin (1225 – 1274)

Nous reprenons, plus de six cents ans après Augustin, aux environs de 1100, la philosophie médiévale.

Pourquoi la philosophie médiévale porte-t-elle le nom de scolastique ? Ce mot vient du latin schola, qui veut dire « école ». Il s’agit donc d’une philosophie d’école. La pensée scolastique se développe dans le cadre de l’église chrétienne. Elle obéit au principe que nous avons déjà mentionné : Fides quaerens intellectum, « La foi à la recherche de la compréhension ».

Nous verrons que quelques exemples de cette recherche – ce qui ne signifie nullement qu’il s’agisse d’une période où la pensée fut primitive ou maladroite. En fait, les scolastiques, en discutant sur les rapports de la foi et de l’entendement, ont élaboré un langage philosophique dont les concepts sont remarquablement précis et profonds. En comparaison, les moyens d’expression de maints philosophes modernes apparaissent grossiers et simplistes. Il est vrai que les subtiles distinctions des scolastiques ont parfois conduit à une virtuosité artificielle et purement verbale : mais beaucoup de termes qu’ils ont créés pourraient encore donner plus de clarté et de concision au style philosophique contemporain.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, La philosophie médiévale, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 107.

Thomas d’Aquin (1225 – 1274)

Il y a donc pour le théologien quelque chose de donné au départ, et un verrou qui arrête l’interrogation. Dans la philosophie proprement dite, en revanche, qui n’est pas imprégnée de théologie, ni subordonnée à elle, l’interrogation est radicale. Cela signifie que nous pouvons continuer à poser toutes les questions qui se présentent aussi longtemps qu’il s’en présente ; rie nous nous arrêtera ; et nous pouvons poser nos questions avec une énergie telle que nous n’aurons d’égard pour rien d’autre que pour l’exigence de notre quête ; de telle sorte que les résultats de notre réflexion pourront finalement se tourner contre l’autorité, contre ses interprétations, contre le Livre*.

Le chemin de la philosophie n’a probablement pas de fin. Certains philosophes ont tellement écrit que leurs œuvres remplissent à elles seules une bibliothèque – pensons par exemple à Hegel. Peut-être ont-ils tant écrit justement parce que ce qu’ils voulaient vraiment écrire, ils n’ont jamais pu l’exprimer. Au cœur d’un système comme celui de Hegel, une question reste béante. Certains penseurs repoussent les problèmes non résolus vers l’extérieur du système, Chez d’autres, ces problèmes rentent au centre et les répandent de là dans l’œuvre entière. Mais un édifice achevé, statique, qui couronnerait une recherche philosophique, cela n’existe pas.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Thomas d’Aquin, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 124-125.

 * Le « livre » : « (…) la pensée théologique possède au départ un savoir préalable – du moins dans la tradition européenne. Au départ, il y a déjà un Texte sacré, un Livre, une Révélation, une Institution, une Église, donc : des autorités ou une autorité. »

La Renaissance (XVème et XVIème siècles)

On ne peut pas délimiter clairement cette période, pendant laquelle se prépare l’époque moderne.

Elle bouillonne d’idée nouvelles. Institutions, croyances, systèmes de pensée sont contestés ou profondément transformée. Le bouleversement des idées, leur diversité, les attitudes nouvelles, la mise en question des valeurs et de leur hiérarchie, les facteurs de dissolution et de recréation font penser à notre temps. Toutes les interprétations deviennent possibles, même les plus diverses, les plus contradictoires. Des tendances opposées s’affirment simultanément.

Ainsi, l’époque est marquée par une volonté de retour à l’expérience. Alors que la scolastique s’attachait avant tout aux textes (que dit Aristote ? que dit l’écriture ? que dit l’Encyclique ?), des méthodes empiriques s’élaborent, permettant d’interroger directement la nature.

D’autre part, la raison jusqu’alors limitée dans ses démarches par son accord nécessaire avec les dogmes et l’Écriture, se libère totalement et conquiert le droit d’imaginer. (On se plant souvent aujourd’hui de ce que l’intelligence des enfants soit développé au dépend de leur imagination. Mais c’est méconnaître une vérité fondamentale : l’intelligence elle-même doit être imaginative, sinon elle n’est pas intelligence.)

La raison libérée lors de la Renaissance, imagine donc : de nouveaux schèmes de pensée, de nouvelles questions, de nouvelles méthodes. Elle envisage des hypothèses inédites et élabore des modèles neufs.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, La Renaissance, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 126-127.


(…) La Renaissance agite les esprits d’aujourd’hui, avec raison : nous cherchons à travers elle à comprendre où nous allons.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, La Renaissance, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 133.


Nicolas de Cuse (1401-1464)

Il est philosophe que l’on peut considérer comme étant la charnière entre le Moyen Âge et la Renaissance : c’est Nicolas de Cuse, Il a été le dernier grand penseur médiéval. Et pourtant il a été considéré par Bruno, par Kepler, et même plus tard par Descartes, comme celui à qui revient le mérite ou la faute – selon le jugement que l’on porte à ce sujet – d’avoir affirmé que l’univers était infini.

Comment a-t-il acquis cette conviction ? Dès le XIIIè siècle on avait, recourant à une métaphore, décrit Dieu comme étant un sphère dont le centre est partout et la circonférence nulle part. Cette définition reconnaît à Dieu l’ubiquité et le dépouille de toute spatialité.

Nicolas de Cuse transposa cette description de Dieu pour l’appliquer à l’univers. D’après lui, l’univers a son centre partout et sa circonférence nulle part, puisque c’est Dieu qui est son centre et sa périphérie, et que Dieu est partout et nulle part. Cette formulation remarquable montre que la représentation rationnelle de l’univers infini n’a pas été d’abord une découverte de la science, mais qu’elle provient d’une impulsion religieuse : elle est né de l’idée de Dieu, ou plutôt de l’échec de toute idée de Dieu, projeté ensuite sur l’univers. Cela se passait au début de la Renaissance.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, La Renaissance, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 133.

René Descartes (1576-1650)

Pour Descartes, le modèle idéal que la pensée doit tenter de rejoindre, c’est le modèle mathématique.

Cette admiration pour la pensée mathématique, nous la retrouvons constamment chez les philosophes depuis Pythagore. Ce qui provoquait leur admiration, souvent mêlée d’envie, c’était la clarté, la transparence parfaite du raisonnement et l’évidence contraignante, l’apodicticité, qui en résultait.

À notre époque, en revanche, nombreux sont les penseurs qui considèrent avec une certaine condescendance le rationalisme d’un Descartes. Fiers de notre savoir psychologique, de notre psychanalyse, de la conscience que nous avons prise de l’ambiguïté, de la complexité, de l’interpénétration de l’esprit et du corps, de l’individuel et du social, du naturel et de l’historique, etc., nous sommes facilement tentés de juger simpliste la claire pensée classique du XVIIe siècle.

Je voudrais ici au contraire reconnaître que nous ne sommes plus guère capables aujourd’hui de revivre en profondeur l’expérience intellectuelle que l’évidence mathématique représentait pour les penseurs de ce temps. Ils admiraient les mathématiques justement parce qu’elle leur procuraient l’expérience de l’évidence, et que leur sens pour l’évidence était vif, alors qu’en nous il s’est émoussé. Nous apprenons à l’école à démontrer que les trois angles d’un triangle valent deux droits. Une fois la preuve acquise, elle reste inerte dans le cahier ou le livre. Nous n’en vivons pas l’évidence, ou à peine. Nous ne l’intégrons pas dans notre expérience.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, René Descartes, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 136-136.


Pour rester sur le terrain de la certitude, il lui fallait élaborer des concepts et des raisonnements ne permettant aucune erreur. Il pose donc l’exigence des concepts clairs et distincts. Je voudrais insister sur ce point car nous vivons en un temps où beaucoup se servent avec prédilection de concepts confus, gonflée ou ambigus. Un concept est clair lorsqu’il est parfaitement défini, c’est-à-dire nettement délimité par rapport à d’autres concepts. Et un concept est distinct lorsque sa compréhension apparaît à l’esprit avec une parfaite transparence. La clarté préserve pour ainsi dire le pourtour du concepts ; la distinction, ce qui est à l’intérieur de ce pourtour. Il nous faut des concepts clairs et distincts afin que nous puissions penser selon la vérité.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, René Descartes, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 141.

Spinoza (1632-1650)

Baruch de Spinoza naquit à Amsterdam, dans une famille de Juifs portugais, et il passa toute sa vie en Hollande. Pour lui, rien au monde n’avait autant d’importance que l’indépendance de sa pensée et son indépendance d’être humain. Il gagna sa vie en polissant des verres de lunettes. Toute sa vie, il vécut dans une relative pauvreté, et lorsqu’il mourut il fallut que Leibniz et quelques autres amis assument les frais de ses funérailles et s’occupent de ses manuscrits.

Il n’avait, de son vivant, publié que deux œuvres : les Principes de la philosophie cartésienne, et le Traité théologico-politique. Et comme ses œuvres, la seconde surtout, déclenchèrent un vaste scandale, Spinoza résolut de ne plus rien publier. C’est ainsi que la plupart de ses ouvrages ne parurent qu’après sa mort – entre autres son œuvre principale, l’Éthique, l’un des grands chef-d’œuvre de la philosophie occidentale.

Spinoza n,avait que quarante-cinq ans lorsqu’il mourut. Il aurait pu avoir une vie bien différente : on lui avait offert une chaire à l’Université de Heildelberg, l’une des plus fameuse de ce temps. Il refusa, pensant qu’il y perdrait son indépendance, qu’on ne le laisserait pas penser et enseigner ce qu’il croyait.

Indépendance à tout prix, tel est le trait caractéristique de sa vie et de sa pensée. ce trait nous paraît d’autant plus impressionnant que nous considérons la notion dont il a fait le centre de sa philosophie. Cette notion, c’est celle de la nécessité. Indépendance-nécessité, avec un trait d’union, c’est Spinoza.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Spinoza, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 149-150.


(…) Nous nous trouvons dès lors au cœur de la pensée de Spinoza : liberté et nécessité ne font qu’un. Finalement, la liberté est nécessaire, la nécessité est liberté. Mais il nous faut suivre le chemin qui conduit à un tel résultat et qui lui donne son sens.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Spinoza, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 151.


Revenons encore une fois au rapport liberté-nécessité chez Spinoza, pour essayer maintenant de le saisir plus concrètement, grâce à une expérience personnelle.

Chacun d’entre nous, lorsqu’on l’interroge, s’efforce de justifier une décision qu’il a prise en en donnant la ou les raisons. Il arrive cependant que cette décision se soit imposée même sans les raisons qu’il évoque, parce qu’elle s’enracine au plus profond de son être. Lorsqu’il en est saisi, il sent bien que les raisons alléguées, dans être fausses, restent insuffisantes et n’atteignent pas le fond. Il a pris cette décision parce que, étant celui qu’il est, il ne pouvait pas agit autrement.

C’est de cela qu’il s’agit : être libre à un tel point qu’on ne peut agir autrement, c’est vivre la coïncidence de la liberté et de la nécessité. Une telle expérience, qu’il nous arrive de faire dans notre vie personnelle, où nous éprouvons que nous n’aurions pas pu agit autrement, est comme le signe d’une décision jaillie de l’absolu de notre liberté.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Spinoza, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 160-161.

Leibniz (1646-1716)

(…) Aucune science de son temps ne lui resta étrangère. En mathématique notoamment, il a inventé le calcul différentiel. (…)

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Leibniz, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 165.


Chez Descartes , on s’en souvient, la substance de la « chose étendue » (res extensa), c’était l’étendue elle-même des corps, à la différence de l’espace vide, abstrait, de la géométrie, qui n’est qu’un espace conçu. L’étendu, et non l’espace, constituait à ses yeux la véritable essence des corps.

Leibniz s’interroge aussi sur la substance – c’est une que question que nous connaissons depuis l’école de Milet. Mais pour lui, l’étendue ne saurait être la substance des choses. La substance des choses, c’est l’énergie. Il conçoit l’énergie comme le principe de l’activité, un principe qui est constamment en action si on ne l’entrave pas. Leibniz ne part donc pas d’une réalité inerte, pour se demander ensuite comment le mouvement peut intervenir. Au contraire : il part d’un principe d’activité, et il s’agit ensuite de comprendre ce qui peut empêcher d’agir. Ce sont les obstacles qui entravent l’activité qu’il s’agit d’expliquer. Le point de départ, c’est donc une énergie originelle, qui dans son état présent contient en elle le passé tout entier, comme aussi, dans un certain sens, l’avenir. Elle est grosse de tout le possible futur. Pour exprimer cela, Leibniz utilise un concept auquel il donne la plus grande importance : celui de puissance. (On se souvient de l’ «être en puissance » chez Aristote.) L’énergie est l’activité qui contient en elle l’avenir, pour autant que rien ne vienne l’empêcher d’advenir.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Leibniz, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 166-167.

L’empirisme anglais

John Locke (1632-1704)

En abordant la philosophie anglaise, nous changeons de climat.

Deux traits caractérisent ces penseurs : 1) au niveau du savoir, c’est expérience sensible qui est pour eux fondamentale et 2) au niveau de l’éthique, ils s’attachent avant tout à la manière dont les hommes organisent leur vie commune dans la société et l’État.

Ainsi, l’empirisme des Anglais et leur sens civique sont étroitement liés. La plupart des penseurs continentaux se sont intéressés à la fois à la connaissance de l’absolu et à l’action. S’ils croient avoir atteint une certaine connaissance de l’absolu, ils s’efforcent d’en tirer une éthique sociale. Les Anglais, en revanche, développent leurs vertus civiques tout en évitant, dans la mesure du possible, de se référer à un absolu.

Il y a dans l’absolu, à leurs yeux, quelque chose d’exclusif qui s’oppose à l’adaptation, alors que la vie normale dans un État implique que l’on consente à s’adapter. Ils ont donc tendance à faciliter les compromis nécessaires à la vie civile en laissant l’absolu hors du jeu. Ils se fondent sur des constatations et des expérience, ou alors sur des accords ou des traités, qui n’ont rien d’absolu, qui ne prétendent à aucune validité éternelle, et auxquels on peut jusqu’à un certain point s’adapter. On perçoit chez eux une préférence pour ce qui est relatif – qui correspond peut-être, étrangement, à un sens profond qu’implique historiquement concret et d’unique tout acte de libre décision.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, L’empirisme anglais – John Locke, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 184-185.


Bien que Locke ait vécu dans la deuxième moitié du XVIIe siècle, il s’apparente par bien des traits aux penseurs du XVIIIe siècle. Il a fait des étude de médecine.

Comme d’autres penseurs anglais, il combat la théorie platonicienne des idées innées. Il n’y croit pas. Descartes l’avait acceptée, Leibniz à sa manière aussi. Locke argumente ainsi : il ne peut rien y avoir dans l’esprit sans que l’esprit en ait conscience. On le voit, Locke rejette radicalement « les petites perceptions » qui, sans devenir claires dans la conscience, assurait chez Leibniz la continuité et d’identité de la nomade. Locke ne reconnaît donc que la conscience claire, et ce trait aussi est caractéristique. Pour lui, il y a contradiction à dire que quelque chose est dans la conscience sans être conscient. Il rejette tout recours à la réminiscence, à la virtualité, etc. Il rejette donc l’idée d’une connaissance originelle absolue, que nous aurions eue dans une vie antérieure à l’existence terrestre.

L’âme commence donc par être une tabula rasa. Locke veut inciter les philosophes à tenir les yeux ouverts face au monde réel, c’est-à-dire celui de l’expérience. Toutes nos idées sont des idées acquises, et non innées ; et elles ont été acquises grâce aux sensations.

Les idées n’ont qu’une source : l’expérience. Il y a deux sortes d’expérience : l’expérience extérieure, qui provient des sensations, et l’expérience intérieur. Sans les sensations, l’esprit ne peut rien faire – quand il en est privé il tourne à vide ; car l’âme, d’abord, n’est rien. Selon Locke, nous ne pensons jamais avant d’avoir des sensations. D’abord sentir, après penser. Locke appelle nos sensations des idées simples, idée  signifiant ici représentation, matière première de la connaissance. L’esprit, par son travail, en fait des idées composées en comparant les idées entre elles, en dégageant des abstractions, tec.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, L’empirisme anglais, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 185-186.

George Berkeley (1685-1753)

(…) Nous prenons pour des choses sensibles des idées. Tout ce qui existe n’existe qu’en tant que perçu par un sujet percevant.

Berkeley aboutit ainsi à la célèbre formule double : esse est percipe (être, c’est être perçu) ou : esse est pefcipere (être, c’est percevoir). L’être n’existe pas en soi, mais seulement en tant qu’il est perçu. Or, pour qu’il soit perçu, il faut qu’il y ait quelqu’un qui perçoive. D’où la seconde formule : être, c’est percevoir. Les deux seules formes d’existences qui nous soient accessibles sont celle de percevoir et celle d’être perçu. Si nous tentons de nous représenter une réalité qui ne soit ni l’un ni l’autre, nous n’obtenons qu’un être illusoire, une non-chose. Les idées (perceptions) ne peuvent en aucune façon être causes d’autre chose puisqu’elles sont, par rapport à nos sens, d’une totale passivité. La cause des idées, ce ne sont pas les choses, c’est l’esprit qui perçoit. L’esprit est un être simple, indivisible, actif, qui produit la perception en percevant. Mais il ne faudrait pas cherche une quelconque « idée de l’esprit » car cela serait contradictoire : idée signifie passivité, esprit signifie activité.

Berkeley énonce la formule : les idées sont les choses mêmes. Aujourd’hui nous dirions : les représentations des choses sont les choses (mêmes). Ou, autrement dit : les choses ne sont rien d’autre que les représentations que nous en avons. Cette conception porte le nom d’idéalisme absolu.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, L’empirisme anglais – George Berkeley, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 191-192.

David Hume (1711-1776)

Hume est un penseur écossais du XVIIIe siècle. Il pose la même question que les autres empiriste : comment la connaissance est-elle possible ? Que connaît-on quand on connaît ? Où sont les limites de la connaissance ? Selon les empiristes, l’unique source de la connaissance est la perception sensible, donc l’expérience, la rencontre avec le donne. (Mais pour Berkeley déjà il n’y avait aucun donné hormis les perceptions et l’esprit qui perçoit.) Hume demande si l’homme est capable de résoudre le problème de l’être : « Qu’est-ce que l’être ? » Il répond ainsi : pour aborder cette question, il faut adopter une attitude critique.

Nous verrons bientôt que ce terme, « critique », va jouer un rôle essentiel pour Kant, qui le fera figurer dans les titres de ses trois principaux ouvrages. Par la suite, la mode s’en est mêlée et le mot a perdu la précision de son sens.

Philosophiquement, le terme « critique » a un sens très précis, qui provient de cette époque. Une attitude critique consiste en ceci : l’esprit s’examine lui-même, observe ses opérations et ses méthodes, afin de décrire clairement son propre appareil à connaître, d’en saisir le nature et d’en apprécier la portée et la validité – au lieu de se tourner vers les objets qui l’entourent. Il s’agit de se connaître soi-même, mais non pas tant comme sujet moral ou existentiel (Socrate), que comme sujet connaissant. Que fait l’esprit qui cherche à connaître ? Quelle est l’essence de ce qu’on appelle « comprendre » ? Quelles sont les opérations fondamentales assurant la connaissance ?

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, L’empirisme anglais – David Hume, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 195-196.


La question la plus importe posée par Hume concerne la causalité : qu’est-ce que la causalité ? Provient-elle de notre esprit ? Faut-il admettre que notre esprit, dès qu’il entre en action, implique déjà la finalité ? Ou la causalité est-elle au contraire dérivée de nos perceptions sensibles ?

(…)

La causalité, selon Hume, dérive donc simplement de l’expérience des successions constantes. Nous constatons que deux phénomènes se produisent toujours l’un après l’autre et nous disons que le premier est cause du second. Ainsi donc l’idée de causalité, avec l’élément des nécessité qu’elle implique, résulte tout simplement de l’habitude empirique de successions qu’on voit se produire constamment, sans qu’il y ait eu d’exception.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, L’empirisme anglais – David Hume, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 196-197.

Emmanuel Kant (1724-1804)

Kant va nous occuper plus longtemps que les autres philosophes. Il a en effet transformé radicalement, en profondeur, les perspectives et les concepts de la pensée philosophique. Si nous négligions Kant, nous ne comprendrions pas grand-chose à tout le développement philosophique ultérieur, y compris aux nombreux penseurs qui ne se sont vraiment mis à philosopher pour le combattre. C’est chez lui qu’ils ont trouvé les moyens d’expression nécessaires à leur attaque.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Emmanuel Kant, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 201.


Kant a dit de Hume qu’il l’avait tiré de son sommeil dogmatique. Qu’était-ce donc que ce « sommeil dogmatique » ? Kant était comme emprisonné dans le vaste système, cohérent, assuré, construit par Leibniz – dans une philosophie embrassant un savoir si riche et si rigoureusement organisé qu’il est possible de s’y tenir et d’y vivre. Le « sommeil dogmatique », c’est le contraire de l’attitude critique. Kant vivait, content, exempt de doute critique, à l’intérieur d’un doctrine solide.

Hume, en revanche, en mettant en question la connaissance elle-même, en s’interrogeant sur le concept de causalité, à tiré Kant de son sommeil dogmatique. Et si Kant s’est éveillé, ce n’est pas que la pensée du Hume lui donnait satisfaction ; au contraire : c’est qu’elle ne le satisfaisait aucunement. Hume a posé le problème de la causalité, et il l’a résolu d’une manière inacceptable pour Kant. C’est ce qui l’éveilla – par un processus bien caractéristique pour la philosophie.

Kant s’étonne. Il s’étonne, fait au fait que la science, en général, puisse exister ; qu’il y ait un savoir nécessaire et universel.

Il avait pour Hume la plus grande admiration. Or Hume affirme que la causalité ne repose que sur l’habitude. Kant, épris de la certitude et de l’évidence des mathématiques, où tout doute est exclu, ne peut se satisfaire d’une telle explication : l’habitude est incapable de fonder aucune sorte de certitude. Hume a eu le grand mérite de poser le problème du fondement de la causalité, en un temps où la physique se fondait sur le déterminisme. Aujourd’hui, la causalité a perdu quelque chose de l’importance exclusive qu’elle avait pour la physique au XVIIIe siècle, pour laquelle elle était une exigence absolue et décisive.

Ainsi donc, Kant se dit qu’il est impossible de fonder une science qui se veut certaine sur quelque chose d’aussi incertain que l’habitude.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Emmanuel Kant, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 202-203.


(…) Cela veut dire : croire n’est pas en contradiction avec la raison. Cela ne signifie pas qu’il y ait un domaine où la raison a des droits, et un autre où elle n’en a pas. Mais comme notre nous révèle elle-même ses limites, il est raisonnable de les reconnaître. Là où, dès lors, on ne peut ni démontrer ni réfuter, il est permis de croire – et on croit, ou bien on ne croit pas. Citons encore la célèbre phrase de Kant : « Il me fallait limiter le savoir pour faire place à la croyance. »

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Emmanuel Kant, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 226.

De Kant à l’idéalisme allemand

On dit souvent de Kant qu’il représente le sommet des Lumières. Et l’on désigne par les Lumières la foi optimiste et exclusive que son époque mettait dans la raison humaine, en tant qu’instrument adéquat pour la connaissance du monde, sans aucun compromis avec une aide quelconque d’origine surnaturelle ou irrationnelle. La raison serait autosuffisante pour la morale, l’État, la religion ; elle suffirait à garantir – pour peu qu’on s’en serve correctement – le progrès de l’humanité. L’homme, dès lors, se tenait pour indépendant, l’humanité n’avait pas d’autre fin qu’elle même, que son propre épanouissement.

Il faut comprendre que, dans ce sens, Kant n’est nullement le sommet des Lumières ; il en est le dépassement.

Il engage l’homme dans un processus sans fin, dans un combat qui n’aura pas de terme, non pas vers l’extérieur, mais vers l’intérieur, un combat contre sa propre finitude et sa propre relativité, qu’il lui faut pourtant découvrir et reconnaître. Ainsi, lorsque Kant parle des chemins qui s’ouvrent à l’homme, il introduit aussitôt des facteurs de limitation, de rupture, de discontinuité, de non-totalité. Et lorsqu’il justifie cet effort à accomplir sans fin comme étant nécessaire à cause précisément des indépassables limites et des irrémédiables ruptures, il s’affirme comme un penseur anti-démiurgique, au sens le plus profond. Il n’est pas permis à l’homme de se prendre pour le double du Créateur. Il n’engendre rien dans l’être en soi, il ne lui ajoute rien ; au sens ontologique il n’a rien d’un créateur.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, De Kant à l’idéalisme allemand, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 255-256.

Georg Wilhelm Friedrich Hegel (1770-1831)

Il nous faut maintenant comprendre pourquoi les deux premiers concepts, l’être et le non-être, sont dits par Hegel « abstrait », alors que le devenir, cette première synthèse, est un concept concret.

Il emploie ces mots de façon très particulière. Si l’être et le non-être sont des concepts abstrait, c’est au sens étymologique de ce terme « abs-trait », qui signifie : tiré hors de…, séparé de… Pour Hegel, l’être est un concept abstrait parce qu’il est unilatéral, exclusif. Il ne se prête à aucune combinaison avec autre chose. La négation n’y a pas encore pénétré. Son antithèse, le non-être, est un concept abstrait, lui aussi, parce qu’il exclut de soi l’être, il se maintient dans son stérile isolement. En revanche, le devenir est le premier concept dans lequel être et non-être se fondent pour engendre quelque chose de nouveau. « Concret » vient de concrescere, concretum, croître ensemble, se lier dans une croissance commune. Ce sens de de « concret » et d’« abstrait » est très important pour qui veut comprendre la pensée de Hegel.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Friedrich Hegel, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 264.


Hegel a dit : « Le soleil et la lune ont moins d’influence sur nous que les forces morales et sociales. » Nous sommes loin désormais de la grande tradition classique, selon laquelle une grande personnalité impose son exemple en toute indépendance du lieu, du temps et de l’histoire où elle se situe. Selon Hegel, mous sommes immergés dans l’histoire et la société. Et désormais, après Hegel, c’est ainsi que l’homme moderne continuera à se concevoir lui-même.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Friedrich Hegel, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 274.

Auguste Comte (1789-1857)

Nous allons nous occuper de penseurs beaucoup moins considérables, mais qui essayé, chacun à leur manière, à l’époque de la science et en étant eux-même fascinés par la connaissance scientifique, de poursuivre et de renouveler l’effort de la révolution philosophique.

Voyons d’abord un penseur français, ne l’année de la Révolution française, qui vécut pendant la première moitié du XIXe siècle : Auguste Comte. Il a été le fondateur de ce qu»’»on a appelé l’École positiviste. Aujourd’hui, ce terme de « positiviste » a pris souvent une nuance péjorative : quand ont traite quelqu’un de « pur positiviste », on veut dire qu’il ne s’est pas encore libéré d’une foi excessive, naïve, dans le pouvoir de la science et qu’il en est resté dépendant comme on l’était au XIXe siècle.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Auguste Comte, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 280-181.


(…) L’ouvrage le plus célèbre d’Auguste Comte, le Cours de philosophie positive, a été publié entre 1830 et 1842. « Positif » n’a donc nullement chez lui le sens d’un contraire de « négatif », mais bien du contraire de « spéculatif » : une théorie est « positive » lorsqu’elle est scientifiquement fondée sur des faits. Une « philosophie positive » ne doit présenter aucune trace de métaphysique et ne s’occuper que d’un classement des faits et des lois. Ainsi, Cours de philosophie positive développe une philosophie que ne repose que sur des faits et des lois, qui ne s’intéresse à rien d’autre et qui n’admet rien d’autre.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Auguste Comte, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 282-183.

Karl Marx (1818-1883)

Sigmund Freud (1873-1939)

Je voudrai ici faire un rappel : on s’en souvient, au Ve siècle avant J,-C. le principe fondamental de Socrate était : « Connais-toi toi-même. » Serait-il possible de faire un rapprochement entre la célèbre maïeutique de Socrate et la méthode psychanalytique de Freud ? Ne pourrait-on pas mettre en exergue de l’œuvre de Freud la devise socratique elle-même : « Connais-toi toi-même » ?

Tous deux s’attachent à l’idée authentiquement philosophique selon laquelle l’homme a pour tâche de se connaître « lui-même ». Que signifie « toi-même » ou « moi-même » ? Pour Socrate, le « moi-même », c’est le libre sujet moral qui cherche le bien, et pour qui le bien est toujours au-delà de ce qu’il a déjà atteint. Cela signifie que chez Socrate, il y a dans le « Connais-toi toi-même » quelque chose que nous, en langage moderne, appellerions « existentiel » : le sujet s’appréhende dans sa liberté essentielle en voyant devant lui un bien qui ne pourra jamais lui appartenir. La connaissance de soi qui est ici visée est une connaissance visant la liberté, ou une connaissance à travers la liberté. Pour Socrate, z se connaître soi-même », c’est se demander quel est le bien, quelle est la justice, quel est le bonheur – autant de concepts qui n’ont un sens que pour la liberté, mais qui n’ont aucun sens objectif au sens des choses qui sont tout juste ce qu’elles sont.

Freud, en revanche, inspiré par l’esprit scientifique de son temps, en énonçant l’exigence « Connais-toi toi-même », demande à l’homme de découvrir son inconscient, qui est en quelque sorte en lui une donnée empirique, mais refoulée. L’inconscient est à la fois donné et dissimulé. Nous pourrions aussi avoir recours à Kant : la chose en soi, la liberté en tant que chose en soi – quelque chose de tout autre que chez Freud. Kant se tient aux côtés de Socrate, mais non pas Freud.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Sigmund Freud, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 316-317.

Henri Bergson (1859-1941)

Changement de direction : nous allons considérer maintenant des penseurs qui ont fortement réagi contre les tendances du monde contemporain aux diverses superstitions scientistes. Ils se sont efforcés de reconquérir justement ce qui, étant essentiel et d’un grand poids, ne se laisse maîtriser par la science. Il s’agira, d’une part, d,Henri Bergson, en France, et d’autre part, de Nietzsche en Allemagne, et de Kierkegaard, au Danemark.

La philosophie d’Henri Bergson constitue une réaction spécifique à tout le courant de pensée qui comptait avant tout sur la science pour expliquer l’essence de l’homme et de la société, et permettre ainsi de résoudre les problèmes posés par la condition humaine. Sa réflexion se développa à contre-courant, contre une Sorbonne et un environnement culturel largement dominés par le positivisme et la crédulité scientiste d’Auguste Comte. Aujourd’hui, nous vivons dans une monde tout différent. Nous pourrions dire, dans un certain sens, que le succès de Bergson en son temps a réduit l’influence sur la postérité. Il a consacré toutes ses forces à enfoncer des portes qui aujourd’hui nous paraissent ouvertes, mais qui étaient à son époque solidement closes. (…)

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Henri Bergson, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 328.


Bergson souligne combien il est difficile à l’homme de se libérer de ses besoins et de ses intérêts pratiques, par lesquels il se trouve asservi à la fois à son intelligence mécaniste et à son aveugle instinct, afin de parvenir à la connaissance du vivant que seule permet cette sympathie désintéressée qu’il appelle « intuition ». Pour réussir il lui faut pour ainsi dire s’opposer à lui-même jusqu’à ce qu’il s’ouvre à une autre réalité et à une connaissance d’un autre ordre.

Cela ne nous rappelle-t-il pas l’histoire du captif dans la caverne de Platon ? Il a fallu que ce captif se détourne du monde des ombres, des prévisions compétentes concernant leur succession, à propos desquels ses compagnons faisaient preuve de tant d’habileté. il a fallu qu.il s’arrache à la sécurité des ses habitudes quotidiennes, pour se mettre à grimper vers la sortie de la caverne. Là, devant le monde des Idées, il fut saisi d’un éblouissement, et il dut s’exercer à regarder leurs ombres et leurs reflets dans l’eau avant de devenir capable de supporter la vue su souverain bien lui-même. Mais il est finalement retourné dans la caverne, où tous alors se moquèrent de son incompétence et de sa maladresse. Tel pourrait bien être le sort de celui qui aurait conquis, à grand effort, la capacité de l’intuition. Par la sympathie celle-ci est capable de fondre en elle l’immédiateté de l’instinct avec la capacité de connaître de l’intelligence, ce qui permet à la conscience de s’ouvrir à la profondeur de la vie.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Henri Bergson, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 350.

Sören Kierkegaard (1813-1900)

Nous commençons par Kierkegaard. Pour lui, comme pour Nietzsche, il est important, plus que pour des penseurs anciens, de savoir ce que fut sa vie. C’est là encore un trait de la modernité : la réflexion philosophique ne peut plus être séparée de la biographie. Nietzsche et Kierkegaard ont vécu leur philosophie, et leur philosophie est issue de leur vie. Mais non pas dans un sens naturaliste, comme si nous pouvions dériver leur pensée des données sociales, politiques, familiales de leur existence. Tous deux tenaient passionnément à authenticité et à la crédibilité de ce qu’ils exprimaient. Tous deux avaient la rhétorique en horreur lorsqu’elle se prend elle-même pour fin. Lorsque leur ton devient pathétique, c’est le plus souvent malgré eux. Ils ont souvent tourné leur ironie contre eux-mêmes, tenant leurs réflexions à distance de leur vie vécue, comme si celle-ci risquaient d’être compromises par les insuffisances de leur existence propre. Il faut donc avoir une certaine connaissance de leur vie pour pouvoir les comprendre.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Sören Kierkegaard, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 353-354.


 Qu’est-ce que l’existence ? Pour Kierkegaard, il s’agit du surgissement de la liberté responsable d’un sujet. Un exemple pour illustrer ce concept : on peut, considérant les choses de l’extérieur, voir de l’eau couler, des branches tomber, une personne accomplir un acte – et tout cela se passe dans le même temps, qu’il s’agisse de l’eau qui coule, des branches qui tombent, de l’homme qui accomplit un acte. Mais l’acte librement accompli de l’homme ne peut pas être dérivé de ce qui s’est passé avant dans ce temps qui est commun à la nature et à l’homme qui agit. L’acte de l’homme provient de ce qui s’est passé au cœur de sa subjectivité et c’est pourquoi il en assume lui-même la responsabilité. En agissant, il ne se laisse pas simplement insérer dans la série des causes et des effets, il n’est pas simplement lui-même un effet d’autre chose, mais il devient une sorte d’absolu commencement. Il insère, dans la texture des causes et des effets, son acte libre venu d’une origine différente, il accompli un rupture, que l’existentialisme, ou philosophie de l’existence, appelle rupture existentielle.

Le terme « existence », avec cette signification, vient de Kierkegaard. C’est lui qui lui a donné ce sens. Dès lors, le verbe « exister » a pris en philosophie une nouvelle signification. Il ne signifie plus seulement : la présence de quelque chose dans le réel. Il faut revenir à son étymologie, comme l’a fait Heidegger : ek-sistere signifie : émerger hors du magma des choses, provoquer une rupture, n’est pas le dérivé d’une continuité homogène.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Sören Kierkegaard, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 362-363.

Friedrich Nietzsche

La séduction poétique que Nietzsche n’hésite pas à mettre en œuvre ne change rien au fait que sa volonté de vérité était une passion dévorante. Mais pour lui, comme pour Kierkegaard, la vérité qu’il s’agit de sauver et de réhabiliter se situe au-delà du concept de vérité objective que connaît la recherche scientifique. Ce n’est pas qu’il veuille dénigrer ou dévaluer la vérité objective ou rationnelle des sciences. Mais celle-ci, selon Nietzsche, dépend de ses prémisses et n’est pas toute la vérité. La vérité philosophique vise quelque chose qui est au-delà de cette simple vérité de surface. Nietzsche a mis l’accent sur l’interprétation, et c’est une raison de plus qui explique l’influence qu’il exerce aujourd’hui. On a été, de nos jours, jusqu’à dire qu’il n’existe en général aucune vérité, qu’il n’y a que des interprétations, et des interprétations d’interprétations, à perte de vue. Ainsi, on entend dire qu’il y a de la naïveté, lorsqu’on explique un texte, à vouloir atteindre ce que l’auteur a vraiment voulu dire. Car il n’existe en réalité aucun texte originel, à proprement parler, et encore moins un sens originel. Nietzsche ne pensait pas ainsi, mais il est certainement l’un des auteurs qui ont le plus contribué au développement de cette tendance. Selon lui, tout savoir est interprétation de l’être par un sujet vivant qui cherche à connaître. La vérité ne peut donc pas se maintenir comme étant quelque chose de solide et d’indépendant du sujet. Elle est toujours déjà interprétation. Dans sa théorie interprétative de la vérité, Nietzsche a exprimé ce doute profond, resté fiché comme un aiguillon au centre de la raison qui cherche la vérité. Il se heurta ainsi à une imite indépassable pour la conscience, et il vécut du même coup l’exigence existentielle d’aller au-delà.

Nous n’avons jamais la vérité clairement en face de nous, nous nous efforçons de la saisir telle qu’elle est, donc indépendamment de nous. Mais malgré tout, une relation essentielle persiste entre la vérité à connaître e celui qui la connaît. La qualité de ce rapport entre un sujet et la réalité qui lui est donnée est elle-même un élément constitutif de la vérité qu’il cherche. Par conséquent, toute interprétation se trouve être à la fois objective et subjective; il n’existe pas d’objectivité pure, que l’on trouverait en dehors du sujet et qui serait totalement indépendante de lui. Il ne peut s’agir que d’une objectivité médiatisée, imprégnée par la vie de celui qui l’énonce, et liée à sa subjectivité. Nous rencontrons ici à nouveau la subjectivité dont nous avons vu la signification qu’elle prenait chez Kierkegaard pour l’expérience religieuse. Mais ici, chez Nietzsche, il s’agit de la vérité philosophique elle-même, telle qu’il est possible de l’atteindre indépendamment de toute foi — ou plutôt : telle qu’il est à jamais impossible de l’atteindre.

Il ne faudrait pourtant pas croire que Nietzsche invoque la subjectivité pour être moins exigeant envers la vérité. Beaucoup de nos contemporains, trop paresseux ou trop engagés pour chercher vraiment la vérité objective, se réfèrent à Nietzsche pour avancer l’argument que l’accord du sujet suffit à constituer la vérité. Non. Si Nietzsche a développé cette théorie, c’est au contraire parce qu’il se faisait une idée bien plus exigeante et bien plus profonde de la vérité que ceux qui se contentent du donné objectif.

C’est donc par passion de la vérité que Nietzsche doit s’interroger: comment la vérité se constitue-t-elle? Comment pouvons-nous l’atteindre? Lorsqu’on s’engage sur ce chemin, on découvre qu’il est impossible d’en prendre tout à fait possession. Et nous retrouvons ainsi le thème du dépassement. La quête de la vérité est une tâche sans fin, elle exige une faim de vérité illimitée et insatiable, et la vérité elle-même vit dans l’acte de dépasser toute prétendue vérité.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Friedrich Nietzsche, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 377-379.

Après Kierkegaard et Nietzsche

Dans un langage plus explicite, cela signifie : il n’est pas de pensée moderne qui puisse se dispenser de passer par le nihilisme ou par l’impossible philosophique. Impossible de s’installer à mi-chemin. Ces penseurs ne sont donc pas des modèles à suivre, mais des appels qu’il faut percevoir, ou plutôt, des exigences auxquelles il faut répondre. Et c’est pourquoi, après Kierkegaard, après Nietzsche, une certaine liberté — qui n’est pas seulement la faculté de prendre une décision, mais celle de connaître et de transcender — est absolument indispensable à la réflexion philosophique. On se rend, je crois, la tâche trop facile lorsqu’on consent, avec une certaine complaisance ou du moins une dose de paresse, à s’installer dans un pessimisme irrémédiable au sujet de notre monde occidental, déclaré vide de sens et de valeur. Ce qui permet d’y trouver une bonne place en se sentant supérieur à tout. Personne n’a réfléchi à cette situation avec plus de passion et de radicalité que Nietzsche et Kierkegaard, chacun à sa manière, et leur condamnation semble sans appel. Mais il est vain de la répéter. Ce qui est nécessaire, c’est de la comprendre, de la prendre au sérieux et d’aller au-delà ; de voir s’il est possible d’aller au-delà. Pour ancrer la liberté de l’homme par-delà les dénonciations, les mises à nu, de Kierkegaard et de Nietzsche, il faut pénétrer dans le nihilisme, le traverser et le dépasser.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Après Kierkegaard et Nietzsche, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 390-391.

Edmund Husserl (1859-1938)

Après Nietzsche et Kierkegaard, la pensée philosophique se développe selon trois directions principales. L’une de ces directions est la phénoménologie, dont l’initiateur a été le philosophe allemand Edmund Husserl. La seconde est la philosophie de l’existence ou existentialisme. Quant à la troisième, dont nous ne ferons qu’indiquer le début, elle n’est pas une philosophie à proprement parler, elle se divise et se subdivise, pour ainsi dire, selon les diverses sciences sociales et humaines.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Edmund Husserl, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 392.


D’abord il se bat contre la psychologie et l’introspection. Il ne veut en aucun cas et d’aucune manière être confondu avec ceux qui prétendent trouver le fondement de la certitude dans la description d’états de conscience intérieurs. Il souligne avec insistance — et selon nous, à juste titre — que les états psychiques que nous pouvons observer, par exemple à l’aide de l’introspection, sont des objets pour nous, tout autant que les objets du monde extérieur; ce sont, certes, des objets psychiques, mais néanmoins des objets. En cela il est encore fidèle à Kant, car pour Kant aussi, tout ce que nous pouvons décrire de notre conscience est déjà de la conscience objectivée. En tout cas, ce n’est pas a priori. Husserl ne veut pas être de ceux qui se contentent de descriptions introspectives du psychisme, et qui en viennent ainsi à se perdre dans le subjectivisme, c’est-à-dire dans une sorte d’empirisme. Et l’on en arrive bientôt, comme les empiristes anglais, à l’idéalisme. Pensons à Berkeley. Husserl ne veut rien avoir à faire avec une objectivation de la conscience, et d’une façon générale avec la psychologie. Ce qu’il cherche doit être immédiat et originel.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Edmund Husserl, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 395-396.


Sa devise bien connue « Allons aux choses mêmes ! » n’appelle nullement à un réalisme naïf. Elle signifie qu’il est indispensable de saisir l’essence de la conscience si l’on veut comprendre comment un « étant quel qu’il soit devient accessible à la conscience intentionnelle ».

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Edmund Husserl, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 398.


Ce qui subsiste alors sans être touché par la réduction phénoménologique, c’est la conscience, qui constitue en principe une région de l’être particulière, et qui peut devenir le domaine d’une science nouvelle — de la phénoménologie. Cette région de l’être, nous pouvons peut-être l’illustrer par une image. Prenons une feuille de papier. Sur l’une de ses faces se trouvent les phénomènes de l’expérience, sur l’autre face, ce qui se produit dans la conscience. Nous sommes enclins à prendre en considération l’une ou l’autre face du papier. Mais dans la méthode phénoménologique de Husserl, ce dont il s’agit c’est en quelque sorte ce qui se passe à l’intérieur de la feuille de papier, c’est-à-dire le donné même des phénomènes, l’activité de la conscience, grâce à laquelle ce donné est rendu possible.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Edmund Husserl, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 401.

Martin Heidegger (1889-1976)

Le rapport de Heidegger au langage est si particulier que ses « pensées fondamentales » ou sa « doctrine de base » ne peuvent être fidèlement reproduites que dans ses propres termes. Il a forgé tant de mots nouveaux, ou employé tant de mots anciens autrement que selon l’usage courant ou la tradition, qu’il est impossible de les faire comprendre brièvement. Les termes dont il se sert ne sont pas traduisibles par d’autres, ils ne se laissent en aucune façon séparer du mouvement philosophique qui s’accomplit à travers eux et en eux. Cette impossibilité me prouve à nouveau combien Heidegger était sur la défensive : ses pensées refusent de se laisser toucher sans leur cuirasse verbale. Au fond, ce n ‘est pas là une défensive philosophique (car un philosophe s’efforce toujours de dire encore une fois autrement ce qu’il a pensé), c’est une défensive poétique : c’est en effet une qualité fondamentale de toute poésie que d’être comme elle est et de ne pas pouvoir être autrement — elle ne se laisse ni traduire ni expliquer.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Martin Heidegger, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 410-411.


Heidegger fait donc une distinction entre « étant » et « être ». L’étant doit son être à l’être, et l’être n’est qu’en tant qu’étant. Et pourtant — c’est décisif — l’étant « dissimule » l’être. Prenons un exemple : voici un crayon sur la table ; il est en bois, il est jaune, avec une pointe dorée, et il écrit noir. Ce crayon est un étant, mais son être n’est pas en bois, il n’est ni jaune ni doré, et l’on ne peut pas se servir de son être pour écrire. D’autre part, son être n’est pas non plus quelque chose qui subsisterait si l’on retranchait le bois, la couleur jaune, la pointe dorée, l’écriture noire. L’être n’est pas « ce qui reste ». Il disparaîtrait lui-même avec toutes les qualités sensibles et avec l’utilité du crayon, et pourtant il est « quelque chose d’autre » que ces qualités et cette utilité. Dans ce sens, on peut dire que les qualités et l’utilité de l’étant dissimulent son être.

Il y a encore autre chose, selon Heidegger, qui contribue à dissimuler l’être de l’étant ou à l’obscurcir — en même temps que le sens de la question posée à son sujet —, c’est l’habitude, et surtout l’habitude « qui va sans dire », qui ne soulève aucun problème, qui consiste à se servir de l’étant conformément à son utilité — donc : le fonde de la technique tout entier, comme aussi celui des sciences exactes. Lorsqu’il s’adonne à de telles activités, ! sujet se perd dans l’anonymat du « on » impersonnel et devient incapable de poser authentiquement la question e l’être de l’étant.

Or, c’est seulement par la découverte du vrai sens de cette question primordiale qu’une quête de la vérité devient possible.

Pour expliquer le sens de la vérité, Heidegger a recours au mot grec aletheia : « ce qui n’est plus caché ». Il le traduit, entre autres, par le mot Entschleierung (« dévoilement ») et il entend par là le dévoilement de l’être. Pour lui, la vérité ne réside jamais dans une cohérence rationnelle, mais dans une « vision » de l’être qui, d’abord « dissimulé par les outils disponibles », se dévoile dans la question primordiale (Urfrage).

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Martin Heidegger, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 413.

Karl Jaspers (1883-1969)

Pendant les années les plus amères qu’il eut à vivre en Allemagne sous le national-socialisme, il trouva en lui- même — comme il le dit — assez de paix pour se plonger dans l’étude du problème en apparence le plus abstrait du monde : il essaya d’élucider le problème de la vérité et développa une Logique philosophique. Il examina les prémisses des méthodes générales de pensée, en se plaçant au point de vue et dans la perspective de la philosophie. Il s’agissait pour lui de comprendre, de manière à la fois plus claire et plus critique, ce qu’était la rationalité des sciences de la nature et, grâce à cette élucidation préalable, d’éclairer le rapport de cette rationalité avec la réflexion et la foi philosophiques. C’est ainsi qu’il mit en lumière ce qui constitue le paradoxe fondamental de la philosophie : dans la science, on a toujours un objet de recherche, mais en philosophie on n’en a pas. Pourquoi pas ? Ce que la philosophie cherche, au fond, c’est l’être même. Nous touchons ici à la racine kantienne de la pensée de Jaspers — et kantienne, elle l’est profondément. Pensons à la Subjekt-Objekt-Spaltung, à la scission sujet-objet. En science, cette scission règne partout, elle est claire : le chercheur étudie une réalité qui se trouve en face de lui, qui est pour lui objective. Mais la philosophie demande : qu’est-ce que l’être ? L’être n’est ni subjectif ni objectif, ou bien il est l’un et l’autre. Si j’essaie de penser une synthèse de sujet et d’objet —, je n’y arrive pas : le sujet est toujours ce que je suis et qui pense un objet, quel qu’il soit, et fut-il quelque chose dans ma propre conscience. La philosophie n’a pas d’objet ; elle est ce « penser » particulier, qui n’a pas d’objet. Son être « englobe » (umgreift) le sujet et l’objet ; il est, comme dit Jaspers, « un englobant » (ein Umgreifendes).

Mais quelle peut bien être la justification d’un « penser » qui n’a pas d’objet ? En science, on procède à la vérification des hypothèses; en logique, on examine la cohérence de la conduite de la preuve. Mais que peut-on faire en philosophie ?

Loin de nier le caractère précaire de la réflexion philosophique, Jaspers l’a mis fortement en lumière. Il le reconnaît : elle n’est, en effet, ni « contraignante » ni « généralement valable ». Elle est autre chose, et donc quelque chose de précaire. On peut toujours la « réfuter » parce qu’elle n’est pas « vraiment scientifique », parce que le philosophe ne peut jamais définitivement « prouver » ce qu’il affirme.

Mais alors, comment la philosophie a-t-elle pu se maintenir en vie au cours des millénaires ? Pour continuer à vivre, elle a besoin du consentement de l’élève. Cela n’implique nullement que l’élève doive penser la même chose que le maître ; mais il faut qu’il commence par consentir au mode de penser du maître, qui est un mode de penser philosophique. Ensuite il trouvera lui- même, par la pratique même de la philosophie, la justification existentielle de sa propre pensée.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Karl Jaspers, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 429-430.


Nous touchons ici à un caractère essentiel de la philosophie, et qui explique pourquoi certains philosophes ne comprennent rien à certains autres. Dans la mesure où la philosophie s’adresse à l’existence possible, c’est-à-dire à la liberté, il lui faut user d’un langage indirect, qu’un autre penseur comprend ou ne comprend pas. Ce sont des langages qu’on ne peut pas rendre objectivement homogènes ou comparer entre eux. Aux yeux de certains philosophes, c’est là une manière de se dérober à tout critère et de se réfugier dans un subjectivisme pur. Mais, à mon avis, c’est qu’ils se refusent simplement à voir la condition humaine telle qu’elle est, et non pas telle que Jaspers, ou la philosophie, l’aurait inventée. Lorsque l’être humain, en tant que possible liberté, cherche à éclairer l’existence, il ne dispose évidemment pas d’un langage direct, universellement valable, qui ne pourrait être qu’objectif. Aussi recourt-il à un langage indirect, dont la portée se mesure à son efficacité ; ce langage ne peut être ni technique ni objectif; il éveille la liberté en se faisant comprendre d’elle.

Le langage scientifique n’est universellement contraignant que lié à un point de vue, à une méthode, à un stade de la connaissance atteint au moment où il est utilisé. Ce qu’il énonce est donc contraignant pour tout esprit normal, mais de manière relative, alors que le langage qui éclaire l’existence n’est jamais universellement valable et contraignant, puisqu’il s’adresse à la liberté d’autrui — mais il se réfère à l’absolu.

Si donc on veut comprendre un certain philosophe, il est absurde de commencer par le refuser. Pour le comprendre, il faut d’abord consentir à penser avec lui, en lui < prêtant » sa propre liberté. Si cette liberté s’y refuse, on ne le comprendra jamais. Nous trouvons ainsi chez Jaspers deux pôles opposés, celui de la validité contraignante, mais relative, et l’autre, où s’éclaire l’absolu. La relativité se trouve du côté de la validité universelle, l’absolu du côté de l’éclairement, qui ne contraint jamais personne.

Tels sont les deux pôles de cette philosophie. Mais alors une question se pose : pourquoi constatons-nous que, tout au long de l’histoire de la philosophie, les philosophes n’ont cessé d’argumenter et d’enchaîner les déductions logiques ? Ils se sont toujours efforcés d’éviter les contradictions, d’avancer des démonstrations cohérentes et bien liées — et Kant plus que quiconque. Mais si l’on examine ces raisonnements de plus près, on découvre que, par-delà leur validité contraignante, ils possèdent une efficacité différente, par laquelle ils modifient l’esprit de celui qui les lit. Souvenons-nous : nous avons vu, à propos de Platon, que lorsque nous lisons un de ses dialogues, nous ne sommes plus les mêmes, à la fin de notre lecture, que ceux que nous étions au commencement.

La philosophie est un domaine étrange. Elle argumente en cherchant des points d’appui dans l’objectivité et la rationalité, et pourtant elle s’attend à être comprise, justement à travers cette argumentation, par une possible liberté, par une existence qui « mime » sa démarche afin de saisir en elle-même ou de devenir quelque chose de plus essentiel que cette démarche même.

Je suis convaincu qu’elle ne peut pas renoncer à ce double aspect, justement parce qu’il correspond à la situation qui est celle de l’homme. Quand l’homme cherche le vrai, c’est le vrai absolu qu’il cherche ; mais chercher le vrai absolu implique, pour l’homme, prendre appui sur l’objectivité et la rationalité — et reconnaître en même temps que les conditions en sont prisonnières de la scission sujet-objet, ce qui signifie que l’être ne saurait se laisser réduire à une connaissance de cette sorte.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, Karl Jaspers, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, pp. 439-441.

La philosophie aujourd’hui

En même temps, des théories se répandent, selon lesquelles les problèmes fondamentaux de la philosophia perennis ne sont pas du tout de véritables problèmes : ils ne se posent qu’à cause du langage, par suite de formulations diverses, et il suffirait de les énoncer autrement pour les voir s’évanouir.

Cette évolution ne concerne pas seulement les problèmes de la philosophie. Ce que les hommes tenaient jusqu’ici pour le monde qui leur était « donné » a perdu sa réalité. Il n’y a plus que des interprétations ou des conventions concernant cet univers, qui découlent de langues naturelles diverses, ou alors des langues artificielles créées par les sciences. Par-delà l’expression verbale il n’y a pas de réalité, et par conséquent les « problèmes » ont cessé de se poser.

Ces sciences humaines et sociales procèdent comme les termites dans le bois : elles vident la philosophie par l’intérieur et réduisent en poudre ses mises en question et ses recherches du sens. Elles ne proposent pas de solutions à ses problèmes, elles les dissolvent, en dissolvant la réalité, l’être même. La possibilité de poser la question disparaît, avec le sens pour la vérité.

Les causes en sont aussi nombreuses que diverses. L’une d’entre elles me paraît évidente : plus une civilisation est évoluée, plus la langue et les langages spécialisés y prennent de l’importance. Dans notre société occidentale, l’« homme cultivé » vit la plus grande partie de sa vie dans le langage. Le résultat est qu’il prend l’expression par le langage pour la vie même.

HERSCH, Jeanne, L’étonnement philosophique, La philosophie aujourd’hui, Gallimard, Collection Folio essais (n° 216), Paris, 1993, p. 457.


Wow ! Quel bouquin ! Je distingue nettement mieux LA philosophie DES philosophies à la suite de ma lecture de L’étonnement philosophique de Jeanne Hersch. Je demeure avant tout un adepte de LA philosophie comme mode de pensée, premier pas pour un mode de vie. Je m’attarde plus spécifiquement à la philosophie de la connaissance, aux « Comment nous pensons ? », « Comment nous prenons conscience ? », « Comment nous visons la connaissance ? », etc.

J’aime plus particulièrement l’épistémologie lorsqu’elle se demande « Qu’est-ce que la connaissance et le connu ? » ou simplement « Qu’est-ce que la connaissance ? » À lecture de L’étonnement philosophique de Jeanne Hersch, je constate que ces questions et bien d’autres sur la connaissance et son acquisition par l’homme a passionné et passionnent encore presque tous les philosophes, chacun ayant sa propre idée sur les réponses à apporter.


ÉPISTÉMOLOGIE

  1. Étude critique des sciences, destinée à déterminer leur origine logique, leur valeur et leur portée (théorie de la connaissance).
  2. Théorie de la connaissance ; « étude de la constitution des connaissances valables » (Piaget). Épistémologie génétique.

Le Robert – Dico en ligne


C’est quoi une étude épistémologique ?

Partie de la philosophie qui a pour objet l’étude critique des postulats, conclusions et méthodes d’une science particulière, considérée du point de vue de son évolution, afin d’en déterminer l’origine logique, la valeur et la portée scientifique et philosophique (cf. philosophie* des sciences, empirisme* logique).

Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales


Bref, je me questionne sur la pensée philosophique elle-même. Dans le livre L’étonnement philosophique de Jeanne Hersch, je trouve de nombreuses pistes de réflexion sur la pensée philosophique, qu’il soit question d’esthétique, d’éthique, de logique, de métaphysique, de morale, d’ontologie,de théologie, etc.

À mon humble avis, la connaissance de la connaissance en notre conscience avec la prise de recul nécessaire s’impose comme le premier pas du philosophe. Comment JE connais ?


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J’accorde 5 étoiles sur cinq au livre L’étonnement philosophique :
Une histoire de la philosophie de Jeanne Hersch paru chez Gallimard, Collection Folio Essais (n° 216) en 1993.

J’en recommande fortement la lecture.


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Articles du dossier

Liste des rapports de lecture et autres articles

Article # 1 : Introduction

Témoignage de ma recherche personnelle au sujet de la philothérapie (philosophie + thérapie) ou, si vous préférez, de la pratique de la philosophie en clinique. Il s’agit de consultation individuel ou de groupe offert par un philosophe praticien pour nous venir en aide. Elle se distingue de la « psychothérapie » (psychologie + thérapie) en ce qu’elle utilise des ressources et des procédés et poursuit de objectifs propres à la philosophie. On peut aussi parler de « philosophie appliquée ».

Article # 2 : Mise en garde contre le copinage entre la philosophie et la psychologie

La philothérapie gagne lentement mais sûrement en popularité grâce à des publications de plus en plus accessibles au grand public (voir l’Introduction de ce dossier).

L’un des titres tout en haut de la liste s’intitule « Platon, pas Prozac! » signé par Lou Marinoff paru en français en l’an 2000 aux Éditions Logiques. Ce livre m’a ouvert à la philothérapie.

L’auteur est professeur de philosophie au City College de New York, fondateur de l’Association américaine des praticiens de la philosophie (American Philosophical Practitioners Association) et auteurs de plusieurs livres.

Article # 3 : Philothérapie – Libérez-vous par la philosophie, Nathanaël Masselot, Les Éditions de l’Opportun

Présentation du livre Philothérapie – Libérez-vous par la philosophie suivie de mes commentaires de lecture.

Article # 4 : Sur le divan d’un philosophe – La consultation philosophie : une nouvelle démarche pour se connaître, changer de perspective, repenser sa vie. Jean-Eudes Arnoux, Éditions Favre

Présentation du livre Sur le divan d’un philosophe – La consultation philosophie : une nouvelle démarche pour se connaître, changer de perspective, repenser sa vie suivie de mes commentaires de lecture.

Article # 5 : Philosopher pour se retrouver – La pratique de la philo pour devenir libre et oser être vrai, Laurence Bouchet, Éditions Marabout

Cet article présente et relate ma lecture du livre « Philosopher pour se retrouver – La pratique de la philo pour devenir libre et oser être vrai », de Laurence Bouchet aux Éditions Marabout. Malheureusement ce livre n’est plus disponible à la vente tel que mentionné sur le site web de l’éditeur. Heureusement on peut encore le trouver et l’acheter dans différentes librairies en ligne.

Article # 6 : Une danse dangereuse avec le philothérapeute Patrick Sorrel

Cet article se penche sur l’offre du philothérapeute Patrick Sorrel.

Article # 7 : La consultation philosophique – L’art d’éclairer l’existence, Eugénie Vegleris

Le livre « La consultation philosophique – L’art d’éclairer l’existence » de Madame Eugénie Vegleris aux Éditions Eyrolles se classe en tête de ma liste des meilleurs essais que j’ai lu à ce jour au sujet de la « philothérapie ».

Article # 8 : Guérir la vie par la philosophie, Laurence Devillairs, Presses universitaires de France

À ce jour, tous les livres dont j’ai fait rapport de ma lecture dans ce dossier sont l’œuvre de philosophes consultants témoignant de leurs pratiques fondées sur le dialogue. Le livre « Guérir la vie par la philosophie » de Laurence Devillairs aux Presses universitaires de France (PUF) diffère des précédents parce que l’auteure offre à ses lecteurs une aide direct à la réflexion sur différents thèmes.

Article # 9 : Du bien-être au marché du malaise – La société du développement personnel – par Nicolas Marquis aux Presses universitaires de France

J’ai lu ce livre à reculons. J’ai appliqué les feins dès les premières pages. L’objectivité sociologique de l’auteur m’a déplu. Ce livre présente aux lecteurs des observations, que des observations. L’auteur n’en tire aucune conclusion.

Article # 10 : Happycratie : comment l’industrie du bonheur a pris le contrôle de nos vies, Eva Illouz et Edgar Cabanas, Premier Parallèle, 2018

J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq parce qu’il m’a révélé les coulisses de la quête du bonheur au cœur de notre société néo-libérale. Je savais que cette obsession du bonheur circulait au sein de la population, notamment par le biais des coach de vie et des agents de développement personnel, mais je n’aurais jamais imaginé qu’elle cachait une véritable industrie soutenue par une idéologie psychologisante. Jusque-là, je ne connaissais de cette industrie que le commerce des livres et la montée en puissance des coachs de vie dédiés à la recherche du bonheur.

Article # 11 : La consultation philosophique, Oscar Brenifier, Éditions Alcofribas, 2020

J’ai adoré ce livre. Il est dense, très dense. On ne peut pas le lire comme un roman. Me voici enfin devant un auteur qui dit tout, où, quand, comment il observe, comment il pense, comment il chemine, comment il voit, comment il entend, comment il anticipe, comment il tire ses conclusions… Bref, un auteur qui expose son propre système de pensée dans un essai plus que formateur pour le nôtre.

Article # 12 : Fin du chapitre : Oscar Brenifier, philosophe praticien

La lecture du livre «La consultation philosophique» signé par le philosophe praticien Oscar Brenifier (voir article #11 de notre dossier «Consulter un philosophe – Quand la philosophie nous aide») nous apprend qu’il adresse un document à ses clients potentiels. J’ai écrit à monsieur Brenifier pour lui demander s’il pouvait me faire parvenir ce document.

Article # 13 : La philo-thérapie, Éric Suárez, Éditions Eyrolles, 2007

Cet article présente et relate ma lecture du livre du «La philo-thérapie» de Éric Suárez, Docteur en philosophie de l’Université Laval (Québec), philosophe praticien (Lausanne), publié en 2007 aux Éditions Eyrolles. Ce livre traite de la consultation philosophique ou, si vous préférez, de la philo-thérapie, d’un point de vue pratique. En fait, il s’agit d’un guide pour le lecteur intéressé à acquérir sa propre approche du philosopher pour son bénéfice personnel. Éric Suárez rassemble dans son ouvrage vingt exemples de consultation philosophiques regroupés sous cinq grands thèmes : L’amour, L’image de soi, La famille, Le travail et le Deuil.

Article # 14 : Comment choisir son philosophe ? Guide de première urgence à l’usage des angoissés métaphysiques, Oreste Saint-Drôme avec le renfort de Frédéric Pagès, La Découverte, 2000

Ce livre se caractérise par l’humour de son auteur et se révèle ainsi très aisé à lire. D’ailleurs l’éditeur nous prédispose au caractère divertissant de ce livre en quatrième de couverture : «Étudier in extenso la pensée des grands théoriciens et en extraire un mode de réflexion agissant est une mission impossible pour l’honnête homme/femme. C’est pourquoi l’auteur de cet ouvrage aussi divertissant que sérieux propose des voies surprenantes au premier abord, mais qui se révèlent fort praticables à l’usage. L’une passe par la rencontre avec la vie et la personnalité du philosophe : la voie des affinités électives».

Article # 15 : La philosophie comme manière de vivre, Pierre Habot, Entretiens avec Jeanne Cartier et Arnold I Davidson, Le livre de poche – Biblio essais, Albin Michel, 2001

Référencé par un auteur à mon programme de lecture, le livre «La philosophie comme manière de vivre» m’a paru important à lire. Avec un titre aussi accrocheur, je me devais de pousser plus loin ma curiosité. Je ne connaissais pas l’auteur Pierre Hadot : «Pierre Hadot (né à Paris, le 21 février 1922, et mort à Orsay, le 24 avril 20101) est un philosophe, historien et philologue français, spécialiste de l’Antiquité, profond connaisseur de la période hellénistique et en particulier du néoplatonisme et de Plotin. Pierre Hadot est l’auteur d’une œuvre développée notamment autour de la notion d’exercice spirituel et de la philosophie comme manière de vivre.» (Source : Wikipédia)

Article # 16 : La philosophie, un art de vivre de vivre, Collectif sous la direction de Jean-François Buisson, Les Éditions Cabédita, 2021

Jeanne Hersch, éminente philosophe genevoise, constate une autre rupture encore, celle entre le langage et la réalité : « Par-delà l’expression verbale, il n’y a pas de réalité et, par conséquent, les problèmes ont cessé de se poser (…). Dans notre société occidentale, l’homme cultivé vit la plus grande partie de sa vie dans le langage. Le résultat est qu’il prend l’expression par le langage pour la vie même. » (L’étonnement philosophique, Jeanne Hersch, Éd. Gallimard.) / On comprend par là qu’aujourd’hui l’exercice du langage se suffit à lui-même et que, par conséquent, la philosophie se soit déconnectée des problèmes de la vie quotidienne.» Source : La philosophie, un art de vivre, Collectif sous la direction de Jean-François Buisson, Les Éditions Cabédita, 2021, Préface,  p. 9.

Article # 17 : Socrate à l’agora : que peut la parole philosophique ?, Collectif sous la direction de Mieke de Moor, Éditions Vrin, 2017

J’ai trouvé mon bonheur dès l’Avant-propos de ce livre : «Laura Candiotto, en insistant sur le rôle joué par les émotions dans le dialogue socratique ancien et sur l’horizon éthique de celui-ci, vise à justifier théoriquement un «dialogue socratique intégral», c’est-à-dire une pratique du dialogue socratique qui prend en compte des émotions pour la connaissance.» Enfin, ai-je pensé, il ne s’agit plus de réprimer les émotions au profit de la raison mais de les respecter dans la pratique du dialogue socratique. Wow ! Je suis réconforté à la suite de ma lecture et de mon expérience avec Oscar Brenifier dont j’ai témoigné dans les articles 11 et 12 de ce dossier.

Article # 18 : La philosophie, c’est la vie – Réponses aux grandes et aux petites questions de l’existence, Lou Marinoff, La table ronde, 2004

Lou Marinoff occupe le devant de la scène mondiale de la consultation philosophique depuis la parution de son livre PLATON, PAS PROJAC! en 1999 et devenu presque’intantément un succès de vente. Je l’ai lu dès sa publication avec beaucoup d’intérêt. Ce livre a marqué un tournant dans mon rapport à la philosophie. Aujourd’hui traduit en 27 langues, ce livre est devenu la bible du conseil philosophique partout sur la planète. Le livre dont nous parlons dans cet article, «  La philosophie, c’est la vie – Réponses aux grandes et aux petites questions de l’existence », est l’une des 13 traductions du titre original « The Big Questions – How Philosophy Can Change Your Life » paru en 2003.

Article # 19 : S’aider soi-même – Une psychothérapie par la raison, Lucien Auger, Les Éditions de l’Homme

J’ai acheté et lu « S’aider soi-même » de Lucien Auger parce qu’il fait appel à la raison : « Une psychothérapie par la raison ». Les lecteurs des articles de ce dossier savent que je priorise d’abord et avant tout la philothérapie en place et lieu de la psychothérapie. Mais cette affiliation à la raison dans un livre de psychothérapie m’a intrigué. D’emblée, je me suis dit que la psychologie tentait ici une récupération d’un sujet normalement associé à la philosophie. J’ai accepté le compromis sur la base du statut de l’auteur : « Philosophe, psychologue et professeur ». « Il est également titulaire de deux doctorats, l’un en philosophie et l’autre en psychologie » précise Wikipédia. Lucien Auger était un adepte de la psychothérapie émotivo-rationnelle créée par le Dr Albert Ellis, psychologue américain. Cette méthode trouve son origine chez les stoïciens dans l’antiquité.

Article # 20 (1/2) : Penser par soi-même – Initiation à la philosophie, Michel Tozzi, Chronique sociale

J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq et je peux même en rajouter une de plus, une sixième, pour souligner son importance et sa pertinence. Il faut le lire absolument ! Je le recommande à tous car il nous faut tous sortir de ce monde où l’opinion règne en roi et maître sur nos pensées.

Article # 20 (2/2) : Penser par soi-même – Initiation à la philosophie, Michel Tozzi, Chronique sociale

Dans la première partie de ce rapport de lecture du livre « Penser par soi-même – Initiation à la philosophie » de Michel Tozzi, je vous recommandais fortement la lecture de ce livre : « J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq et je peux même en rajouter une de plus, une sixième, pour souligner son importance et sa pertinence. Il faut le lire absolument ! Je le recommande à tous car il nous faut tous sortir de ce monde où l’opinion règne en roi et maître sur nos pensées.» Je suis dans l’obligation d’ajouter cette deuxième partie à mon rapport de lecture de ce livre en raison de ma relecture des chapitres 6 et suivants en raison de quelques affirmations de l’auteur en contradiction avec ma conception de la philosophie.

Article # 21 – Agir et penser comme Nietzsche, Nathanaël Masselot, Les Éditions de l’Opportun

J’accorde au livre Agir et penser comme Nietzsche de Nathanaël Masselot cinq étoiles sur cinq. Aussi facile à lire qu’à comprendre, ce livre offre aux lecteurs une excellente vulgarisation de la philosophie de Friedricha Wilhelm Nietzsche. On ne peut pas passer sous silence l’originalité et la créativité de l’auteur dans son invitation à parcourir son œuvre en traçant notre propre chemin suivant les thèmes qui nous interpellent.

Article # 22 – La faiblesse du vrai, Myriam Revault d’Allones, Seuil

Tout commence avec une entrevue de Myriam Revault d’Allonnes au sujet de son livre LA FAIBLESSE DU VRAI à l’antenne de la radio et Radio-Canada dans le cadre de l’émission Plus on de fous, plus on lit. Frappé par le titre du livre, j’oublierai le propos de l’auteur pour en faire la commande à mon libraire.

Article # 23 – Pour une philothérapie balisée

Le développement personnel fourmille de personnes de tout acabit qui se sont improvisées conseillers, coachs, thérapeutes, conférenciers, essayistes, formateurs… et auxquelles s’ajoutent des praticiens issus des fausses sciences, notamment, divinatoires et occultes, des médecines et des thérapies alternatives. Bref, le développement personnel attire toute sorte de monde tirant dans toutes les directions.

Article # 24 – Comment nous pensons, John Dewey, Les empêcheurs de penser en rond / Seuil

Je n’aime pas cette traduction française du livre How we think de John Dewey. « Traduit de l’anglais (États-Unis) par Ovide Decroly », Comment nous pensons parait aux Éditions Les empêcheurs de penser en rond / Seuil en 2004. – Le principal point d’appui de mon aversion pour traduction française repose sur le fait que le mot anglais « belief » est traduit par « opinion », une faute majeure impardonnable dans un livre de philosophie, et ce, dès les premiers paragraphes du premier chapitre « Qu’entend-on par penser ? »

Article # 25 – Une philothérapie libre axée sur nos besoins et nos croyances avec Patrick Sorrel

Hier j’ai assisté la conférence Devenir philothérapeute : une conférence de Patrick Sorrel. J’ai beaucoup aimé le conférencier et ses propos. J’ai déjà critiqué l’offre de ce philothérapeute. À la suite de conférence d’hier, j’ai changé d’idée puisque je comprends la référence de Patrick Sorrel au «système de croyance». Il affirme que le «système de croyance» est une autre expression pour le «système de penser». Ce faisant, toute pensée est aussi une croyance.

Article # 26 – Une pratique philosophique sans cœur

J’éprouve un malaise face à la pratique philosophique ayant pour objectif de faire prendre conscience aux gens de leur ignorance, soit le but poursuivi par Socrate. Conduire un dialogue avec une personne avec l’intention inavouée de lui faire prendre conscience qu’elle est ignorante des choses de la vie et de sa vie repose sur un présupposé (Ce qui est supposé et non exposé dans un énoncé, Le Robert), celui à l’effet que la personne ne sait rien sur le sens des choses avant même de dialoguer avec elle. On peut aussi parler d’un préjugé philosophique.

Article # 27 – Êtes-vous prisonnier de vos opinions ?

Si votre opinion est faite et que vous n’êtes pas capable d’en déroger, vous êtes prisonnier de votre opinion. Si votre opinion est faite et que vous êtes ouvert à son évolution ou prêt à l’abandonner pour une autre, vous êtes prisonnier de l’opinion. Si votre opinion compte davantage en valeur et en vérité que les faits, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si votre opinion est la seule manière d’exprimer vos connaissances, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si vous pensez que l’opinion est le seul résultat de votre faculté de penser, vous êtes prisonnier de vos opinions. Si vous prenez vos opinion pour vraies, vous êtes prisonnier de vos opinions.

Article # 28 – La pratique philosophique – Une méthode contemporaine pour mettre la sagesse au service de votre bien-être, Jérôme Lecoq, Eyrolles, 2014

J’ai mis beaucoup de temps à me décider à lire « La pratique philosophique » de Jérôme Lecoq. L’auteur est un émule d’Oscar Brenifier, un autre praticien philosophe. J’ai vécu l’enfer lors de mes consultations philosophiques avec Oscar Brenifier. Ainsi toute association de près ou de loin avec Oscar Brenifier m’incite à la plus grande des prudences. Jérôme Lecoq souligne l’apport d’Oscar Brenifier dans les Remerciements en première page de son livre « La pratique philosophique ».

Article # 29 – Je sais parce que je connais

Quelle est la différence entre « savoir » et « connaissance » ? J’exprime cette différence dans l’expression « Je sais parce que je connais ». Ainsi, le savoir est fruit de la connaissance. Voici quatre explications en réponse à la question « Quelle est la différence entre savoir et connaissance ? ».

Article # 30 – Les styles interpersonnels selon Larry Wilson

J’ai décidé de publier les informations au sujet des styles interpersonnels selon Larry Wilson parce que je me soucie beaucoup de l’approche de la personne en consultation philosophique. Il m’apparaît important de déterminer, dès le début de la séance de philothérapie, le style interpersonnel de la personne. Il s’agit de respecter la personnalité de la personne plutôt que de la réprimer comme le font les praticiens socratiques dogmatiques. J’ai expérimenté la mise en œuvre de ces styles inter-personnels avec succès.

Article # 31 – La confiance en soi – Une philosophie, Charles Pépin, Allary Éditions, 2018

Le livre « La confiance en soi – Une philosophie » de Charles Pépin se lit avec une grande aisance. Le sujet, habituellement dévolue à la psychologie, nous propose une philosophie de la confiance. Sous entendu, la philosophie peut s’appliquer à tous les sujets concernant notre bien-être avec sa propre perspective.

Article # 32 – Les émotions en philothérapie

J’ai vécu une sévère répression de mes émotions lors deux consultations philosophiques personnelles animées par un philosophe praticien dogmatique de la méthode inventée par Socrate. J’ai témoigné de cette expérience dans deux de mes articles précédents dans ce dossier.

Article # 33 – Chanson « Le voyage » par Raôul Duguay, poète, chanteur, philosophe, peintre… bref, omnicréateur québécois

Vouloir savoir être au pouvoir de soi est l’ultime avoir / Le voyage / Il n’y a de repos que pour celui qui cherche / Il n’y a de repos que pour celui qui trouve / Tout est toujours à recommencer

Article # 34 – « Ah ! Là je comprends » ou quand la pensée se fait révélation

Que se passe-t-il dans notre système de pensée lorsque nous nous exclamons « Ah ! Là je comprends » ? Soit nous avons eu une pensée qui vient finalement nous permettre de comprendre quelque chose. Soit une personne vient de nous expliquer quelque chose d’une façon telle que nous la comprenons enfin. Dans le deux cas, il s’agit d’une révélation à la suite d’une explication.

Article # 35 – La lumière entre par les failles

Âgé de 15 ans, je réservais mes dimanches soirs à mes devoirs scolaires. Puis j’écoutais l’émission Par quatre chemins animée par Jacques Languirand diffusée à l’antenne de la radio de Radio-Canada de 20h00 à 22h00. L’un de ces dimanches, j’ai entendu monsieur Languirand dire à son micro : « La lumière entre par les failles».

Article # 36 – Les biais cognitifs et la philothérapie

Le succès d’une consultation philosophique (philothérapie) repose en partie sur la prise en compte des biais cognitifs, même si ces derniers relèvent avant tout de la psychologie (thérapie cognitive). Une application dogmatique du dialogue socratique passe outre les biais cognitifs, ce qui augmente les risques d’échec.

Article # 37 – L’impossible pleine conscience

Depuis mon adolescence, il y a plus de 50 ans, je pense qu’il est impossible à l’Homme d’avoir une conscience pleine et entière de soi et du monde parce qu’il ne la supporterait pas et mourrait sur le champ. Avoir une pleine conscience de tout ce qui se passe sur Terre et dans tout l’Univers conduirait à une surchauffe mortelle de notre corps. Il en va de même avec une pleine conscience de soi et de son corps.

Article # 38 – Verbalisation à outrance : «Je ne suis pas la poubelle de tes pensées instantanées.»

Le Dr Jean-Christophe Seznec, psychiatre français, a été interrogé par la journaliste Pascale Senk du quotidien Le Figaro au sujet de son livre Savoir se taire, savoir parler, coécrit avec Laurent Carouana et paru en 2017. Le titre de l’article a retenu mon attention : Psychologie: «il faut sortir de l’hystérie de la parole».

Article # 39 – Comment dialoguer de manière constructive ? par Julien Lecomte, Philosophie, médias et société

Reproduction de l’article « Comment dialoguer de manière constructive ? », un texte de Julien Lecomte publié sur son site web PHILOSOPHIE, MÉDIAS ET SOCIÉTÉ. https://www.philomedia.be/. Echanger sur des sujets de fond est une de mes passions. Cela fait plusieurs années que je m’interroge sur les moyens de faire progresser la connaissance, d’apprendre de nouvelles choses. Dans cet article, je reviens sur le cheminement qui m’anime depuis tout ce temps, pour ensuite donner des pistes sur les manières de le mettre en pratique concrètement.

Article # 40 – Le récit d’initiation en spirale

Dans le récit initiatique, il s’agit de partir du point A pour aller au point B afin que le lecteur ou l’auditeur chemine dans sa pensée vers une révélation permettant une meilleure compréhension de lui-même et/ou du monde. La référence à la spirale indique une progression dans le récit où l’on revient sur le même sujet en l’élargissant de plus en plus de façon à guider la pensée vers une nouvelle prise de conscience. Souvent, l’auteur commence son récit en abordant un sujet d’intérêt personnel (point A) pour évoluer vers son vis-à-vis universel (point B). L’auteur peut aussi se référer à un personnage dont il fait évoluer la pensée.

Article # 41 – La philothérapie – Un état des lieux par Serge-André Guay, Observatoire québécois de la philothérapie

Cet article présente un état des lieux de la philothérapie (consultation philosophique) en Europe et en Amérique du Nord. Après un bref historique, l’auteur se penche sur les pratiques et les débats en cours. Il analyse les différentes publications, conférences et offres de services des philosophes consultants.

Article # 42 – L’erreur de Descartes, Antonio Damasio, Odile Jacob, 1995

J’ai découvert le livre « L’erreur de Descartes » du neuropsychologue Antonio R. Damasio à la lecture d’un autre livre : L’intelligence émotionnelle de Daniel Goleman. L’édition originale de ce livre est parue en 1995 en anglais et j’ai lu la traduction française à l’été 1998 parue un an auparavant chez Robert Laffont. Diplômé de l’université Harvard et docteur en psychologie clinique et développement personnel, puis journaliste au New York Times, où il suit particulièrement les sciences du comportement, Daniel Goleman nous informe dans son livre « L’intelligence émotionnel » au sujet de la découverte spectaculaire pour ne pas dire révolutionnaire de Antonio R. Damasio à l’effet que la raison a toujours besoin d’un coup des émotions pour prendre des décisions. Jusque-là, il était coutume de soutenir que les émotions perturbaient la raison, d’où l’idée de les contrôler.

Article # 43 – Éloge de la pratique philosophique, Sophie Geoffrion, Éditions Uppr, 2018

Ma lecture du livre ÉLOGE DE LA PRATIQUE PHILOSOPHIQUE de la philosophe praticienne SOPHIE GEOFFRION fut agréable et fort utile. Enfin, un ouvrage court ou concis (le texte occupe 65 des 96 pages du livre), très bien écrit, qui va droit au but. La clarté des explications nous implique dans la compréhension de la pratique philosophique. Bref, voilà un éloge bien réussi. Merci madame Geoffrion de me l’avoir fait parvenir.

Article # 44 – Consultation philosophique : s’attarder à l’opinion ou au système de pensée ?

Dans cet article, je m’interroge à savoir la consultation philosophique doit s’attarder à l’opinion ou au système pensée du client. OPINION – Le philosophe praticien cible l’opinion de son client en vue de démontrer l’ignorance sur laquelle elle repose et, par conséquent, l’absence de valeur de vérité qu’elle recèle. Cette pratique repose sur le « questionnement philosophique ».

Article # 45 – Sentir et savoir – Une nouvelle théorie de la conscience, Antonio Damasio, Éditions Odile Jacob

Dans son livre « Sentir et savoir », Antonio Damasio propose « Une nouvelle théorie de la conscience ». Il démontre que la conscience ne peut pas exister sans le corps. Il identifie dans le corps la capacité de sentir comme préalable à la conscience.

Article # 46 – Dépression et philosophie : Du mal du siècle au mal de ce siècle, Robert Redeker, Editions Pleins Feux, 2007

Un si petit livre, seulement 46 pages et en format réduit, mais tellement informatif. Une preuve de plus qu’il ne faut se fier aux apparences. Un livre signé ROBERT REDEKER, agrégé de philosophie originaire de la France, connaît fort bien le sujet en titre de son œuvre : DÉPRESSION ET PHILOSOPHIE.

Article # 47 – Savoir se taire, savoir parler, Dr Jean-Christophe Seznec et Laurent Carouana, InterÉditions, 2017

La plupart des intervenants en psychologie affirment des choses. Ils soutiennent «C’est comme ceci» ou «Vous êtes comme cela». Le lecteur a le choix de croire ou de ne pas croire ce que disent et écrivent les psychologues et psychiatres. Nous ne sommes pas invités à réfléchir, à remettre en cause les propos des professionnels de la psychologie, pour bâtir notre propre psychologie. Le lecteur peut se reconnaître ou pas dans ces affirmations, souvent catégoriques. Enfin, ces affirmations s’apparentent à des jugements. Le livre Savoir se taire, savoir dire de Jean-Christophe Seznec et Laurent Carouana ne fait pas exception.

Article # 48 – Penser sa vie – Une introduction à la philosophie, Fernando Savater, Éditions du Seuil, 2000

Chapitre 1 – La mort pour commencer – Contrairement au philosophe Fernando Savater dans PENSER SA VIE – UNE INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE, je ne définie pas la vie en relation avec la mort, avec son contraire. Je réfléchie et je parle souvent de la mort car il s’agit de l’un de mes sujets préféré depuis mon adolescence. Certaines personnes de mon entourage pensent et affirment que si je parle aussi souvent de la mort, c’est parce que j’ai peur de mourir. Or, je n’ai aucune peur de la mort, de ma mort, de celles de mes proches. Je m’inquiète plutôt des conséquences de la mort sur ceux et celles qui restent, y compris sur moi-même.

Article # 49 – Pourquoi avons-nous des couleurs de peau et des physiques si différents ?

À la lumière du documentaire LE SOLEIL ET DES HOMMES, notamment l’extrait vidéo ci-dessus, je ne crois plus au concept de race. Les différences physiques entre les hommes découlent de l’évolution naturelle et conséquente de nos lointains ancêtres sous l’influence du soleil et de la nature terrestre, et non pas du désir du soleil et de la nature de créer des races. On sait déjà que les races et le concept même de race furent inventés par l’homme en se basant sur nos différences physiques. J’abandonne donc la définition de « race » selon des critères morphologiques…

Article # 50 – Extrait du mémoire de maîtrise «Formation de l’esprit critique et société de consommation» par Stéphanie Déziel

Dans le cadre de notre dossier « Consulter un philosophe », la publication d’un extrait du mémoire de maîtrise « Formation de l’esprit critique et société de consommation » de Stéphanie Déziel s’impose en raison de sa pertinence. Ce mémoire nous aide à comprendre l’importance de l’esprit critique appliqué à la société de consommation dans laquelle évoluent, non seule les jeunes, mais l’ensemble de la population.

Article # 51 – « En fait, c’est dans son incertitude même que réside largement la valeur de la philosophie. » Bertrand Russell

Je reproduis ci-dessous une citation bien connue sur le web au sujet de « la valeur de la philosophie » tirée du livre « Problèmes de philosophie » signé par Bertrand Russell en 1912. Mathématicien, logicien, philosophe, épistémologue, homme politique et moraliste britannique, Bertrand Russell soutient que la valeur de la philosophie réside dans son incertitude. À la suite de cette citation, vous trouverez le texte de Caroline Vincent, professeur de philosophie et auteure du site web « Apprendre la philosophie » et celui de Gabriel Gay-Para tiré se son site web ggpphilo. Des informations tirées de l’Encyclopédie Wikipédia au sujet de Bertrand Russell et du livre « Problèmes de philosophie » et mon commentaire complètent cet article.

Article # 52 – Socrate et la formation de l’esprit critique par Stéphanie Déziel

Passez donc sans vous arrêter, amis, au milieu des Marchands de Sommeil; et, s’ils vous arrêtent, répondez-leur que vous ne cherchez ni un système ni un lit. Ne vous lassez pas d’examiner et de comprendre. (…) Lisez, écoutez, discutez, jugez; ne craignez pas d’ébranler des systèmes; marchez sur des ruines, restez enfants. (…) Socrate vous a paru un mauvais maître. Mais vous êtes revenus à lui; vous avez compris, en l’écoutant, que la pensée ne se mesure pas à l’aune, et que les conclusions ne sont pas l’important; restez éveillés, tel est le but. Les Marchands de Sommeil de ce temps-là tuèrent Socrate, mais Socrate n’est point mort; partout où des hommes libres discutent, Socrate vient s’asseoir, en souriant, le doigt sur la bouche. Socrate n’est point mort; Socrate n’est point vieux. (…) – Alain, (Emile Charrier), Vigiles de l’esprit.

Article # 53 – J’ai un problème avec la vérité

Tout au long de ma vie, j’ai vu la vérité malmenée, tassée d’un bord puis de l’autre, devenir une propriété personnelle (ma vérité — ta vérité — à chacun sa vérité), tantôt objet de monopôle, tantôt reconnue, tantôt niée et reniée… Ah ! La vérité. Quel chaos ! Je me demande depuis longtemps pourquoi la vérité, si elle existe, ne triomphe pas à tout coup, pourquoi elle ne s’impose à tous d’elle-même. Contestée de toutes parts, la vérité, si elle existe, n’a d’intérêt que pour l’opinion qu’on en a et les débats qui s’ensuivent. On va jusqu’à donner à la vérité une mauvaise réputation eu égard à son influence néfaste sur la société et les civilisations. Et que dire de toutes ces croyances qui se prennent pour la vérité ? Et c’est sans compter l’observation récente à l’effet que nous venons d’entrer dans une « ère de post-vérité ».

Article # 54 – Petit manuel philosophique à l’intention des grands émotifs, Iaria Gaspard, Presses Universitaires de France, 2022

J’accorde à ce livre trois étoiles sur cinq. Le titre « Petit manuel philosophique à l’intention des grands émotifs » a attiré mon attention. Et ce passage du texte en quatrième de couverture m’a séduit : «En proposant une voyage philosophique à travers l’histoire des émotions, Iaria Gaspari bouscule les préjugés sur notre vie émotionnelle et nous invite à ne plus percevoir nos d’états d’âme comme des contrainte ». J’ai décidé de commander et de lire ce livre. Les premières pages m’ont déçu. Et les suivantes aussi. Rendu à la moitié du livre, je me suis rendu à l’évidence qu’il s’agissait d’un témoignage de l’auteure, un témoignage très personnelle de ses propres difficultés avec ses émotions. Je ne m’y attendais pas, d’où ma déception. Je rien contre de tels témoignages personnels qu’ils mettent en cause la philosophie, la psychologie, la religion ou d’autres disciplines. Cependant, je préfère et de loin lorsque l’auteur demeure dans une position d’observateur alors que son analyse se veut la plus objective possible.

Article # 55 – Savoir, connaissance, opinion, croyance

Tout repose sur le Savoir. L’expérience personnelle et/ou professionnelle qu’on fait du Savoir, après en avoir pris conscience, se retrouve à la base des Connaissances que nous possédons. Les Opinions expriment des Jugements des connaissances et inspirent souvent les Croyances.

Article # 56 – Philosophie, science, savoir, connaissance

La philosophie, mère de toutes les sciences, recherche la sagesse et se définie comme l’Amour de la Sagesse. La sagesse peut être atteinte par la pensée critique et s’adopte comme Mode de vie. • La philosophie soutient la Science et contribue à la naissance et au développement de la méthode scientifique, notamment avec l’épistémologie.

Article # 57 – La philosophie encore et toujours prisonnière de son passé ?

La philothérapie, principale pratique de la philosophie de nos jours, met sans cesse de l’avant les philosophes de l’Antiquité et de l’époque Moderne. S’il faut reconnaître l’apport exceptionnel de ces philosophes, j’ai parfois l’impression que la philothérapie est prisonnière du passé de la philosophie, à l’instar de la philosophie elle-même.

Article # 58 – Le Québec, un désert philosophique

Au Québec, la seule province canadienne à majorité francophone, il n’y a pas de tradition philosophique populaire. La philosophie demeure dans sa tour universitaire. Très rares sont les interventions des philosophes québécois dans l’espace public, y compris dans les médias, contrairement, par exemple, à la France. Et plus rares encore sont les bouquins québécois de philosophie en tête des ventes chez nos libraires. Seuls des livres de philosophes étrangers connaissent un certain succès. Bref, l’espace public québécois n’offre pas une terre fertile à la Philosophie.

Article # 59 – La naissance du savoir – Dans la tête des grands scientifiques, Nicolas Martin, Éditions Les Arènes, 2023.

J’accorde à ce livre cinq étoiles sur cinq parce qu’il me permet d’en apprendre beaucoup plus sur la pensée scientifique telle que pratiquée par de grands scientifiques. L’auteur, Nicolas Martin, propose une œuvre originale en adressant les mêmes questions, à quelques variantes près, à 17 grands scientifiques.

Article # 60 – Pourquoi est-il impossible d’atteindre l’équilibre entre développement personnel et développement spirituel ou philosophique ?

Cet article répond à ce commentaire lu sur LinkedIn : « L’équilibre entre développement personnel et développement spirituel ou philosophique est indispensable. » Il m’apparaît impossible de viser « L’équilibre entre développement personnel et développement spirituel ou philosophique » et de prétendre que cet équilibre entre les trois disciplines soit « indispensable ». D’une part, le développement personnel est devenu un véritable fourre-tout où l’ivraie et le bon grain se mélangent sans distinction, chacun avançant sa recette à l’aveugle.

Article # 61 – Le commerce extrême de la philosophie avec les « philopreneurs »

En ne s’unissant pas au sein d’une association nationale professionnelle fixant des normes et des standards à l’instar des philosophes consultants ou praticiens en d’autres pays, ceux de la France nous laissent croire qu’ils n’accordent pas à leur disciple tout l’intérêt supérieur qu’elle mérite. Si chacun des philosophes consultants ou praticiens français continuent de s’affairer chacun dans son coin, ils verront leur discipline vite récupérée à mauvais escient par les philopreneurs et la masse des coachs.

Article # 62 – Soigner par la philosophie, En marche – Journal de la Mutualité chrétienne (Belgique)

“ Après les succès d’Épicure 500 vous permettant de faire dix repas par jour sans ballonnements, après Spinoza 200 notre inhibiteur de culpabilité, les laboratoires Laron, vous proposent Philonium 3000 Flash, un médicament révolutionnaire capable d’agir sur n’importe quelle souffrance physique ou mentale : une huile essentielle d’Heidegger pour une angoisse existentielle, une substance active de Kant pour une douleur morale…. Retrouvez sagesse et vitalité en un instant ”, s’amusaient les chroniqueurs radio de France Inter dans une parodie publicitaire diffusée à l’occasion d’une émission ayant pour thème : la philosophie peut-elle soigner le corps ?

Article # 63 – Contre le développement personnel. Thiery Jobard, Éditions Rue de l’échiquier, 2021

J’attribue quatre étoiles sur cinq à ce livre. Les lecteurs assidus de mes articles connaissent fort bien ma position plus que défavorable face au développement personnel. À l’instar de Thiery Jobard, je suis contre le développement personnel. Je qualifie le développement personnel d’arnaque extrêmement dangereuse pour ses adeptes et notre société.

Article # 64 – Apocalypse cognitive – La face obscure de notre cerveau, Gérald Bronner, Presses Universitaires de France (PUF), 2021

Le philothérapeute (philosophe consultant ou philosophe praticien) a l’obligation de très bien connaître le contexte dans lequel évolue son client. Le développement de l’esprit critique de ce client passe inévitablement par une prise de conscience de sa cognition en vue de comprendre comment il connaît. Si, dès le départ, le client n’a pas conscience de son mode de pensées, il lui sera difficile de participer activement au dialogue avec son philothérapeute. L’objectif primaire du philosophe consultant demeure de déceler et de corriger les biais cognitifs de son client avant même d’abord une question philosophique. Bref, si la »machine à pensée » du client est corrompu par des «virus cognitifs », une «réinitialisation » s’impose en début de séance de consultation.

Article # 65 – Développement (im)personnel – Le succès d’une imposture, Julia de Funès, Éditions de l’observatoire/Humensis, 2019

Dans son livre « Développement (im) personnel, Julia de Funès, docteure en philosophie, soutient que le développement personnel offre la même recette à tous et qu’à ce titre il ne peut donc pas se qualifier sa démarche de « personnel ». Selon ma compréhension, le développement personnel devrait mettre de l’avant un développement personnalisé, c’est-à-dire adapté à chaque individu intéressé pour se targuer d’être personnel.

Article # 66 – Savoirs, opinions, croyances – Une réponse laïque et didactique aux contestations de la science en classe, Guillaume Lecointre, Édition Belin / Humensis, 2018

Mon intérêt pour la pensée scientifique remonte à plus de 25 ans. Alors âgé d’une quarantaine d’année, PDG d’une firme d’étude des motivations d’achat des consommateurs, je profite des enseignements et de l’étude du processus scientifique de différentes sources. Je me concentre vite sur l’épistémologie…

Article # 67 – À l’école du doute – Apprendre à penser juste en découvrant pourquoi l’on pense faux, Marc Romainville, Presses Universitaires de France / Humensis, 2023

Ce livre m’a déçu en raison de la faiblesse de sa structure indigne de son genre littéraire, l’essai. L’auteur offre aux lecteurs une foule d’information mais elle demeure difficile à suivre en l’absence de sous-titres appropriés et de numérotation utile pour le repérage des énumérations noyés dans un style plus littéraire qu’analytique.

Article # 68 – Ébauche d’un annuaire : philothérapeutes, philosophes consultants, philosophes praticiens

En l’absence d’une association d’accréditation des philothérapeutes, philosophes consultants ou praticiens en francophonie, il est difficile de les repérer. Il ne nous reste plus que de nombreuses recherches à effectuer sur le web pour dresser une liste, aussi préliminaire soit-elle. Les intervenants en philothérapie ne se présentent pas tous sous la même appellation : « philothérapeute », « philosophe consultant » ou « philosophe praticien » « conseiller philosophique » « philosophe en entreprise », « philosophe en management » et autres.

Article # 69 – Guérir l’impossible – Une philosophie pour transformer nos souffrances en forces, Christopher Laquieze, Guy Trédaniel Éditeur, 2023

J’ai lu le livre GUÉRIR L’IMPOSSIBLE en me rappelant à chaque page que son auteur, Christopher Laquieze, est à la fois philosophe et thérapeute spécialisé en analyse comportementale. Pourquoi ? Parce que ce livre nous offre à la fois un voyage psychologique et philosophique, ce à quoi je ne m’attendais pas au départ. Ce livre se présente comme « Une philosophie pour transformer nous souffrances en forces ». Or, cette philosophie se base davantage sur la psychologie que la philosophie. Bref, c’est le « thérapeute spécialisé en analyse comportementale » qui prend le dessus sur le « philosophe ».

Article # 70 – Agir et penser comme Platon – Sage, penseur, philosophe, juste, courageux …, Nathanaël Masselot, Les Éditions de l’Opportun

Nathaniel Masselot maîtrise fort bien son écriture visiblement axée sur son accessibilité et sa compréhension par tous. Loin de la vulgarisation simpliste, l’auteur nous parle comme nous parlons. Loin de l’écriture hermétique, l’auteur n’a pas la tête dans les nuages et isolé dans une tour surplombant la société; il marche auprès de nous. Avec ses références à l’actualité, il campe son lecteur dans la réalité quotidienne où il évolue.

Article # 71 – 7 règles pour une vie (presque) sans problème, Simon Delannoy, 2022

Ma lecture de ce livre m’a procuré beaucoup de plaisir et de bonheur. Je recherche dans mes lectures les auteurs et les œuvres permettant aux lecteurs d’évoluer de prise de conscience en prise de conscience de la première à la dernière page, de ne plus être le même à la fin de la lecture. Et c’est ce que les lecteurs vivront à la lecture de ce livre.

Article # 72 – Les philo-cognitifs – Ils n’aiment que penser et penser autrement…, Fanny Nusbaum, Olivier Revol, Dominic Sappey-Marinier, Odile Jacob, Paris, 2019

Je n’ai pas aimé ce livre parce que son titre, LES PHILO-COGNITIFS, se réfère à la philosophie sans pour autant faire un traitement philosophique de son sujet. Mon achat reposait entièrement sur le titre de ce livre et je m’attendais à un livre de philosophie. Mais il s’agit d’un livre de psychologie. Mon achat fut intuitif. J’avais pleinement confiance dans l’usage du mot « PHILO » en titre d’un ouvrage pour que ce dernier ne puisse traiter d’un autre sujet que philosophique. Mais ce n’est pas le cas.

Article # 73 – Qu’est-ce que la philosophie ? Michel Meyer, Le livre de poche, Librairie générale française, Paris, 1997

J’aime beaucoup les livres d’introduction et de présentation de la philosophie parce qu’ils ramènent toujours les lecteurs à l’essentiel, aux bases de la discipline. À la question « Qu’est-ce que la philosophie ? », Michel Meyer répond : « La philosophie est depuis toujours questionnement radical. C’est pourquoi il importe aujourd’hui de questionner le questionnement, même si on ne l’a jamais fait auparavant. » MEYER, Michel, Qu’est-ce que la philosophie ? – Les questions ultime de la pensée, Le livre de poche © Librairie Générale Française, Paris, 1997. p. 18.

Article # 74 – Présentations de la philosophie, André Comte-Sponville, Éditions Albin Michel, Le livre de poche, 2000

À l’instar de ma lecture précédente (Qu’est-ce que la philosophie ? de Michel Meyer), le livre PRÉSENTATIONS DE LA PHILOSOPHIE du philosophe ANDRÉ COMTE-SPONVILLE m’a plu parce qu’il met en avant les bases mêmes de la philosophie et, dans ce cas précis, appliquées à une douzaine de sujets…

Article # 75 – Les théories de la connaissance, Jean-Michel Besnier, Que sais-je?, Presses universitaires de France, 2021

J’ai dévoré le livre LES THÉORIES DE LA CONNAISSANCE par JEAN-MICHEL BESNIER avec un grand intérêt puisque la connaissance de la connaissance me captive. Amateur d’épistémologie, ce livre a satisfait une part de ma curiosité. Évidemment, je n’ai pas tout compris et une seule lecture suffit rarement à maîtriser le contenu d’un livre traitant de l’épistémologie, notamment, de son histoire enchevêtrée de différents courants de pensée, parfois complémentaires, par opposés. Jean-Michel Besnier dresse un portrait historique très intéressant de la quête philosophique pour comprendre la connaissance elle-même.

Article # 76 – Philosophie de la connaissance – Croyance, connaissance, justification, textes réunis par Julien Dutant et Pascal Engel, Libraire philosophique J. Vrin, 2005

Ce livre n’était pas pour moi en raison de l’érudition des auteurs au sujet de la philosophie de connaissance. En fait, contrairement à ce que je croyais, il ne s’agit d’un livre de vulgarisation, loin de là. J’ai décroché dès la seizième page de l’Introduction générale lorsque je me suis buté à la première équation logique. Je ne parviens pas à comprendre de telles équations logiques mais je comprends fort bien qu’elles soient essentielles pour un tel livre sur-spécialisé. Et mon problème de compréhension prend racine dans mon adolescence lors des études secondaires à l’occasion du tout premier cours d’algèbre. Littéraire avant tout, je n’ai pas compris pourquoi des « x » et « y » se retrouvaient dans des équations algébriques. Pour moi, toutes lettres de l’alphabet relevaient du littéraire. Même avec des cours privés, je ne comprenais toujours pas. Et alors que je devais choisir une option d’orientation scolaire, j’ai soutenu que je voulais une carrière fondée sur l’alphabet plutôt que sur les nombres. Ce fut un choix fondé sur l’usage des symboles utilisés dans le futur métier ou profession que j’allais exercer. Bref, j’ai choisi les sciences humaines plutôt que les sciences pures.

Article # 77 – Problèmes de philosophie, Bertrand Russell, Nouvelle traduction, Éditions Payot, 1989

Quelle agréable lecture ! J’ai beaucoup aimé ce livre. Les problèmes de philosophie soulevés par Bertrand Russell et les réponses qu’il propose et analyse étonnent. Le livre PROBLÈMES DE PHILOSOPHIE écrit par BERTRAND RUSSELL date de 1912 mais demeure d’une grande actualité, du moins, selon moi, simple amateur de philosophie. Facile à lire et à comprendre, ce livre est un «tourne-page» (page-turner).

Article # 78 – La dictature des ressentis – Sauver la liberté de penser, Eugénie Bastié, Éditions Plon, 2023

La compréhension de ce recueil de chroniques signées EUGÉNIE BASTIÉ dans le quotidien LE FIGARO exige une excellence connaissance de la vie intellectuelle, politique, culturelle, sociale, économique et de l’actualité française. Malheureusement, je ne dispose pas d’une telle connaissance à l’instar de la majorité de mes compatriotes canadiens et québécois. J’éprouve déjà de la difficulté à suivre l’ensemble de l’actualité de la vie politique, culturelle, sociale, et économique québécoise. Quant à la vie intellectuelle québécoise, elle demeure en vase clos et peu de médias en font le suivi. Dans ce contexte, le temps venu de prendre connaissance de la vie intellectuelle française, je ne profite des références utiles pour comprendre aisément. Ma lecture du livre LA DICTATURE DES RESSENTIS d’EUGÉNIE BASTIÉ m’a tout de même donné une bonne occasion de me plonger au cœur de cette vie intellectuelle française.

Article # 79 – À la découverte de la sagesse stoïcienne: L’histoire improbable du stoïcisme suivie du Manuel de la vie bonne, Dr Chuck Chakrapani, Éditions Stoa Gallica, 2023

À titre d’éditeur, je n’ai pas aimé ce livre qui n’en est pas un car il n’en possède aucune des caractéristiques professionnelles de conceptions et de mise en page. Il s’agit de la reproduction d’un texte par Amazon. Si la première de couverture donne l’impression d’un livre standard, ce n’est pas le cas des pages intérieures du… document. La mise en page ne répond pas aux standards de l’édition française, notamment, en ne respectant pas les normes typographiques.

Article # 80 – Le changement personnel – Histoire Mythes Réalités, sous la direction de Nicolas Marquis, Sciences Humaines Éditions, 2015

J’ai lu avec un grand intérêt le livre LE CHANGEMENT PERSONNEL sous la direction de NICOLAS MARQUIS. «Cet ouvrage a été conçu à partir d’articles tirés du magazine Sciences Humaines, revus et actualisés pour la présente édition ainsi que de contributions inédites. Les encadrés non signés sont de la rédaction.» J’en recommande vivement la lecture pour son éruditions sous les aspects du changement personnel exposé par différents spécialistes et experts tout aussi captivant les uns les autres.

Article # 81 – L’empire des coachs – Une nouvelle forme de contrôle social, Roland Gori et Pierre Le Coz, Éditions Albin Michel, 2006

À la lecture de ce livre fort intéressent, j’ai compris pourquoi j’ai depuis toujours une dent contre le développement personnel et professionnel, connu sous le nom « coaching ». Les intervenants de cette industrie ont réponse à tout, à toutes critiques. Ils évoluent dans un système de pensée circulaire sans cesse en renouvellement créatif voire poétique, système qui, malheureusement, tourne sur lui-même. Et ce type de système est observable dans plusieurs disciplines des sciences humaines au sein de notre société où la foi en de multiples opinions et croyances s’exprime avec une conviction à se donner raison. Les coachs prennent pour vrai ce qu’ils pensent parce qu’ils le pensent. Ils sont dans la caverne de Platon et ils nous invitent à les rejoindre.

Article # 82 – À quoi sert la philosophie ?, Marc Sautet, Éditions Pleins Feux, 1997

Ce petit livre d’une soixantaine de pages nous offre la retranscription de la conférence « À QUOI SERT LA PHILOSOPHIE ? » animée par Marc Sautet, philosophe ayant ouvert le premier cabinet de consultation philosophique en France et également fondateur des Cafés Philo en France.

Article # 83 – Raviver de l’esprit en ce monde – Diagnostic du contemporain, François Jullien, Éditions de l’Observatoire, 2023

L’essai RAVIVER DE L’ESPRIT EN CE MONDE – UN DIAGNOSTIC CONTEMPORAIN par FRANÇOIS JULLIEN chez les Éditions de l’Observatoire, parue en 2023, offre aux lecteurs une prise de recul philosophique révélatrice de notre monde. Un tel recul est rare et fort instructif.

Article # 84 – La philosophie appelle à une révélation suivie d’une conversion

La philosophie a pour but l’adoption d’un mode de vie sain. On parle donc de la philosophie comme un mode de vie ou une manière de vivre. La philosophie ne se possède pas, elle se vit. La philosophie souhaite engendrer un changement de comportement, d’un mode de vie à celui qu’elle propose. Il s’agit ni plus ni moins d’enclencher et de soutenir une conversion à la philosophie.

Article # 85 – La philosophie comme mode de vie, Daniel Desroches, Deuxième édition revue et corrigée, Coll. À propos, Les Presses de l’Université Laval, Québec, 2019

La lecture de cet essai fut très agréable, instructive et formatrice pour l’amateur de philosophie que je suis. Elle s’inscrit fort bien à la suite de ma lecture de « La philosophie comme manière de vivre » de Pierre Habot (Entretiens avec Jeanne Cartier et Arnold I Davidson, Le livre de poche – Biblio essais, Albin Michel, 2001).

Article # 86 – Les consolations de la philosophie, Alain De Botton, Mercure de France, 2001, Pocket

La lecture du livre Les consolations de la philosophie, une édition en livre de poche abondamment illustrée, fut très agréable et instructive. L’auteur Alain de Botton, journaliste, philosophe et écrivain suisse, nous adresse son propos dans une langue et un vocabulaire à la portée de tous.

Article # 87 – La philothérapie – Philosophie pratique à l’international

L’Observatoire de la philothérapie a consacré ses deux premières années d’activités à la France, puis à la francophonie. Aujourd’hui, l’Observatoire de la philothérapie s’ouvre à d’autres nations et à la scène internationale.

Article # 88 – L’approche intellectuelle en philothérapie et en philosophie pratique

Certaines personnes croient le conseiller philosophique intervient auprès de son client en tenant un « discours purement intellectuel ». C’est le cas de Dorothy Cantor, ancienne présidente de l’American Psychological Association, dont les propos furent rapportés dans The Philosophers’ Magazine en se référant à un autre article parue dans The New York Times.

Article # 89 – En thérapie avec… Épicure – Combattre votre anxiété – 40 antidotes du philosophe antique, Nathanaël Masselot, Les Éditions de l’Opportun, Paris, 2024

Nathaniel Masselot maîtrise fort bien son écriture visiblement axée sur son accessibilité et sa compréhension par tous. Loin de la vulgarisation simpliste, l’auteur nous parle comme nous parlons. Loin de l’écriture hermétique, l’auteur n’a pas la tête dans les nuages et isolé dans une tour surplombant la société; il marche auprès de nous. Avec ses références à l’actualité, il campe son lecteur dans la réalité quotidienne où il évolue.

Article # 90 – Êtes-vous sûr d’avoir raison ?, Gilles Vervisch, Flammarion, 2022

De lecture agréable et truffé d’humour, le livre ÊTES-VOUS SÛR D’AVOIR RAISON ? de GILLES VERVISCH, agrégé de philosophie, pose la question la plus embêtante à tous ceux qui passent leur vie à se donner raison.

Article # 91 – L’approche interrogative et l’approche conversationnelle dans la pratique philosophique

Dans un article intitulé « Se retirer du jeu » et publié sur son site web Dialogon, le philosophe praticien Jérôme Lecoq, témoigne des « résistances simultanées » qu’il rencontre lors de ses ateliers, « surtout dans les équipes en entreprise » : « L’animation d’un atelier de “pratique philosophique” implique que chacun puisse se « retirer de soi-même », i.e. abandonner toute volonté d’avoir raison, d’en imposer aux autres, de convaincre ou persuader autrui, ou même de se “faire valider” par les autres. Vous avez une valeur a priori donc il n’est pas nécessaire de l’obtenir d’autrui. » (LECOQ, Jérôme, Se retirer du jeu, Dialogon, mai 2024.)

Article # 92 – Introduction à la philosophie, Karl Jaspers, Plon, coll. 10-18, 2001

« Jaspers incarne, en Allemagne, l’existentialisme chrétien » peut-on lire en quatrième de couverture de son livre INTRODUCTION À PHILOSOPHIE. Je ne crois plus en Dieu depuis vingt ans. Baptisé et élevé par défaut au sein d’une famille catholique qui finira pas abandonner la religion, marié protestant, aujourd’hui J’adhère à l’affirmation d’un ami philosophe à l’effet que « Toutes les divinités sont des inventions humaines ». Dieu est une idée, un concept, rien de plus, rien de moins. / Dans ce contexte, ma lecture de l’œuvre INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE de KARL JASPERS fut quelque peu contraignante à titre d’incroyant. Je me suis donc concentré sur les propos de JASPERS au sujet de la philosophie elle-même.

Article # 93 – Le rôle social des idées – Esquisse d’une philosophie de l’histoire contemporaine, Max Lamberty, Éditions de la Cité Chrétienne, 1936

« La philosophie a gouverné toute la vie de notre époque dans ses traits les plus typiques et les plus importants » (LAMBERTY, Max, Le rôle social des idées, Chapitre premier – La souveraineté des idées ou La généalogie de notre temps, Les Éditions de la Cité Chrétienne (Bruxelles) / P. Lethielleux (Paris), 1936, p. 41) – la démonstration du rôle social des idées par Max Lamberty doit impérativement se poursuivre de nos jours en raison des défis qui se posent à nous, maintenant et demain, et ce, dans tous les domaines. – Et puisque les idées philosophiques mènent encore et toujours le monde, nous nous devons d’interroger le rôle social des idées en philosophie pratique. Quelle idée du vrai proposent les nouvelles pratiques philosophiques ? Les praticiens ont-ils conscience du rôle social des idées qu’ils véhiculent dans les consultations et les ateliers philosophiques ?

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